Depuis quelques temps, les débats sur le projet de référendum en vue de
modifier l’article 37 de la Constitution pour permettre au Président Blaise
Compaoré d’être candidat à la présidentielle de 2015, virent dangereusement
vers une escalade de la violence. Les militants et dirigeants du parti au
pouvoir ainsi que leurs soutiens multiplient les dérives à travers des propos
tendant à instrumentaliser certains Burkinabè et à les dresser contre tous ceux
qui s’opposent à ce projet de pouvoir personnel et à vie.
L’on peut citer en exemple les propos tenus par un
député du CDP, Salam Dermé, qui dans ses envolées lyriques lors d’un meeting à
Ouagadougou s’est laissé aller à des menaces à peine voilées, faisant savoir à
ceux qui s’opposent au référendum que « « Si les gens ne veulent
pas du référendum, l’on peut revenir à l’état d’avant (état d’exception) car si
ce sont les armes, c’est nous qui possédons les armes… ». Ses propos
en langue nationale mooré sont téléchargeables sur Youtube.
Le comble de cette montée de la tension a été atteint à
Ouahigouya le Samedi 24 mai 2014, où des militants notoirement connus dans ladite
ville comme étant ceux du Congrès pour la démocratie et le progrès (CDP) ont
perturbé une conférence publique animée par le Professeur Luc Marius Ibriga et
contraint les organisateurs à suspendre la rencontre. Ces délinquants, sans
doute instrumentalisés par des maîtres politiques, ont proféré toutes sortes de
menaces sur le conférencier et sur quiconque oserait contester la tenue du
référendum pour réviser l’article 37.
Le même jour dans la nuit, le Juge constitutionnel Salifou
Nébié a été retrouvé mort à Saponé, à une trentaine de Kilomètre de Ouagadougou
sur le même axe où près de 16 ans plus tôt Norbert Zongo et ses compagnons
avaient été assassinés et brûlés. Le corps sans vie du Juge Nébié a été
retrouvé à environ 100 mètres de sa voiture, le crâne fracassé. Cette énième
mort suspecte qui intervient dans un contexte sociopolitique où les menaces se
succèdent doit être élucidée au plus vite.
Plus tôt dans la matinée de ce même samedi 24 mai, c’est
un jeune couturier de 24 ans, du nom de Jacques Bado qui a succombé à des coups
et blessures que lui auraient infligés deux militaires la veille, pour dit-on,
une affaire de vol de portable ou de femme.
L’on se souviendra qu’au mois de mars dernier, un
policier a été abattu avec sa propre arme, par un fou dit-on, sur l’Avenue
Charles De Gaule à Ouagadougou. L’on ne peut passer sous silence cette bien
curieuse affaire Tuina, du nom de cet ancien militaire du Régiment de Sécurité
présidentielle mort dans des conditions suspectes en août 2013, après avoir
tenté d’attaquer le palais présidentiel, selon les sources officielles.
Pourtant son corps a été retrouvé quelques kilomètres plus loin, notamment dans
le quartier Pissy de Ouagadougou.
En outre, des rumeurs circulent à Ouagadougou, sur
l’existence d’une présumée liste noire de personnalités à abattre. Qui sont ces
personnes et à qui profiterait leur élimination physique ?
Pourtant, il n’y a pas longtemps, tous les canaux
médiatiques (radios, télé, journaux, …) étaient mobilisés pour une campagne de
masse en vue de sensibiliser les populations au civisme. Aujourd’hui, après
tant d’actions de résistance citoyenne non violente, de manifestations
pacifiques, sans casses, sans dégâts, (…), les populations ont suffisamment
prouvé leur maturité, leur civisme et leur attachement à la paix. L’incivisme
tant combattu par le gouvernement, est de plus en plus constaté chez ceux-là
mêmes qui nous invitent chaque jour au civisme : crimes économiques et de
sang, impunité, injustice, corruption, … sont autant d’actes inciviques
perpétrés au vu et au su de tous, par nos dirigeants et leurs zélateurs.
Désormais, en matière de civisme, c’est à notre tour d’inviter nos gouvernants,
à prendre le bon exemple sur leurs concitoyens.
Au regard de la dégradation progressive de la situation
nationale, le Balai Citoyen se sent interpellé. Notre Mouvement, qui fonde
toutes ses revendications sur le principe de « non-violence », ne
saurait rester indifférent face à cette montée de l’escalade criminelle qui
risque de précipiter notre pays dans le chaos.
Aussi, Le Balai Citoyen condamne-t-il, avec la plus
grande fermeté, l’assassinat du juge Salifou Nébié et la mise à mort du jeune
Jacques Bado et exige que toute la lumière et la justice soient faites sur ces
affaires troublantes. Il lance un appel à tous les mouvements et organisations
de défense des droits humains, les organisations de la société civile et toutes
les formations politiques attachées au droit à la vie, à un vaste rassemblement
populaire pour exiger vérité et justice sur ces crimes odieux.
De même, le Balai Citoyen dénonce et condamne
énergiquement la montée de la violence dans les propos des dirigeants du parti
au pouvoir dans leurs meetings et les tient pour responsables de toutes les
dérives qui résulteraient des provocations et autres campagnes d’intoxication
et d’intimidation.
Face à cette situation, le Mouvement voudrait ici :
* dénoncer l’interruption de la conférence du Focal à Ouahigouya qui est une
atteinte grave aux libertés individuelles et collectives, notamment la liberté
d’expression et exiger la poursuite des militants zélés du CDP à la base de
cette forfaiture ;
*
tenir le pouvoir pour responsable de toutes dérives violentes ;
*
interpeller l’opinion publique nationale et internationale sur les risques
d’affrontements et de violences du fait de l’attitude du pouvoir et de ses
suppôts ;
*
inviter toutes les forces politiques de la société civile opposées à
l’instauration d’un pouvoir personnel et à vie dans notre pays à se mobiliser
dans un front unique de combat pour imposer la démocratie et le respect des
droits notamment le droit à la vie et à la différence, la vérité et la
justice ;
Tout en félicitant les forces du changement dont la
mobilisation a contraint le pouvoir à repousser les échéances de ses réformes
qui tirent notre processus démocratique vers le bas, le Balai Citoyen les
invite à redoubler d’efforts car le pays est à la croisée des chemins et cela
nécessite que le peuple se mette debout comme un seul homme contre ses oppresseurs.
Le Balai Citoyen saisit cette occasion pour féliciter
les cibals et cibelles ainsi que tous les militants du changement de
Ouagadougou et de Bobo-Dioulasso pour les mobilisations exceptionnelles lors
des dernières manifestations contre les délestages et contre la situation à
l’Hôpital Souro Sanou de Bobo-Dioulasso.
Il les invite à se mobiliser davantage dans les
quartiers et secteurs, dans les écoles et universités, dans les marchés et
yaars, dans l’administration, bref partout sur le territoire national et dans
la diaspora afin d’apporter la riposte à tout projet de confiscation de l’Etat
par quelque groupe ou clan que ce soit.
Le Balai citoyen soutient la campagne anti-référendum
lancée par l’opposition politique et invite tous les cibelles et cibals à
sortir massivement le 31 mai au stade du 4 août pour dire non au énième
tripatouillage de notre constitution.
Notre nombre est notre force !
Ensemble on n’est jamais seul !
Pour le mouvement Le
Balai Citoyen, La Coordination nationale
Titre original : « Balai citoyen : Appel à la
mobilisation contre l’escalade criminelle et pour le changement ! »
Source : Lefaso.net 30 mai 2014
Il est tout à fait dommage de constater que les gouvernants francophones négligent le respect de la Constitution de leur pays. En fait, tous rêvent de devenir rois !
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