Notre
Voie : Quatre jours après l’emprisonnement de Justin Koua à la Maison d’arrêt
de correction d’Abidjan (Maca), quels commentaires faites-vous de ce qui est
arrivé au secrétaire national par intérim de la Jfpi ?
Nestor Dahi |
Nestor Dahi : Le camarade Koua était le 7 juin au Qg
du parti, en réunion avec les membres de son bureau. C’est là qu’il a été pris
par des éléments du CCDO, sans mandat. Par la suite, il a été conduit à la Dst,
puis à la Maca. Ce qui s’est passé témoigne que nous sommes sous un régime
totalitaire qui n’est pas prêt à céder une parcelle de liberté.
N.V.
: Justin Koua a été accusé de manœuvres subversives. Le pouvoir a soutenu qu’il
a été à la base du récent soulèvement des éléments Frci à Bouaké. Qu’en
dites-vous?
N.D. : Atteinte à la sûreté de l’Etat, manœuvres
subversives… Ce sont des marques déposées pour les partisans de Laurent Gbagbo
depuis que le pouvoir est tombé aux mains d’Alassane Ouattara, le 11 avril
2011. Nous ne sommes donc guère surpris par ces allégations. Mme Gbagbo, Mme
Bro Grébé, M. Abou Drahamane Sangaré ont ces mêmes chefs d’accusation. Ce qui
est amusant dans le cas de Koua est le fait qu’on l’accuse de manipuler les
Frci. Des gens qui ont renversé Gbagbo hier, sont présentés aujourd’hui comme
des alliés du Fpi. Comment est-ce possible ? Je crois que les tenants du pouvoir
font preuve de mauvaise foi. La vérité est que les Frci ont reçu des promesses
faramineuses. Deux ans après l’arrivée d’Alassane Ouattara au pouvoir, ils
constatent que les choses tardent à se concrétiser. Pendant ce temps, certains
parmi eux sont promus à de hautes fonctions aussi bien dans l’armée que
l’administration. Aujourd’hui, ils voient les chefs de guerre qui sont riches
et qui ont plein de réalisations à Abidjan. Il est normal que ces gens-là
songent à revendiquer pour l’amélioration de leurs conditions de vie. Cela n’a
rien à voir avec Justin Koua. Les dirigeants actuels ont décidé d’arrêter Koua
et c’est aussi simple que cela. Sur les attaques d’Abengourou, il a été dit que
les enquêtes étaient en cours. Nous attendions tous les résultats quand on nous
a jeté à la figure que notre camarade a participé à cette attaque. Le pouvoir
utilise la force, mais je crois qu’il y a quelque chose de très important qui
est le retour de l’opinion par rapport à ces agissements. Les Ivoiriens ne
croient pas en ce régime. Plus il continuera de mentir, plus la méfiance
grandira. Koua est un pur produit du Front populaire ivoirien qui, on le sait,
a toujours prôné l’alternance démocratique.
N.V.
: Certains journaux ont parlé d’une opération «Canard» qui devait aboutir au
renversement du pouvoir.
N.D. : C’est dans les journaux que ces tentatives de
coup d’Etat se passent. Encore une fois, nous ne sommes pas un parti de coups
d’Etat. Il faut que cela soit clair.
N.V.
: Comment expliquez-vous que chaque fois, le Fpi soit accusé de coup d’Etat ?
N.D. : Pour moi, c’est de faux complots. On brandit
les coups d’Etat pour arrêter les cadres et militants du Front populaire
ivoirien.
N.V.
: Lida, Akoun, Douati, aujourd’hui Justin Koua. Manifestement le régime est
dans une logique de casser l’opposition !
N.D. : C’est évident. Le pouvoir cherche à faire taire
définitivement l’opposition significative. A la limite, le régime veut une
opposition de collaboration. Or le Front populaire ivoirien est né dans
l’adversité. Cela ne cadre pas avec notre idéologie politique. Ils ne nous
connaissent pas. C’est pourquoi ils croient qu’en arrêtant les Douati, les
Koua, ils pourront arriver à faire taire le parti. Je ne me fais aucun doute
que le Fpi surmontera toutes les difficultés. Koua arrêté, la marche continue.
Il faut que ceux qui sont en face comprennent que nous ne sommes pas nés de la
dernière pluie et que ces agissements ne nous ébranleront pas. Nous avons fait
la clandestinité avant d’être officiellement reconnu. Nous avons une longue
expérience politique et des cadres valeureux pour pouvoir faire face à cette
situation.
N.V.
: Finalement, on est tenté de dire que ça marche bien pour le pouvoir puisque
les arrestations continuent !
N.D. : Regardez bien. Nous sommes en train de conduire
le régime totalitaire sur le terrain de la démocratie. C’est peut-être lent
mais ça avance. Si Justin Koua était arrêté le 11 avril 2011, il aurait été
abattu. Aujourd’hui, il a été certes torturé, mais il n’a pas été tué. A force
d’insister, nous allons faire plier le régime dictatorial de Ouattara.
N.V.
: Vous êtes optimiste alors que presque toute la direction du Fpi est en
prison…
N.D. : Il y a certainement ce qu’on voit qui se
traduit par les actes posés et il y a ce qu’on ne voit pas. Le fait que les
arrestations se multiplient signifie que le régime Ouattara est ébranlé.
N.V.
: Par la force des choses, vous êtes donc le nouveau secrétaire national
intérimaire de la Jfpi. Vous vous y étiez préparé ?
N.D. : Lorsqu’après le 11 avril 2011, nous avons
décidé de prendre le relais de la lutte, nous nous attendions à des situations
plus difficiles. C’est donc en connaissance de cause que nous agissons. Nous
sommes dans une telle disposition d’esprit que rien ne pourra nous freiner. Je
l’ai indiqué plus haut, la Jfpi est un esprit. Justin Koua arrêté, la lutte
continue. Nous maintenons le cap. Cette semaine nous serons en meeting à Akoupé
dans le cadre de l’opération «Eveil de conscience» lancée par le camarade Koua.
Nous allons appeler les Ivoiriens autour de la mère patrie qui est en train de
s’effondrer sous Alassane Dramane Ouattara. Il est important que l’on comprenne
que ce qui est en jeu aujourd’hui, c’est l’avenir de la Côte d’Ivoire. Pour ça,
tous les Ivoiriens doivent se mobiliser. Tout le monde voit ce qui se trame
avec ce régime où le parlement ne sert plus à rien.
N.V.
: Certains ont taxé votre prédécesseur de violent…
N.D. : Je ne partage pas cette façon de voir les
choses. Le camarade Koua dépeint ce qui se passe. Dire que depuis l’arrivée
d’Alassane Dramane Ouattara, les Ivoiriens ne mangent plus à leur faim et
qu’ils côtoient chaque jour la mort, ça n’a rien de violent. A l’université, on
a annoncé un investissement de 110 milliards de Fcfa, mais il n’y a pas de
tables-bancs pour les étudiants. Par ailleurs, les Frci y font régner la
terreur et les étudiants éprouvent des difficultés à se nourrir. C’est tous ces
problèmes que Koua dénonçait. Dénoncer les enlèvements et autres violations des
Droits de l’Homme, ce n’est pas être violent.
N.V.
: Toute la direction du Fpi est en prison. Le parti est donc dans la même
situation que l’Anc en 1963 lorsque Nelson Mandela et ses camarades ont été
arrêtés. Pensez-vous que le Front populaire ivoirien a les ressources
nécessaires pour relever le défi comme l’a fait en son temps l’Anc ?
N.D. : Oui, le Fpi relèvera le défi de l’histoire. Je
vous donne rendez-vous après l’opération « Eveil de conscience » et vous
verrez. Le Fpi est aujourd’hui l’espoir pour la Côte d’Ivoire.
N.V.
: Quel message à l’endroit de ceux qui continuent d’avoir peur du régime en
place ?
N.D. : La peur est derrière nous. Le régime fait
exprès pour maintenir les Frci et les dozos en armes parce qu’il sait
pertinemment qu’il n’est pas légitime. Chaque Ivoirien doit savoir que l’agent
Frci qui est devant lui ne peut rien lui faire. La peur est psychologique et il
faut arriver à la surmonter.
N.V.
: Quelle adresse faites-vous aux populations d’Akoupé pour le rendez-vous de ce
week-end ?
N.D. : Je n’ai pas grande chose à dire. Ce sont les
populations elles-mêmes qui sont venues vers nous au lendemain de l’arrestation
de Justin Koua pour nous demander que la tournée à Akoupé soit maintenue. J’ai
déjà envoyé des émissaires sur le terrain. Au plan organisationnel, tout va
bien. Le Bureau exécutif national n’a pas de raison de ne pas répondre présent.
Nous serons dans les localités prévues et nous entretiendront les populations.
Je demande à tous ceux qui portent Laurent Gbagbo dans leur cœur de sortir pour
démontrer que le Fpi est toujours égal à lui-même.
Interview
réalisée par César Ebrokié - Notre Voie 14/06/2013
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