lundi 31 août 2015

François Hollande : « MOI, gendarme du monde »

Ce qu'il y a de rassurant dans les discours de François Hollande, c'est qu'ils sont toujours convenus. Mardi matin, son intervention lors de la conférence des ambassadeurs fut sans surprise.
Le président français, François Hollande, s'est fixé une ligne de conduite et il s'y tient. Depuis le début de son mandat, il répète que le chômage va baisser et que la reprise économique arrive. Sur le plan extérieur, il appelle de tous ses vœux la chute de Bachar El-Assad. En vain, depuis trois ans. Ca ne l'empêche pas, ignorant le principe de réalité, de continuer sur la même voie.
En témoigne le long discours qu'il a prononcé ce mardi 25 aout, en ouverture de la conférence des ambassadeurs, ce grand raout annuel organisé chaque fin de mois d'août par le quai d'Orsay. Cette déclaration est supposée fixer les grandes lignes de la politique étrangère de la France pour l'année à venir.
Daesh, « le plus grand danger »
L'Etat Islamique qui « contrôle un vaste territoire » est ainsi désignée par Hollande, qui, fidèle à sa ligne de conduite, ne la qualifie pas d'« islamiste », mais simplement de « terroriste ». Il en décrit la barbarie sans proposer d'autre solution pour l'anéantir que « la neutralisation de Bachar El-Assad », le président syrien. Un vocabulaire appartenant à des temps qu'on croyait révolus, celui des barbouzes. En oubliant de demander aux Syriens, qui restent quand même les premiers concernés, de se prononcer sur le sujet. Et réchauffe le vieux plat d'une fumeuse troisième voie avec un nouveau gouvernement composé de Kurdes et de Sunnites, bref le mariage de la carpe et du lapin, qui fait depuis des années le lit de Daesh.
« L'intervention armée en Libye était nécessaire »
François Hollande approuve la guerre néocoloniale du couple Sarkozy-Cameron qui a plongé le pays dans un chaos sans nom. Mais il ne propose d'autre solution pour en sortir qu'une hypothétique médiation onusienne, en ignorant que Daesh y contrôle désormais plus de deux cent kilomètres de côtes d'où s'élancent quotidiennement un flot ininterrompu de migrants... pimenté par quelques terroristes.
Boko Haram, l'autre menace. Cette organisation terroriste, et toujours pas désignée comme islamiste, menace toute l'Afrique de l'Ouest selon François Hollande. D'où sa volonté de réunir tous les acteurs de la lutte contre Boko Haram, à commencer par le président nigérian Buhari qui se rendra dans les prochains jours à Paris. Comme si la France était toujours le gendarme de cette région d'Afrique.
Le Mali presque oublié
Seule une petite phrase sur l'opération Barkhane dans le discours du président rappelle que le Mali existe. Comme s'il avait décidé de faire profil bas sur cette énième intervention de l'armée française en Afrique. Il y voit cependant une « démonstration » de l'efficacité de sa « lutte contre le terrorisme ». Sur le terrain, les faits ne lui donnent pas toujours raison.
Les migrants, « tragiques conséquences des conflits qui s'accumulent ».
Hollande semble enfin découvrir que la guerre, ça produit des morts et des réfugiés. Il sort de son assourdissant silence sur le sujet pour produire des lamentations sans effets. Il propose avec la chancelière allemande Merkel une uniformisation des politiques d'accueil des pays européens. Ce qui demandera, au rythme où avance l'Europe, des années de négociations.
En attendant, il ordonne aux Grecs et aux Italiens, qui sont en première ligne, de faire le tri entre les réfugiés (ceux qui peuvent rester; ceux qui doivent partir). Et surtout de les garder chez eux.
Le nouveau rôle de l'Iran.
Hollande, qui a longtemps maintenu l'Iran au ban des nations, lui demande maintenant d'être un acteur dans la résolution des crises régionales mais, dans la foulée, il se félicite de ses « relations de grande confiance » avec l'Arabie Saoudite et les pays du Golfe. On connaît la cordialité des rapports entre Chiites et Sunnites au Yémen ou ailleurs. Sur ce sujet comme dans d'autres, Hollande cherche à occuper la « position centrale », un exercice d'équilibriste qui lui a permis de faire la carrière politique que l'on sait. En espérant que les événements viendront un jour lui donner raison.
Reste qu'il endosse, en Syrie ou en Afrique, l'uniforme de gendarme. Sur la scène mondiale, on attend plutôt d'un président français, néanmoins socialiste, qu'il fasse entendre la voix d'une France qui prônait jadis l'autodétermination des peuples. Et non pas celle des barbouzes et autres colonialistes.

Philippe Duval*  

 
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Source : Mondafrique.com (via le journal de Bally Ferro) 26 Août 2015 

(*) - Journaliste indépendant, membre de la rédaction d’un grand quotidien, “Le Parisien”, pendant vingt ans (culture, politique étrangère). Auteur de nombreux reportages en Afrique de l’Ouest. Et de plusieurs livres dont « Fantômes d’Ivoire » et « Chroniques de Guerre ».

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