On va faire un test en Côte d'Ivoire... |
La France n’a jamais été neutre dans la guerre ivoirienne partie de la
tentative de coup d’Etat du 19 septembre 2002 qui s’est muée en rébellion
contre Laurent Gbagbo, président démocratiquement élu depuis octobre 2000. De
Jacques Chirac à Nicolas Sarkozy, le projet de ce pays, qui se targue pourtant
d’être l’avocat des Droits de l’Homme, est passé de l’ombre à la lumière. Des
faits du néocolonialisme français en parlent.
Les trois larrons et la patronne |
Un panel de 5 chefs d’Etat africains a été constitué, la semaine dernière,
suite au 16ème Sommet de l’Union africaine (UA) à Addis-Abeba (Ethiopie) pour
la résolution de la crise ivoirienne post-présidentielle. Ce groupe comprend la
Mauritanie, l’Afrique du Sud, le Burkina Faso, la Tanzanie et le Tchad. Mais,
déjà, que de sons discordants qui laissent supposer que la France de Sarkozy,
l’ONU de Ban Ki-moon et la Communauté économique des Etats de l’Afrique de
l’ouest (CEDEAO) à la sauce sénégalaise d’Abdoulaye Wade, assaisonnée d’épices
nigérians de Jonathan Goodluck et du Burkinabé Blaise Compaoré, sont déterminés
à empêcher l’éclatement de la vérité en Côte d’Ivoire. Eux reconnus comme des
ennemis notables du poumon de l’Afrique de l’ouest qui manœuvrent, depuis la
mise en place du panel conforme aux désirs des présidents de l’Afrique digne,
pour imposer Alassane Dramane Ouattara comme président de la République aux
Ivoiriens. Parce que Sarkozy le veut ainsi. Un projet que les dignes filles et
fils de la Côte d’Ivoire s’attellent à rejeter, même au prix de leur sang, en
s’opposant au rêve fou et démoniaque de la France néocolonialiste et de son
candidat perdant qui vit désormais reclus avec des centaines de ses rebelles, depuis
la mi-décembre 2010, au Golf Hôtel d’Abidjan. Lieu d’où il appelle comme un
sourd, des forces étrangères à bombarder la Côte d’Ivoire qu’il prétend aimer
afin que les mafieux de la planète lui permettent de s’installer par la force
dans le fauteuil présidentiel qui lui a déjà échappé par les urnes depuis le 28
novembre 2010. Du jamais vu, serait-on tenté de crier, si la France, depuis
2002, n’avait pas habitué les Ivoiriens à une interminable série de crimes
perpétrés sur leur propre sol !
En effet, le 13 décembre 2010, dans un entretien exclusif accordé à la
radio française Kernews 91.5 Fm, Alcide Djédjé, ministre des Affaires
étrangères ivoirien, dénonce l’ingérence des Nations unies, manipulées par la
France et les Etats-Unis, dans la gestion de la crise post-présidentielle en
Côte d’Ivoire, qui a vu la victoire du candidat de LMP, Laurent Gbagbo, avec
51,45 % des suffrages exprimés. Cela, au détriment de son rival du RHDP,
Alassane Ouattara, crédité de 48,55 %. « Cette
ingérence s'est faite d'abord au Conseil de sécurité, à New York, puisque le
représentant des services extérieurs des Nations unies a reçu de fortes
pressions pour que le président de la Commission électorale indépendante (CEI)
qui, normalement siège de façon collégiale et par consensus, soit amené dans
les locaux de l’ONUCI à Abidjan pour proclamer les résultats. Monsieur Choi a
refusé et il m’a appelé à cet effet. C'est ainsi que ce président de la CEI,
Monsieur Youssouf Bakayoko, a été amené à l'Hôtel du Golf, le QG de campagne de
Monsieur Ouattara pour proclamer de faux résultats devant la presse étrangère
dont France 24 », révèle le diplomate ivoirien. De vrais faux résultats qui
seront dans la précipitation reconnus par Choï et consorts. « A l’analyse de ces résultats, le taux de
participation passe de 70% à 81%. Nous avons donc constaté que plus de 630 000
voix ont été ajoutées au bénéfice du candidat Ouattara après la fermeture des
bureaux de vote. Voilà ce qui se passe et cela a été fait par la France et les
États-Unis, dont les ambassadeurs sont très actifs en Côte d’Ivoire ».
Selon Alcide Djédjé, la veille, le président Sarkozy a envoyé un courrier au
président de la Commission électorale indépendante pour lui demander de
proclamer les résultats sur-le-champ. « J'étais
moi-même en face de militaires français qui, à 22 h 40, tentaient de remettre
ce courrier au président de la Commission électorale indépendante. Cela nous a
été signalé par les militaires ivoiriens. Je me suis rendu sur les lieux
moi-même et j'ai appelé l'ambassadeur de France qui a demandé aux militaires de
retourner au camp Licorne, ils semblaient très embarrassés. Ce sont ces
instructions du président Sarkozy qui ont été exécutées le lendemain. Ensuite,
le président Sarkozy, et aujourd'hui le président Wade, ont appelé le président
Jonathan Goodluck pour orienter la décision de la CEDEAO. Plus grave encore,
l'ambassadeur américain à Abidjan que j'ai reçu dans mon bureau, savait, la
veille, la position que l'Union africaine allait prendre », insiste le
ministre des Affaires étrangères ivoirien avant de conclure : « Il s'agit non seulement d'une ingérence
dans les affaires intérieures mais aussi d'une manipulation des institutions
telles que la CEDEAO et l’Union Africaine pour que Alassane Ouattara soit
déclaré président. Malheureusement pour eux, il n'a aucune prise sur la réalité
du terrain ici en Côte d'Ivoire. Donc, nous avons formé notre gouvernement
parce que le président Gbagbo a été élu président de la République, suite à ses
réclamations et aux décisions du Conseil constitutionnel qui l’a proclamé
vainqueur ».
Deux semaines après ce hold-up électoral manqué, le 17 décembre 2010,
Nicolas Sarkozy déclare que Laurent Gbagbo doit quitter le poste qu'il occupe « en
violation de la volonté du peuple ivoirien ». C’était lors d'une
conférence de presse, à l'issue du Conseil européen.
Pour le président français, son homologue ivoirien doit lui obéir « avant
la fin de la semaine » sous peine d'encourir des sanctions européennes et
d'avoir affaire au tribunal pénal international. « Est-ce qu'il veut laisser l'image d'un homme de paix ? Il est
encore temps, mais le temps presse et il doit partir. Ou est-ce qu'il veut
laisser l'image de quelqu'un qui a fait tirer sur des civils parfaitement innocents
? Et, dans ce cas-là, il y a des juridictions internationales comme la Cour
pénale », persiste Nicolas Sarkozy. Aussitôt, ses menaces sont relayées par
l’Union européenne à travers son Conseil et par Washington qui signifie à
Laurent Gbagbo qu'il dispose d'un « temps limité » pour quitter le
pouvoir et que son épouse et lui ont désormais « leur destin entre leurs mains ».
A l’instigation de Nicolas Sarkozy, Laurent Gbagbo et son épouse, Simone
Gbagbo, la « dame de fer » du régime, sont « nommément inscrits
sur la liste des sanctions » européennes, tout comme des personnalités du
pays jugées proches du couple présidentiel et « qui refusent de reconnaître la
victoire d'Alassane Ouattara à la présidentielle du 28 novembre ».
Les visas vers l'Union européenne de ces personnes sont interdits et leurs
avoirs gelés, pour ceux qui en ont. L’appel de Laurent Gbagbo à la constitution
d’un Comité d’évaluation pour enquêter sur la réalité de l’élection
présidentielle ivoirienne est difficilement perçu hors du pays, dans un premier
temps. Mais dans un second temps, sur le continent noir, les agitations
schizophréniques et les injonctions néo-colonialistes de Sarkozy au président
ivoirien finissent par réveiller bien des soupçons. Des voix s’élèvent pour
réclamer que l’on cherche à voir plus clair dans le dossier ivoirien. Et que
cela doit se faire malgré l’opposition des loups habitués aux manœuvres
obscures sur le continent noir au risque d’être effrayés par l’éclat de la
lumière de la souveraineté qui pointe à l’horizon.
Neuf années de tentative de recolonisation ! Pour tout comprendre, il faut
remonter le temps. En effet, l’horreur tombe sur le peuple ivoirien dès l’aube
de la nuit du jeudi 19 septembre 2002 où tout bascule. Dans la Côte d’Ivoire
naguère havre de paix, l’insoutenable se déclenche. Des tirs de canon et
d’armes lourdes réveillent brusquement le pays du cacao, dès 3 h du matin. Le
président de la République, Laurent Gbagbo, se trouve en visite de travail en
Italie. Les principales villes du pays telles qu’Abidjan, Bouaké et Korhogo
sont simultanément attaquées par une horde de rebelles sans foi ni loi. Ils
sont recrutés au Burkina Faso, au Libéria, au Mali et dans le nord de la Côte
d’Ivoire. Des centaines de civils et de militaires issus des rangs des Forces armées
nationales de Côte d’Ivoire (FANCI) sont froidement massacrés, en particulier
des gendarmes égorgés avec leur famille. Parmi les illustres victimes, figurent
Emile Boga Doudou, ministre d’Etat, ministre de l’Intérieur ; le général Robert
Guéi, ancien chef d’Etat putschiste (1999-2000) ; les colonels Dagrou Loula,
Dali Oblé et Yodé, ainsi que le célèbre musicien-arrangeur Marcellin Yacé.
Jusqu’à 13 h, les combats pour la prise d’Abidjan, siège du pouvoir politique,
sont d’une rare violence. Surtout devant la gendarmerie d’Agban considérée
comme la poudrière à prendre aux gendarmes loyalistes. On attribue ces attaques
meurtrières des assaillants à un certain nord ivoirien qui ne supporterait plus
d’être victime d’exclusion et de xénophobie de la part du reste du pays. Mais
on saura très vite que, derrière cette opération barbare, se cache une
tentative de coup d’Etat planifiée par la France de Jacques Chirac. Le putsch
est destiné à renverser – mort ou vivant et ce, dans un délai de deux jours –
le président Laurent Gbagbo, pourtant démocratiquement élu en octobre 2000, sur
un programme de gouvernement et un projet de société résolument révolutionnaire
qui repose sur l’assurance-maladie universelle, la décentralisation et l’école
gratuite. Bien qu’ayant lamentablement échoué grâce à la bravoure des Forces de
défense et de sécurité ivoiriennes, mal équipées à cette période, mais aussi
avec la résistance de l’ensemble des patriotes ivoiriens, les rebelles
continuent à occuper la partie nord de la Côte d’Ivoire. Ils refusent même de
déposer les armes malgré les appels pressants de nombreuses sociétés civiles
nationales et des sommets sur cette crise sans précédent.
Aux premières heures de la guerre, les rebelles sont mis en déroute par les
FDS dans une offensive destinée à libérer Bouaké. Ce qui fait crier – trop tôt –
victoire au ministre de la Défense de l’époque, Moïse Lida Kouassi. C’est donc
ce moment que choisissent les troupes françaises du 43ème Bataillon
d’infanterie de marine (BIMA) – des héritiers des troupes coloniales dans
lesquelles ont servi de nombreux Africains pendant les guerres – pour demander
une trêve de deux jours aux belligérants. Le temps d’évacuer, selon les soldats
de Jacques Chirac, les ressortissants français, américains et des autres communautés
internationales de la ville. Mais, au lieu de deux jours, ils traînent le pas
deux semaines et font craindre, en toute logique, le pire aux Ivoiriens. En
réalité, le prétexte est tout trouvé pour épauler les rebelles. Une fois mis
sur orbite, les ennemis de la Côte d’Ivoire cueillent à froid les FDS, tuant
plusieurs d’entre elles, sans compter les prisonniers que ces rebelles
détiennent. Ainsi ce qui passait pour être des rumeurs en période de guerre se
révèlent juste : il est revenu de façon récurrente à la population ivoirienne
que, pendant les hostilités, les attaques des bandes terroristes sont précédées
de patrouilles de soldats ou de convois militaires français suspects. Par la
suite, quand l’Ouest montagneux est à son tour attaqué, des caisses d’armes sont saisies sur des
rebelles en plein combat. Elles sont estampillées « Ambassade de France au
Burkina Faso ». La connexion entre la France et le Burkina Faso dans la guerre
faite à la Côte d’Ivoire est établie. La France est pourvoyeuse d’armes, le
Burkina sert de base-arrière aux agresseurs de la Côte d’Ivoire. De plus en
plus, la vérité se manifeste.
Les soldats français, dans un coup de gueule qui tranche avec le sacré
langage militaire, avouent un bon matin que les rebelles sont plus armés que
les soldats ivoiriens. Ainsi pour prévenir, selon eux, une débâcle des FDS, un
cessez-le-feu doit être signé entre les deux belligérants. Ce qui est effectif
en septembre 2002. Juste après, le président Laurent Gbagbo tend la main à la
France qu’il croyait certainement de bonne foi : « Nous n’aurons la force tampon que d’ici une semaine. J’ai demandé à
la France de jouer, pour le moment et ce, pendant une semaine, le rôle de force
tampon pour permettre de surveiller la non-belligérance d’une part et d’autre
part, de mettre en place l’administration dans les zones où elle a disparu, en
entendant que la CEDEAO commence à les désarmer (les rebelles, ndlr) »,
annonce le président ivoirien, dans un discours à la nation, le 17 octobre
2002. En fait, la déclaration de Laurent Gbagbo fait suite à l’accord de Bouaké
signé, quelques heures auparavant, avec la médiation du Groupe de contact de la
CEDEAO.
La France, qui n’attendait pas mieux, saisit la perche. Elle met en branle sa
machine d’hypocrisie. Jacques Chirac prétend qu’il veut éviter « un Rwanda bis »
sur le sol ivoirien. Dès lors, s’appuyant sur les accords de défense que la
France colonialiste a signés avec la Côte d’Ivoire le 24 avril 1961, soit
quelques mois après l’indépendance du jeune Etat acquise le 7 août 1960, le
ministère français de la Défense dépêche, sur le territoire ivoirien, de
nombreuses unités. Les premières à y débarquer sont les légionnaires. Leur
mission est de bloquer la progression des rebelles vers Yamoussoukro, la
capitale politique du pays, et d’autres zones au-delà de ce qu’occupent déjà
Guillaume Kigbafori Soro et ses rebelles de tueurs, de violeurs, de pilleurs et
de buveurs de sang humain. Les soldats français devraient également porter
assistance aux troupes ivoiriennes. Mais rien de suffisamment clair en réalité.
Sur le terrain, la France est convaincue de l’inefficacité des forces
onusiennes déployées en Côte d’Ivoire depuis le 13 mai 2003 par la Résolution
1479 du Conseil de sécurité des Nations unies. A partir du 1er octobre 2002,
Paris envoie alors une opération nommée Licorne en Côte d’Ivoire dont le
général Emmanuel Beth est le premier commandant. Le choix de son QG est
stratégique. C’est le 43ème BIMA, basé depuis l’époque de l’indépendance
nationale dans la commune de Port-Bouët, près de l’aéroport international Félix
Houphouët-Boigny d’Abidjan, dans le cadre des accords de défense et de
coopération entre les deux Etats. Officiellement, Licorne se présente comme une
force d’interposition. Officieusement, ce sont les soldats français qui vont
penser tout à la place des rebelles. Sous les ordres du général Beth, ils
aident à mettre à exécution le plan diabolique de déstabilisation de la Côte
d’Ivoire et d’assassinat du président Laurent Gbagbo. Ce que le président de
l’Assemblée nationale, Mamadou Koulibaly, appelle « la guerre économique de la
France contre la Côte d’Ivoire », qu’il développera dans son ouvrage du même
nom. Aujourd’hui, la force Licorne prétend qu’elle vient en appui à l’ONUCI
dont elle servirait de force d’intervention rapide. En vérité, les soldats
français ont un statut ambigu : ils sont sous mandat de l’ONU sans être aux
ordres de l’ONU ; ils obéissent directement à l’Elysée ou au Quai d’Orsay. Des
exemples sont légion.
L’an 2004 marque le paroxysme de la bêtise française de l’Opération Licorne
en Côte d’Ivoire. Les 6, 7, 8 et 9 novembre de cette année, le pays retient son
souffle. La France a pour la première fois ouvertement déclaré son parti-pris
pour les rebelles. Les faits. Dès le 4 novembre, les FDS lancent l’Opération
César. Son but est de débarrasser la Côte d’Ivoire de ses rebelles en vue de sa
réunification. Au second jour de l’offensive, dans le quartier général des
rebelles, à Bouaké, les troupes françaises estiment que les frappes aériennes
ivoiriennes à l’aide de redoutables Mi 24 ont touché leur base, faisant, selon
eux, 9 morts dans leurs rangs. Mais l’Etat français ne montrera jamais leur
corps aux yeux du monde, ils ne seront jamais non plus autopsiés. Ce qu’Abidjan
considère jusqu’à aujourd’hui comme un prétexte à la déclaration de guerre de
Paris. En effet, au deuxième jour de l’opération de l’armée ivoirienne, sur
ordre du président français Jacques Chirac, à Yamoussoukro et à Abidjan,
Licorne détruit – au sol – tous les aéronefs ivoiriens. Le Grumman présidentiel
de Laurent Gbagbo, ainsi que sa résidence officielle de Cocody sont également
touchés. Dans le même temps, partout à Abidjan, une colonne de plus de 120
chars français se déploie dans les rues et tous les coins stratégiques de la
mégapole. Ils sont appuyés par des tirs d’hélicoptères. Certains des chars,
avec perfidie, font mouvement vers la résidence officielle du président Laurent
Gbagbo, à Cocody. Sur leur chemin, des dizaines de milliers d’Ivoiriens se
dressent à l’appel de Charles Blé Goudé, leader de l’Alliance de la Jeunesse
patriotique de Côte d’Ivoire. Les Français envahisseurs sont stoppés net dans
leur élan. Ils se replient devant l’Hôtel Ivoire, à quelques centaines de
mètres de la résidence présidentielle. Les jeunes patriotes ivoiriens les
encerclent et leur demandent de s’en aller dare-dare. Désemparés face à la
détermination farouche des résistants ivoiriens aux mains nues, les soldats de
l’opération Licorne, dans laquelle on compte des snippers embusqués dans des
chambres de l’Hôtel Ivoire, ouvrent le feu sur les pauvres manifestants. Les
mêmes scènes se produisent sur les deux ponts – Général de Gaulle et Félix
Houphouët-Boigny –, à l’entrée de l’aéroport international FHB et dans l’ouest
du pays où tout le peuple est également debout. Le bilan de cette barbarie des
soldats français fait officiellement 65 morts dont un gendarme froidement
abattu, et le jeune Jean-Louis Coulibaly (25 ans) décapité par un char devant
l’Hôtel Ivoire. On dénombre aussi plus de 2100 blessés.
Pour la chaîne de télé française Canal+, qui a filmé ou eu droit à toute la
scène de la boucherie, ce crime contre l’humanité mérite d’être immortalisé au
plus haut degré autant pour son public que pour le reste du monde. La chaîne
française lui consacre un documentaire qu’elle intitule « Côte d’Ivoire :
quatre jours de feu ». Les images des bombes larguées sur des manifestants aux
mains nues recueillies auprès de caméras amateurs ivoiriennes ayant osé les
capter font le tour du monde et provoquent partout une onde de choc. Tout comme
la découverte d’un CD-Rom dans lequel figurent les profils de toutes les
autorités ivoiriennes, suite à ces événements sanglants de novembre 2004. Dans
ce document abandonné par les snippers français dans leurs chambres de l’Hôtel
Ivoire, on trouve également l’itinéraire du cortège du président Gbagbo à
Abidjan et à Yamoussoukro, le nombre de véhicules qui l’escortent, le blindage
de sa voiture et divers autres informations suspectes. Comme si la France de
Chirac était devenue totalement folle, elle propose et fait signer, le 15
novembre 2004, par les 15 membres du Conseil de sécurité des Nations unies, la
résolution 1572 qui place immédiatement la Côte d’Ivoire sous le coup d’un
embargo sur les armes ; lequel est toujours en cours.
Selon la France, la prise de cette résolution est liée à la fameuse
opération contre leurs poulains.
Plus révoltante est encore l’affaire Mahé qui continue de troubler le
sommeil du général Henri Poncet, ex-commandant de la force Licorne en Côte
d’Ivoire. Elle est révélée longtemps après le crime prémédité par 5 militaires,
dont le général lui-même, le 13 mai 2005 sur l’axe Duékoué-Man, par un des
tortionnaires de l’Ivoirien. En effet, un jeune paysan de l’ouest montagneux
nommé Firmin Mahé a eu le plus grand tort d’être un vaillant résistant. Il
meurt, suite à des tortures perpétrées sur sa personne par des soldats de l’opération
Licorne détachés dans cette région, la plus endeuillée par la guerre
ivoirienne. Après l’avoir blessé par balle, traqué dans sa fuite, capturé, puis
ligoté, les militaires du pays des droits de l’homme – ironie du sort –
l’étouffent mortellement dans un de leurs blindés en lui enfonçant dans la
gorge un sachet en plastique. Contrairement à ce que les Français font croire,
ce jeune paysan n’est pas un coupeur de route. Firmin Mahé est, en réalité, un
résistant à la recolonisation de la Côte d’Ivoire qui se trouve être un des
obstacles à la mise à exécution de leur plan funeste. L’affaire semble être
classée « Secret défense ». Même si la presse française rapportait (mars 2009)
que le juge d’instruction du Tribunal aux armées de Paris (TAP), Florence
Michon, a bouclé son enquête sur le meurtre de l’Ivoirien. Dans la même région
et la même année, Massé, un autre patriote ivoirien et correspondant du
quotidien Le Courrier d’Abidjan, succombe au terrorisme d’Etat des Français.
Trouvé gênant, il est pisté comme un gibier, puis abattu par la Licorne. Cette
affaire, qui choque toutes les âmes sensibles, reste, elle aussi, sans suite.
De même qu’un enfant de 12 ans tué aux tirs de lance-pierre dans la région de
Dimbokro, au centre de la Côte d’Ivoire.
Les trois larrons après leur forfait... |
Et que dire encore des casses des agences de la BCEAO de Bouaké et de Man,
respectivement en 2003 et en 2004. Tout simplement du gangstérisme caractérisé
au cœur de l’armée française. A Bouaké, en effet, deux de ces soldats ont été
pris avec des sacs d’argent. Dans un simulacre de procès en France, ils
auraient été condamnés. A M’Bahiakro (aujourd’hui tombée aux mains des
rebelles), dans le centre de la Côte d’Ivoire, les soldats français sont
surpris, en 2003, par les éléments du sous-groupement aux ordres du lieutenant
Zadi (aujourd’hui passé capitaine), avec une carte du pays. Ils sont en train
de prendre les mesures du pont, à l’entrée de la ville. A Abidjan, précisément
à Angré, commune de Cocody, des biscuits avariés sont distribués par les
soldats de l’opération Licorne à des écoliers d’un établissement scolaire, près
du 22ème Arrondissement de police. Le scandale est révélé le 11 mars 2005 par
le quotidien ivoirien Notre Voie et a
pour conséquence colère et indignation chez les parents qui menacent de porter
plainte. « Qu’ils partent chez eux, ces
militaires français ! Nous sommes fatigués d’eux. Après avoir tué des jeunes
ivoiriens, ils veulent maintenant empoisonner nos enfants. Comment peuvent-ils
donner des aliments avariés à des enfants si fragiles ? ». Tel est le cri
de douleur et de révolte d’une dame de l’établissement. Mais tout cela reste
lettres mortes. Le témoignage suivant publié par Le courrier d’Abidjan est celui de Camara Kassoum, un Ivoirien qui
était en service au 43ème BIMA au moment de l’éclatement de la guerre en
septembre 2002. Selon lui, pendant que la France réitère son refus d’appliquer
les accords de défense sous le prétexte qu’il s’agit d’un conflit
ivoiro-ivoirien, ses soldats mettent en place un système de deux réseaux de
communication en vue d’espionner les FDS ivoiriennes, avec la complicité de
certains éléments de l’armée ivoirienne. Il s’agit de l’INMARTSAT composé de
toutes les stations d’émission et de réception sur le territoire ivoirien. De
deux stations fixes (SICA et EIT au 43ème BIMA) avant la guerre, la Licorne
passe à 11 dont une est remorquée sur un navire, le tout coordonné par deux
satellites en liaison avec la métropole. Carthage, c’est le nom du second
réseau mobile. Il est monté sur des véhicules qui parcourent le territoire avec
une base-arrière. Un dimanche de mai 2003, à 19h, il apprend qu’une mission
dite Largage 1°RTP fournit des armes
aux rebelles de Bouna, dans le nord-est de la Côte d’Ivoire, et que les
Français y transportent des avions militaires français. Voilà une des causes de
sa révolte. En octobre 2002, sans ordre de mission, certains des soldats
français sont arrêtés par la population à Oumé, puis transférés dans la ville
voisine de Gagnoa, une zone pourtant située dans le centre-ouest du pays, qui
n’est pas déclarée zone de guerre. Ils seront remis à la gendarmerie de la
ville pour leur sécurité, car ils étaient sous la menace d’un lynchage. Le
43ème Bima a toujours servi de refuge aux rebelles et aux leaders de
l’opposition politique. C’est ça aussi la France des Droits de l’Homme et de la
légalité constitutionnelle. Résultat, une manifestation de l’Union des
patriotes pour la libération de la Côte d’Ivoire, le mardi 22 octobre 2002, est
organisée en face du 43ème BIMA. Objectif de cette protestation : exiger
l’extraction d’Alassane Dramane Ouattara de la résidence de l’ambassadeur de
France devenu son lieu de refuge favori, sous la protection du très actif feu
Renaud Vignal (paix à son âme), alors ambassadeur de France à Abidjan. A cette
colère des jeunes patriotes, l’armée française riposte et fait des centaines de
blessés graves. Certes il y a à manger et à boire quand il s’agit de la France
mais voilà en quelques faits, ce que les soldats de Jacques Chirac et
maintenant de Nicolas Sakozy font à la Côte d’Ivoire, qui lui a pourtant tout
donné : l’eau, l’électricité, le pétrole, les grands travaux, le téléphone…
Boulimie sans limite ! Voilà aussi comment le temps de se mettre debout
s’impose face à l’amie devenue l’ennemie, car un peuple peut tout perdre, sauf
sa dignité. La Côte d’Ivoire et l’Afrique ont tout pour relever ce défi de
l’impensable.
Schadé Adédé
Titre original : « Chronique
des crimes de la France néocolonialiste en Côte d’Ivoire ».
EN MARAUDE DANS LE WEB
Sous cette rubrique, nous vous proposons des documents de
provenance diverses et qui ne seront pas nécessairement à l'unisson avec notre
ligne éditoriale, pourvu qu'ils soient en rapport avec l'actualité ou
l'histoire de la Côte d'Ivoire et des Ivoiriens, ou que, par leur contenu
informatif, ils soient de nature à faciliter la compréhension des causes, des
mécanismes et des enjeux de la « crise ivoirienne ».
Source :
Notre Voie 5 février 2011
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire