Ancien DG du BNETD (Bureau national d’études techniques et
de développement), nommé ministre de l’Equipement et de l’Assainissement dans
le gouvernement Aké N’gbo, Ahoua Don Mello s’est prêté aux questions de
Africatime. Depuis son lieu d’exil, l’ancien porte-parole du dernier
gouvernement Gbagbo fait des révélations sur les sujets de l’actualité
ivoirienne.
Ahoua Don Mello |
Où vivez-vous actuellement ? Au Ghana, en Guinée
Equatoriale, au Maroc… ?
Je suis un Africain,
je vis en Afrique.
Quel est votre état d’esprit aujourd’hui, après
plusieurs longs mois hors de votre pays ?
En état de
réflexion permanente sur le passé, le présent et l’avenir de l’Afrique.
De quoi vivez à l’étranger ? L’on vous dit à l’abri
du besoin. Vrai ou faux ?
Pas
d’importance. Je suis Africain et je peux servir partout en Afrique.
Qu’est-ce qui vous empêche de rentrer aujourd’hui,
quand on sait que plusieurs cadres de votre parti sont revenus au bercail et
sont moins inquiétés ?
Je ne sais pas
si on parle du même pays et du même régime. Sachez que comme la plupart des
ministres de Gbagbo, un mandat d’arrêt international a été lancé contre moi et
que Gbagbo est en prison à la Haye et 700 innocents sont torturés dans
différents camps de concentration. Toute la haute direction du FPI est en
prison.
N’avez-vous pas votre rôle à jouer dans le
processus de réconciliation nationale ?
Je ne sais pas
jouer sur un terrain surveillé par des chasseurs traditionnels prêts à tirer et
avec des coéquipiers en prison. Si je savais jouer au jeu de chasse, je n’aurai
certainement pas hésité.
Que pensez-vous du dialogue engagé entre le FPI et
le pouvoir d’Abidjan ?
Faire connaître
les attentes du FPI et ses solutions de sortie de crise.
Suite à la crise postélectorale, alors que vous
étiez ministre de l’Equipement et de l’Assainissement et porte-parole du
gouvernement Aké N’gbo, vous vous désolidarisez de vos collègues et prenez la
clé des champs. Pourquoi avez-vous quitté votre pays pour l’exil ?
Je ne sais pas
si vous étiez un observateur de la vie politique pendant la crise ou si vous
racontez une histoire qui vous a été racontée par quelqu’un qui lui aussi a
appris par quelqu’un d’autre. J’ai porté la parole du gouvernement jusqu’au 11
avril 2011 et j’étais là où je devais être pour porter la parole sans les
autres ministres mais en rapport permanent avec le Premier ministre Gilbert
Marie Aké N’gbo et le Président Gbagbo ainsi que les ministres de la Défense,
des Affaires étrangères et de l’Intérieur. Je suis venu en exil lorsqu’un
mandat d’arrêt était en préparation contre moi.
Un exercice de souvenir : Pouvez-vous nous dire
quelle était l’ambiance dans la résidence du président Gbagbo jusqu’à ce que
vous quittiez les lieux ?
Les uns
priaient, d’autres géraient la situation de crise.
L’on a appris que le président Gbagbo aurait
reconnu sa défaite et qu’il s’apprêtait à lire sa reddition à la télévision, et
qu’il a été empêché par son épouse Simone Gbagbo et vous-même, M. Don Mello.
Qu’en est-il ?
Les décisions
étaient prises démocratiquement au sein du gouvernement. Je ne sais pas de quoi
vous parlez.
Quel a été le rôle de la France dans la crise
ivoirienne ?
De maître
d’ouvrage au début, elle est devenue maître d’œuvre et prestataire de service
au profit de M. Ouattara.
Qui des forces onusiennes, françaises et
républicaines ont procédé à l’arrestation du président Laurent Gbagbo ? Y
a-t-il eu des tractations ou pas ?
Exclusivement
les forces françaises. D’abord par bombardement des jeunes patriotes devant la
résidence du chef de l’Etat comme si pour la France les jeunes patriotes
constituaient l’arme lourde du président Gbagbo, ensuite par bombardement de la
résidence, enfin par bombardement du portail et pénétration des chars français
ayant procédé à l’arrestation du Président et sa remise aux forces rebelles.
Dans quelle circonstance est décédé l’ancien ministre
de l’Intérieur Désiré Tagro ?
Tir à bout portant par les rebelles.
Que pensez-vous de la cohabitation entre les alliés du
RHDP actuellement au pouvoir ?
Demandez-leur ce qu’ils en pensent eux-mêmes, chacun
est libre de ses choix et prêt à assumer aussi les conséquences.
Les élections régionales et municipales couplées ont
montré un fort taux de réussite pour les candidats indépendants. Qu’est-ce que
cela explique, selon vous ?
Le peuple a tourné le dos au mensonge, au génocide, à
l’expropriation des biens et des terres, et à la répression des innocents par
des criminels en liberté.
Le boycott de votre parti de toutes les dernières
élections en Côte d’Ivoire (législatives, municipales et régionales) est-il
productif ?
Très productif. Il a confirmé que le peuple est avec
lui et a tourné le dos aux génocidaires.
Pensez-vous qu’Alassane Ouattara soit capable de
résoudre les problèmes des Ivoiriens (santé, éducation, chômage…)
Ce n’est pas sa
préoccupation et la France ne l’a pas installé pour cette mission. Il est là pour garantir les intérêts de la France dans l’UEMOA (Union monétaire
ouest africaine) et ceux de ses financiers de sa longue guerre contre la Côte
d’Ivoire.
Le chef de guerre Amadé Ouérémi de la forêt du Mont
Péko a été arrêté. Faut-il féliciter les autorités ivoiriennes ?
Arrêter les complices, les coauteurs directs et
indirects et libérer les terres des Wè.
Que pensez-vous de la décision des juges de la CPI de
demander des informations complémentaires au procureur Fatou Bensouda ? Cela
veut dire concrètement quoi pour vous ?
Que Gbagbo est innocent au vu du dossier constitué.
Mais comme cela fragilise la position de la France qui a affirmé à l’ONU
qu’elle a vu Gbagbo tirer sur son peuple, elle a pu obtenir une résolution de
l’ONU pour venir exterminer les jeunes patriotes et ouvrir la voie du palais
présidentiel aux chars français remplis de rebelles. La vérité peut avoir des
conséquences graves sur la crédibilité de l’ONU et la responsabilité de la
France dans les 3000 morts ainsi que l’ONUCI qui a procédé au ramassage des
cadavres pour une destination jusque-là inconnue. Il faut donc maintenir
Gbagbo politiquement en prison à défaut de preuves. La recherche des
informations complémentaires est une diversion et une posture politique.
Bensouda a eu l’assistance de l’ONUCI, la Force Licorne, le régime Ouattara et
l’ambassade de France et des Etats-Unis sans résultat pendant deux ans. Que
peut Bensouda pendant six mois ?
Laurent Gbagbo sera-t-il libre dans 10 mois ?
Il est libre de tout crime, le reste est politique. Il
nous revient de faire connaître cette réalité au monde entier pour que Gbagbo
soit libéré.
Le FPI souhaite un rapprochement entre lui et le PDCI,
que pensez-vous de cela ?
C’est dans l’intérêt du PDCI (Ndlr : Parti de Henri
Konan Bédié) de ne pas être complice du génocide et de l’expropriation
économique de ses électeurs, et de se mettre à l’abri du jugement du peuple à
l’heure venue. Et c’est de la responsabilité du FPI de rassembler toutes les
forces politiques et démocratiques pour libérer la Côte d’Ivoire de
l’occupation.
Le ministre du Commerce, de l’Artisanat et de la
promotion des PME, Jean-Louis Billon a fustigé le contrat de cession du marché
de l’extension du 2è terminal à conteneurs du port d’Abidjan au groupe français
Bolloré.
M. Billon ignore
certainement les raisons de l’intervention militaire de la France dans le
conflit et la mission du gouvernement auquel il appartient. Il s’en rendra compte avec le temps.
Les prochaines élections présidentielles se tiennent
dans deux ans, le FPI doit-il participer en proposant un candidat ?
Ce n’est pas à l’ordre du jour tant que les conditions
ne sont pas réunies pour un jeu démocratique inclusif sans des chasseurs comme
arbitres.
Entretien réalisé par le panafricain.com
Titre
original : « Pour Don Mello, "M. Billon
ignore les raisons de l’intervention militaire de la France". »
en maraude
dans le web
Sous cette rubrique, nous vous proposons des documents de
provenance diverses et qui ne seront pas nécessairement à l’unisson avec notre
ligne éditoriale, pourvu qu’ils soient en rapport avec l’actualité ou
l’histoire de la Côte d’Ivoire et des Ivoiriens, et aussi que par leur contenu
informatif ils soient de nature à faciliter la compréhension des causes, des
mécanismes et des enjeux de la « crise ivoirienne ».
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