samedi 21 juin 2014

2015 : De quoi les montreurs de fantoches ont-ils peur ?

 
« …là où le bât blesse, c’est la présence d’un représentant du chef de l’Etat
qui, en plus, est appelé, sauf changement, à présider la Commission. »
Le moins qu’on puisse dire, c’est que la présidentielle ivoirienne de 2015 se prépare sous de mauvais auspices. Déjà  que la participation du Front populaire ivoirien (FPI) au scrutin était incertaine… En effet, au sein du parti de l’ex-président Laurent Gbagbo, deux camps se dégagent : d’un côté il y a les partisans du boycott pour qui la détention de leur chef dans le centre pénitencier de la Haye, la mauvaise conduite du  processus de réconciliation, la partialité de la justice ivoirienne et même internationale dans les affaires liées à la crise postélectorale, constituent autant d’obstacles à toute participation au scrutin à venir ; de l’autre, il y a ceux qui prônent la reconquête du pouvoir malgré l’absence du leader historique du FPI. Est de cette tendance, le président du parti, Pascal Affi N’Guessan, déjà dans la posture de candidat.
L’autre menace qui plane sur cette élection de 2015, c’est la position du PDCI dont la participation est tout aussi incertaine. Là aussi, deux tendances s’affrontent : l’une, emmenée par un jeune franc-tireur du parti, Konan Kouassi Bertin (KKB), bataille pour une candidature contre l’allié d’hier, Alassane Dramane Ouattara ; une position qui n’est pas pour déplaire à certains vieux caïmans comme Alphonse Djedje Madi, qui piaffe d’impatience de s’essayer enfin à la course vers le palais de Cocody ; l’autre, représentée par des «obligés» du président actuel, préfère accompagner un généreux bienfaiteur dans sa quête de second mandat.
Est de ceux-là Henri Konan Bédié, entretenu comme un coq en pâte par le pouvoir : construction d’un pont à son nom, voyages dans l’avion du chef de l’Etat et autres libéralités présidentielles à l’égard du Sphinx de Daoukro.
A tout ce méli-mélo d’avant-2015 vient s’ajouter cette nouvelle affaire de la Commission électorale indépendante (CEI).
En effet, cette institution, en charge de l’organisation des élections, cristallise contre elle de nombreuses critiques non seulement du FPI mais également d’une partie du PDCI dont des députés ont même saisi le Conseil constitutionnel pour dénoncer la non-conformité de la nouvelle loi avec la Constitution. Mais sans surprise, la requête n’a pas abouti.
Ce qui a autorisé, le lendemain mercredi 18 juin, le chef de l’Etat à promulguer la loi  querellé avec quatre représentants de l’Administration, quatre de la société civile, quatre de l’opposition, quatre du pouvoir et, tenez-vous bien, un représentant du chef de l’Etat dans la Commission, composée de 17 membres.
On n’a pas besoin de sortir des hautes écoles de sciences politiques pour se rendre compte que, par sa composition, cette CEI n’a d’indépendante que le nom.
Passe encore que le pouvoir, en plus de ses quatre représentants, ait les alliés  naturels que sont les quatre représentants de l’Administration. Mais là où le bât blesse, c’est la présence d’un représentant du chef de l’Etat qui, en plus, est appelé, sauf changement, à présider la Commission.
Sauf erreur ou omission, même dans de pareilles institutions taillées sur mesure comme on en connaît dans beaucoup de contrées africaines, on n’a jamais vu le président de la République être représenté ès-qualité. Cette incongruité ivoirienne est d’autant plus problématique qu’Alassane Ouattara se trouve être candidat à l’élection alors que la loi ne prévoit pas de représentant, à titre personnel, de ses challengers ; d’où la fronde légitime d’un certain nombre de députés contre cette représentation inéquitable au sein de la CEI.
Alors si dès l’amont, les prétendants à la course présidentielle ne sont pas sur la même ligne de départ, il va sans dire que l’arrivée est connue d’avance. Et la suite aussi : contestation des résultats avec tout ce que cela comporte comme conséquences pour une Côte d’Ivoire qui ne s’est pas encore tout à fait remise du conflit postélectoral de 2010. Le président Ouattara est bien payé pour savoir que ce sont pareilles iniquités qui font le lit des crises politiques.
Toutes ces entorses  à l’indépendance réelle de la CEI trahissent-elles la peur du candidat sortant de ne pas décrocher le pompon en 2015 ? Dans le cas contraire, procèdent-elles de micmacs politiques visant à lui assurer une victoire à valeur de plébiscite ? 

Adama Ouédraogo Damiss

 
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Source : L’Observateur Paalga (BF) 19 Juin 2014

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