« …Et nous demandons à tous nos camarades en exil d’avoir foi
en l’avenir. »
Notre Voie: Le pouvoir a tenu à organiser les municipales et régionales. Des élections qui ont été boycottées par votre parti. Que vous inspirent ce scrutin et ses résultats ?
Lazare
Zaba Zadi: Il faut dire qu’au regard des résultats officiels, si on prend le
cas de Yopougon, qui a eu un taux de participation de 16%, je crois que, sur le
plan national, c’est le taux le moins élevé. Ne serait-ce qu’au vu de cela, on
peut estimer que le mot d’ordre a été totalement respecté par la population de
Yopougon. 16%, c’est même une surestimation de la réalité. Parce que, dans
certains bureaux de vote, véritablement, les électeurs ne se sont pas déplacés.
Donc nous sommes satisfaits des résultats obtenus.
N.V.: Le Rdr a remporté les législatives à Yopougon. Ce parti vient encore de gagner la mairie. N’avez-vous pas peur que le Fpi perde son bastion au profit du Rdr dans votre fédération ?
L.Z.Z.:
Non, je ne suis pas inquiet du tout. J’aurais été inquiet si les militants
n’avaient pas respecté les différents mots d’ordre aux législatives d’abord et
aux municipales. A partir du moment où les militants ont fait corps avec les
mots d’ordre du parti, moi, en tant que premier responsable du parti, je ne
peux que me réjouir. Je me réjouis du fait que le parti est vivant et les
militants sont mobilisés et sont prêts à répondre aux mots d’ordre du parti.
C’est cela le plus important. Ces députés et maires élus à Yopougon savent
eux-mêmes que les véritables maîtres de Yopougon, ce sont les militants du
Front populaire ivoirien.
N.V.: A peine les élections municipales et régionales prennent-elles fin qu’Alassane Ouattara dit qu’il sera candidat en 2015. Quel est votre commentaire ?
L.Z.Z.:
Je pense qu’il faut éviter de faire la politique fiction. Au niveau du Front
populaire ivoirien, notre souci, c’est, pour l’heure, de restructurer le parti.
C’est vrai que les militants sont là, mais il faut restructurer le parti. Il
faut reprendre toutes les activités, il faut créer toutes les conditions
d’exercice de la démocratie dans nos différentes structures et sur le
territoire ivoirien. Et puis quand le moment des élections va arriver et qu’on
aura dégagé notre candidat, avec la machine électorale qu’est le Front
populaire ivoirien, quel que soit le candidat qui sera en face de nous, nous ne
doutons pas un seul instant que nous allons les remporter.
N.V.: Etes-vous certain de battre Alassane Ouattara qui revendique un taux de croissance à deux chiffres et qui déclare que le pays est en chantier ?
L.Z.Z.:
Si ce qu’il avance était vrai, personne n’allait suivre le mot d’ordre du
boycott du Fpi. Si cela était vrai, dans les différents scrutins, la population
allait se mobiliser pour aller au vote pour choisir les candidats du Rdr. Je
voudrais tout juste rappeler que le Rdr n’a en vérité gagné aucune élection. Si
on prend les législatives partielles, le Rdr a présenté 6 candidats et s’en est
sorti avec zéro. Nous venons, à l’issue des élections municipales, de faire un
constat. Sur l’ensemble des candidats, et c’est une première mondiale dans un
pays, on se rend à l’évidence qu’un un parti au pouvoir qui va à des élections
n’arrive pas à tenir tête à des candidats indépendants qui sont arrivés en tête
du scrutin. Cela veut tout simplement dire que les populations n’adhèrent pas à
toutes ces choses. La population vit sous le poids de la misère en Côte
d’Ivoire. La cherté de la vie n’est pas une vue de l’esprit. Ce n’est pas une
affaire de taux de croissance de tel ou tel chiffre. Ce sont des réalités
concrètes que chacun vit dans sa chair. Et, à ce niveau de la cherté de la vie,
il n’y a pas un parti politique qui tienne. Le Fpi, le Rdr et le Pdci sont tous
touchés et c’est la population ivoirienne dans son ensemble qui souffre
actuellement. Nous ne nous laissons pas abuser par ces histoires de croissance
à deux chiffres. La réalité que vivent les Ivoiriens est totalement contraire à
la croissance à deux chiffres dont on nous parle.
N.V.: Yopougon a été sérieusement touché par la crise. Quel préjudice votre parti a-t-il subi au niveau de son patrimoine dans cette commune ?
L.Z.Z.:
En ce qui concerne la commune de Yopougon, c’est depuis décembre 2010 que la
terreur s’abat sur le Fpi. Le 2 décembre déjà, nous avons subi une première
attaque des militants du Rdr. Le 16 décembre, nous avons subi la deuxième
attaque au cours de laquelle tout notre matériel informatique a été saccagé, le
véhicule de commandement du fédéral a été incendié, tout le mobilier a été
emporté. Et, depuis ce temps, notre siège est occupé par les Frci.
N.V.: Voulez-vous insinuer que le siège du Fpi est actuellement occupé par les Frci à Yopougon ?
L.Z.Z.:
Oui, c’est ce que je dis. Jusqu’à présent, le siège de la fédération Fpi que je
dirige est toujours occupé à Yopougon. Le local qui a servi de Q.G. de campagne
du président Laurent Gbagbo à Yopougon est aussi occupé jusqu’à ce jour. Il n’y
a pas que ces deux locaux, car le terrain qui est la propriété du Front
populaire ivoirien à Yopougon est devenu un camp militaire et abrite une
caserne des Frci. Ce sont des réalités que nous continuons de vivre à Yopougon.
Donc nous demandons aux autorités de faire en sorte que tous ces biens soient
libérés et restitués au Fpi pour que notre parti exerce son droit ; droit qui
nous est conféré par la Constitution.
N.V.: On parle aussi d’un terrain appartenant au Fpi qui aurait été vendu à un opérateur. De quoi s’agit-il ?
L.Z.Z.:
Il s’agit du terrain appartenant au Fpi sur l’espace Ficgayo. Contre toute
attente, ce terrain a été vendu par le maire Bertin Yao Yao à un opérateur
économique. Nous avons effectué des démarches auprès du ministère de la
Construction pour lui signifier que ce terrain nous appartient. Et les
recherches qui ont été menées nous ont donné raison. Mais comme ce maire
fonctionnait en dehors de toute règle, il ne s’est pas ressaisi. Mais je
préviens ceux qui vont acquérir ce terrain-là, car ils le feront à leurs
risques et périls. Parce que le Fpi est un parti politique qui fonctionne selon
les règles. Donc s’il y a des gens qui s’entêtent à occuper ce terrain, ils se
rendront compte que ce site est une propriété du Fpi.
N.V.: Le Fpi étant
dépossédé de son patrimoine, pourrait-on dire que le parti fonctionne dans la
clandestinité à Yopougon ?
L.Z.Z.:
La clandestinité, c’est trop dire, mais je reconnais que les conditions sont
extrêmement difficiles. C’est en cela que je loue le militantisme des camarades
du Front populaire. Parce que, malgré cela, chaque responsable de structure
essaie de tenir des rencontres. Ils essaient, dans la mesure du possible, de
faire vivre le parti. Nos sièges étant occupés, nous sommes obligés de louer
des salles. Et, quand on loue une salle et qu’on revient après, le propriétaire
nous dit qu’il a reçu des menaces. Et, dans le souci d’animer notre parti, nous
allons d’un site à un autre quand des menaces pèsent sur ceux qui nous louent
leurs salles. Agir ainsi n’est pas une manière démocratique d’exercer le
pouvoir. Il ne faut pas empêcher son adversaire de mener ses activités. Nous
déplorons cela et voulons que cela prenne fin, parce qu’au Fpi, nous voulons
travailler pour la Côte d’Ivoire.
N.V.: Le président Laurent Gbagbo, votre leader, est détenu à La Haye. Dans quel état d’esprit poursuivez-vous le combat politique ?
L.Z.Z.:
Il faut dire qu’à Yopougon, nous sommes très nostalgiques de Gbagbo. Parce que
Yopougon est son second village. Donc, quand Gbagbo est à La Haye, ce sont tous
les militants de Yopougon qui souffrent. Mais nous avons vu Laurent Gbagbo le
28 février 2013 s’adresser au monde dans un discours mémorable. Cela nous a
tous redonné de l’espoir. Au-delà de Yopougon, c’est à tous les Ivoiriens et à
tous les Africains qu’il a redonné de l’espoir. Nous sommes avec lui et nous
tenons bon, comme il nous l’a recommandé. A travers Gbagbo, je m’adresse aussi
à tous les autres prisonniers. Notamment la Première Dame Simone Ehivet Gbagbo,
le président Pascal Affi N’Guessan, Sangaré Abou Drahamane. Et nous demandons à
tous nos camarades en exil d’avoir foi en l’avenir. Nous comptons sur eux, nous
les portons dans nos cœurs et nous pensons que Dieu fera qu’ils reviendront
très bientôt parmi nous.
Propos recueillis par Benjamin Koré
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informatif, ils soient de nature à faciliter la compréhension des causes, des
mécanismes et des enjeux de la « crise ivoirienne ».
Source :
Notre Voie 29 mai 2013
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