La course vers l'émergence |
Il est deux
façons pour les medias dominants d’occulter la réalité de l’impérialisme
français en Afrique. La plus courante est d’exclure totalement ces pays du
champ de l’information, selon le principe que le public ne s’intéresse qu’à ce
qu’on lui montre.
Les Français
n’avaient jusqu’à ces derniers temps, en-dehors des bokasseries, guère entendu
parler de la Centrafrique, où la France est pourtant présente depuis la
prétendue décolonisation, soutenant des dirigeants corrompus alors que les
Centrafricains s’enfonçaient dans la misère.
Quand les
violences civiles qui sont la conséquence inévitable de ce long pourrissement
menacent la présence française, rendant nécessaire l’intervention militaire, la
stratégie change, mais le but reste le même : entretenir l’ignorance du public.
En dépit de la prolifération de reportages, débats et commentaires redondants,
malgré la nuée des intervenants militaires, journalistes, ONG, qui a fondu sur
la Centrafrique, on ne sait pas grand-chose de ce qui se passe dans la majeure
partie du pays, ni même au cœur des bidonvilles de Bangui où personne ne s’est
aventuré.
Personne
n’est capable d’évaluer tant soit peu l’ensemble de la situation, de donner une
idée du nombre des victimes, de l’importance des bandes armées. Quelques images
de ruines, de lynchages et d’exode, d’autres de patrouilles et de blindés
français sont censées montrer le problème et le remède. Les commentateurs
n’hésitent pas à recourir à l’anthropologie racialiste qui a, quoi qu’on en
ait, toujours accompagné et soutenu l’impérialisme. Navi Pillay, haut-commissaire
des Nations Unies aux droits de l’homme, rapportant les détails, aussi
horrifiques que superflus, du traitement réservé aux cadavres après les scènes
de lynchage qui se sont déroulées à Bangui, évoque « des mutilations de corps en public, des amputations d’organes
génitaux et d’autres parties du corps, des décapitations et au moins un fait
signalé de cannibalisme ». Peu importe que ce signalement soit une
rumeur, puisqu’il s’agit avant tout d’occulter les véritables rapports de force
en entretenant les fantasmes racistes du public occidental.
Une fois que
l’intervention armée a permis de remettre sous le joug une (ex)-colonie,
celle-ci disparaît à nouveau du champ de l’information. La Côte d’Ivoire, qui
faisait les gros titres dans les années qui ont suivi l’élection de Laurent
Gbagbo, est retournée dans les ténèbres après que Ouattara s’est emparé du
pouvoir avec l’aide des troupes françaises : la situation cependant ne cesse de
s’y dégrader dans l’indifférence des médias. La société est loin d’être
pacifiée avec plus de 800 opposants politiques détenus sans procès dans des
conditions inhumaines. Les chefs des milices de l’ex-rébellion non seulement
n’ont pas été inquiétés pour les crimes commis pendant la guerre civile et la
crise postélectorale, mais ils continuent à sévir impunément dans les postes de
commandement qui leur ont été attribués. Racket, intimidations, exécutions
extra-judiciaires, on ne compte plus les exactions infligées à une population
soumise à l’arbitraire.
L’opinion
française n’est pas près de connaître la responsabilité de la France dans le
délitement de ces deux pays. Ainsi le
gouvernement socialiste a opposé une fin de non-recevoir à la demande de dix
députés d’une commission d’enquête sur le rôle de l’armée française en Côte
d’Ivoire sous la précédente majorité. Les protagonistes UMP et PS sont
d’accord pour maintenir tous les actes de la tragédie françafricaine dans
d’épaisses ténèbres.
EN MARAUDE DANS LE WEB
Sous
cette rubrique, nous vous proposons des documents de provenance diverses et qui
ne seront pas nécessairement à l'unisson avec notre ligne éditoriale, pourvu
qu'ils soient en rapport avec l'actualité ou l'histoire de la Côte d'Ivoire et
des Ivoiriens, et que, par leur contenu informatif, ils soient de nature à
faciliter la compréhension des causes, des mécanismes et des enjeux de la «
crise ivoirienne ».
Source: eburnienews
12 mars 2014
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