Monsieur le ministre et
très cher oncle,
Tu m’excuseras de la
forme ouverte de ma lettre. J’ai beaucoup hésité mais après de longues
réflexions, j’ai jugé cela utile car étant en exil depuis le 11 avril 2011,
c’est le seul moyen pour moi de pouvoir m’adresser à toi. Je voudrais avant de
commencer, même si tu n’as jamais jugé utile de prendre de mes nouvelles, te
dire que je me porte bien, toujours ancré dans mes convictions.
Monsieur le ministre,
permets-moi d’évoquer nos souvenirs communs car même si tout
le monde ne saura pas de quoi je parle, toi et certains de nos proches
respectifs comprendront ma lettre ainsi que sa portée car mon objectif
contrairement à ce que tu pourrais penser n’est pas de t’humilier mais te faire
admettre qu’à force de vouloir être plus royaliste que le roi, tu te
ridiculises tout en faisant honte aux personnes comme moi que tu as introduites
en politique dans les années 2000.
Monsieur le ministre,
te souviens-tu de ce jour où assis à ta terrasse, tu tentais de nous convaincre
de t’accompagner dans la vision politique du Mouvement des Forces d’Avenir (Mfa) ? Un parmi
nous t’avait demandé ce que pouvait nous apporter le ministre Anaky Kobenan et ta réponse
avait été digne, celle d’un homme d’honneur et d’un intellectuel. Tu lui avais
enseigné que « la politique,
c’est d’abord une conviction car faire la politique sans conviction, c’est
comme avoir une arme à feu en main et tirer dans tous les sens sur des êtres
humains ». Tu nous demandais donc ce jour-là de militer au Mfa,
parti politique de gauche non pas pour ce que le
Ministre Anaky pouvait nous apporter mais par conviction et avec la volonté
d’apporter notre pierre à la construction de la Côte d’Ivoire, notre cher pays.
Malheureusement, 13 ans plus
tard, je me pose la question de savoir où se trouve cette conviction dont tu
nous parlais lorsque je lis tes nombreuses déclarations pour le compte du Rdr.
Monsieur le ministre,
n’est-ce pas le même Alassane Ouattara dont tu disais, dans un passé récent,
qu’il était la plus grosse
erreur d’Houphouët-Boigny, qui l’avait fait venir en 1989 et
fait entrer en politique en Côte d’ivoire ?
Ta compréhension de
l’erreur a pu évoluer certainement mais dans ta volonté de te faire accepter au
Rdr comme un militant des premières heures, te pousse à aller trop loin. Certes
au Rdr, les grades se gagnent soit par les armes, soit par les invectives
déversées sur Laurent Gbagbo et ses partisans, mais laisse-moi te dire, cher
oncle, malgré les injures et les insanités que tu déverseras sur le président
Gbagbo et le Fpi, tu ne gagneras jamais la confiance du Rdr. Tu as quitté le Fpi en 1993 pour le Pdci à
l’arrivée du Président Bédié au pouvoir. A la chute de ce dernier, tu as
rejoint Anaky Kobenan au Mfa que tu abandonneras en 2007 suite à son éjection
du gouvernement, pour revenir avec les pro-Gbagbo, afin de demeurer au
gouvernement en tant que ministre des droits de l’homme. En 2010, tu quittes Gbagbo et va poser ton
« nid voyageur » au Rdr. Penses-tu, cher oncle, que
les militants de ce parti te font confiance ? Ils sont certains, et ils ont
raison, que tu les quitteras aussi un jour pour celui qui te donnera le plus à
manger quand ils ne seront plus au pouvoir.
M. le ministre, je ne
crois pas que toi-même, tu ferais confiance à une personne comme toi. Avec un
tel curriculum vitae politique et malgré toutes les promesses que Ouattara a pu
te faire, il ne t’a jamais et ne te confiera jamais un poste de responsabilité
dans l’appareil de l’Etat en dépit de tes compétences intellectuelles. Tu es
juste bon à faire le sale boulot du Rdr : désintégrer au maximum le tissu social. Un poste
qu’il ne confierait jamais à quelqu’un pour qui il a du respect. Ta feuille de
route de porte-parole du RDR t’ordonne-t-elle aussi d’être si ingrat ?
Assurément non !
M. le ministre, comment
expliques-tu cette haine
injustifiée que tu nourris à l’endroit du président Gbagbo, alors que les liens
de famille sur lesquels tu t’appuyais pour qu’il te vienne en aide moralement
et financièrement n’ont toujours pas disparu ? Dois-je
comprendre que pour toi, le lien de famille n’est brandi que lorsqu’il doit te
servir ? Dois-je dire sur la place publique ce que Laurent Gbagbo, le « dictateur
sanguinaire » selon toi, a fait pour ta famille et toi-même lorsque tu es
sorti du gouvernement ? Je te laisse le soin de l’expliquer aux militants du
Rdr et à tous les Ivoiriens lors de ta prochaine prise de parole dans le cadre
de tes activités politiques. Mais n’oublie pas que c’est cet homme, le
président Laurent Gbagbo, que Dieu a utilisé pour préserver ta vie le 09 avril
2011, pendant qu’il était lui-même bombardé dans sa résidence par la coalition « franco-rebelle ».
Aujourd’hui, pour tes intérêts, tu es prêt à tout, au point d’oublier les
souvenirs les plus forts de ta vie familiale et politique. Je voudrais, malgré
toutes tes invectives, te rassurer si tu en as besoin, que pour le peu que je
connais du président Laurent Gbagbo, il n’aura rien dans le cœur contre toi,
s’il apprend tout ce que tu dis, si ce n’est de chercher à comprendre pourquoi
un intellectuel comme toi, a pu tomber aussi bas.
M. le ministre et cher
oncle, tu vas trop loin dans ta
quête de plaire et de convaincre tes nouveaux amis. Il est vrai
que l’homme mangera à la sueur de son front, mais celle que produit ton front
actuellement est nauséabonde et indigne. Je te sais très attaché à la tradition,
alors ne sois pas le « Baoulé de service » car c’est ainsi qu’ils te
perçoivent au Rdr. Je te dis tout cela, non pas dans le but de te recruter mais
pour que tu mettes en pratique les enseignements que tu nous donnais hier,
c’est-à-dire « faire de la politique par conviction », la politique
des débats contradictoires, la politique de vérité, ce métier noble qui
consiste à se mettre au service des autres.
Abandonne, cher oncle,
cette politique qui conduit à insulter, à proférer des mensonges et à semer la
haine dans le cœur de nos concitoyens. Reviens à la politique saine, reviens à
la dignité, non pas pour moi, non pas
pour ces milliers d’Ivoiriens parce que je sais qu’ils comptent peu pour toi vu
ta transhumance aiguë, mais rejoins la noblesse de l’âme à cause de tes enfants.
Dans la Côte d’Ivoire de demain, tes enfants auront la lourde charge de
défendre le souvenir que tu laisseras dans notre pays parce que, dans la Côte
d’Ivoire de demain, la politique ne sera pas seulement la saine appréciation
des réalités du moment mais elle sera aussi la saine appréciation du rôle joué
par tout un chacun dans l’histoire passée de notre pays. Penses-y!
Cher Oncle, si tu as perçu cette lettre comme blessante, sache que cela n’était pas mon objectif. Je suis prêt, cher oncle, à offrir le jour J, quand j’en aurai les moyens, selon la tradition, le bélier aux mânes de nos ancêtres pour t’avoir interpellé publiquement. Vois-tu, cher oncle, au-delà de nos divergences politiques, les liens de sang demeurent et nous aurons, tôt ou tard, l’occasion de nous retrouver en famille et que tu l’oublies ou non, Gbagbo demeure et demeurera ton parent parce que dans les veines de tes petits enfants, coulent aussi le sang de Gbagbo.
Que Dieu bénisse la Côte d’Ivoire et inspire tous ceux qui pratiquent ce noble métier qu’est la politique.
Ton neveu, Stéphane
Kipré, président de l’Union des Nouvelles Générations
en maraude
dans le web
Sous cette rubrique, nous vous
proposons des documents de provenance diverses et qui ne seront pas
nécessairement à l’unisson avec notre ligne éditoriale, pourvu qu’ils soient en
rapport avec l’actualité ou l’histoire de la Côte d’Ivoire et des Ivoiriens, et
aussi que par leur contenu informatif ils soient de nature à faciliter la
compréhension des causes, des mécanismes et des enjeux de la « crise
ivoirienne ».
Source :
Connectionivoirienne.net 17 juillet,
2013
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