samedi 13 juin 2015

Justin Katinan Koné réfute les graves accusations du commandant Jean-Noël Abéhi.

Le mardi 9 juin 2015, interrogé par le tribunal militaire, le commandant Abéhi Jean-Noël, de la
J. Katinan Koné
Gendarmerie nationale, poursuivi pour désertion de l’armée, a tenu des propos à mon endroit, qui méritent d’être rectifiés. Depuis que ces propos ont été rendus publics, j’ai reçu de nombreux coups de fil de personnes qui disent être déçues par les propos tenus par cet officier qui a gagné l’estime et la sympathie d’un grand nombre de nos compatriotes, par son combat héroïque pour défendre la patrie et la loi, conformément à son serment de gendarme. Ces personnes me pressaient de réagir immédiatement aux propos tenus par le prévenu. J’ai voulu attendre la fin du procès, pour éviter d’en ajouter à la peine de cet officier, qui visiblement est dans une situation de détresse. En effet, nos compatriotes ne doivent jamais oublier que de nombreux soldats, officiers ou hommes du rang, se sont battus avec abnégation, parfois dans des conditions extrêmes, contre une coalition d’ennemis pour rester conformes aux exigences du code d’honneur qui régit leur métier. Beaucoup en sont morts, de nombreux restent soit mutilés, soit des invalides à vie. Un nombre non négligeable a décidé de rompre avec l’armée pour ne pas à avoir à compromettre leur honneur. Ils sont soit en exil, vivant dans des conditions d’extrême précarité, soit en Côte d’Ivoire, mais en rupture de ban avec leur corps de métier. Leur sacrifice est énorme. Ce sont eux qui sont traqués, menacés de mort pour avoir fait exactement ce que ceux qui les traquent aujourd’hui attendent qu’ils fassent pour eux. Nous leur devons un devoir de gratitude et de solidarité, et notre admiration pour eux ne doit jamais s’altérer du seul fait que, traversant des moments de faiblesse inhérents à la condition humaine, ils adoptent parfois certains comportements que nous n’apprécions pas. Ce devoir de solidarité est plus renforcé à mon endroit. En effet, les instituions de la République et les lois que ces soldats ont défendues au prix de tant de sacrifices sont incarnées par le président Laurent Gbagbo, lui-même poursuivi pour avoir agi conformément aux lois et aux décisions des institutions de son pays. Et je suis son Porte-parole. Personnellement, j’ai une grande admiration pour le métier des armes. Le soldat incarne à mes yeux les plus grandes valeurs qu’un homme puisse cultiver : l’honneur, la dignité et la responsabilité. J’ai eu le privilège de côtoyer pendant mon enfance des soldats ivoiriens qui ont bâti toute leur vie sur ces valeurs, même après avoir quitté l’armée. Je pense à feu le Général Thomas d’Aquin. Je continue de regarder le soldat en général, et le soldat ivoirien en particulier, avec la même admiration. Rien ne pourra en déprécier mon jugement. C’est pourquoi j’accorde d’ores et déjà mon pardon au commandant Abéhi ; je le rassure de ma solidarité dans ces moments très difficiles pour lui et sa famille, et à travers lui, à toutes les personnes qui souffrent de cette situation d’injustice. Mais je ne peux m’empêcher de relever que les propos qu’il a tenus à mon sujet sont totalement faux. J’en restitue ci-dessous l’intégralité :
« (…) Lorsque je suis arrivé au Ghana, la première personne que j’ai pu joindre est Konan Boniface pour lui donner l’information de ma présence dans ce pays. Il m’a dit de ne parler à aucune autorité politique. J’étais dans mon coin. Un jour j’essaie d’appeler Konan Boniface. Il était fermé et je suis passé par des d’autres personnes pour avoir de ses nouvelles. Un jour le Colonel Gouanou me contacte pour une réunion avec les autorités politiques. On a discuté avec le ministre Koné Katinan et un autre ministre dont je ne me rappelle pas le nom. Il y avait aussi le Colonel Gouanou et le colonel Dadi. Il y avait des solutions diplomatiques et militaires pour notre retour. A la seconde réunion, on nous a demandé de faire le point du matériel que chacun pouvait apporter. C’est à ce niveau que j’ai dit non, car je n’avais pas de moyens ni d’hommes à mettre à leur disposition. Je n’étais pas d’accord avec l’esprit de la chose. C’était sur la base tribalique. On devait commencer à nettoyer à l’Ouest tous les Baoulés et Burkinabè. J’ai marqué mon désaccord. »
Le lendemain, mercredi 10 juin 2015, certains médias ont fait la couverture de leur parution avec des résumés très tendancieux de ces propos qui sont en eux-mêmes, à tout point de vue, mensongers. C’est pourquoi, non seulement je démens fermement les propos tenus par le commandant Jean-Noël Abéhi, mais au-delà, je dénonce l’exploitation malicieuse qui en est faite contre moi par certains médias. Je n’ai jamais participé à une quelconque réunion avec le prévenu pour discuter des conditions de retour des militaires au pays. N’étant ni militaire, ni même chargé des questions militaires dans le gouvernement (Gbagbo), je ne vois pas en quoi je devais discuter des modalités de leur retour. J’étais absent du territoire ghanéen lorsque, courant juillet 2011, j’avais appris que le gouvernement ivoirien avait entamé des négociations avec les militaires exilés au Ghana à l’effet d’obtenir de ces derniers leur retour au pays. J’étais encore en voyage quand le premier groupe de ces militaires, dont Boniface Konan, est retourné au pays. Je n’ai participé à aucune des réunions préparatoires qui ont précédé leur retour. Je n’ai participé non plus à aucune réunion portant sur ce sujet après leur départ. Les cachets de services d’immigration du Ghana et du pays dans lequel je séjournais confirment mon absence à cette période. C’est donc faux que de m’associer à ces réunions. Je suis tout de même perplexe que le prévenu ait cité mon nom à ce stade de la procédure alors qu’aucune de ses déclarations préliminaires, recueillies par les autorités ivoiriennes et rendues publiques par ces dernières, ne mentionne mon nom.
Ma perplexité se renforce par le fait que des deux ministres réputés présents à cette réunion, il n’y a que moi seul dont le prévenu se souvient du nom. Il est tout de même curieux que ni le Juge, ni le Procureur qui poursuit le prévenu, n’ont daigné demander des précisions quant à la date et au lieu de cette fameuse rencontre ; surtout que le prévenu fait cas de deux réunions, sans préciser à laquelle j’ai eu à échanger avec lui. Ils n’ont pas jugé non plus nécessaire d’insister pour que le nom du second ministre présent, qui reste un témoin important pour le prévenu, soit révélé. Tout se passe comme si l’essentiel dans cette affaire était de m’y impliquer d’une façon d’une autre. Cela pourrait bien expliquer l’exploitation malicieuse qui en a été faite par certains medias.
Par ailleurs, je voudrais solliciter de tous ceux qui veulent construire des histoires sur mon dos, de  m’accorder le bénéfice de la présomption de la raison minimale qui est reconnue à chaque être humain. En effet, dans le cas d’espèce, sauf à supposer que l’exil a altéré toutes mes facultés humaines, il me semble que le minimum de la raison humaine m’aurait conseillé de ne pas demander à un Baoulé, à qui j’entends confier une opération subversive, de commencer celle-ci par le massacre de ses propres parents. Enfin, je ne peux m’empêcher de lier ces fausses accusations portées contre moi aux dernières alertes qui m’ont été adressées il y a quelques jours. Ces alertes faisaient état de ce qu’un commando a été dépêché au Ghana pour procéder au moins à mon enlèvement, au plus à mon assassinat. La récurrence de ces alertes m’a poussé à informer les autorités ghanéennes sur cette autre menace contre mon intégrité physique. Ne s’agit-il pas, par ces allégations, qui tranchent totalement avec les premières déclarations du prévenu, de justifier a priori l’opération d’enlèvement planifiée contre moi. Après « Katinan braqueur de banques », « Katinan meurtrier » (j’aurais tué deux personnes dont une de 83 ans, soudeur de son état), voici le « Katinan génocidaire des Baoulés et des Burkinabè » ! Je continue de m’interroger sur les raisons de ce harcèlement politico-judiciaire contre moi. Il est temps qu’il prenne fin, parce qu’il n’arrivera jamais à bout de ma conviction profonde selon laquelle le gouvernement ivoirien est dans l’erreur, depuis son avènement au pouvoir, dans la gestion de la crise politique ivoirienne. J’ai déjà interpellé à maintes reprises le gouvernement ivoirien sur l’inefficacité des méthodes qu’il utilise pour ressouder la nation ivoirienne après tant d’années de drame en stigmatisant des personnes. La politique de ségrégation judiciaire et économique qu’il applique ne fait que renforcer la cassure sociale, déjà abyssale. Sa volonté de vouloir extirper certaines personnes du corps social du pays, parce que ces dernières expriment une opposition ouverte à sa gouvernance ne fait que ralentir la recherche de la cohésion nationale. Ma position sur cette gouvernance ségrégationniste du gouvernement ivoirien est claire et constante. Celle-ci prépare des lendemains sombres pour le pays. Le dire ne fait pas de moi l’ennemi de la République à abattre. La solution n’est pas dans mon anéantissement. Le gouvernement doit prévenir cette situation au lieu de stigmatiser ceux qui attirent son attention sur elle. J’ai toujours proposé au gouvernement de trouver un mécanisme juridique et institutionnel pour soigner de façon globale et définitive les cœurs meurtris, afin de préparer les esprits à une véritable réconciliation. Les cœurs meurtris ne sont pas seulement d’un seul côté. Il n’est donc pas judicieux de soulager un seul côté, en chargeant l’autre de tous les péchés. Ils sont nombreux les Ivoiriens civils et militaires, qui ont peur de s’inscrire dans le processus de retour à la normalité que le gouvernement prétend mettre en œuvre. La duplicité du gouvernement, qui annonce une chose et qui en applique exactement le contraire, n’inspire pas confiance. En effet, comment rassurer ces centaines de milliers d’Ivoiriens qui voudraient mettre fin à leur exil, lorsque ceux qui sont retournés se sont retrouvés pour un bon nombre en prison parce qu’ils marquent leur opposition aux choix du gouvernement. Je dénonce cette duplicité du gouvernement. Et aucune stigmatisation ne pourra m’en empêcher. Parce que je revendique le même droit que tous les Ivoiriens de vivre dans une société pacifiée, vidée de toutes les rancœurs ; et c’est le devoir du gouvernement de satisfaire l’attente des populations.
Pour finir, je souhaite bonne chance au soldat Abéhi dans son procès. Puissent sa déposition, même mensongère à mon endroit, l’aider à remporter la victoire et à  retrouver sa famille.

J. Katinan Koné, ancien ministre, porte-parole du président Laurent Gbagbo.
 

 
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Source : CIVOX. NET 13 Juin 2015

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