Le
président français François Hollande assistera
jeudi à Bamako, en compagnie de plusieurs dirigeants africains, à une cérémonie
"festive" marquant le début du mandat d'Ibrahim Boubacar Keïta à la
tête du Mali. Il est le seul invité non Africain.
Ce chameau est le plus beau jour de sa vie politique. (ph :
lci-tf1.fr)
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Éclat, lustre, prestige
et gloire, il a connu tout cela, François
Hollande, un jour, un seul, le 3 février 2013 : il est devenu le héros de Tombouctou libéré. L'opération Serval est terminée, trois semaines après le début de l'intervention française, la liesse, les cris de joie des Maliens saluent un chef de guerre, quasi-sauveur d'un pays. C'est trop beau, chef de guerre. Chef d'État, pour lui, c'est plutôt la morosité ambiante, la déception croissante de tout un peuple, y compris ses électeurs. À sa descente d'avion, il reçoit en signe de reconnaissance un joli petit chameau couleur de sable gris, immédiatement devenu star internationale sous les flashs des photographes. La pauvre bête blatère en totale panique, à peine si on entend Hollande déclarer avec son fin sourire : « Je l'utiliserai autant que je pourrai comme moyen de transport ».
Tous les chefs d'État
qui ont reçu des bestioles en cadeau d'honneur ont observé le même protocole :
mise en quarantaine, vaccin et transfert au zoo de Vincennes ou autre
ménagerie. Hollande, n'écoutant que son bonheur du moment, le donne à un paysan
malien. Hélas, selon Valeurs
actuelles, la pauvre bête finira découpée en morceaux assaisonnés d'épices
pour finir à la marmite. Mais ce jour-là Hollande n'en finit plus de savourer
sa gloire. En conclusion d'un discours prononcé aux côtés du président malien
par intérim, il conclut : « C'est le
plus beau jour de ma vie... politique. Parce qu'à un moment une décision doit
être prise, elle est grave, elle engage la vie d'hommes et de femmes ».
Seul contre tous
Et voilà que cela le
reprend, transposé, cette fois, à la Syrie. « La France est prête à punir ceux qui ont pris la décision de gazer des
innocents » – gazer des coupables serait plus acceptable ? Il a repris son
air martial, petits poings serrés, mâchoires serrées, il s'y voit déjà, de
nouveau chef de guerre, justicier, héros. Seul contre tous s'il le faut. Il
veut à tout prix retrouver une stature internationale, c'était trop beau, trop
bref au Mali. Prêt à entamer une action militaire, au besoin, avant même que le
Parlement ne se réunisse mercredi. « Une action proportionnelle »,
dit-il. En bon français, c'est le genre dent pour dent, gaz toxiques contre gaz
toxiques, crime contre l'humanité partagé ? Il n'écoute rien ni personne.
Au Mali, la cause était
juste : instaurer la démocratie. En Syrie, il s'agit d'un terrible et sanglant
affrontement religieux : c'est chiites contre sunnites et, comme dans toute
guerre, massacres et atrocités des deux côtés. Le camp des rebelles est
infiltré de djihadistes et probablement de membres d'al-Qaida. Leur but ultime
est d'instaurer un régime islamiste. De cela Hollande ne dit jamais un mot. Il
n'est peut-être pas au courant. Il a cependant conscience qu'à lui seul il ne
renversera pas Bachar el-Assad. Nous sommes tous désemparés, atterrés par
l'horrible attaque aux gaz neurotoxiques du 21 août. Dénoncer un crime contre
l'humanité, oui. Prétendre sévir en bombardant des lieux stratégiques du
pouvoir en place, comme cela fut suggéré, servirait à quoi ? Aggraver le nombre
des morts ? Des djihadistes ? Des représailles du pouvoir en place ?
Une
intervention serait justifiée par la preuve que Bachar el-Assad est celui qui a
donné l'ordre de cette tuerie. À ce moment, il serait légitime de le capturer
et de le faire passer devant un tribunal international. Heureusement que Barack
Obama est beaucoup plus avisé et averti que vous. Notre crainte est que votre
désir d'être porté au pinacle vous inspire d'y aller tout seul. Puisque vous ne
voulez même pas écouter le Parlement. Mais la gloire ne repasse pas deux fois
le même plat. Quant au petit chameau de Tombouctou, emblème de votre triomphe,
c'est vous qui l'avez envoyé à la marmite. Sans le savoir. C'est encore pire.
Par Claire
Gallois
Source :
Le Point.fr 31 août 2013
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