Fantoche et heureux. Le "président" de la "Communauté internationale" au milieu de ses sicaires |
Au
cours des mois récents, nombre de violences internationales ont retenu l'attention
des médias, mais n'ont guère mobilisé les diplomaties au-delà de mesures symboliques
qui ne les ont pas empêchées de se déployer. On ne négocie plus, ou à vide. La
diplomatie internationale se limite à des protestations et à des dénégations;
unilatérales. Dérive inquiétante face à des conflits qui, pour l'instant,
demeurent de basse intensité, sauf pour les civils exposés à de grands
massacres.
S'il ne s'agissait que de rendre une vraie justice, la CPI n'aurait que l'embarras du choix... |
Alors
que, depuis des décennies, des efforts considérables ont été entrepris pour
prévenir le retour des massacres et réprimer leurs auteurs, aujourd'hui,
qu'observons-nous ? L'absence de la Cour pénale internationale (CPI) face aux
atteintes massives au droit humanitaire qu'elle a pour objet de sanctionner.
En Libye, en Irak, en Syrie, à Gaza, saisie ou non, elle est impuissante. Or le
statut de Rome a été adopté, en 1998, sous la pression de la société civile
internationale qui s'en faisait l'expression. On peut pour chaque conflit
trouver une explication, comme les obstacles à sa saisine : imagine-t-on traduire
M. Nétanyahou, qui démontre son dédain à rencontre du droit humanitaire, devant
la CPI ?
Mais le mal est plus profond.
Il tient à la nature même de la CPI, vouée à devenir une nouvelle Société des
nations, construite sans bases solides ni moyens d'action. Comment une Cour
sans appui coercitif d'une police internationale, qui suppose, pour fonctionner,
la coopération des Etats dont les responsables peuvent être poursuivis, dont
la conception même a reposé sur la méfiance à l'égard du Conseil de sécurité, pourrait-elle
être efficace ? Sans moyens d'action : enquêtes impossibles sur des terrains de
bataille, mandats d'arrêt inexécutés, procédures transformant chaque procès en
feuilleton judiciaire, témoins qui se dérobent.
Ce n'était pas être étroit,
pessimiste, voire réactionnaire que de prévoir un tel aboutissement, et de ne
pas voir dans la CPI une avancée formidable du droit international. On a
critiqué ceux qui en doutaient. Ils se consolaient avec Stendhal écrivant que
tout bon raisonnement offense. Sans glaive et sans balance, la CPI est vouée à
des procès résiduels d'opposants livrés par leurs gouvernements. Avant elle,
des tribunaux pénaux spéciaux (ex-Yougoslavie, Rwanda), institués par le
Conseil de sécurité et appuyés sur son autorité, ont fonctionné et condamné à
juste titre – mais leurs incriminations ont visé les vaincus plus que les
vainqueurs.
Une
coûteuse inutilité
Le fantoche et son apprenti (de G à D) |
La justice pénale suppose
une société politique consensuelle, appuyée sur la force publique. D'où le
dilemme de la justice internationale pénale dans la société internationale,
société polémique qui peine à devenir une société politique. Ou bien elle est
borgne, une justice de vainqueurs qui intervient après la bataille – glaive
sans balance. Ou bien elle est impartiale, indépendante – mais alors elle est
une balance sans glaive, incapable de se saisir des accusés pour les juger. La
CPI cumule ces deux défauts : si elle fonctionne, elle oublie de regarder sur
le côté si les personnes poursuivies ne sont pas les seules qui devraient
l'être. Si elle ne fonctionne pas, elle est d'une coûteuse inutilité.
Les victimes collatérales
sont le droit humanitaire, violé sans réaction, et le droit international,
exposé à l'opprobre, alors qu'il est organisateur de la société internationale
et instrument de sa gestion. Encore faut-il ne pas le confondre avec
l'idéologie juridique qui le fourvoie dans des aventures déclaratoires et
improvisées.
« Sans
glaive et sans balance,
la CPI est vouée
à des procès résiduels
d'opposants livrés
par leurs gouvernements. »
|
La
CPI ne peut être une alternative au Conseil de sécurité, mais son complément.
Le droit international est un droit politique et la politique n'est pas soluble
dans le droit. Construire des institutions sans bases politiques est voué à
l'échec, et c'est bien le triste sort qui menace la CPI. Espérons que nous nous
trompons !
Serge SUR (Professeur émérite à l'université Panthéon-Assas)
(*) - Titre
original : « La CPI,
une juridiction qui ne fonctionne pas »
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des Ivoiriens, ou que, par leur contenu informatif, ils soient de nature à
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crise ivoirienne ».
Source : Le Monde 7 août 2014
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