Depuis le coup d’Etat du 24 décembre 1999, la Côte d’Ivoire continue de faire
face aux défis de la stabilité, de la paix et de la démocratie. La guerre qui a
semé la désolation dans notre pays aux lendemains de la crise post-électorale semble ne pas avoir
servi de leçon à certains acteurs politiques du pays,
particulièrement ceux qui le gouvernent depuis le 11 avril 2011. L’actuel
régime a la lourde responsabilité de préserver la paix déjà fragile. Il lui
revient de la consolider par des actes responsables conformes aux principes de
la démocratie, de la justice et des droits de l’homme.
Or l’observation de l’état actuel de la
nation et de la préparation des futures élections sont loin de rassurer les
acteurs politiques de l’opposition et la majorité de nos concitoyens. A
l’approche des élections présidentielles, l’angoisse s’empare de la plupart de
nos concitoyens. Car rien ne les rassure quant à l’organisation d’élections
libres, démocratiques et transparentes. Tout
le dispositif électoral est de nature à nous conduire dans une autre crise post-électorale
avec sa spirale de violences.
Nous avons le devoir de dénoncer ce
dispositif antidémocratique, et d’interpeller l’opinion nationale et internationale sur la question. Notre dénonciation a pour cible les
deux institutions piliers des élections que sont la Commission électorale
indépendante (CEI) et le Conseil constitutionnel, et une des pièces maîtresses
des élections que constitue la liste électorale. Nous tenons à mettre à nu les
failles et défaillances du système électoral actuel, dans l’espoir que nos
critiques soient entendues et suivies d’effets positifs dans l’intérêt de la
démocratie et de la paix notre cher pays.
DE LA COMMISSION ÉLECTORALE INDÉPENDANTE (CEI)
Avant 1999, les élections dans notre
pays étaient organisées par le ministère de l’Intérieur. Alors que ce rôle
électoral du ministère de l’intérieur convenait au contexte du parti unique, il
ne l’était plus dans un environnement politique marqué par le multipartisme. En
décidant de la création de la CEI, les Ivoiriens ont dans leur grande majorité
exprimé leur vœu de dessaisir le ministère de l’Intérieur de son rôle
prédominant et partisan dans l’organisation des élections. Or, dans les faits,
la Loi Organique de la CEI, adoptée le 05 juin 2014, a permis la mise en place
d’une CEI déséquilibrée dans laquelle l’exécutif et le(s ) parti(s)
politique(s) dont il émane sont surreprésentés. Cette surreprésentation entache
fortement l’indépendance de la Commission électorale. Dans la composition actuelle de la CEI,
l’exécutif a 9 membres sur les 17 membres, qui lui sont clairement « acquis »,
sans compter la probable « acquisition » d’autres membres au sein de cette
Commission. Les représentants acquis de cette CEI pour le
compte de l’exécutif sont : un représentant du président de la République, un
représentant du président de l’Assemblée nationale, un représentant du ministre
chargé de l’Administration du territoire, un représentant du ministre chargé de
l’Économie et des Finances, un représentant du Conseil supérieur de la
magistrature et quatre représentants du parti ou groupement politique au
pouvoir. Avec une telle composition déséquilibrée de la CEI, dans l’état actuel
des choses, rien ne garantit l’organisation d’élections libres, démocratiques
et transparentes, eu égard au mode de décision au sein de la CEI basé sur le
vote majoritaire, à défaut de décision consensuelle.
Cette CEI est encore hantée par la
présence en son sein de monsieur Yousouf Bakayoko à qui il a été encore confié
de la présider. Monsieur Youssouf Bakayoko a fait preuve de défaillance et de
manque de probité dans l’organisation et la proclamation des résultats en 2010.
Son action négative
a été dans une certaine mesure à l’origine de la crise post-électorale et de la
guerre qui s’en est suivie. C’est sans doute cette posture partisane affichée
en 2010 qui lui a valu sa reconduction à la tête de cette institution.
DU CONSEIL CONSTITUTIONNEL
La démission par contrainte de Monsieur
Francis Wodié le
03 février 2015, et son remplacement par Monsieur Mamadou Koné, un militant du
RDR et un proche d’Alassane Ouattara, n’est pas non plus de nature à garantir
des élections libres, transparentes et démocratiques dans notre pays. Nul
n’ignore le rôle central que joue le Conseil constitutionnel dans notre système
électoral. En effet, conformément à l’article 94 de notre Constitution,
Le Conseil constitutionnel contrôle la
régularité des opérations de referendum et en proclame les résultats.
Le Conseil statue sur :
– L’éligibilité des candidats aux
élections présidentielle et législative ;
– Les contestations relatives à
l’élection du Président de la République et des députés.
Le Conseil constitutionnel proclame les
résultats définitifs des élections présidentielles. »
En amont et en aval, le Conseil
constitutionnel est juge des élections présidentielle et législative. Il a
compétence de statuer sur l’éligibilité des candidats, les contestations des
résultats électoraux, et il proclame les résultats définitifs.
Force est de souligner que la
nomination du nouveau président du Conseil constitutionnel a été faite dans le
but d’une instrumentalisation
de cette haute institution de la République. C’est la thèse avérée après les
révélations sur la raison de la démission de Monsieur Francis Wodié de la
présidence du Conseil constitution. Sa démission, il faut le souligner, est
survenue suite à son refus
de cautionner l’éligibilité d’Alassane Ouattara sans
modification préalable de l’article 35 de notre Constitution par referendum. En
nommant monsieur Koné Mamadou à la tête de cette haute institution dans de
telles circonstances, aucun doute ne couvre désormais la volonté de l’auteur de
sa nomination de s’assurer des décisions en sa faveur, afin de le proclamer
éligible et vainqueur de l’élection présidentielle. La démocratie est en danger
dans notre pays. Et cette réalité pourrait faire resurgir des moments sombres
dans le quotidien des Ivoiriens aspirant au changement démocratique.
DE LA LISTE ÉLECTORALE
La liste électorale constitue l’une des
pièces maîtresses de notre système électoral. Son élaboration est ainsi chargée
d’enjeu pour le déroulement et l’issue du scrutin. La liste électorale doit
être transparente et ne doit souffrir d’aucune contestation, afin de permettre
la tenue d’élections libres, transparentes et démocratiques. A cet effet elle
ne doit faire l’objet d’aucun tripatouillage au profit d’un bétail électoral
instrumentalisé pour assurer la victoire d’un candidat. Conformément à ce
principe de transparence, il convient de rendre publique la liste des
bénéficiaires de la Loi du 23 août 2013 portant dispositions particulières en
matière d’acquisition de la nationalité par déclaration. Pour plus de
transparence, cette liste des bénéficiaires de cette loi devra mentionner les
références de leurs décrets
de naturalisation. Il importe de jouer le jeu de la
transparence pour rassurer tous les ivoiriens, tous les acteurs de la vie
politique nationale et en particulier les candidats déclarés aux prochaines
élections.
L’article 5 de la loi N°2000-514 du 1er août 2000
portant code électoral stipule que « La qualité d’électeur
est constatée par l’inscription sur une liste électorale. Cette inscription est
de droit. »
L’inscription sur la liste électorale
est donc un droit des citoyens jouissant de leurs droits civiques et qui ne
sont frappés ni d’incapacité ni d’indignité. Or dans l’état actuel des choses,
tout semble concourir à la violation de ce droit essentiel de la majorité de
nos concitoyens. En effet, alors que l’alinéa 3 de l’article 6 de ladite loi
prévoit une mise à jour annuelle de la liste électorale « pour tenir compte des
mutations intervenues dans le corps électoral », la coutume fâcheuse dans notre
pays demeure la mise à jour dans le cafouillage de la liste électorale tous les
cinq ans, à l’approche des échéances électorales. Il importe de souligner que
dans le cadre de l’élection présidentielle de d’octobre 2010, le décret N°2009-270 du 25 août 2009
fixant la période d’établissement de la liste électorale, avait fixé
l’enrôlement des électeurs pour la période du 15 septembre 2008 au 30 juin
2009, soit sur une durée de plus de 9 mois. Or à 7 mois de l’élection
présidentielle de 2015, l’enrôlement des électeurs n’a pas encore commencé,
aucune date n’a encore été fixée à ce sujet par la Commission électorale
indépendante. Tout semble se mettre en place pour bâcler l’enrôlement des électeurs
et l’établissement de la liste électorale, comme ce fut le cas en 2010 malgré
le délai accordé à la Commission pour accomplir cette mission.
Tout semble se mettre également en
place pour susciter le vote anarchique au bénéfice d’un candidat. Ce vote anarchique
sera possible avec la nouvelle disposition permettant à tout électeur inscrit
sur la liste électorale de pouvoir voter partout où il se trouve le jour du
scrutin. Cette situation pourra violer le principe selon lequel un électeur,
égal une voix. Car des individus pourront bénéficier de multiples cartes
d’électeurs pour voter n’importe où, aidés en cela par la nature délébile de
l’encre dite indélébile.
C’est le lieu d’interpeller le
gouvernement sur la nécessité de faciliter et d’accélérer l’établissement de la carte nationale d’identité
permettant d’identifier les électeurs. Dans la situation d’extrême pauvreté que
vivent la plupart de nos compatriotes, le coût et le délai de sa délivrance
doivent être revus, afin de faciliter l’acquisition de cette pièce importante
par la grande majorité.
Notre pays a besoin de stabilité, de paix et
développement pour assurer le bien-être des Ivoiriens
et des populations étrangères résidant en Côte d’Ivoire. Cette stabilité, cette
paix et ce développement passent par l’organisation d’élections libres,
démocratiques et transparentes. La sagesse commande de tirer les leçons du
passé. Il incombe au gouvernement et à la Commission électorale indépendante de
tout mettre en œuvre avec diligence pour garantir, en cette année électorale,
la mise en application des règles démocratiques pour préserver la paix sociale.
Le Collectif des Ivoiriens pour des élections sans fraudes et sans
violences en 2015
EN MARAUDE DANS LE WEB
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nécessairement à l'unisson avec notre ligne éditoriale, pourvu qu'ils soient en
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que, par leur contenu informatif, ils soient de nature à faciliter la
compréhension des causes, des mécanismes et des enjeux de la « crise ivoirienne
».
Source : connectionivoirienne.net 11 avril 2015
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