dimanche 14 juillet 2013

“Nous ne faisons plus confiance aux dirigeants actuels.”

Interview d’Armand Kouadio Kouakou*

Notre Voie : Comment avez-vous accueilli la nouvelle du 12ème congrès du Pdci ?
Armand Kouadio Kouakou : Ça a été un soulagement. Je dois dire que cela a suscité en nous un réel espoir. L’espoir de voir un changement s’opérer à la tête de notre parti, l’espoir de voir le sort des jeunes s’améliorer. Il faut le dire, les jeunes sont oubliés dans notre maison.
N.V. : Voulez-vous dire que, jusque-là, les jeunes ont été relégués au second plan dans le parti ?
A.K.K. : C’est le constat que nous avons fait. Mes camarades et moi, nous nous sommes battus. Nous
H. Konan Bédié dans un nouveau rôle
étions au devant de la lutte. Nous avons mené le combat sur le campus. Beaucoup d’entre nous ont été obligés de fuir parce qu’ils ont tout perdu. D’autres ont été emprisonnés pendant des jours à la Maca. On nous a promis qu’avec le changement de régime, la souffrance des étudiants du Pdci allait prendre fin. Mais, jusque-là, c’est le contraire. Les jeunes du Pdci continuent de vivre dans la misère. Ce n’est pas normal, et ça prouve que l’équipe qui dirige le parti aujourd’hui a failli.
N.V. : Mettez-vous en cause le leadership de Konan Bédié ?
A.K.K. : Ce n’est pas seulement Bédié. C’est tous ceux qui l’entourent, c’est-à-dire Bédié et son équipe. La jeunesse n’a jamais été véritablement prise en compte.
N.V. : Le président de la Jpdci, KKB, est aujourd’hui député. Comme il y a beaucoup d’autres jeunes qui ont eu de la promotion.
A.K.K.: Le président KKB a été élu député. Je ne crois pas que cela soit une promotion. Il s’est battu sur le terrain et le peuple l’a élu. Aujourd’hui, aucun jeune issu du milieu universitaire en tout cas n’a connu de promotion. Au niveau du parti, les gens font croire le contraire, en brandissant l’exemple d’un certain N’Zi Assamoi, qui a été bombardé Daf au niveau de l’appareil du parti. Mais N’Zi Assamoi est un inconnu. Au-delà des jeunes, les vrais qui vont au charbon sont laissés sur le carreau. La promotion, s’il y en a, n’est rien d’autre que le fait d’un favoritisme qui ne dit pas son nom.
N.V. : Ne pensez-vous pas que la revendication à des postes d’emploi est un peu déplacée ?
A.K.K. : Nous sommes dans un pays où la jeunesse constitue environ 70% de la population. Si le Pdci veut conquérir le cœur des Ivoiriens, il est tout à fait logique que les dirigeants songent à faire la promotion des jeunes. C’est pourquoi la Jeunesse pour la Coordination des élèves et étudiants du Pdci milite pour une alternance, un changement véritable. Mais aussi pour qu’il y ait une véritable promotion des jeunes au sein des instances de décision au sortir du 12ème congrès.
N.V. : Pourquoi l’alternance est-elle nécessaire?
A.K.K. : Parce que nous ne faisons plus confiance aux dirigeants actuels. Ils nous ont mis au placard après la victoire de l’alliance du Rhdp en 2010. Nous ne sommes pas prêts à accepter que cette classe dirigeante se maintienne à la tête du parti pour cinq ans encore. Un nouveau mandat pour eux serait synonyme de souffrance et de misère.
N.V. : L’alternance, une réaction à l’échec de la classe dirigeante ou plutôt une exigence qui entre dans l’ordre normale des choses ?
A.K.K. : Ils ont échoué. Mais c’est aussi une nécessité. Il est temps que le parti fasse sa mue. Si nous voulons reconquérir le cœur des Ivoiriens, il ne fait pas l’ombre d’un doute que le parti doit faire sa mue. Le Pdci doit faire la promotion de nouvelles personnes.
N.V. : Votre position est tout de même étrange d’autant plus qu’au Pdci, l’on soutient qu’il y a le respect de la chaîne des générations.
A.K.K. : Justement, il faut que la génération actuelle dégage. Tant que ce n’est pas fait, il est clair que les autres ne pourront pas avancer. Ils ont dirigé le parti et nous leur en sommes reconnaissants. Le moment est venu de passer le témoin. Mais il faut qu’ils partent dans la dignité
N.V. : Pouvez-vous être plus précis ?
A.K.K. : Nous souhaitons que les aînés ne tordent pas le cou aux statuts et règlement intérieur du parti pour satisfaire des individus. Ce n’est pas normal et, nous les jeunes, nous allons nous opposer. Nous allons faire barrage à ce projet et ces desseins lugubres.
N.V. : Que répondez-vous à ceux qui disent que Bédié est encore bon pour le service ?
A.K.K. : Pensez-vous que Nelson Mandela, après son premier mandat, n’était pas encore bon pour le service en Afrique du sud ? Je pense qu’à un moment donné, il faut savoir se retirer. Le président Bédié gagnerait à se retirer. Il entrerait, s’il le faisait, dans l’histoire par la grande porte. Par contre, s’il s’entête à se maintenir vaille que vaille, l’histoire retiendra de lui qu’il a été un dictateur.
N.V. : Certains responsables du Pdci sont pour une candidature unique du Rhdp à la prochaine présidentielle. Qu’en dites-vous ?
A.K.K. : La candidature unique dans une alliance, c’est quelque chose de normal. Aujourd’hui, ceux qui sont en train d’enterrer le Rhdp, ce sont les militants du Rdr. Souvenez-vous, on les a vus, aux élections législatives, bastonnant le président de la jeunesse de notre parti, le laissant pour mort ; on les a vus, aux élections municipales, brigandant et cassant les urnes. Je pense que le Rhdp est en train de mourir à cause justement de ces agissements. Nos aînés doivent comprendre que le parti doit prendre son destin en main, pour présenter un candidat à la prochaine présidentielle.
N.V. : Comment entrevoyez-vous le congrès ?
A.K.K.: Au Pdci, on s’entend toujours. Mais, à ce congrès, on risque de ne pas s’entendre. Parce que nos camarades sont déterminés à aller jusqu’au bout. Je profite de cette occasion pour demander aux jeunes de se mobiliser massivement, le vendredi 12 juillet 2013, au siège du parti.
N.V. : Quelle réaction par rapport au lynchage médiatique dont KKB fait l’objet en ce moment ?
A.K.K. :Aujourd’hui, il est incompris, mais nous sommes persuadés que la vérité finira par triompher. Nous sommes dans la vérité et nous triompherons sur le mensonge et sur les intérêts corrompus de certains dirigeants.
N.V. : Le Pdci va-t-il renaître de nouveau ou on va vers l’implosion ?
A.K.K.: Il n’y aura pas d’implosion si le président Bédié se retire. D’ailleurs, il ne peut pas être candidat. La limite d’âge est fixée à 75 ans. Si le congrès modifie les textes, ils ne seront applicables qu’après ce congrès. Si le président Bédié fait un forcing, ce sera de la tyrannie.
N.V. : En tant que membre de la Coordination des élèves et étudiants, quelle part active comptez-vous prendre dans la tenue de ce congrès ?
A.K.K.: Nous avons nos méthodes pour faire pression sur la direction du parti. Nous revendiquons la réintégration de nos responsables dans les différentes commissions techniques de préparations du 12ème congrès. Nous revendiquons également une tribune d’expression à ce congrès. Nous sommes sûrs que nous aurons la victoire. Nous demandons aux militants du Pdci de rester sereins, car, bientôt, nous allons faire bouger les lignes. Aux Ivoiriens, nous disons que nous savons la place du Pdci, qui est un parti de tolérance, de dialogue et de paix. C’est ce parti seul qui peut apporter la paix en Côte d’Ivoire.  

(*) - Armand Kouadio Kouakou est le président de la Coordination des élèves et étudiants militants du Pdci. 

Interview réalisée par César Ebrokié

Titre original : Armand Kouadio Kouakou : Si Bédié partait, il resterait dans l’histoire. 

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Source: Notre Voie 12 juillet 2013

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