jeudi 18 avril 2013

Incident protocolaire à l'aéroport de Senou : Alpha Oumar Konaré empêché d’accéder à la piste d’embarquement


Incroyable, mais vrai : l’ancien chef de l’Etat, Alpha Oumar Konaré, a été empêché par quelques éléments des forces de sécurité d’accéder à la piste, à bord de son véhicule, pour pouvoir embarquer dans l’avion en partance pour Lagos, la capitale fédérale du Nigeria. 
Il était environ 9h30, hier mardi, 16 avril 2013 : le président Alpha Oumar Konaré arrive à l’aéroport international de Bamako-Sénou et, comme à son habitude, se dirige directement vers la piste d’embarquement, après tout le circuit protocolaire dû à son rang d’ancien président du Mali. 
L'ancien président Alpha Oumar Konaré
Pour l’occasion, selon des sources concordantes, il était accompagné de son chef de protocole, qui fait en même temps office de garde du corps et d’interprète anglais-français, Abdel Kader Touré.
Mais, c’était sans compter avec les porteurs d’uniforme en faction, qui l’on empêché d’accéder directement à la piste, comme à son habitude.
Car, comme chacun le sait, il s’agit tout de même de l’ancien chef de l’Etat du Mali, encore en territoire malien.   
Aussi, malgré les protestations de son chef de protocole, qui a souligné avec insistance « le statut d’ancien président de la république » avec les honneurs et privilèges qui lui sont dus à cet égard, les porteurs d’uniforme, susmentionnés, n’ont-ils rien voulu entendre.
« Le président Alpha a été contraint de tuer le temps dans le salon ministériel, en attendant d’embarquer dans le vol d’Asky KT-019 pour Lagos, la capitale économique et fédérale du Nigeria », nous a confié une source digne de foi.
Mais, ces porteurs d’uniforme, selon les mêmes sources, disent avoir agi « sur consigne », sans autre forme de détails sur les autorités à la base de cette mesure qui heurte, d’un certain point de vue, « les sensibilités protocolaires » au plus sommet de l’Etat.
Le président Konaré mérite-t-il ce mauvais traitement sur le sol malien, c’est-à-dire un  manque d’égard protocolaire à son endroit, et qu’est-ce qui peut bien le motiver ? 
Ce qui est sûr, c’est que, malgré la grave crise sécuritaire et institutionnelle que le pays vit depuis plus d’une année maintenant, personne n’a entendu le président Alpha opiner sur la question, ni en bien ni en mal. 
Ce silence est diversement apprécié dans l’opinion nationale, pro ou contre. 
Ses détracteurs vont jusqu’à lui attribuer la cause profonde et lointaine de cette crise : le sous-équipement de l’armée, notamment l’armée de l’air, qui a perdu presque toutes ses ailes (les avions de combat) sous son règne (de 1992 à 2002) ; l’arrivée du général ATT au pouvoir en 2002, alors que l’homme, pour tous ceux qui l’ont connu et côtoyé, n’était pas « à la hauteur de cette mission historique » : diriger un pays comme le Mali. 
Le plus grave, accusent-ils, c’est d’avoir transformé l’armée en « refuge pour fils à papa » avec le résultat que l’on connaît aujourd’hui : 2/3 du territoire national occupé par les groupes rebelles et jihadistes, une année durant, et le pays ne doit son salut qu’à l’intervention de l’armée française, en janvier 2013, qui signe ainsi son retour 51 ans après avoir été chassée, comme un malpropre, par le régime du président Modibo KEITA. 
Alpha lui-même a reconnu son échec sur un point : l’école malienne, tombée plus bas que terre, qui n’est plus que l’ombre d’elle-même, où la médiocrité le dispute au clientélisme.
La gouvernance économique et financière n’est pas logée non plus à meilleure enseigne : une étude réalisée par la Banque mondiale, commanditée par Alpha lui-même en 2002, a conclu à la « corruption systémique » au Mali avec des fonctionnaires « milliardaires ». 
Cependant, comme le disent les Bambaras : Hamadi jô te’a la, o té wèrè ti kun bô (Le Peul n’a certes pas raison souvent ; mais, ce n’est pas une raison pour l’obliger à décamper ailleurs avec son cheptel).
En tous les cas, les autorités de la transition doivent méditer un autre proverbe bambara : Ni i ye min kè cèwla aw taga tô, u be a nyogon sara i la aw segin tô (A chacun son tour chez le coiffeur). 
Mais surtout, elles ne doivent pas perdre de vue cette mise en garde de  M. Martin Niemöller, face à une attitude d’indifférence devant le mauvais sort fait à son prochain :  « Quand ils sont venus chercher les communistes, je n’ai rien dit parce que je n’étais pas communiste. Puis ils sont venus pour les socialistes, et je n’ai rien dit parce que je n’étais pas socialiste. Puis ils sont venus chercher les syndicalistes, et je n’ai rien dit parce que je n’étais pas syndicaliste. Puis ils sont venus chercher les capitalistes, et je n’ai rien dit parce que je n’étais pas capitaliste. Puis ils sont venus chercher les Juifs, et je n’ai rien dit parce que je n’étais pas Juifs. Puis, ils sont venus chercher les chrétiens, et je n’ai rien dit parce que je n’étais pas Chrétien. Puis, ils sont venus chercher les Musulmans, et je n’ai rien dit parce que je n’étais pas Musulman. Puis ils sont venus pour moi, et il n’y avait plus personne pour parler pour moi ».
A bon entendeur, salut… 

Seydina Oumar DIARRA-SOD (info-matin 18 avril 2013)

Source : www.malijet.com

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