samedi 14 juin 2014

NOTRE HISTOIRE AVEC L’IMPÉRIALISME FRANÇAIS

 
 
DÈS LE COMMENCEMENT, LA VIOLENCE AVEUGLE ET LA LOI DU PLUS FORT POUR SEULES RÈGLES, EN TOUTE BONNE CONSCIENCE. (La Rédaction)
 

Les Français sur la côte occidentale d'Afrique

GRAND-BASSAM, DABOU, ASSINIE 

En 1838, à la suite de l'exploration du littoral de la côte ouest de l'Afrique, des îles Loos au cap Lopez, par M. Bouët-Villaumez, commandant la Malouine, on décida la création de comptoirs sur la Côte d'Or et sur la Côte-d'Ivoire.
On négocia donc, avec les chefs indigènes, la cession à la France des territoires de Grand-Bassam et d'Assinie.
En juin 1843, la corvette l'Indienne, capitaine Rataillot ; la Malouine, commandée par M. Fleuriot de Langle; l'Eperlan, commandant Darricau, vinrent jeter l'ancre devant Assinie. L'expédition était en outre accompagnée de trois navires de commerce, portant des vivres et un matériel d'installation, plus trente soldats d'infanterie de marine sous les ordres du lieutenant de Montlouis. M. Fleuriot de Langle, chef de l'expédition, entra immédiatement en pourparlers avec le roi du pays, et le 5 juillet le débarquement commença. Il fut long et pénible, à cause de la barre qui ferme l'entrée de la rivière d'Assinie; néanmoins le 22 juillet tout était fini, et la construction d'un blockhaus achevée. Pendant que se terminaient les travaux d'installation, de nouveaux traités étaient signés avec Amatifoux, neveu d'Attacla, roi d'Assinie, Ils nous donnaient la propriété pleine et entière de la presqu'île sur laquelle est établi notre comptoir, et reconnaissaient le protectorat de la France sur toute l'étendue du royaume. On put procéder, le 29 juillet, à la cérémonie officielle de la prise de possession.
Quelques jours auparavant (le 23), une seconde expédition avait quitté Gorée pour aller occuper Grand-Bassam ; elle se composait du brick l'Alouette, capitaine Kerhallet, commandant de l'expédition; de la goëlette la Fine, sous les ordres de M. Méquet, et de trois bâtiments marchands. La flottille arriva le 16 août en vue de Grand-Bassam; le 22, elle franchissait la barre et s'engageait dans la rivière Costa. Six jours après, le débarquement était terminé, un blockhaus construit, et le même jour, 28 août, M. Kerhallet prenait solennellement possession de Grand-Bassam.
"Le commandant E. Bouët-Willaumez attaque et châtie
les peuplades insurgées de Grand-Bassam"
(Colonel Frey, « Côte occidentale d'Afrique », 1890)
Aussitôt que l'on voulut entrer en relations avec les indigènes, on se heurta à l'opposition des habitants de la province d'Akba, qui, par de méchants bruits répandus, et même par des attaques à main armée, voulurent empêcher les populations de trafiquer avec nous. Ils allèrent jusqu'à essayer de fermer la lagune d'Ebrié et la rivière aurifère d'Akba, qui sert de voie de communication avec l'intérieur. En agissant ainsi, les gens d'Akba obéissaient à la crainte de nous voir nous substituer à eux pour le commerce des produits de l'intérieur, dont ils avaient le monopole ; ils espéraient, par leur opposition, nous fatiguer et nous amener à abandonner notre possession. Une attitude aussi hostile méritait un châtiment ; en 1849, M. Bouët se décida à sévir : les cases de Yabou, le village le plus important de la contrée, furent brûlées, et ses habitants condamnés à payer une forte indemnité. Après cet acte d'énergie, on entreprit une exploration dans l'intérieur, afin de rassurer les populations, et le commerce, désormais tranquille, prit une rapide extension.
Trois ans plus tard, une nouvelle leçon devint nécessaire. Les Jack-Jacks du littoral, qui occupent la langue de terre séparant la lagune Ebrié de la mer, servaient de courtiers dans toutes les transactions conclues entre les trafiquants de la côte et les peuplades de l'intérieur. C'était leur seule industrie. Craignant que les Français n'avançassent jusqu'au cœur du pays, ce qui eût causé leur ruine, ils poussèrent à la révolte les habitants d'Ebrié, au nord de la lagune. M. Martin des Pallières, alors capitaine d'infanterie de marine, effraya les Jack-Jacks par une démonstration armée, et châtia les habitants de Grand-Bassam, qui n'obtinrent la paix qu'on payant une somme énorme ; comme garantie de l'exécution de leurs engagements, leur roi Piter fut gardé en otage à bord du navire de l'Etat en station dans la rade.
Cependant les gens d'Ebrié n'étaient pas soumis. Retranchés dans leurs forêts profondes, où nos troupes ne pouvaient les poursuivre, ils continuèrent les hostilités, et, un an plus tard, réussirent à entraîner dans la lutte les habitants d'Akba, de Potou, de Dabou et de Banboury, c'est-à-dire une partie des populations qui nous entouraient. A la nouvelle du soulèvement, le roi d'Assinie, au mépris des traités signés avec nos représentants, se révolta aussi, dans l'intention de détruire notre comptoir et de nous forcer à abandonner son territoire.
Le 14 septembre 1853, le commandant Baudin quitta Gorée avec une colonne forte de sept cent soixante-trois hommes, marins et soldats. Le 10 octobre, il était devant Grand-Bassam. A la vue de nos troupes, les Bassamans vinrent immédiatement faire leur soumission au commandant; on traita avec eux, ils payèrent un tribut, et on leur rendit leur roi Piter. Ils durent en outre nous fournir un contingent et des guides qui conduisirent nos soldats contre le gros des révoltés. Il fallait un châtiment sévère: plusieurs villages furent détruits, entre autres ceux d'Abata, d'Eboué et de Dabou; les habitants, terrifiés par la marche de notre colonne et l'incendie des villages vinrent demander la paix.
De ce côté l'insurrection était entièrement vaincue, et, depuis cette époque, la tranquillité n'a plus, été troublée. D'ailleurs, afin de prévenir toute nouvelle tentative de révolte, on occupa Dabou, point stratégique important, qui commande la lagune et plusieurs villages très riches en huile de palme, dont on accaparait ainsi le monopole. On construisit un blockhaus, et l'organisation de notre nouvelle possession par droit de conquête fut confiée au capitaine du génie Faidherbe.
Restaient les rebelles d'Assinie : c'est le lieutenant d'infanterie de marine Coquet qui fut envoyé contre eux. A son arrivée, il se mit en rapport avec Amatifoux, qu'il convainquit facilement de la folie de son entreprise, le fit rentrer dans le devoir, et reçut, sans combat, la soumission de la population.
Nos deux comptoirs étaient donc pacifiés, et nous venions d'ajouter à nos possessions antérieures un troisième point d'occupation.
Débarrassés des inquiétudes causées par les indigènes, les résidents purent s'occuper des améliorations à apporter à nos établissements; des travaux d'assainissement furent immédiatement commencés : on dessécha et on combla les marais, on traça de grandes voies de communication entre les comptoirs, on remplaça les blockhaus primitifs par des maisons modèles en pierre. Dès 1856, on édifiait à Grand-Bassam un hôpital en briques. A Assinie, les établissements du gouvernement s'élevaient sur la rive droite de la rivière, en face de ceux que l'on avait installés à la hâte lors du débarquement. Le commerce, un instant suspendu par les événements que nous venons de relater, prit l'extension qu'il a toujours conservée depuis.
Telle est, en résumé, l'histoire de l'occupation moderne des établissements français de la Côte-d'Or. 

(Extrait de « Nos petites colonies », par F. Hue et G. Haurigot, H. Lecène et H. Oudin éditeurs, Paris-Poitiers 1887). 

A suivre…

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