lundi 14 janvier 2013

Le projet de naturalisation de 4 millions de Burkinabè dans le prolongement du complot de Marcoussis-Kléber

Le pouvoir Ouattara se propose de procéder à la naturalisation de plus de 4 millions de Burkinabè vivant sur le sol ivoirien. Un vieux projet habillement exprimé en termes de «droit du sol» par le mentor du Rdr dans l’Annexe des accords de Linas-Marcoussis sur la naturalisation des Etrangers en Côte d’Ivoire. Mais ce projet, conçu à l’attention de la diaspora burkinabé n’intéresse pas vraiment les «bénéficiaires forcés». Comme si la crise ivoirienne qui a déchiré la sous-région ne suffisait pas, le régime Ouattara se préparerait encore à exposer les étrangers vivant en Côte d’Ivoire. Particulièrement les Burkinabè. En effet, le pouvoir propose à plus de 4 millions de Burkinabè vivant sur le sol ivoirien depuis longtemps de leur offrir «gracieusement» la nationalité ivoirienne. Un vieux projet exprimé par le mentor du Rdr depuis 2003, dans l’Annexe des Accords de Linas-Marcoussis sur la naturalisation des Etrangers en Côte d’Ivoire. Il suffit de lire ledit document pour comprendre les origines de la loi que Ouattara veut faire adopter à l’Assemblée nationale, contre l’avis des Ivoiriens. Dès l’amorce du texte, il est mentionné que :
  • « La Table Ronde estime que la loi 61-415 du 14 décembre 1961 portant code de la nationalité ivoirienne modifiée par la loi 72-852 du 21 décembre 1972, fondée sur une complémentarité entre le droit du sang et le droit du sol, et qui comporte des dispositions ouvertes en matière de naturalisation par un acte des pouvoirs publics, constitue un texte libéral et bien rédigé».
Mais une loi «libérale et bien rédigée» ne suffisait pas à Ouattara. Aussi les Accords de Linas-Marcoussis, imposés au Président Laurent Gbagbo sous la pression de Jacques Chirac le 24 janvier 2003, sont arrivés à la considération qui suit :
  • «La Table Ronde considère en revanche que l’application de la loi soulève de nombreuses difficultés, soit du fait de l’ignorance des populations, soit du fait de pratiques administratives et des forces de l’ordre et de sécurité contraires au droit et au respect des personnes ».
Des arguments pernicieux

Après avoir ainsi noirci le régime en l’accusant de non respect des droits et des personnes les soi-disant experts français qui ont élaborés les Accords et leur annexe ont insisté sur le fait que :
  • « La Table Ronde a constaté une difficulté juridique certaine à appliquer les articles 6 et 7 du code de la nationalité. Cette difficulté est aggravée par le fait que, dans la pratique, le certificat de nationalité n’est valable que pendant 3 mois et que, l’impétrant doit chaque fois faire la preuve de sa nationalité en produisant certaines pièces. Toutefois, le code a été appliqué jusqu’à maintenant ».
Et les auteurs de l’Annexe des Accords de Linas-Marcoussis sur la naturalisation des Etrangers en Côte d’Ivoire de proposer, de façon sournoise, le bradage de la nationalité ivoirienne en ces termes :
  • « En conséquence, le gouvernement de réconciliation nationale… relancera immédiatement les procédures de naturalisation existantes en recourant à une meilleure information et le cas échéant à des projets de coopération mis en œuvre avec le soutien des partenaires de développement internationaux ».
Pour accomplir le projet, les concepteurs de l’annexe des Accords de Linas-Marcoussis ont exigé ce qui suit : Le projet, conçu dans un but électoraliste, visait, dès 2003, à évoquer « la xénophobie » et « l’exclusion » pour entretenir la confusion, dans le but de proposer la nationalité ivoirienne à tous les Burkinabè vivant en Côte d’Ivoire, pour que ceux-ci servent de bétail électoral à Ouattara, le moment venu. C’est ainsi qu’à la suite de Marcoussis, le « gouvernement de réconciliation nationale » a reçu pour mission de « donner un mandat impératif » au Parlement pour lui faire adopter le texte. Mais cette disposition sera rejetée par les députés de tous bords, qui n’entendaient pas vendre la nationalité ivoirienne comme au marché sur des étals.

Les Burkinabè dignes et fiers de leur patrie, pas intéressés

En fait, si le projet n’a pas vraiment prospéré et n’a, à vrai dire, pas grand chance de le faire dans un débat ouvert et démocratique sur la nationalité ivoirienne, c’est que ceux à qui Ouattara propose le « deal » ne sont pas vraiment intéressés par la nationalité ivoirienne, dans les conditions qui sont celles du contexte de ce projet. En effet, la vraie communauté burkinabé, à dissocier des aventuriers de guerre et autres mercenaires comme Amadé Ouérémi, a payé, tout comme le peuple ivoirien, un lourd tribut à cette guerre imposée pour pousser Ouattara au pouvoir. Déjà suffisamment intégrée en Côte d’Ivoire, cette communauté, que le Rhdp a tout fait pour opposer aux Ivoiriens par des discours haineux qui visaient à saper la cohésion sociale et la coexistence pacifique, a déploré, comme son hôte, la tragédie vécue ensemble, sous les bombes de l’armée française. La majorité des « Hommes intègres » généralement fiers de leur nationalité burkinabé, n’étaient pas demandeurs de la nationalité ivoirienne. Les Burkinabè dignes et fiers de leur patrie ne sont pas intéressés par cette démarche qui tend à les présenter comme des quémandeurs de la nationalité ivoirienne. Qui plus est, les Burkinabè de Côte d’Ivoire connaissent les dispositions légales qui permettent aux Etrangers – et qui ont déjà permis à plusieurs d’entre eux – d’avoir la nationalité ivoirienne. A vrai dire, les débats sur la naturalisation des Burkinabé de Côte d’Ivoire relève d’une manipulation juridico-politique entretenue par un discours haineux qui pousse à la division. La politique du « rattrapage des gens du nord » au plan national, issue de la Charte du nord qui divise la Côte d’Ivoire en deux, nous fournit la preuve que le régime Ouattara ne prospère que dans la haine et la division. Certes, Ouattara et ses parrains occidentaux réussiront à instrumentaliser certains membres de la communauté burkinabé de Côte d’Ivoire pour les pousser aux heurts avec les frères Ivoiriens, en récupérant des litiges fonciers et des différends de divers natures qui datent, pour beaucoup, de l’ère Houphouët-Boigny ou Bédié.
Un aspect qui soulève une autre question sensible : le code foncier. Sur lequel nous reviendrons. Mais la vérité sur ce projet du nouveau code de nationalité, qui gêne au plus haut point les « bénéficiaires » est que, de façon générale, ils n’en sont pas demandeurs. Il y a seulement que Ouattara, conscient qu’il est minoritaire et impopulaire en Côte d’ivoire, veut les instrumentaliser à des fins inavouées.

Maurice K. Kouassi


en maraude dans le Web
Sous cette rubrique, nous vous proposons des documents de provenance diverses et qui ne seront pas nécessairement à l’unisson avec notre ligne éditoriale, pourvu qu’ils soient en rapport avec l’actualité ou l’histoire de la Côte d’Ivoire et des Ivoiriens, et aussi que par leur contenu informatif ils soient de nature à faciliter la compréhension des causes, des mécanismes et des enjeux de la « crise ivoirienne ».


Source : Le Temps 28 Novembre 2012

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