Jean Metellus, médecin, linguiste et poète haïtien, est mort le 4 janvier
2014. Il était né le 30 avril 1937 à Jacmel (Haïti). Après des études
secondaires au Lycée Pinchinat de Jacmel, il enseigne d’abord les mathématiques
au Lycée Célie-Lamour de sa ville natale entre 1957 et 1959, l’année où, fuyant la dictature de François Duvalier, dit Papa Doc, il émigre en France. Il y poursuit ses études à la
Faculté des Sciences de Paris, puis à la Faculté de Médecine de Paris. Docteur
en Médecine en 1970 et Docteur en Linguistique en 1975, il conjugue
harmonieusement ses deux spécialisations dans son quotidien médical et
littéraire qui lui ont valu la reconnaissance de sociétés savantes.
Marié à Anne-Marie Cercelet-Métellus, normalienne originaire de Metz, et père
de trois enfants, Jean Métellus était médecin des Hôpitaux de Paris et exerçait
au Centre Hospitalier Émile Roux en tant que neurologue spécialiste des
troubles de la parole. Il était aussi professeur au Collège de Médecine des
Hôpitaux de Paris.
Conjuguant avec bonheur sa profession de neuro-linguiste et ses multiples
activités littéraires de romancier, poète, dramaturge et essayiste, Jean Métellus était lauréat
de l'Académie de Médecine en 1973, 1976, 1984 et de trois prix littéraires qui
lui ont été décernés en 1982, 1984 et 1991.
D’après L’Humanité du 6 Janvier 2014
La deuxième mort de
Charlemagne Péralte
(Un aticle de J. Métellus)
C'est
ainsi que Leslie Manigat, ancien président constitutionnel d'Haïti de février à
juin 1988, professeur des universités, qualifie le reniement du prêtre
Jean-Bertrand Aristide.
"Le
cadavre de Charlemagne
fut
crucifié et accroché à une porte…" |
Charlemagne Péralte, le héros de la
résistance haïtienne à l'occupation américaine de 1915 à 1934, reste
inoubliable dans la mémoire des Haïtiens. Par son action et sa détermination,
il a contraint les marines à une lutte difficile et meurtrière contre la
guérilla rurale en Haïti. Nous n'avons pas besoin de rappeler ici que les
troupes américaines en débarquant en Haïti se sont tout simplement emparées des
500.000 dollars de la banque haïtienne qui constituaient les réserves du pays
et que ces troupes ont tué près de 20.000 Haïtiens durant leur séjour pour
pacifier le pays ; nous nous contenterons de souligner que Jean-Bertrand
Aristide a centré sa campagne électorale de 1990 sur le nom de ce héros,
symbole de la fierté et de la dignité de l'Haïtien, à tel point qu'il signait
ses lettres, proclamations et appels « Charlemagne Péraltement ».
Cette expression était d'autant plus bienvenue que l'occupant américain ne
lésina pas sur les moyens d'immortaliser malgré lui ce rebelle : le cadavre de
Charlemagne fut crucifié et accroché à une porte par ses bourreaux le 1er
novembre 1919.
Après le coup d'État du général Cedras,
qui le contraignit à quitter le pays, Jean-Bertrand Aristide a sollicité et
contribué à imposer un embargo dramatique à ses compatriotes, paralysant le
commerce et acculant nombre d'Haïtiens à une mort lente.
Ramené dans le pays par plus de 20.000
marines le lundi 19 septembre 1994, appelé désormais « le lundi noir des
patriotes », réinstallé dans le fauteuil présidentiel le 15 octobre
suivant, Jean-Bertrand Aristide, qui prétendait transformer la misère en
pauvreté digne, a bel et bien participé à la seconde mort de Charlemagne
Péralte. Il raya désormais ce nom de son vocabulaire et n'évoqua plus jamais
cette grande figure de notre histoire.
Nous voilà donc en présence d'un homme
sans conviction, prêt à tous les compromis pour jouir du pouvoir et parader. Il
n'a reculé devant aucune humiliation pour faire d'Haïti le Congo des Amériques,
selon l'expression de l'ambassadeur de Colombie.
Cet homme a transformé son pays en plaque
tournante de la drogue, profitant personnellement de la manne financière
qu'apporte ce trafic. Critiqué par les étudiants, par les journalistes, par
toutes les couches de la société, il n'a pas hésité à faire entrer ses « chimères »
à l'université, provoquant des morts et des blessés.
Sous son gouvernement, le pays s'est
enfoncé dans la misère économique. L'euphémisme de PMA pour désigner les pays
les plus pauvres convient mal à la fierté de ceux qui sont conscients d'être
les descendants des habitants de la perle des Antilles.
Prenant exemple sur le courage de Charlemagne
Péralte, les Haïtiens doivent faire preuve d'un sursaut de patriotisme. Nous
devons nous relever en corrigeant la déchéance géophysique de la déforestation,
du déboisement catastrophique, de l'érosion galopante, de l'aggravation de la
sécheresse, de l'asséchement des rivières, des avancées de la salinité dans les
sols de plaine, des progrès de la désertification. Il faut éviter la débâcle
économique, penser à l'alimentation de tous, à la possibilité de produire
encore du bon café, de la canne à sucre et des denrées pour l'intérieur et
l'exportation. Nous devons penser à alphabétiser véritablement le peuple et à
relever le niveau de l'enseignement.
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