mardi 30 avril 2013

Qu’est-ce qui ne marche pas avec Alassane Ouattara ?


Ha ! Les beaux jours...
C’était le 11 octobre 1968. Il y a longtemps. Mais puisque Margaret Thatcher vient d’être enterrée en grande pompe en Angleterre et que sa politique « libérale » est encensée (encore) par quelques adeptes, cela vaut le coup de rappeler l’interrogation qui était celle de la « dame de fer » (quand elle ne l’était pas encore ; elle appartenait au Shadow Cabinet de Ted Heath). C’était à l’occasion de la conférence annuelle du Conservative Political Centre (CPC). Thatcher, qui avait alors 43 ans (mais près de dix ans d’expérience comme députée), était l’étoile montante de la vie politique britannique mais pas encore la star qu’elle deviendra quelques années plus tard, avait posé la question dans un texte fondateur du « thatchérisme » : « What’s wrong with politics ? ».

Elle y prônait une « politique de conviction » contre la « politique de consensus » en vigueur dans les rangs des conservateurs. La démocratie, disait-elle, « suppose l’alternative politique et un contre-gouvernement prêt à prendre en main les rênes du pays […] Aucun grand parti ne peut survivre sur des bases qui ne soient pas celles d’une ferme conviction de ce qu’il veut faire ». Elle ajoutait : « Il n’est pas de politique qui vaille en dehors des réalités ».
Cette interrogation (« Qu’est-ce qui ne marche pas en politique ? ») et ces propos thatchériens me reviennent en mémoire alors que la Côte d’Ivoire est confrontée à l’émergence d’une nouvelle crise politique.
Les élections régionales couplées, déjà reportées, viennent de se dérouler de la façon la plus indescriptible qui soit. Impréparation, faible participation, confusion… et, tout naturellement, en fin de parcours, affrontements violents dans plusieurs villes du pays. Un K.O. annoncé pour le parti au pouvoir, le RDR, et un chaos avéré pour la République de Côte d’Ivoire qui n’avait pas besoin de cela.
Deux ans après avoir prêté serment (6 mai 2011), Alassane D. Ouattara se trouve, une fois encore, confronté à la réalité politique et sociale de son pays alors qu’il ne semble s’intéresser qu’à une virtualité économique (l’émergence en 2020) à laquelle l’encouragent, hélas, ses partenaires mondiaux et les institutions internationales qui l’ont formaté.
« Il n’est pas de politique qui vaille en dehors des réalités ». Quand donc ADO va-t-il les prendre en compte ? En novembre 1988, à Washington, alors qu’il se préparait à quitter le FMI pour le gouvernorat de la BCEAO, il me disait que « les bonnes politiques économiques, ce sont des recettes de bonne femme, des choses très simples » et que pour les mettre en œuvre il fallait « un assainissement préalable du terrain ». O.K. pour l’économie, c’est son job. Mais en matière politique, le « libéral » qu’il est (ce que je ne suis pas, loin de là) devrait relire Thatcher qui a des « recettes de bonne femme » qui pourraient lui permettre de ne pas être dégagé en touche avant l’heure : « Aucun grand parti ne peut survivre sur des bases qui ne soient pas celles d’une ferme conviction de ce qu’il veut faire ».
Or, le RDR ne semble vouloir rien faire d’autre que d’avoir le pouvoir pour quelques-uns de ses « grottos ». ADO en a pris les rênes à l’été 1999 – cela fait quand même pas loin de quatorze ans – et ce parti n’a, depuis, cessé de se « déconstruire ». Le RDR accède au pouvoir après avoir raté le coche à de multiples reprises et, après deux années d’exercice, ne semble pas en mesure d’être un pôle de mobilisation de la vie politique de la droite libérale ivoirienne. L’impréparation se doublerait-elle d’incompétence ?
Le RDR, c’est le maschmallow de la vie politique ivoirienne. Aucune consistance ; goût factice. Amadou Soumahoro, son secrétaire général par intérim depuis le 14 juillet 2011, en a été le secrétaire général adjoint de 2005 à 2011 (il aurait été battu, ce week-end, à Séguéla). On se demande ce qu’il a « foutu » toutes ces années. Et quels sont les conseils distillés en 2011-2012 à Ouattara (il était son conseiller spécial en charge des affaires politiques). Djeni Kobina, fondateur du RDR, et Henriette Dagri Diabaté, qui a pris sa suite jusqu’à la nomination d’ADO à la présidence du parti le 1er août 1999, avaient une vraie personnalité (même s’ils avaient des insuffisances organisationnelles). Ce n’étaient pas des maschmallows. Le 4 avril 2013, à la veille de la campagne pour les régionales, Soumahoro « imaginait » déjà la victoire de Ouattara « au premier tour » de la présidentielle… 2015.
« La Côte d’Ivoire, du Nord au Sud, d’Est en Ouest, est plongée dans le clameurs et les vivats de joie et de bonheur ». Il ajoutait : « Nous devons démontrer que nous sommes prêts pour 2015, en faisant de ces élections régionales et municipales un succès républicain et populaire ». Raté.
Le site du RDR fait état, en lieu et place de sa victoire, « des violences post-électorales » dans plusieurs villes du pays, précisant que « l’armée quadrille la ville d’Abidjan ». Ces élections n’auront pas été « un succès républicain et populaire ». Ce qui serait « républicain et populaire » (et salutaire pour le RDR) c’est que Soumahoro aille exprimer ailleurs son incompétence politique. Mais comme me le répétait Balla Keïta : « Si tu es au milieu des crapauds accroupis, ne demande pas une chaise ».
Les régionales devaient être l’étape « du rassemblement et de l’unité pour l’édification d’une Côte d’Ivoire paisible, réconciliée et prospère » prédisait Soumahoro. Le FPI boycottait le scrutin ; il ne restait sur la scène politique que le RDR et le PDCI-RDA et des « indépendants » parfois instrumentalisés par Soumahoro. Les deux partis s’étaient rassemblés, au second tour de la présidentielle 2010, pour faire gagner (de justesse) Ouattara. Une crise post-électorale (déjà) particulièrement meurtrière et deux années de pouvoir ont eu raison de cette alliance sans que, pour autant, puisse s’exprimer une opposition viable. Résultat de la « politique de consensus » dénoncée par Thatcher. Qui exprimait une donnée gastronomique : « Nous n’avons pas beaucoup "bouffé" pendant dix ans, nous avons, du même coup, plus d’appétit que d’ordinaire ». Or chacun sait que les « grottos » ivoiriens ne sont pas anorexiques !
Le pari de Ouattara c’est : impasse sur la politique (il déteste son « ambiance délétère ») ; relance de l’économique (ce qu’il pense savoir faire). Du même coup, « les populations voyant leurs conditions de vie améliorées [vont] massivement renouveler leur confiance au président » (pronostic de Soumahoro/maschmallow le 4 avril 2013). Sauf que ça ne marche pas comme cela. Et Toussaint Alain, le communicant du FPI, peut évoquer une « traversée du désert électoral ». « Les Ivoiriens, dit-il, dans leur ensemble, ont manifesté leur désintérêt aux élections locales, Alassane Ouattara a été incapable de rassembler les Ivoiriens ».
On peut ne pas partager l’engagement de Toussaint Alain, on ne peut que partager son diagnostic. « Même sans opposition pro-Gbagbo, qui a décidé de boycotter le scrutin, commente Jeune Afrique sur son site, la Côte d’Ivoire ne peut visiblement pas organiser un scrutin sans que des violences ne se déclenchent […] Ces nombreux incident mettent essentiellement en cause des partisans du RDR du président Alassane Ouattara et du PDCI de l’ex-chef d’Etat Henri Konan Bédié ».
La presse pro-Gbagbo, bien sûr, s’en donne à cœur joie. Mais quelques jours après que le chef de l’Etat ait décidé de faire l’impasse sur une Assemblée nationale où le RDR est pourtant majoritaire pour gouverner par ordonnances, ce (double) fiasco électoral (échec du RDR + échec gouvernemental) annonce des lendemains difficiles pour Ouattara. Il est temps de se ressaisir et de prendre conscience que la Côte d’Ivoire 2013 n’est pas celle des « années Houphouët ».
Personne n’a intérêt à ce que le pays renoue avec une crise politique d’ampleur. « On lui reproche de vouloir créer un apartheid, un développement séparé pour quelques privilégiés et un statut de seconde classe pour les masses » disait-on de Thatcher en 1968 qui finira par imposer « ses convictions » plutôt que la négociation. C’est ce qu’on dit de Ouattara en 2013. Il est urgent, en Côte d’Ivoire, de repenser le mode de production politique. Si tant est qu’il y en ait un.

Jean-Pierre BEJOT (La Dépêche diplomatique)
Titre original : « Alassane Ouattara rate son nouveau rendez-vous avec la démocratie »  

en maraude dans le web
Sous cette rubrique, nous vous proposons des documents de provenance diverses et qui ne seront pas nécessairement à l’unisson avec notre ligne éditoriale, pourvu qu’ils soient en rapport avec l’actualité ou l’histoire de la Côte d’Ivoire et des Ivoiriens, et aussi que par leur contenu informatif ils soient de nature à faciliter la compréhension des causes, des mécanismes et des enjeux de la « crise ivoirienne ».  

Source : Lefaso.net 25 avril 2013

lundi 29 avril 2013

QUAND LE PDCI-RDA FÊTAIT SON CINQUANTIÈME ANNIVERSAIRE


Les dirigeants du Parti démocratique de la Côte d’Ivoire (PDCI) ont choisi de situer le temps fort de la célébration du cinquantième anniversaire de leur parti au 30 avril 1996, au lieu du 9 avril qui eût été un choix plus conforme à la vérité historique si, du moins, le but de

Timbre à l'effigie de Marie Koré
ces festivités était de rappeler aux Ivoiriens leur glorieuse initiative de ce temps-là, et non l’acte administratif automatique qui le sanctionna. Pourquoi ? Selon le président du groupe parlementaire du Front populaire ivoirien (FPI), Doudou Boga, ce serait pour faire pièce à son parti, qui, ce même jour, célébrait sa fête annuelle de la Liberté. Pour preuve, il rappelait comment, le 27 mai 1995, Laurent Fologo avait aussi appelé le ban et l’arrière ban du PDCI à défiler dans les quartiers d’Abidjan à seule fin de démontrer qu’il était capable de faire mieux que le Front républicain de Djéni Kobina et de Laurent Gbagbo n’avait fait trois semaines auparavant. C’est de bonne guerre. Le FPI se prépare en effet à entrer de nouveau en campagne, en vue des partielles, dans les circonscriptions où les législatives avaient été ajournées en raison des troubles qui y avaient émaillé le scrutin présidentiel d’octobre 1995. Ses candidats, dont L. Gbagbo, partent largement favoris ; mais il n’y a pas de mal à tirer un peu la couverture à soi… Encore que s’arrêter à cette interprétation puisse suggérer que, en somme, la guerre apparemment sans merci que se livrent depuis six ans les deux formations qui dominent la scène politique ivoirienne, guerre au demeurant sans enjeu discernable, n’est rien qu’un vain concours de gesticulations. En fait, compte tenu de la manière dont l’histoire de la Côte d’Ivoire s’écrit depuis 1951, ce choix eût été exactement le même si le 30 avril n’était pas aussi le jour de la fête annuelle du FPI.
Le PDCI fut fondé le 9 avril 1946, mais c’est le 30 avril qu’il fut enregistré par les services du gouverneur. Pour les dirigeants de l’ancien parti unique, c’est donc ce jour-là qui marque le commencement de son histoire, conformément au principe houphouétiste qu’il n’y a de légitimité que celle qui procède directement du fait colonial. Pour autant, le 9 avril ne fut pas totalement oublié. Il y a encore trop de survivants de cette époque, et qui ne partagent pas tous le point de vue officiel sur elle, pour qu’il soit possible de l’escamoter. Il y eut donc, ce jour-là, un rassemblement sur le site du bar-dancing L’Etoile du sud, où avait eu lieu la réunion constitutive d’un parti « destiné à soutenir l’action du député Félix Houphouët », l’homme qui allait, deux jours plus tard, attacher son nom à la loi d’abolition du travail forcé dont il était le rapporteur.
Pour l’occasion, les médias gouvernementaux donnèrent la parole à quelques survivants de cette époque. Certains d’entre ces héros avaient été jusqu’alors, pour le moins, bien négligés. Ainsi de Mme Anne-Marie Raggi, qui tâta même de la prison en 1963. Ainsi de Mme Marguerite Sakoum qui, elle, fut carrément reléguée dans une sorte d’exil intérieur jusqu’à ce 9 avril 1996 ! Le rôle insigne que ces citoyennes jouèrent dans le mouvement insurrectionnel de 1949-1950 ne fut récompensé que par une montagne d’ingratitude ! Ces deux figures monumentales de la trop brève épopée du RDA ivoirien sont apparues là, aussi admirables de courage, de patriotisme et de modestie qu’aux jours de leurs vingt ans. Quand on les a entendues, on comprend mieux pourquoi la commémoration du 9 avril 1946 se fit, pour ainsi dire, à la cloche de bois. Tous ceux qui peuvent se sentir concernés par cet anniversaire-là ne sont pas précisément des adorateurs ou des adoratrices du grand fétiche de Yamoussoukro.
Le 9 avril 1946, il ne s’agissait que de donner un nom à un mouvement qui existait déjà de façon virtuelle, tant les populations étaient avides de secouer le joug colonial. C’est ce qui explique le succès extraordinaire et immédiat du PDCI auprès des masses ivoiriennes. Ce succès s’accompagna de l’ascension rapide à sa direction de jeunes cadres radicaux acquis aux idées politiques et sociales dominantes de l’époque ; idées que leurs aînés, et Houphouët en particulier, étaient loin de partager, même si au palais Bourbon et au palais du Luxembourg les élus du Rassemblement démocratique africain (RDA), fondé en octobre 1946, et qui tirait toute sa force du PDCI, sa section ivoirienne, étaient apparentés aux groupes des élus progressistes et communistes. Et c’est ainsi que ce qui faisait la force de ce parti devait bientôt constituer une brèche par laquelle ses ennemis allaient l’atteindre au cœur. En 1947, l’attitude du Syndicat agricole africain (SAA) devant la grève des cheminots avait montré que l’unité du PDCI n’était pas à toute épreuve. Dès lors l’administration et le colonat allaient tout tenter afin d’élargir cette première brèche. Ils commencèrent par circonvenir Houphouët dont ils avaient pu mesurer et l’égotisme et l’hostilité atavique aux tendances dominantes du mouvement dont il était, un peu à son corps défendant, le principal dirigeant.
Dès 1948, lors d’une entrevue secrète avec le haut-commissaire en AOF, le président du RDA s’était pratiquement engagé à rompre avec ses alliés progressistes français. La chose ne se fit pas alors parce que le comité de coordination refusa de le suivre dans cette résolution. Mais, de ce moment, Houphouët était entré dans l’engrenage qui devait le conduire progressivement à dévoyer le PDCI de son orientation primitive et à en faire, à partir de 1951, un simple instrument de sa prodigieuse carrière. En attendant ce jour, il se laissa cependant porter par le mouvement comme s’il adhérait toujours à ses objectifs, y compris les plus radicaux. De sorte que la réputation de communisme que lui firent alors les milieux réactionnaires n’était pas sans vraisemblance.
Le 6 février 1949 eut lieu l’événement qui devait avoir les plus graves conséquences sur l’évolution ultérieure du PDCI. Ce jour-là, une provocation magistralement exécutée fournit au gouverneur Laurent Péchoux le prétexte pour jeter en prison les dirigeants les plus radicaux et les plus populaires du RDA ivoirien non protégés par l’immunité parlementaire. Le mouvement était décapité ; mais c’est alors qu’il fit vraiment la démonstration de la force qu’il représentait.
Monument dédié aux héroïnes de 1949
Le coup du 9 février provoqua une levée en masse des Ivoiriens, à laquelle le gouverneur répondit en établissant un véritable régime de terreur qui ensanglanta toute la Côte d'Ivoire tout au long de l'année 1949, et durant les premiers mois de l'année suivante. C'est pendant cette période qu’eurent lieu tous les actes d’héroïsme dont les dirigeants actuels du PDCI attribuent toute la gloire à Houphouët, alors que du vivant de ce dernier il valait mieux ne pas en parler si on voulait faire carrière à son ombre. C’est à cette époque qu’apparurent les figures sublimes de Marguerite Sakoum, Anne-Marie Raggi, Marie Koré, Mami N’Doli Amoin, Macoucou Célestine Ouezzin et de dizaines d’autres femmes qui furent justement surnommées les amazones du RDA. Epouses des prisonniers ou simples militantes, elles s’étaient levées partout pour prendre la relève de leurs hommes, et elles donnèrent plus de grain à moudre au sanguinaire Péchoux que ces derniers. Un de leurs hauts faits est resté dans l’histoire sous le nom de La marche des femmes sur la prison de Grand-Bassam, touchante initiative dont Houphouët devait dire, en 1986, que ce fut… une sottise !
Après le coup du 6 février, le PDCI fut interdit. Il le restera pratiquement jusqu’en 1959, l’année où, pour la première fois depuis 1947, un congrès put enfin se réunir. Entre temps, toutes les mesures d’exception dont on avait frappé l’ancienne direction furent maintenues. Ainsi en avait décidé un ministre de la France d’Outre-mer nommé François Mitterrand. Le but de la manœuvre était d’écarter de la direction du mouvement tous les éléments jugés « idéologiquement irréductibles » et de favoriser « en revanche les authentiques messagers de la libération africaine que l’assentiment et la fidélité de leur peuple autant que l’amitié de la France mèneraient aux plus hauts destins » (F. Mitterrand, Présence française et abandon, Seuil 1957 ; p. 183).
Fin 1950, alors que ses amis se trouvaient encore en attente de jugement et que le péchoutage n’avait pas cessé, le président d’honneur du PDCI conclut avec le ministre de la France d’Outre-mer un pacte de sauvegarde personnelle au prix de la rupture avec les communistes et de l’abandon de l’anticolonialisme radical qui, jusqu’alors, caractérisait le PDCI. C’est son fameux repli tactique. Un an plus tard, il demandait solennellement aux Ivoiriens de se soumettre à l’administration coloniale, qui, elle, n’avait pourtant rien appris ni rien oublié : « Je demande à nos militants le respect des lois et des autorités constituées » (Discours du stade Géo-André, 6 octobre 1951). En même temps il ouvrait le mouvement à tous ceux qui l’avaient combattu. C’est ainsi que, sans changer de nom, le PDCI changea totalement d’orientation et de nature même, jusqu’à devenir le contraire de ce qu’il était à son origine. En sorte que si son nom conservait encore toute sa charge symbolique aux yeux des masses villageoises qui l’avaient porté pendant ses quatre années d’existence, la chose elle-même avait cessé de leur appartenir. Le PDCI ressuscité vers le milieu des années 1950 n’était plus qu’un parti de notables et de possédants ayant fait leur paix séparée avec le parti colonial, et partageant avec lui la rente caféière et les places politiques. C’est la raison pour laquelle certains auteurs ont défini le régime Houphouët comme le régime des planteurs ; bien à tort car, dans ce régime, le gros commerce colonial jouait un rôle plus déterminant que les planteurs autochtones.
En 1959, sous l’influence de la Jeunesse du Rassemblement démocratique africain-section Côte d'Ivoire (JRDACI) créée à l’initiative de la première vague de diplômés de l’enseignement supérieur revenus au pays, le 3e congrès fut, en quelque sorte, une tentative de ramener le PDCI dans le sillon d’origine, l‘anticolonialisme radical, symbolisé par l’élection de Jean-Baptiste Mockey, l’homme que le parti colonial détestait le plus, au secrétariat général en remplacement d’Auguste Denise. Mais, alors, étroitement chaperonné par les fameux réseaux Foccart, Houphouët était déjà trop puissant pour que cette tentative, ainsi que celle du début des années 1960 (affaire des complots qui, aux dires d’Houphouët lui-même, n’en étaient pas !), d’intention sinon de nature semblable, pussent aboutir.
Au début des années 1970, le dégel consécutif au Grand dialogue favorisa l’intégration de quelques jeunes diplômés dans le gouvernement et dans les instances dirigeantes du parti unique. Un an plus tard, après le règlement à l’africaine de l’affaire des pseudo-complots de 1963-1964, tous les exclus de la période antérieure furent réintégrés. Mais cela ne pouvait plus rien changer car, sous la houlette d’Houphouët et de son bras droit, le secrétaire général Philippe Yacé, l’appareil du PDCI était tout à fait devenu une simple administration vouée à la propagande du régime et au conditionnement des populations.
A la fin de cette mue forcée commencée au lendemain de la provocation du 6 février 1949, le PDCI devint, et resta jusqu’en 1990, ce parti dont on a pu dire : « Le parti unique complète le présidentialisme. Il en est un des instruments… Derrière l’apparence d’un parti de masse, il s’agit d’un parti qui encadre plus qu’il ne mobilise la population. Grâce à son monopole, il permet de canaliser la participation politique et donc de la contrôler » (J.-F. Médard, La régulation socio-politique, in Etat et bourgeoisie en Côte d’Ivoire, Karthala 1982 ; pp. 64-65). Encore le mot parti est-il plutôt impropre dans cet emploi, puisque d’une part tous les Ivoiriens majeurs, et même tous les résidents d’origine négro-africaine, étaient comptés comme membres du PDCI et devaient obligatoirement y cotiser, et que d’autre part tous ceux qui occupaient des positions intéressantes dans la fonction publique ou dans le secteur privé étaient théoriquement membres de ses directions, avec au moins une voix délibérative, étant bien entendu que toute décision y appartenait à Houphouët seul. De sorte que jusqu’à l’abolition du système de parti unique fin avril 1990, le PDCI n’était pas un parti politique, mais le peuple lui-même. En théorie tout au moins.
Avant le 30 avril 1990, le PDCI ignorait l’adhésion volontaire. Aujourd’hui, le parti de ce nom est composé de gens qui, en 1990, ont choisi le camp d’Houphouët plutôt que d’adhérer à l’un des nouveaux partis apparus alors, puis, en 1995, le camp d’Henri Konan Bédié plutôt que le Rassemblement des républicains (RDR) d’Alassane Ouattara et Georges Djéni Kobina, sans pour autant que ces choix recouvrent une réalité sociologique ou un projet politique vraiment différent de ceux de leurs adversaires. En sorte que le parti qui en est résulté, s’il est incontestablement l’héritier de l’ancien parti unique, il ne l’est, cependant, qu’en tant qu’il est avant tout le parti de celui qui gouverne et qui est, à ce titre, le grand maître des carrières et le dispensateur des fortunes, même si, en 1995 comme en 1990, ses éclatants succès électoraux ont prouvé qu’il bénéficie lui aussi, comme l’ancien parti unique, du prestige du mouvement anticolonialiste des années 1940.
Cependant, on s’en souvient, les dirigeants du PDCI furent les premiers surpris par leurs victoires de l’année terrible 1990. C’est là sans doute la principale raison de cette célébration conçue comme un rituel fétichiste d’incorporation. 

Marcel Amondji
Titre original : « LE JUBILÉ DES OUVRIERS DE LA ONZIÈME HEURE ».  

Source : Le Nouvel Afrique Asie N° 81, juin 1996

Le bêtisier militaro-ultramarin…

Aujourd’hui, la parole à David Matin de l’Agence de presse GHM, et au très communiquant colonel Bruno Héluin, alors à la tête du 2e RIMa et du Bataillon de Tora, un héritier spirituel de Mangin, qui, semble-t-il, se prenait aussi parfois pour un anthropologue averti :
 
« L’armée "ne fait pas de communautarisme" et se refuse à communiquer sur l’origine de ses militaires. Si tous ont décidé de se battre pour les mêmes couleurs et les mêmes valeurs, il n’en reste pas moins que les ultramarins sont nombreux dans l’armée française. En Afghanistan, ils représenteraient près de 20 % des 4 000 soldats français.
Le colonel Bruno Héluin, à la tête du RIMa et du bataillon de Tora, explique l’intérêt de son régiment pour ces originaires des trois océans : "Le maître-mot en outre-mer est fidélité. Les ultramarins aiment la cohésion et la vie en collectivité. En France métropolitaine, nous avons un peu perdu cette notion. Je tiens à avoir un minimum de 15 % d’ultramarins dans mon régiment". Il cite notamment les Polynésiens et les Wallisiens. "Des guerriers", souvent des forces de la nature. Ainsi, les quatre tireurs d’élite de la base de Tora sont originaires d’Océanie, deux Wallisiens et deux Polynésiens. Question de puissance. "Tout le monde ne peut pas patrouiller avec 100 kg sur le dos", souligne le colonel. 100 kg c’est le poids du paquetage au départ d’une mission de 96 heures (gilet pare-balles, 25 kg ; fusil de tireur d’élite, 17 kg ; Famas, 4 kg, réserves d’eau, 10 litres ; rations ; munitions…).
Echec scolaire, difficultés à trouver du travail, opportunité de découvrir le monde et de sortir de son île sont les principales raisons de l’engagement des ultramarins. Certains ont, aussi, tout simplement envie de défendre les valeurs de la France.
2011 a été déclarée "Année des Outre-mer" par le gouvernement, histoire de montrer que ces territoires ne sont pas seulement un poids pour la France, comme on le perçoit parfois. Pour mettre en valeur ces collectivités, les Régiments basés en outre-mer et quelque trois cents jeunes du Service Militaire Adapté (SMA), un organisme de formation professionnelle et d’insertion sociale au profit des jeunes d’outre-mer, défileront lors du 14-Juillet à Paris. » 

(Source : http://www.paris-normandie.fr 21 avril 2011)

samedi 27 avril 2013

L’ONU met à nu les réseaux criminels des anciens chefs rebelles dans l’armée

ABIDJAN (Reuters) – D’anciens chefs rebelles ivoiriens intégrés dans l’armée nationale après l’arrivée au pouvoir du président Alassane Ouattara profitent aujourd’hui de leurs fonctions pour contrôler des trafics illicites en tout genre portant sur des millions de dollars, affirment des experts des Nations unies.
A. Ouattara au milieu de ses estafiers
Dans un rapport que Reuters a pu consulter vendredi, ces experts mettent en cause certains chefs
militaires, issus de l’ex-mouvement rebelle des Forces nouvelles et qui ont rejoint l’armée après la victoire d’Alassane Ouattara sur son rival Laurent Gbagbo en avril 2011, à l’issue d’une courte guerre civile.
Ces hommes occupent aujourd’hui des postes-clés au sein des Forces républicaines de Côte d’Ivoire (FRCI), l’armée nationale.
« L’administration ivoirienne a progressivement intégré d’anciens commandants rebelles dans les forces armées nationales sans que ceux-ci aient abandonné leurs activités économiques et leurs méthodes de prédateurs et de chefs de guerre », disent les experts de l’Onu.
Ils ont étendu leur « réseau militaro-économique » sur tout le pays pour se livrer à de fructueux trafics, ajoute le rapport qui cite les noms d’Ouattara Issiaka, alias « Wattao », Hervé Touré, alias « Vetcho », Koné Zakaria, Chérif Ousmane et Martin Kouakou Fofié.
Kouakou Fofié fait l’objet de sanctions de l’Onu depuis 2006 (gel des avoirs à l’étranger et interdiction de voyager).
Aucun responsable ivoirien n’a pu être joint vendredi pour commenter ce rapport.
Le document affirme que les anciens combattants rebelles maintiennent leur contrôle sur les mines de diamants et l’industrie artisanale de l’or. D’ex-membres des Forces nouvelles travaillent dans des exploitations forestières illégales dans la région de Bouaké, leur ancien bastion, et font la contrebande du précieux bois de teck.
Des camions de l’armée ont été utilisés pour exporter clandestinement vers les pays voisins, surtout le Ghana, du cacao, dont la Côte d’Ivoire est le premier pays producteur au monde.
« Les autorités ivoiriennes estiment que pour la saison 2011-2012, la contrebande de cacao a atteint 152.000 tonnes, ce qui représente pour les finances du pays une perte de 76 millions de dollars », précise le rapport.
Dans la vie quotidienne, les civils sont parfois contraints de payer pour franchir les postes de contrôle de l’armée ou de la police, et peuvent même être soumis à un système d’impôt forcé, ajoutent les experts. 

Joe Bavier, Guy Kerivel pour le service français 

en maraude dans le web
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Source : Connectionivoirienne.net 27 avril 2013

jeudi 25 avril 2013

Pétition pour Venance Konan

« Au travail, maintenant ! »
Par Venance Konan - Fraternité Matin 22 avril 2013

 
Il s’agira, désormais, pour les élus, de concrétiser tout ce qu’ils ont promis, en songeant, un peu plus, à leurs administrés, à la trace qu’ils laisseront dans l’histoire de leurs cités ou régions, qu’à leur propre enrichissement.
Après plus de dix ans d’incurie, de je-m’en-foutisme, de course effrénée à l’enrichissement personnel, nous voici vivant dans des villes laides, bruyantes, polluées, étouffantes. Abidjan, notre capitale économique que naguère, l’on venait admirer de partout, est aujourd’hui méconnaissable. Les lagunes du pays qui faisaient son charme sont toutes polluées et la plus grande d’elles, la lagune Ebrié, est en train de se fermer sous nos yeux. La forêt du Banco où l’on allait s’oxygéner les dimanches est devenue infréquentable. Et cela n’a pas l’air de déranger qui que ce soit. Que dire de Bouaké, la plus grande ville du pays après Abidjan ! J’y ai passé quelques jours, la semaine dernière. Depuis plus de 20 ans, 99% de ses voies sont impraticables. Les rebelles qui l’ont occupée pendant huit ans y ont semé l’anarchie et elle est aussi méconnaissable, ayant perdu tout ce qui faisait son charme. Ses endroits mythiques qu’étaient la piscine que chantait l’Ofi ainsi que le zoo n’existent plus. J’ai rencontré, à Bouaké, une amie qui travaille dans une agence européenne de développement. Elle m’a raconté que la Banque mondiale avait projeté d’y construire un très grand lycée. Le terrain avait été acheté et les constructions avaient même démarré. Un jour, un responsable de cette Banque est allé sur place et a découvert qu’une école coranique avait été construite sur le terrain dédié au lycée. Parce que quelqu’un à Bouaké qui avait le pouvoir d’en vendre une partie l’a fait, au profit de cette école coranique. Qu’est-ce qui peut bien attirer un touriste à Bouaké, aujourd’hui ? Qu’est-ce qui peut attirer un touriste dans nos différentes villes de l’intérieur ?
Ce que nous devons, nous, administrés, exiger de nos maires, est qu’ils nous fassent vivre dans des villes propres, agréables, jolies, bien construites et calmes. Nous avons des urbanistes, des architectes et des artistes très compétents qui peuvent contribuer à rendre nos villes vivables. Il ne faut pas toujours de gros moyens pour cela. Juste quelques bonnes idées. Et ce ne sont pas les personnes capables d’en donner qui manquent dans ce pays. Nous, administrés et contribuables, devons nous montrer plus exigeants désormais. Nous ne devons pas oublier que nos élus le sont par nous, et gouvernent pour nous. Nous devons nous constituer en associations chargées de veiller à ce qu’ils appliquent les programmes pour lesquels ils ont été élus, qu’ils ne nous infligent pas des monuments affreux et surtout, qu’ils ne vendent pas tous nos espaces verts, nos trottoirs ainsi que les bordures de nos lagunes et lacs à des commerçants peu soucieux de l’environnement. Nous devons désormais exiger que pour la construction de tout monument, un concours soit lancé afin que les meilleurs artistes du pays puissent y participer, et que nous ayons notre mot à dire dans le choix définitif.
Nos élus régionaux ont pour devoir de mettre en valeur les richesses de nos régions afin d’y amorcer le développement. Là aussi, nous ne devons pas leur donner nos blancs-seings. Nous devons nous impliquer aussi pour que leur premier souci ne soit pas de récupérer les sommes qu’ils ont dépensées pour leurs campagnes passées et celles qui serviront pour les prochaines.
Il y a une vingtaine d’années, nous étions très fiers de sillonner notre pays. Aujourd’hui, non seulement il est pénible de le faire, vu le mauvais état de nos routes, mais aussi on revient toujours avec beaucoup d’amertume, à cause de la pauvreté qui règne dans nos villes et villages de l’intérieur, et surtout à cause de l’apathie générale des populations,  de cette absence de volonté de s’en sortir. On a l’impression qu’un ressort s’est cassé en nous, peuple ivoirien. Il appartient, certes,  à chacun de nous de remonter son ressort personnel, mais il est du devoir de nos élus de créer les conditions pour que ceux qui veulent entreprendre pour s’en sortir puissent le faire.
 

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Pétition pour Venance Konan

 Ce qui est bien avec Venance Konan, c’est qu’il est capable de dire tout et le contraire de tout dans le même article. Si bien que toute son œuvre – du moins son œuvre journalistique car c’est la seule que je connais au jour d’aujourd’hui – n’est qu’un tissu de contradictions, de paradoxes, de sophismes, de lapalissades et même de contre-vérités, le tout asséné avec un sang-froid qu’on pourrait admirer si le journalisme était l’un des beaux-arts, ou s’il ne s’agissait pas de sujets aussi graves que tous ceux sur lesquels cet écrivain dévoyé exerce depuis ses débuts une plume inutilement talentueuse. Inutilement ? Oui… Car quand on réfléchit à son parcours à la lumière de ses reportages, interviews, billets d’humeur et éditoriaux, on se rend vite compte que ce journaliste « recherché » n’a jamais fait que suivre l’opinion dominante. Et quand nous disons « opinion dominante », nous ne voulons pas dire l’opinion de la majorité des citoyens de notre pays, mais l’opinion de ceux qui nous dominent… Ainsi, V. Konan était naturellement tayloriste durant la guerre civile libérienne, parce que dans cette guerre, Charles Taylor était le bras armé de la Françafrique, alors représentée par l’ambassadeur Michel Dupuch et par un certain Robert de Saint-Pai, peut-être un des alias du très entreprenant Jean Mauricheau-Beaupré, un résidu de la Maison Foccart. Ainsi, sous Bédié, s’il était furieusement « ivoiritaire », c’était parce que le « gouverneur » Guy Nairay régnant et Michel Dupuch étant toujours à son poste, Alassane Ouattara n’apparaissait pas encore comme le choix de la Françafrique. Ainsi, sous Robert Guéi, quoique le contexte ait changé du fait du décès de G. Nairay et du rappel de M. Dupuch, qui facilitèrent le renversement de Bédié sans ouvrir à Ouattara la voie royale qu’il espérait, il demeura « ivoiritaire ». Ainsi, pendant le mandat de Laurent Gbagbo, même s’il avait déjà mis beaucoup d’eau dans son vin, question « ivoirité », depuis que Bédié et Ouattara avaient fait leur paix sous l’égide de la Françafrique,  et pratiquement jusqu’à ce que tout se gâte vraiment entre ladite Françafrique et Gbagbo au lendemain du 2e tour du scrutin présidentiel de 2010, V. Konan n’était pas vraiment le farouche opposant qu’il deviendra à partir du 3 décembre 2010. La seule chose qui ne varie pas dans cette trajectoire, c’est que V. Konan n’apparaît chaque fois que comme la cinquième roue du carrosse ou, si vous préférez, comme la mouche du coche.
Inutilement talentueuse, disions-nous ? En fait, cela dépend pour qui. Car V. Konan est l’un des très rares Ivoiriens qui vivent très bien de leur plume, et probablement le seul parmi les journalistes qui ne sont pas devenus autre chose. Mais, même dans cette « mangécratie » que la Françafrique nous impose depuis le 11 avril 2011, et s’agissant d’une telle poche de moralité, l’argent n’est pas tout ! Un Venance Konan peut certainement, et avec raison, ambitionner beaucoup plus que ce rôle d’imprécateur que personne n’écoute et que peut-être ceux qui le payent méprisent en secret, comme dans la légende, Cassandre la Troyenne éternellement vouée à prêcher dans le désert. Quand on voit avec quelle assurance il dénonce l’anarchie, l’insalubrité, l’anomie, l’insécurité, l’incivisme, l’irresponsabilité, la corruptibilité des hommes et la corruption des mœurs, la gabegie, toutes ces « négreries » comme il aime à dire, peut-on douter que ce nouveau Savonarole serait aussi compétent sinon plus, par exemple, que tel maire, tel gouverneur de district, tel préfet, tel député, tel ministre, tel ministre d’Etat, voire le Premier ministre ou le président de la République lui-même, pour éradiquer tous ces maux dont la Côte d’Ivoire n’a que trop souffert…
Voilà pourquoi, chers membres et chers amis du Cercle Victor Biaka Boda, nous vous soumettons le dernier éditorial de Venance Konan, qui est un peu la quintessence de sa pensée et qui se lit comme un catalogue ou un inventaire de tous les projets dont il pourrait faire bénéficier cette Côte d’Ivoire qui lui est si chère, pourvu qu’elle lui en donne les moyens. Que diriez-vous d’une pétition en sa faveur, à soumettre à ses employeurs actuels, pour les exhorter à mieux l’utiliser qu’ils ne le font aujourd’hui ? Etant donné l’étendue des centres d’intérêts de V. Konan et l’immensité de ses talents, on pourrait envisager de lui confier au minimum une fonction de conseiller spécial à compétence universelle, avec droit de regard sur l’activité de toutes les autorités depuis le sommet de l’Etat jusqu’au dernier détenteur de la moindre parcelle de pouvoir… Quelque chose comme la présidence de ce truc bizarre qu’Houphouët imagina, en 1990, pour mettre sur orbite un certain Alassane Ouattara. Ça s’appelait le « Comité interministériel de coordination du programme de stabilisation et de relance économique ». Sans être et sans jamais avoir été membre du gouvernement ivoirien, Ouattara avait été bombardé président de cet organisme, avec plusieurs ministres à ses ordres au grand scandale de Camille Alliali, qui ne put s’empêcher de faire observer à Houphouët – c’est dire s’il fut scandalisé ! – « Qu’il n’était pas habituel qu’une personnalité qui n’était pas membre du gouvernement puisse être nommée à la tête d’un comité composé de ministres »… Mais ça, c’était avant. Une époque où, s’il faut en croire V. Konan, l’urgence n’existait pas encore. Aujourd’hui, c’est autre chose. On n’a pas le temps de chipoter. Et pas question de limiter le champ d’intervention du nouveau sauveur de la patrie au seul domaine économique comme ce fut le cas pour Ouattara. Au contraire, il faudra lui confier tous les leviers de décision existant dans le pays, sans excepter ceux qui appartiennent au chef de l’Etat. En un mot, il faut créer V. Konan dictateur, comme ils faisaient dans l’ancienne Rome lorsqu’ils étaient confrontés à une crise d’une telle gravité que seul un homme d’exception nanti de tous les pouvoirs pouvait sauver la république.
Si cette proposition vous agrée, faites-le-nous savoir. Et si elle ne vous agrée pas, faites-le-nous savoir également, en précisant les raisons de votre désaccord.
Donc, chers membres et chers amis du CVBB, à vos plumes !

Cercle Victor Biaka Boda
La Rédaction, 24 avril 2013

50 vérités sur Henrique Capriles Radonski, candidat à la présidence du Venezuela

Qui est réellement le leader de l'opposition
au Venezuela ?

1. Né en 1972, Henrique Capriles Radonski est issu de deux des plus puissantes familles vénézuéliennes, qui se trouvent à la tête de plusieurs conglomérats industriel, immobilier et médiatique (Capriles) et possèdent le Circuit national d’exhibitions (Cinex), seconde chaîne de cinéma du pays (Radonsky).


H. Capriles Radonski en campagne
2. Sa famille possède le quotidien Últimas Noticias, le plus diffusé au niveau national, des radios et une chaîne de télévision.

3. Dans les années 1980, il a milité au sein du parti d’extrême droite Tradición, Familia y Propiedad.

4. Capriles a été élu député en 1999 pour l’Etat de Zulia en tant que membre du parti de droite COPEI. Contre toute attente et malgré son manque d’expérience en politique, il a immédiatement été désigné président de la Chambre des députés, devenant ainsi le plus jeune député à diriger la Chambre basse du Parlement.

5. En réalité, Capriles a réussi à s’imposer face aux autres aspirants au poste, ayant une trajectoire politique plus importante grâce au pouvoir économique et financier de sa famille qui a financé les campagnes de nombreux députés.

6. En 2000, il fonde le parti politique Primero Justicia avec le conservateur Leopoldo López, et s’allie immédiatement à l’International Republican Institute, branche internationale du Parti républicain des Etats-Unis. Le président de l’époque n’est autre que George W. Bush, lequel apporte un large soutien à la nouvelle formation politique qui s’oppose au gouvernement d’Hugo Chávez, notamment par le biais de la National Endowment for Democracy (NED).

7. Selon le New York Time « la NED a été créée il y a 15 ans pour réaliser publiquement ce que la Central Intelligence Agency (CIA) a fait subrepticement durant des décennies. Elle dépense 30 millions de dollars par an pour appuyer des partis politiques, des syndicats, des mouvements dissidents et des médias d’information dans des dizaines de pays ».

8. Selon Allen Weinstein, père de la législation qui a donné naissance à la NED, « Beaucoup de ce que nous faisons aujourd’hui a été fait par la CIA il y a 25 ans de manière clandestine ».

9. Carl Gershman, premier président de la NED, a expliqué la raison d’être de la Fondation en juin 1986 : « Il serait terrible pour les groupes démocratiques du monde entier d’être vus comme subventionnés par la CIA. Nous avons vu cela dans les années 1960, et c’est pour cela qu’on y a mis un terme. C’est parce que nous n’avons pas pu continuer à le faire que la fondation [la NED] a été créée ».

10. Durant son mandat de maire de la municipalité de Baruta, Capriles a signé plusieurs accords avec le FBI étasunien afin de former sa police municipale, et a reçu des fonds de l’ambassade des Etats-Unis pour cette mission.

11. Henrique Capriles a activement participé au coup d’Etat contre Hugo Chávez, organisé par les Etats-Unis, en avril 2002. Maire de Baruta, il a fait arrêter de nombreux partisans de l’ordre constitutionnel dont Ramón Rodríguez Chacín, alors ministre de l’Intérieur et de la Justice, lequel a été violemment agressé par les partisans du putsch devant les caméras de télévision.

12. A ce sujet, les propos de Rodríguez Chacín sont sans équivoque : « Je leur  ai fait part [à Henrique Capriles et Leopoldo López venus l’arrêter] du risque, du danger qu’il y avait pour mon intégrité physique [de sortir au milieu de la foule]. J’ai suggéré de passer par une autre sortie et la réponse que j’ai reçue de Capriles, précisément, a été négative, car, m’a-t-il dit, les caméras se trouvaient devant l’immeuble. Ils voulaient me faire sortir devant les caméras, pour m’exhiber, pour se vanter [d’avoir procédé à mon arrestation] ».

13. Quelques jours avant le coup d’Etat, Capriles est apparu devant les caméras de télévision en compagnie des dirigeants de son parti politique Primero Justicia pour réclamer la démission d’Hugo Chávez, des députés de l’Assemblée nationale, du Procureur de la République, du Défenseur du peuple et du Tribunal Suprême de Justice. Suite au coup d’Etat du 11 avril 2002, la première décision prise par la junte putschiste a été précisément de dissoudre tous ces organes de la République.

14. En avril 2002, Primero Justicia, a été le seul parti politique à accepter la dissolution forcée de l’Assemblée nationale ordonnée par la Junte putschiste de Pedro Carmona Estanga.

15. Durant le coup d’Etat d’avril 2002, Capriles a également participé au siège de l’ambassade cubaine de Caracas, organisée par l’opposition vénézuélienne et l’extrême droite cubano-américaine. Henry López Sisco, complice du terroriste cubain Luis Posada Carriles, qui est responsable de plus d’une centaine d’assassinats, dont l’attentat contre l’avion civil de Cubana de Aviación qui a coûté la vie à 73 personnes le 6 octobre 1976, était présent.

16. Après avoir coupé l’eau et l’électricité, Capriles, pensant que le vice-président de l’époque Diosdado Cabello, était réfugié au sein de l’entité diplomatique, est entré et a exigé de l’ambassadeur de fouiller les lieux, violant ainsi l’Article 22 de la Convention de Vienne, stipulant que les représentations diplomatiques sont inviolables.

17. Germán Sánchez Otero, à l’époque ambassadeur cubain au Venezuela, lui avait rétorqué : « Si vous connaissez le droit international, vous devez savoir le Venezuela tout comme Cuba ont le droit d’évaluer la possibilité d’octroyer l’asile politique à tout citoyen dans n’importe quelle représentation diplomatique. Un démocrate, un humaniste, ne peut pas permettre que des enfants soient privés d’eau, de nourriture et d’électricité ».

18. A sa sortie de l’ambassade, Capriles, loin de calmer la foule excitée, a déclaré à la presse qu’il n’avait pas été autorisé à fouiller la représentation diplomatique et qu’il était dans l’impossibilité de confirmer ou d’infirmer la présence de Cabello, attisant les tensions.

19. Pour sa participation au coup d’Etat, Capriles a été mis en examen et mis en détention préventive après s’être soustrait à la justice.

20. Le procureur de la République Danilo Anderson en charge du dossier Capriles a été assassiné en novembre 2004 lors d’un attentat à la voiture piégée.

21. En 2006, Capriles a été acquitté par les tribunaux.

22. En 2008, une nouvelle procédure pénale a été lancée et suit toujours son cours.

23. Suite à son élection en 2008 en tant que gouverneur de l’Etat du Miranda, Capriles a expulsé des installations de la région les fonctionnaires chargés des programmes sociaux mis en place par le gouvernement de Chávez.

24. Dans son programme électoral, Capriles promet de lutter contre la délinquance. Néanmoins, depuis son arrivée au pouvoir à Miranda, l’insécurité a explosé, faisant de l’Etat l’un des trois les plus dangereux du Venezuela. Entre 2011 et 2012, le taux d’homicides a augmenté de plus de 15%.

25. Malgré ce bilan, Capriles, réélu en 2012, refuse toujours l’implantation de la Police nationale bolivarienne sur le territoire dont il a la gestion.

26. Entre 2008 et 2012, Capriles a congédié plus de mille fonctionnaires dans l’Etat du Miranda – qui travaillaient dans le secteur culturel et étaient soupçonnés d’être proches de l’ancien gouverneur chaviste Diosdado Cabello. Capriles a ainsi procédé à la fermeture de dizaines de bibliothèques.

27. En 2012, Capriles s’est secrètement réuni en Colombie avec le général Martin Demsey, chef d’Etat-major des Etats-Unis. Rien n’a filtré de ces discussions.

28. Capriles ne cesse de se réclamer de l’ancien président brésilien Lula da Silva. Néanmoins, ce dernier a apporté à maintes reprises son soutien à Hugo Chávez, notamment lors des dernières élections d’octobre 2012. « Ton triomphe sera le nôtre », avait-il déclaré dans un message d’appui au Président Chávez.

29. Candidat à l’élection présidentielle de 2012, au nom de la Mesa Unidad Democrática qui a regroupé les partis d’opposition, Capriles a perdu le scrutin par plus de 10 points d’écart.

30. En cas de victoire aux élections présidentielles du 14 avril 2013, Capriles a promis l’amnistie à Pedro Carmona Estanga, ancien président du patronat vénézuélien qui avait pris la tête de la junte militaire lors du coup d’Etat d’avril 2002, actuellement en fuite en Colombie.

31. Le programme présidentiel de Capriles est d’essence néolibérale et préconise une accélération des privatisations dans une économie déjà contrôlée à plus de 70 % par le secteur privé, une autonomie et une décentralisation.

32. En cas de victoire de Capriles, l’entreprise pétrolière nationale Petróleos de Venezuela S.A. (PDVSA), ne sera plus contrôlée par le pouvoir politique.

33. Le programme de Capriles prévoit la suspension de l’aide financière qu’octroie PDVSA au Fonds de développement national, lequel finance les infrastructures et les programmes sociaux.

34. Capriles imposera également une augmentation du prix de l’essence consommée sur le marché national.

35. Les réformes agraires réalisées sous le gouvernement de Chávez seront annulées et les terres restituées aux latifundistes.

36. La loi sur la pêche, dont ont bénéficié des dizaines de milliers de travailleurs de la mer, sera également abrogée.

37. Capriles autorisera la culture au Venezuela d’organismes génétiquement modifiés.

38. Capriles se propose « d’incorporer dans le système éducatif primaire et secondaire des thèmes démonstratifs sur la connexion entre la propriété, le progrès économique, la liberté politique et le développement social »

39. Capriles prévoit d’accorder une indépendance totale à la Banque centrale du Venezuela, afin d’éviter tout contrôle démocratique sur les politiques financières et monétaires, et lui « interdira de financer les dépenses publiques ».

40. Capriles a annoncé qu’il mettrait fin à la relation spéciale avec Cuba, ce qui affectera les programmes sociaux dans les domaines de la santé, de l’éducation, du sport et de la culture.

41. Capriles mettra un terme à l’Alliance Bolivarienne pour les peuples de notre Amérique (ALBA), organisme d’intégration régionale.

42. Capriles supprimera le programme Petrocaribe qui permet actuellement à 18 pays d’Amérique latine et de la Caraïbe, soit 90 millions de personnes, d’acquérir du pétrole subventionné et d’assurer leur approvisionnement énergétique.

43. Capriles prévoit de signer des traités de libre échange (TLC), notamment avec les Etats-Unis et l’Union européenne.

44. Capriles prévoit de redonner la concession hertzienne à la chaîne RCVT, qui émet désormais par câble et satellite, malgré sa participation ouverte au coup d’Etat d’avril 2002.

45. Capriles interdira tous les programmes politiques sur la chaîne nationale Venezolana de Televisión, laissant ainsi le monopole du débat citoyen aux chaînes privées.

46. Capriles prévoit de « superviser et contrôler la prolifération des radios […] et de réguler la croissance des radios communautaires ».

47. Le programme de la MUD prévoit de réduire de façon substantielle le nombre de fonctionnaires.

48. Le FONDEN, fonds spécial destiné à financer les programmes sociaux, sera éliminé.

49. Capriles mettra un terme à la régulation des prix qui permet à toute la population d’acquérir les produits de première nécessité.

50. Capriles accuse le gouvernement vénézuélien et la famille d’Hugo Chávez d’avoir occulté la mort de ce dernier. Selon lui, son décès serait survenu avant le 5 mars 2013.

Salim Lamrani

Source : Mondialisation.ca 20 mars 2013

mardi 23 avril 2013

Attentat contre l'ambassade de France à Tripoli (Libye)


Un attentat à la voiture piégée a visé mardi l'ambassade de France à Tripoli, blessant
Devant l'ambassade de France ce 23 avril
deux gardes français dont un grièvement, et provoquant d'importants dégâts matériels, selon une source de sécurité libyenne.
Selon un correspondant de l'AFP sur place, le bâtiment abritant les locaux de la chancellerie a été fortement endommagé et une partie du mur de l'enceinte a été détruite. Deux voitures garées devant l'ambassade sont calcinées. 

Source : AFP 23 avril 2013