jeudi 26 juin 2014

NOTRE HISTOIRE AVEC L’IMPÉRIALISME FRANÇAIS (suite)

LA PRISE DE CONTRÔLE DE LA "LAGUNE ÉBRIÉ", D’APRÈS LE TÉMOIGNAGE D’UN CROISÉ DES TEMPS MODERNES
 
« A 80 kilomètres environ à l'ouest de Grand-Bassam la grande lagune Ebrié, dont les eaux limoneuses s'étendent jusqu'à Kraffy, 40 kilomètres plus loin, se creuse en un vaste port natu40 kilomètres plus loin, se creuse en un vaste port naturel abrité contre les vents du large qui soufflent parfois en tempête dans ces parages.
Au fond de cette baie se trouve le petit village de Dabou, centre du commerce des amandes et de l'huile de palme que les habitants du pays Adioukrou venaient, de temps immémorial, livrer aux traitants Alladians et aux courtiers Ebriés de la grande lagune. Tant que les rapports, établis en 1843 par nos marins de l'Atlantique avec les chefs indigènes, se bornèrent à leur faire des cadeaux, tout fut facile, mais lorsque ceux-ci virent des factoreries, fournies de nombreuses marchandises, venir leur disputer les marchés, ils pensèrent qu'ils s'étaient donné là des concurrents dangereux et leur animosité dégénéra bientôt en une hostilité flagrante qu'il fallut réprimer. En 1853, l'amiral Baudin avait dû infliger aux Ebriés, réunis à Eboué, une correction qu'ils n'oublièrent pas de sitôt. C'est à la suite de cette expédition que fut construit à Dabou par Faidherbe, alors capitaine du génie, le fort qui porte son nom et dont la solide masse de pierre pouvait défier tous les assauts et permettait d'assurer la libre circulation de la lagune. Elle avait aussi le grand avantage de tenir en respect la turbulente tribu des Boubourys, située à peu de distance, et dont l'hostilité toujours en éveil devait donner lieu, dans le cours de l'année 1898, à de tragiques événements.
Le fort Faidherbe avait dû être abandonné en 1870 pour n'être occupé de nouveau qu'en 1892, sous l'administration de M. Ballay, gouverneur de ce qu'on appelait alors la Guinée française et dépendances. A l'époque qui nous occupe, il servait de résidence à l'administrateur commandant le cercle.
 
[…] la fondation des deux postes de Bingerville et d'Abidjan ouvrait à l'évangélisation la tribu Ebrié, jusque-là délaissée.
Cette tribu, adonnée principalement à la pêche, habite un grand nombre de petits villages disséminés çà et là sur les bords de la lagune, à l'ombre d'un bosquet de cocotiers. Les Ebriés avaient toujours été assez réfractaires à notre autorité, et il avait fallu infliger dans le passé quelques sévères leçons à ces écumeurs de la lagune. Nous avons relaté plus haut la correction que l'amiral Baudin dut leur administrer dès 1853, près du village d'Eboué. Depuis cette époque, ils s'étaient toujours obstinément dérobés devant la pénétration européenne, et les débuts de la Mission de Bingerville devaient encore être signalés par une nouvelle marque de leur hostilité. En février 1905, les indigènes du village d'Akouadio [Akouédo], situé à 8 kilomètres à peine, pénétraient en armes dans la capitale sans défense et y massacraient un garde et un colporteur indigènes. Il fallut faire venir de Lahou une compagnie de tirailleurs qui, appuyée par une flottille, enleva le village  d'Akouadio, après une résistance acharnée.
Tels étaient les Ebriés. Leur défiance de l'Européen, unie à la sauvagerie de leur caractère, en rendrait certes la conquête difficile, mais ces considérations n'étaient pas de nature à décourager les missionnaires qui, sous ces dehors un peu rébarbatifs, savaient distinguer l'âme immortelle créée à l'image de Dieu. » 
(Extrait de « La Côte d'Ivoire chrétienne », du R.P. Joseph Gorju, Librairie catholique Emmanuel Vitte, Paris-Lyon 1915 ; pp 25-26 & 146). 

Source gallica.BnF.fr / Bibliothèque nationale de France

2 commentaires:

  1. Je suppose que le livre n'est pas réédité. Cela me ferait plaisir de le lire.

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    1. L'ouvrage "La Côte d'Ivoire chrétienne" est accessible sur le site de la BNF et il est possible de le télécharger gratuitement. Je vous le recommande. Et, tant qu'on y est, vous pourrez y trouver beaucoup d'autres livres très intéressants autour de la même époque.
      Bien à vous
      M. Amondji

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