On peut
imaginer que M. Alassane Dramane Ouattara a une mauvaise image de lui-même. Il
est, on peut l’imaginer, frappé par le « syndrome de
l’imposture » : un sentiment d’avoir usurpé sa place, assorti de la
peur d’être démasqué un jour… ». L’actuel président de la Côte d’Ivoire
est à la barre par la volonté de la fameuse « communauté internationale »,
et il rempile sous les applaudissements de ses soutiens français. Les
prédécesseurs de François Hollande, notamment Chirac et surtout Sarkozy, ont
usé de l’humiliation comme stratagème pour disqualifier les acteurs de
l’échiquier politique ivoirien en donnant un positionnement plus conséquent à
leur protégé Alassane Dramane Ouattara. L’on s’en souvient encore, les
bombardements du palais présidentiel ivoirien, une semaine durant par l’armée
française ont eu raison de Gbagbo qui avait cru naïvement à la force du droit. Mais
le droit n’existant pas pour les petits pays, Ouattara a donc été fait
président par les chars français.
Sa
réélection est une victoire à la Pyrrhus. Mais ce président aura besoin de
cette flamme, cet élan populaire, de l’enthousiasme du quidam ivoirien pour
réaliser son programme, si tant est qu’il en ait réellement un, celui sans
doute concocté dans la précipitation par ses conseillers
« françafricains ». L’observateur le moins avisé des réalités
ivoiriennes constatera aisément que les Ivoiriens ne sont pas vent debout
derrière le nouvel élu. Le programme le plus cher à Monsieur le président
n’est-il pas le « rattrapage
ethnique ? » Il l’a crié haut et fort à travers le pays ;
mais les censeurs français l’ont-ils entendu ou lu ? La presse française ne
s’est pas non plus précipitée pour des « mises en garde » dont
elle a le secret.
La plupart
des médias français, notamment France24,
Le Monde, La Croix… ─ il n’est point inutile de
s’en étonner ─ ont toujours accompagné
Ouattara dans sa quête, quel qu’en soit le prix, du pouvoir en Côte
d’Ivoire. Le quotidien La Croix (du mardi 27 octobre), en sa
page 10, affirme « La Côte d’Ivoire
attend confirmation de la réélection du président Ouattara », avec une
analyse condescendante de la situation du Pays. Tout le monde sait, du moins
ceux qui s’intéressent au sort de ce petit pays, que les dés sont pipés depuis
le décès du premier président de la Côte d’Ivoire. Jean Karim Fall sur France24, le 26 octobre, dans son
édition de 17h30, se satisfait du taux de participation qu’il estime être à 60
%. C’est un mensonge éhonté. Dans son propos, ce journaliste semblait nous dire
que la hantise de la CEI était l’abstention record… Celle-ci d’ailleurs est une
certitude. La machine à désinformer dont ce journaliste est l’un des rouages
excelle dans l’art de la triangulation. Le quotidien du soir, Le Monde (du 27 octobre) en sa page 6,
écrit : « Le scrutin
présidentiel ivoirien s’est déroulé dans le calme ». Le calme apparent
peut être vu sous des prismes différents. La réalité est la suivante : « Nous avons tous des cartes
d’électeur, mais personne n’ira voter… Celui qui est ici est l’homme des
étrangers… »1. C’est en ces termes que
les Ivoiriens auxquels un quelconque journaliste tend un micro crient leur
exaspération.
Tout a été
mis en œuvre pour empêcher l’opposition de s’exprimer. C’est la
« stratégie de la terreur » qu’utilise le pouvoir actuel pour intimider
et s’imposer. Le meeting de l’opposition du 26 septembre 2015 a été interdit et
dispersé avec brutalité : grenades lacrymogènes, fusils d’appoint et
autres apparat de frayeur étaient de sortie ce jour-là. Le meeting exigeait « la libération des prisonniers
politiques et des règles du jeu transparents et équitables »2. Ces propos paraissent
plus crédibles que ceux rapportés par des journalistes coiffés de la mitre de
« spécialistes de l’Afrique ».
La CEI
(Commission électorale « indépendante ») dirigée par le même
président qu’en 2010, Youssouf Bakayoko, accompagné dans sa tâche par son
neveu, le ministre de l’Intérieur Hamed Bakayoko, pondront dans les jours à
venir un taux de participation et un score « officiels » qui
satisferont aux normes acceptables par ladite communauté internationale.
F. Hollande,
qui a rencontré Ouattara au cours de cette année d’élection, ne disant rien,
donc consentant quant à la gouvernance en cours en Côte d’Ivoire. « Lorsque l’image est forte, elle vit
d’elle-même et peu importent les démentis, les dénégations et les explications. »3 Cette élection est une mascarade. Maintenant que
la victoire lui est acquise sans heurts, comme disent ses supporteurs et les
fameux observateurs internationaux, que va-t-il en faire ?
Ouattara
dispose de tous les leviers. Mais sa victoire ne règlera pas les multiples
fractures sociales et les meurtrissures que son irruption sur l’échiquier
politique ivoirien a induites. La pauvreté est de plus en plus visible. Le
chômage reste chronique alors que les médias nous annoncent constamment le
niveau du taux de croissance qui avoisine les 10 %. Ces annonces, distillées à
tout va, cachent l’incompétence de cet ex-fonctionnaire international dont les
médias français ne tarissent pas d’éloges. Les étudiants se plaignent du manque
scandaleux de moyens de travail alors que les chefs « Comzone », les
ex-rebelles disposant toujours de leur arsenal de guerre, exhibent
ostensiblement leur aisance financière.
La
réconciliation peut attendre ! Les tensions ethniques savamment
entretenues par le pouvoir minent la société. Le slogan « rattrapage ethnique » est
florissant. C’est un scandale ! Voici ce qu’en disent certains
Ivoiriens : « Pour réussir aux
concours désormais, mieux vaut avoir un nom dioula car, quand on examine les
résultats, ils trustent pratiquement tous les postes »4. Le
pouvoir actuel veut déconstruire pour reconstruire à sa guise. Au lieu de
dépasser les clivages ethniques pour construire un « vivre ensemble »
plus harmonieux, Ouattara continue de construire les murs dans les têtes. Au
lieu de rassembler ce que le concept de « l’ivoirité » de Bédié, son
allié actuel, a dispersé, pour créer une nouvelle sociabilité, afin de donner à
chacun ses chances, Ouattara persiste dans ce nouveau paradigme de gestion de soixante-trois
ethnies. Au nez et à la barbe d’Amnesty international et de nombre d’ONG, la
police arrête et emprisonne régulièrement des Ivoiriens qui leur paraissent
suspects. Nous conviendrons avec Seydou Badian Kouyaté, médecin, écrivain et homme
d’Etat malien, pour dire : « Nous
sommes sûrs qu’un jour, un jeune Ivoirien se lèvera pour dire :
non ! » Et ce sera la fin de l’humiliation que nous subissons
depuis plusieurs décennies.
Georges TOUALY, Professeur
d’économie et gestion (28 octobre 2015)
Mon cher frère et ami Georges, tu dis tout haut ce que nous pensons toujours. Depuis l'irruption de Ouattara sur la scène politique de la CI, nous marchons sur la tête (comme aime à le dire notre regretté Bertin ASSOU- paix à son âme !). Tout ce que fait Ouattara est bon, même si c'est mauvais ! Il peut massacrer tous les ivoiriens et personne ne dira rien car tout ce qu'il fait est bon !
RépondreSupprimerOui, un jour le soleil se lèvera pour les opprimés et ce jour notre chère patrie sera libérée !
Ton frère et ami PY