Pendant l’audience de
confirmation des charges dans l’affaire Laurent Gbagbo-Procureur de la Cpi,
Fatou Benssouda et son équipe ont présenté le Congrès National pour la
résistance et la démocratie (CNRD) comme une structure créée par le président
Gbagbo pour tuer les partisans d’Alassane Ouattara. Près d’un mois après ces
accusations, la secrétaire générale du CNRD établit la vérité sur la création
de ladite structure.
Notre Voie : Lors de l’audience de
confirmation des charges contre le Président Laurent Gbagbo à la Cpi, le
procureur a accusé le Cnrd, votre organisation politique, d’avoir été mis en
place pour faire la guerre en Côte d’Ivoire. Que répondez-vous ?
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L'écrivain B. Dadié, président du CNRD et M. Ago |
Agoh
Marthe : Cette image erronée que l’on a voulue donner du Cnrd répond à une
volonté simple : diaboliser le Président Laurent Gbagbo pour justifier sa
présence à la Cour pénale internationale. Le procureur de la Cpi et tous les
autres ignorent tout du combat de Monsieur Laurent Gbagbo et de sa personne.
Nous le leur concédons. En réalité, ce que le Procureur a dit est aux antipodes
de ce qu’est le Cnrd.
N.V : Qu’est-ce que le Cnrd et que
peut-on retenir de sa création ?
Agoh
Marthe : Le Cnrd est une fédération de partis, de mouvements politiques et
d’organisations de la société civile, engagée dans le combat pour la démocratie
en Côte d’Ivoire ; ce vaste rassemblement est dénommé : Congrès
National de la Résistance pour la Démocratie (C.N.R.D). Il est essentiellement
un organe de veille et de promotion de la démocratie. Sa Charte a été approuvée
par ses signataires le 06 mars 2006. Sachez que c’est une idée du Président
Laurent Gbagbo et nous pensons que c’est une dernière vision prophétique
de son long combat.
N.V : Expliquez-vous ?
Agoh
Marthe : A l’audience de la Cpi, le Président Laurent Gbagbo a tenu des
propos qui résument son combat : « La
Démocratie est la voie du salut pour l’Afrique… Toute ma vie, je me suis battu
pour la Démocratie… Quiconque ne respecte pas la Constitution et les lois qui
en découlent n’est pas démocrate. Je suis ici parce que j’ai respecté la
Constitution de mon pays ». Pour réaliser cet idéal démocratique,
Monsieur Laurent Gbagbo s’est donné plusieurs moyens dont le premier est la
création d’un parti politique (le FPI, Ndlr). Par la suite, il a lutté pour
l’avènement du multipartisme, il a prôné la transition pacifique pour
l’accession au pouvoir d’Etat par des élections justes et transparentes. Il a
voulu, il s’est battu pour qu’il y ait une structure autonome et libre qui gère
le processus électoral indépendamment de l’Etat afin qu’il y ait égalité entre
les candidats aux élections. Mais, lorsqu’il est arrivé au pouvoir d’Etat suite
à des élections transparentes et libres en octobre 2000 et, qu’un coup d’Etat
est tenté quelques mois après (7 et 8 Janvier 2001), suivi d’une attaque de
rebelles en septembre 2002, cela lui a fait prendre conscience que la
Démocratie était menacée. C’est alors qu’il met en place une structure mixte
regroupant les différentes organisations sociales, politiques ou non qui
embrassent l’idéal démocratique pour la Côte d’Ivoire. Le Cnrd est donc un
moyen de sauvegarde de la démocratie. Le contenu de l’engagement des
signataires de la Charte du Cnrd est explicite à ce sujet : « Sont parties à la présente Charte,
les organisations politiques et sociales adhérant aux principes des libertés
publiques et aux valeurs républicaines. Les parties contractantes affirment
leur attachement au respect scrupuleux de la Constitution, notamment en ses
dispositions consacrant le mode de dévolution du pouvoir par les élections et
se déclarent opposées à tout recours à la force des armes comme moyen
d’accession au pouvoir. », « Les
parties à la présente Charte s’engagent à agir pour la défense des institutions
de la République, la sauvegarde de la souveraineté nationale, la promotion de
la démocratie, de l’Etat de droit, de la paix et la restauration de l’image de
la Côte d’Ivoire ainsi que de sa vocation traditionnelle de nation ouverte sur
le monde. » (Article 2 et article 3 de la Charte).
N.V : Vous n’avez toujours pas dit en
quoi c’est prophétique…
Agoh
Marthe : Le caractère prophétique réside dans la dénomination du Cnrd. Il est
contenu dans ce mot « résistance ». En nous référant à l’histoire de
la France dont nous sommes les ex-colonisés, la Résistance rappelle
l’opposition des Français à l’action de l’occupant allemand et du gouvernement
de Vichy pendant la seconde guerre mondiale ; un organe fut créé à cet
effet en 1943 : le C.N.R. (Conseil National de la Résistance). Or, au
moment de la création du Cnrd en 2006, le Président Laurent Gbagbo était au
pouvoir, et uniquement une partie de la Côte d’Ivoire était occupée par la
rébellion armée ; il était donc insolite de parler de Résistance. En
revanche, depuis le 11 Avril 2011, l’on saisit mieux la portée d’une structure
telle que le Cnrd.
N.V : Mais pourquoi Laurent Gbagbo
tient-il tant à la Démocratie ?
Agoh
Marthe : Le principe de la Démocratie tel qu’inscrit dans l’article 30 alinéa 3
de la Constitution de la Côte d’Ivoire est : « le gouvernement du peuple
par le peuple et pour le peuple. » Or, Monsieur Laurent Gbagbo qui est un
grand humaniste, respectueux de la dignité humaine, ne peut concevoir qu’on
veuille faire le bien-être d’un peuple contre son gré ; d’où son refus
obstiné de toute prise de pouvoir par les armes, appuyé par ses slogans
favoris : « donnez-moi le
pouvoir pour que je vous le redonne », « Asseyons-nous et discutons ». Un tel homme ne peut
qu’aimer le système démocratique qui privilégie la souveraineté au peuple dans
le choix de ses dirigeants au regard de la politique qu’ils proposent. C’est
fort de cette conviction qu’il a été le premier en Côte d’Ivoire à présenter un
livre-programme de gouvernement dès 1994. Ce qui est extraordinaire, c’est que
le Président Laurent Gbagbo ne s’est pas arrêté aux mots, il a mis en
application ses propos et continue de le faire jusqu’à ce jour. Pour exemple,
dès son arrivée à la tête de l’Etat de Côte d’Ivoire, il a remis la
filière café-cacao entre les mains des représentants des planteurs.
Quoique le pouvoir d’Etat ait été attaqué 3 mois à peine après son élection, le
Président Laurent Gbagbo a engagé des discussions avec presque toutes les
corporations socioprofessionnelles (personnel de Mairie, Enseignants, Médecins,
Corps préfectoral, Diplomates etc.). Le Président Laurent Gbagbo a discuté avec
la rébellion armée qui réclamait « sa tête » ; pour ce faire, il
a consulté le peuple à maintes reprises. Citons à titre d’exemple, la
consultation sur l’accord de Linas-Marcoussis rejetée par la grande majorité du
peuple de Côte d’Ivoire. Et c’est son humilité à supplier le peuple d’accepter
ce « médicament amer » qui assouplit l’ardeur populaire d’en découdre
avec les rebelles qui devraient entrer dans le gouvernement. Il a également
fait une consultation populaire avant l’accord de Ouagadougou. C’est donc dans
la même logique du respect de la volonté du peuple qu’il ne pouvait abandonner
le fauteuil Présidentiel qui venait de lui être confié conformément aux lois de
la République de Côte d’ivoire, et qu’il demandait un recomptage des voix de
l’élection présidentielle de 2010. Par ailleurs, outre l’amour du prochain qui
le pousse à aimer le régime démocratique, Laurent Gbagbo est foncièrement un
homme de paix. Comme ce slogan répété à satiété à l’époque du Président
Houphouët-Boigny, « la paix ce n’est pas un vain mot, c’est un
comportement». Vous constatez avec moi, que durant sa longue lutte politique
dans l’opposition, tout comme dans l’exercice du pouvoir d’Etat, Monsieur
Laurent Gbagbo a toujours utilisé les moyens pacifiques de lutte ; mais
ses adversaires politiques ont toujours tenté, en vain, de le faire apparaître comme
un homme violent, belliqueux ; pensez aux évènements du 18 Février 1992.
Nous espérons que cette fois encore, la sagesse des hommes politiques
triomphera dans l’intérêt général. Enfin, Laurent Gbagbo est attaché à la
démocratie, car c’est le meilleur moyen d’assurer une juste répartition des
fruits de la prospérité nationale à tous les citoyens d’un pays. En effet, dans
une démocratie véritable, telle que conçue dans la Constitution de la Côte
d’Ivoire, « tout être humain a droit au développement et au plein
épanouissement de sa personnalité dans ses dimensions matérielles,
intellectuelles et spirituelles » (article 7 de la Constitution) ;
c’est l’Etat qui assure l’égal accès à ces droits. Par conséquent, si le
détenteur du pouvoir d’Etat ne l’a pas reçu du peuple, comment le peuple
pourra-t-il le contrôler, le sanctionner s’il ne gouverne pas dans l’intérêt
des citoyens ? Pensez-vous que les revendications des populations seront
prises en compte pacifiquement si c’est par la force des armes que l’on accède
au pouvoir d’Etat ?
N.V : Quelle est aujourd’hui la
réalité de la résistance pour la démocratie en Côte d’ivoire ?
Agoh
Marthe : Vous savez, la Résistance dont il est question au Cnrd est une
conscience populaire qui s’oppose à tout régime autre que la démocratie, ainsi
qu’à tout moyen non démocratique de l’exercice du pouvoir. Pour exemple, le
faible taux de participation aux dernières élections législatives en Côte
d’ivoire en est une preuve tangible.
N.V : Ne pensez-vous pas que la
« démocratie » imposée à coup de bombardements en Côte d’ivoire par
les forces Onusiennes et l’armée française a désabusé les démocrates
ivoiriens ?
Agoh
Marthe : Non, le Cnrd a organisé au mois de juin-juillet 2012 des
rencontres avec ses 38 organisations membres pour échanger, et toutes
conviennent de s’inscrire dans les lignes tracées par la Charte, les Statuts et
le Règlement Intérieur du Cnrd. Il est navrant que l’on prenne en mal la
recherche obstinée de la vérité des urnes ; c’est pourtant une exigence
démocratique. Comment voulez-vous que le digne peuple de Côte d’ivoire tienne
pour acquis les résultats provisoires de l’élection Présidentielle 2010
déclarés hors délais par la C.E.I au Q.G d’un candidat et hâtivement
« certifié » par l’Onuci et ce, en lieu et place des résultats
définitifs proclamés par le Conseil Constitutionnel conformément aux normes
constitutionnelles et légales ? Nous supplions les instances nationales et
internationales de ne pas s’offusquer lorsque les démocrates drapés de leur
étendard Laurent Gbagbo posent la question « qui a gagné les dernières
élections présidentielles en Côte d’Ivoire ? » ; question
essentielle et fondamentale pour la conscience collective ; elle mérite
donc une réponse claire et définitive, afin d’assurer à tous un avenir confiant
dans un vrai « vivre ensemble ».
Entretien réalisé par Boga Sivori
Entretien réalisé par Boga Sivori
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Sous cette rubrique, nous vous
proposons des documents de provenance diverses et qui ne seront pas
nécessairement à l’unisson avec notre ligne éditoriale, pourvu qu’ils soient en
rapport avec l’actualité ou l’histoire de la Côte d’Ivoire et des Ivoiriens, et
aussi que par leur contenu informatif ils soient de nature à faciliter la
compréhension des causes, des mécanismes et des enjeux de la « crise
ivoirienne ».
Notre voie
26 Mars 2013
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