vendredi 27 novembre 2020

DIEGO SE VA...



Le « gamin en or » (pibe de oro) Diego Maradona est mort d’une crise cardiaque à l’âge de soixante ans, quatre ans jour pour jour après Fidel Castro. Nous rediffusons le billet qu’Olivier Pironet consacrait à ses engagements politiques. « Maradona n’a jamais cherché à dissimuler ses sympathies pour le chavisme comme pour le socialisme latino-américain

https://blog.mondediplo.net 25 novembre 2020

MARADONA, LA POLITIQUE EN CRAMPONS

L’Argentin Diego Maradona, figure mondiale du football, fait l’objet d’un nouveau film documentaire réalisé par le cinéaste britannique Asif Kapadia. Il sera projeté ce 19 mai au Festival de Cannes. L’ancien joueur, qui s’est souvent illustré par ses frasques en dehors du terrain, est également un homme très ancré à gauche. Et qui ne s’en est jamais caché, au risque de… déplaire. Retour sur trente ans d’engagements.

Extrait du film « Diego Maradona » (2019) © M2R Films

L’ex-prodige du ballon rond Diego Armando Maradona, actuel entraîneur de l’équipe mexicaine des Dorados de Sinaloa, a récemment écopé d’une amende par la fédération de football du Mexique. Il faisait l’objet d’une procédure disciplinaire pour manquement à la « neutralité politique et religieuse » qu’impose le code éthique de l’instance sportive. Son « forfait » ? Le 31 mars dernier, lors de la conférence de presse organisée après un match remporté par les Dorados, l’Argentin a tenu à « dédier ce triomphe à Nicolás Maduro [le président du Venezuela] et à tous les Vénézuéliens qui souffrent ». Il en a profité pour étriller les États-Unis de M. Donald Trump, responsables à ses yeux de la crise que traverse Caracas : « Les shérifs de la planète que sont ces Yankees croient qu’ils peuvent nous piétiner parce qu’ils ont la bombe la plus puissante du monde. Mais non, pas nous. Leur tyran de président ne peut pas nous acheter »[1].

Le « gamin en or » (pibe de oro) — le surnom de Maradona en raison de son génie précoce né sur les terrains vagues du bidonville où il a grandi — n’en est pas à son premier coup d’éclat en faveur de M. Maduro. En tout début d’année, il a publié sur les réseaux sociaux un message de soutien à l’attention du chef de l’État vénézuélien, en butte à la contestation conduite par M. Juan Guaido, autoproclamé « président par intérim » avec la bénédiction de Washington : « Malgré les traîtres et l’impérialisme qui veulent gouverner le Venezuela, le peuple a réélu Nicolás Maduro à la présidence. Hugo Chávez nous a montré la voie et cette voie c’est Nicolás Maduro (…). Ils n’ont pas réussi avec Fidel [Castro], ils n’ont pas réussi avec Hugo, encore moins avec vous. Le Venezuela vaincra ! » Au cours de la campagne présidentielle vénézuélienne de mai 2018, l’ancien numéro 10 argentin est allé jusqu’à « mouiller le maillot » : il s’est rendu en personne au dernier meeting de M. Maduro, à Caracas, et s’est présenté à la tribune comme son « soldat ». En août 2017, alors que le Venezuela connaissait de graves violences, il lui avait déjà témoigné son appui, se disant même « chaviste jusqu’à la mort ».

Extrait du film « Diego Maradona » (2019) © M2R Films

Diego Maradona n’a jamais cherché à dissimuler ses sympathies pour le chavisme comme pour le socialisme latino-américain. On a pu ainsi le voir à plusieurs reprises aux côtés de feu Hugo Chávez, le fondateur de la « révolution bolivarienne » vénézuélienne. Notamment lors du « sommet des peuples » organisé à Mar del Plata (Argentine) en novembre 2005. Ce rassemblement altermondialiste se déroulait en marge du IVe Sommet des Amériques qui réunissait, entre autres, les deux « ennemis » George W. Bush et Hugo Chávez. Arrivé sur place après une nuit passée à bord du « train de l’Alba  »[2] en compagnie de M. Evo Morales (futur président de la Bolivie) et de nombreux militants opposés au projet de zone de libre-échange régionale promu par Washington, Maradona s’est distingué, avant d’embarquer à Buenos Aires, par une sortie musclée contre le président américain : « Je suis fier, en tant qu’Argentin, de pouvoir monter dans ce train pour exprimer mon rejet à l’égard de cette poubelle humaine que représente Bush. Je veux que tous les Argentins comprennent que nous luttons pour la dignité[3] ». Le leader vénézuélien l’invitera sur l’estrade pendant le discours qu’il prononce le 4 novembre 2005 au stade de Mar del Plata. « Vive Maradona, vive le peuple ! », scande Chávez à l’unisson avec la foule. À sa mort en 2013, Maradona appellera à « poursuivre l’héritage » d’« El Comandante » et à « continuer la lutte ». Car il « a changé la manière de penser des Latino-Américains qui [s’étaient] soumis leur vie entière aux États-Unis ».[4]


« On a passé cinq heures à discuter du “Che” [Ernesto Guevara], de l’Argentine, de Cuba…

Avant Nicolas Maduro, Hugo Chávez et Evo Morales, il y eut Fidel Castro. En 1987, alors au sommet de sa gloire avec le club de Naples et l’Albiceleste (champion d’Italie avec l’équipe napolitaine et vainqueur de la Coupe du monde avec sa sélection nationale, l’année précédente), le maître à jouer argentin voyage à Cuba, où il fait la connaissance du dirigeant socialiste. Il noue une relation de confiance avec Castro, qu’il dit admirer depuis toujours — « On a passé cinq heures à discuter du “Che” [Ernesto Guevara], de l’Argentine, de Cuba… (…) C’est le seul homme politique, si on peut dire, qu’on ne pourra jamais traiter de voleur, même si l’Amérique ne s’en prive pas. (…) C’est un révolutionnaire. Les politiciens accèdent au pouvoir avec le fric, lui c’est avec le fusil », explique-t-il au cinéaste Emir Kusturica. Cette amitié « révolutionnaire » se traduira par de nombreux séjours dans l’île, notamment pour soigner son addiction à la cocaïne. Présent à La Havane pour les funérailles du « líder máximo », en 2016, l’idole des terrains déplorera la perte d’un « second père ».

« Dans mon cœur, je suis palestinien 

L’ancien champion du monde n’hésite pas non plus à s’exprimer sur le conflit israélo-palestinien. Au président de l’Autorité palestinienne, M. Mahmoud Abbas, qu’il rencontre à l’occasion de la finale du Mondial de football en Russie, à l’été 2018, Maradona déclare : « Dans mon cœur, je suis palestinien ». En 2012, évoquant la lutte des Palestiniens contre l’occupation israélienne, il confie : « Je les respecte et je les comprends ». Et lorsqu’un déluge de feu s’abat sur Gaza au cours de la guerre lancée par Tel-Aviv contre le territoire côtier, en juillet-août 2014 (plus de 2 200 morts, dont 75 % de civils), il donne de la voix pour dénoncer les massacres : « Ce qu’Israël fait aux Palestiniens est honteux »[5].

Toutes ces prises de position détonent dans l’univers du ballon rond, où la plupart des sportifs réfléchissent au moins à deux fois avant d’afficher leurs préférences politiques, à l’exception récente de plusieurs footballeurs brésiliens. Lors de la dernière élection présidentielle au Brésil, de célèbres joueurs — Neymar, Ronaldinho, Rivaldo, Cafu, etc. — ont ainsi apporté publiquement leur appui au candidat d’extrême droite Jair Bolsonaro[6], élu à la tête du pays le 28 octobre 2018. Le cœur de Maradona, penche, lui, pour l’ex-président socialiste Luiz Inàcio Lula da Silva. Emprisonné pour corruption à l’issue d’un procès controversé et banni du scrutin présidentiel de 2018, dont il était donné grand favori, « Lula » a reçu son ferme soutien : « Ils ont volé la présidence à Lula ! »[7].

Ce dimanche 19 mai 2019, Diego Maradona devait se rendre au festival de cinéma de Cannes, pour la projection d’un film documentaire consacré à ses années napolitaines[8], mais il a dû annuler sa venue au dernier moment pour raisons de santé[9]. Nul doute que sa présence aurait attiré les foules, en raison de la fascination qu’il continue d’exercer. Il est très probable également que certains auraient surveillé de près ses déclarations et veillé à ce que l’idole des stades ne commette pas de « dérapages idéologiques » : à l’heure où les médias et une bonne partie de la classe politique brandissent la menace du « populisme de gauche », cela aurait forcément fait mauvais genre sous les ors du Palais des Festivals.

Oliver Pironet - Le Monde diplomatique, mai 2019

Source : https://blog.mondediplo.net 25 novembre 2020


[1] - Lire « Dans mon cœur, je suis palestinien, a déclaré le footballeur Maradona à Abbas », The Times of Israël, 16 juillet 2018.

[2] -  Sur Jair Bolsonaro, lire notamment Renaud Lambert et Pierre Rimbert, « Davos applaudit un fasciste », Manière de voir, n° 164, « Tous populistes ! », avril-mai 2019.

[3] - « Lula, la balle au prisonnier », Libération, 20 juin 2018.

[4] - Diego Maradona, d’Asif Kapadia, sortie nationale en salles le 31 juillet 2019.

[5] - Cet article a été modifié le 19 mai 2019 après l’annulation du déplacement de Diego Maradona.

[6] - Du nom de l’Alliance bolivarienne pour les Amériques (Alba), une organisation de coopération régionale lancée en décembre 2004 par Cuba et le Venezuela, puis rejointe un an plus tard par la Bolivie.

[7] - Voir le documentaire d’Emir Kusturica, Maradona (2008).

[8] - « Venezuela : Maradona se recueille sur la tombe de Chavez avant la présidentielle », AFP, 13 avril 2013.

[9] - Cf. « Diego Maradona podría ser sancionado por dedicarle una victoria a Maduro y criticar a Trump », TN, 3 avril 2019. Lire aussi Julia Buxton, « Où va l’opposition au Venezuela ? », Le Monde diplomatique, avril 2019.



lundi 2 novembre 2020

LA SITUATION SOCIO-POLITIQUE APRÈS LE 31 OCTOBRE 2020


Les partis et groupements politiques de l’opposition ivoirienne annoncent la création d’un « Conseil national de Transition », présidé par Henri Konan  Bédié, et qui aura pour missions de préparer le cadre d’une nouvelle élection présidentielle, de mettre en place dans les prochaines heures un gouvernement de transition, de convoquer des Assises nationales pour la réconciliation nationale.

LE COMMUNIQUE

Faisant suite à la précédente déclaration de l’opposition en date du 1er novembre 2020, les partis et groupements politiques de l’opposition, après la parodie d’élection présidentielle du 31 octobre 2020, constatent la vacance de la présidence de la République de Côte d’Ivoire.

Le peuple de Côte d’Ivoire, dans sa majorité, a suivi le mot d’ordre de désobéissance civile lancé le 20 septembre 2020 et celui relatif au boycott de l’élection présidentielle du 31 octobre 2020.

En effet, le pouvoir en place et l’organe électoral illégal n’ont réussi à faire voter que 8% de l’électorat, malgré les bourrages d’urnes, toutes autres formes de tricherie, d’agressions et d’assassinats perpétrés contre les partisans de l’opposition.

En conséquence, les partis politiques de l’opposition de notent que 90 % de l’électorat de ce scrutin, soit la majorité des Ivoiriens et Ivoiriennes, ont rejeté :

– la candidature illégale et anticonstitutionnelle du président sortant Alassane Ouattara ;

– liste électorale truffé d’irrégularités ;

– les décisions iniques du conseil constitutionnel du 14 septembre 2020, invalidant certaines candidatures.

Au regard de ce qui précède,

– Tirant les conséquences de la vacance du pouvoir exécutif, avec la fin du mandat présidentiel de monsieur Alassane Ouattara et la non tenue d’une élection crédible ;

– Considérant que le maintien de Monsieur Alassane Ouattara en qualité de chef de l’État est susceptible d’entraîner la guerre civile ;

Les partis et groupements politiques l’opposition annoncent :

– la création, ce jour, du Conseil National de Transition. Le Conseil National de Transition est présidé par Monsieur Henri Konan BEDIÉ, Président du Pdci-Rda et de la plateforme Crdp.

Le Conseil National de Transition a pour missions de :

• préparer le cadre et l’organisation d’une élection présidentielle juste, transparente et inclusive,

• la mise en place, dans les prochaines heures, d’un gouvernement de transition,
• la convocation des assises nationales pour la réconciliation nationale en vue du retour à une paix définitive en Côte d’Ivoire.

Les partis et groupements politiques de l’opposition félicitent les Ivoiriens et Ivoiriennes pour la victoire face à la forfaiture de Monsieur Alassane Ouattara et les appellent à exprimer leur joie par des manifestations populaires.

Les partis et groupements politiques de l’opposition affirment que le mot d’ordre de désobéissance civile est maintenu et demandent au peuple ivoirien de rester mobilisé jusqu’à la victoire finale.


Fait à Abidjan, le 2 novembre 2020

Pour les partis et groupements politiques de l’opposition, le porte-parole : Pascal AFFI N’GUESSAN


Source :
https://www.ivorian.net 02 novembre 2020

dimanche 1 novembre 2020

Au lendemain de la farce électorale de ce samedi 31 octobre 2020, les partis politiques de l’opposition constatent la fin du 2nd mandat présidentiel d’Alassane Ouattara et appellent à l'ouverture d'une transition civile

Le porte-parole de l'opposition ivoirienne, Pascal Affi N'Guessan a fait une déclaration ce dimanche 1er novembre 2020, à la Résidence d’Henri Konan Bédié. Au nom des partis et groupements politiques de l’opposition, il a appelé à l'ouverture d'une transition civile afin de créer les conditions d'une élection présidentielle juste et transparente.

Les Partis et Groupements politiques de l’opposition ivoirienne ont assisté le 31 octobre 2020 à un simulacre d’élection présidentielle, en violation flagrante de la constitution, du code électoral et de la loi portant composition de la Commission Électorale, avec la participation de Monsieur Alassane OUATTARA, dont la candidature est anticonstitutionnelle et illégale.

Cette élection a été organisée par un organe jugé non équilibré par la Cour Africaine des Droits de l’Homme l’Homme et des Peuples.

Le déroulement du scrutin présidentiel du 31 octobre 2020 a été entaché de nombreuses irrégularités ; notamment :

1- la non-opérationnalité de nombreuses Commissions locales et de bureaux de vote ;

2- la suppression irrégulière de nombreux lieux de vote ;

3- la non-participation de plus de 90% des électeurs au scrutin ;

4- le faible taux de participation , moins de 10% de l’électorat, rendant ainsi erronées les statistiques avancées par la Commission Électorale jugée illégale.

5- les morts d’hommes ; au moins une trentaine de personnes, soit au total près de cent dix(110) morts depuis l’annonce de la candidature anticonstitutionnelle et illégale du Président sortant, Alassane OUATTARA.

Au regard de tout ce qui précède, les partis et groupements politiques de l’opposition :

1- félicitent les Ivoiriens et les Ivoiriennes, particulièrement les militants de l’opposition pour avoir respecté le mot d’ordre de désobéissance civile ;

2- s’inclinent devant la mémoire de tous les morts ;

3- présentent leurs condoléances aux familles éplorées ;

4- expriment leur compassion aux blessés et leur solidarité à tous les détenus ;

5- dénoncent le simulacre d’élection présidentielle organisée le 31 octobre 2020 dans un climat d’insécurité généralisée ;

6- dénoncent, également, toutes les exactions extrajudiciaires caractérisées par les enlèvements des militants et personnalités politiques de l’opposition;

7- condamnent toutes les destructions de biens, les tueries et blessures perpétrées par les miliciens du RHDP Unifié sur des manifestants aux mains nues ;

8- ne reconnaissent pas pas l’élection présidentielle du 31 octobre 2020 ;

9- constatent la fin du mandat du Président Alassane OUATTARA depuis le 31 octobre 2020 et invitent la Communauté Internationale à en prendre acte.

En conséquence, les partis et groupements politiques de l’opposition appellent à l’ouverture d’une transition civile, afin de créer les conditions d’une élection présidentielle juste, transparente et inclusive.

Les partis et groupements politiques de l’opposition appellent, dès cet instant, à la mobilisation générale, les Ivoiriens et les Ivoiriennes et particulièrement toutes les forces vives de la Nation, les démocrates épris de justice et de paix, pour faire barrage à la dictature et à la forfaiture du Président sortant Alassane OUATTARA.


Fait à Abidjan, le 1er novembre 2020

Pour les partis et groupements politiques de l’opposition et P.O., le porte-parole : Pascal AFFI N’GUESSAN

Source : afriksoir.net 1er Novembre 2020