L’ancien maire de Bouaké, Ibrahima Fanny, a confié
au quotidien Le Patriote (12 juin 2013), proche du RDR, ses impressions
après sa défaite aux dernières élections municipales. Impressions non dénuées
d’amertume, ni de dépit envers ses camarades de parti, y compris le premier
d’entre eux, Alassane Ouattara, auquel il reproche à demi-mot de ne pas
suffisamment reconnaître ses services et ses mérites :
« Je mérite mieux qu’un poste
de PCA. (…). J’ai manifesté le désir de gouverner le district, mais c’est le
chef de l’Etat seul qui décide. Si son choix se porte sur ma personne, tant
mieux. Dans le cas contraire, je n’aurais que mes yeux pour pleurer. »
Comme quoi, de l’aveu même de l’un de ses plus anciens
et plus éminents dignitaires, le système Ouattara n’est qu’une vulgaire mangécratie.
La Rédaction
Interview
Le Patriote : Monsieur le maire, vous
avez perdu les élections municipales du 21 avril. Aujourd’hui dans quel état
d’esprit êtes-vous ?
I. Fanny (photo Ivoire-Presse, par DR) |
Fanny Ibrahima : Pour un
ancien footballeur que je suis, j’accepte les défaites comme les victoires.
Rien ne fait plus mal que lorsque vous avez perdu une finale de coupe
d’Afrique, comme cela a été mon cas à l’époque. Vous comprenez donc que cette
défaite, je l’ai très bien prise.
L P : Dans cet état d’esprit, comment comptez-vous
réorganiser le parti en votre qualité de premier responsable dans la région ?
FI : Il y a la gestion de
la commune et celle du parti pour lequel nous avons tant souffert, souvent même
au risque de notre vie. Mon souci en ce moment n’est pas d’avoir perdu la
mairie, loin de là. Je ne dis pas que c’est un bon débarras. La vérité, c’est
que cette élection municipale a éclaté le parti dans la commune. On a eu
malheureusement un secrétaire départemental qui n’a pas su faire la jonction
entre les militants. Mais tout ça est du passé. Ma préoccupation aujourd’hui,
c’est la vie du parti. Il nous faut reconstruire un RDR fort capable d’aider le
Président de la République à se faire réélire en 2015. Nous qui avons commencé
cette affaire avec Djeny Kobenan et Amadou Soumahoro, savons de quoi nous avons
souffert.
L P : Vous êtes tout de même un militant resté fidèle
au parti. Inutile de le rappeler. Il se murmure dans la ville que le RDR ne vous
a pas été reconnaissant. Qu’est-ce que vous en dites ?
F I : Oui, il faut le dire
tout net. Je pense que je mérite mieux qu’un poste de PCA pour avoir beaucoup
souffert pour le RDR. Mais je ne peux pas dire que le Président Ouattara n’a
pas été reconnaissant à mon endroit. Quelqu’un qui vous sauve de la mort, vous
devez lui êtes redevable à tous les niveaux. Quand je suis tombé malade, c’est
lui qui a bien voulu me soigner. Je lui en suis reconnaissant. Je lui dis pour
cela merci.
L P : Etes-vous prêt à aider le nouveau maire dans la
gestion de la commune ?
F I : Si je suis reconduit
comme responsable du parti dans la région, je ferai tout ce qui est en mon
possible pour approcher M. Djibo Nicolas qui n’est autre qu’un petit frère.
C’est moi qui l’ai conduit chez le Président de la république lorsqu’il a voulu
adhérer au RDR. Il n’a pas été patient. Je pense qu’il aurait pu attendre que
je finisse au moins mon mandat pour qu’ensemble nous voyions la conduite à
tenir. Par ailleurs, toutes les personnalités du parti à Bouaké avaient écrit
pour demander au Président que je sois à la tête du district. C’est
certainement pour cette raison que des gens ayant pensé que la mairie ne
m’intéresserait plus, sont venus dans l’arène politique. En tout cas, j’ai
manifesté le désir de gouverner le district mais c’est le chef de l’Etat seul
qui décide. Si son choix se porte sur ma personne, tant mieux, dans le cas
contraire, je n’aurai que mes yeux pour pleurer.
L P : Justement, quels sont aujourd’hui vos rapports
avec votre successeur ?
F I : Comme je l’ai dit si
bien, c’est un petit frère, très poli, il ne m’a jamais manqué. Je le
reconnais. Je lui ai même déjà écrit pour le féliciter. Mais qu’il sache que la
mairie de Bouaké est un désastre. La preuve, nous avons fait 10 ans sans
salaire. Pendant environ 8 ans, les Forces nouvelles ont géré la commune et
cela, les gens n’en parlent pas et trouvent que nous n’avons pas travaillé.
J’ai financé beaucoup de réalisations de ma propre poche.
L P : Que répondez-vous à ceux qui pensent qu’il faut
apporter du sang neuf à la direction du RDR ?
F I : Je ne suis pas de
leur avis. Amadou Soumahoro est honnête et fait son travail comme il se doit.
Aucune œuvre humaine n’étant parfaite, il a dû commettre quelques petites
erreurs. Ce n’est pas pour autant qu’il faut lui faire un mauvais procès. L’homme
a beaucoup de courage, c’est un véritable tribun. Il est alassaniste. Je ne
doute pas de son militantisme. Moi je ne lui reproche rien. Pour ce qui est de
la région, il faut que nous nous mettions au travail pour ressouder les
fissures en vue de la préparation des élections de 2015.
Réalisée par Coulibaly
Souleymane, correspondant
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