jeudi 8 août 2013

De l'origine et de la nationalité…

Ces derniers jours, j’ai été surpris d’entendre de la bouche de notre président que les Ivoiriens doivent d’abord se sentir et se savoir Ivoiriens avant de se savoir Baoulé, Dioula, Bété, Akyé, ou Ebrié. Cela m’a laissé perplexe. Se savoir Ivoirien avant de se savoir de sa tribu ou de son clan ou de son ethnie, alors la question qui s’est imposée à moi a été de savoir jusqu’alors à quoi nous sommes-nous identifiés ? La Côte d’Ivoire et encore plus l’Ivoirien n’a rien à apprendre de nouveau sur la notion de Nation. Jusqu’en 1990, les Ivoiriens se sont sentis d’abord Ivoiriens avant d’être autre chose. Pour nous qui avons eu la chance de voyager, partout où nous sommes allés, nous étions d’abord Ivoirien et identifié comme tel. Ni notre ethnie, ni notre tribu n’était connu de l’extérieur. Et que nous dit-on sur l’Américain qui s’identifierait Américain avant de parler de son origine ? Nous avons aussi vécu aux Etats-Unis pendant un certain temps et les gens du Colorado dont Denver est la ville cité, s’identifient plus facilement gars du Colorado qu’Américains. Ne mélangeons pas les choses. L’Américain en face des autres non Américains s’identifie par rapport à son pays, mais dès qu’il a affaire à d’autres Américains, ce qui prime, c’est son terroir d’origine. Le natif de San Francisco se démarque aisément du Texans ou du gars de Floride. Il faut ne pas avoir connu les Américains pour ne pas savoir cela. L’Ivoirien a beaucoup plus de respect pour son drapeau, son pays que certains Américains d’origine mexicaine que j’ai eu à côtoyer.
Donc que l’on ne vienne pas nous étaler des méconnaissances comme savoir. Ce, depuis 1958 et les dernières élections de l’ère coloniale et la renonciation d’approuver l’indépendance en rang dispersé, ce qui a amené les leaders des partis politiques à faire bloc autour de Félix Houphouët-Boigny et de faire le Pdci-Rda un parti unique. Les Ivoiriens se sont dès lors configurés en Nation et cela jusqu’en 1990. La configuration nouvelle que lui a imposée le Premier ministre de cette époque, l’a détourné de cette construction. Parce que ce dernier se définissant homme du Nord et musulman que le reste du pays empêchait de prendre le pouvoir, avec la charte du Nord suscitée, le coup d’Etat de 1999 et les attaques de la nuit du 18 au 19 septembre 2002 ont fini par imposer à l’Ivoirien une identification par rapport à sa région et à son ethnie. Les tueries massives perpétrées par les Dozo et autres mercenaires venus du Nord et les nominations basées sur l’ethnie et les tribus ont poussé l’Ivoirien à ne plus se sentir concerné par la chose nationale. Ainsi, la Nation n’a plus pour les jeunes Ivoiriens d’aujourd’hui le sens fort qui s’accolait à cette notion pour ceux qui allaient le cœur en joie étudier au Lycée Houphouët-Boigny de Khorogo ou à Man, ou à Odienné et même à Bouna, qui étaient parties intégrantes de la Nation ivoirienne et où on se sentait Ivoirien avant d’être Akyé, Ebrié ou Abbey. 

Achegnan Yapo Khossé
Titre original : « De l'origine à la nationalité, comparaison n’est pas raison »
 
 
 
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Source : LGInfos 31 juillet 2013

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