Il y a
19 ans, le 2 août 1997, un homme de qualité nous a quittés.
Notre
hommage à Charles Bauza Donwahi, ancien président de l’Association des
Étudiants de la Côte d’Ivoire en France (AECIF), ancien d’Assabou, président de
l’Assemblée nationale au moment de sa disparition.
Durant les quatre
années que je passai au gouvernement, à aucun moment le regret d'avoir quitté
la CICA ne m'effleura. Certes, la tâche de ministre paraissait immense, voire
incommensurable ; toutefois, je la trouvais tout simplement passionnante.
Cependant, j'étais un peu naïf à l'époque, ne m'occupant pas de politique
politicienne : j'étais préoccupé par ce que je faisais et ne perdais pas de
temps dans les couloirs. J'aurais peut-être dû porter plus d'attention à tout
ce qui se tramait car lorsque je fus arrêté, ce fut pour moi comme si le monde
s'écroulait. Il me faut raconter les circonstances de ce terrible épisode.
Rappelons que ce
fut Houphouët-Boigny lui-même qui avait créé le mouvement des jeunes, la
JRDACI, lors d'un congrès constitutif en mars 1959. Pour lui, ce congrès était
destiné à contenir les aspirations autonomistes de la jeunesse et à instaurer
la mainmise de son parti sur la jeunesse. Pour les jeunes au contraire, il
s'agissait du congrès de tous les espoirs. Conçu pour être un appendice du
PDCI-RDA, la JRDACI avait au contraire cru devoir critiquer les méthodes et
l'organisation du parti, recommander davantage de tolérance vis-à-vis des prises
de position des étudiants et revendiquer une plus grande implication des jeunes
aux responsabilités politiques.
En apparence, on
pourrait croire que le Président répondit à ces souhaits en constituant un
gouvernement associant les jeunes élites du pays. Mais en réalité, la ligne
politique de la JRDACI n'allait pas dans le sens de ses intérêts parce qu'elle
ne partageait pas les options antifédéralistes du PDCI. Le divorce était
patent entre le Président et le mouvement de la jeunesse en Côte d'Ivoire et en
France. Il datait en fait du désapparentement communiste : dès 1951, la FEANF
(dont je fus membre) accusa le RDA de collusion avec la puissance coloniale.
Lorsque Houphouët-Boigny avait siégé au banc du gouvernement français à l'ONU
pour défendre l'Algérie française, une délégation de la FEANF avait fait une démarche
auprès de lui pour l'en dissuader, ce qui n'avait pas dû lui plaire... Par la
suite, le mouvement étudiant avait dénoncé la politique de « balkanisation » de
l'Afrique telle qu'elle était menée par le premier dirigeant de la Côte
d'Ivoire. Autant de points de discordance qui avaient sans nul doute irrité le
Président : il n'appréciait guère que les étudiants se posent en donneurs de
leçons. Subtilement, il avait agi pour soustraire les étudiants ivoiriens à la
prétendue influence communiste des étudiants ressortissants des autres
territoires en leur accordant une attention particulière lorsqu'ils revenaient
au pays à la fin de leurs études, attention dont je bénéficiai également comme
on l'a vu.
Dans toutes les
manœuvres politiques d'Houphouët-Boigny, les notions de tribalisme et
d'ethnocentrisme étaient très présentes : ainsi, il s'appuyait sur les
étudiants d'origine baoulé, son ethnie, dont il tirait une immense fierté
corroborée par un sectarisme prononcé à l'égard des autres. Lors du fameux congrès
de la JRDACI en 1959, plusieurs courants s'étaient affirmés ; je faisais partie
du mouvement mené par Amadou Koné, un homme de confiance du Président – pour
son malheur car il fut victime de cette position... En tout état de cause, le
congrès constitutif de la JRDACI n'avait pas répondu aux souhaits
d'Houphouët-Boigny. Ses manœuvres destinées à faire taire les étudiants en les
dotant d'un organe politique avaient abouti à un résultat contraire à ses
ambitions. En outre, des comités de base de la JRDACI avaient fleuri partout
sur le territoire : dès sa création, le mouvement des jeunes apparut comme un
parti adverse, ou tout du moins différent du PDCI. Houphouët-Boigny ne pouvait
se permettre de laisser la JRDACI prendre de l'ampleur, estimant qu'elle allait,
à terme, menacer son pouvoir qu'il voulait absolu et sans partage. II avait
coutume de dire : « Le cafard ne pénètre dans la maison que lorsque le mur est fendu ».
Il y eut un premier
complot en 1959 qui visa et destitua Jean-Baptiste Mockey (ministre de
l'Intérieur), appelé « le complot du chat noir » car l'homme avait
prétendument tué et enterré un chat avec la photo d'Houphouët-Boigny dans les
entrailles. Le ministre avait été limogé et arrêté à la suite de cette sordide
affaire qui reposait essentiellement sur la croyance à des sortilèges et
autres gris-gris. Il s'agissait là d'une première alerte. Elle aurait dû mettre
nos sens en éveil...
Au début des années
1960, une paix sociale et un calme politique précaire régnaient en Côte
d'Ivoire. Houphouët-Boigny avait une conscience claire du danger qui menaçait
son régime, d'autant qu'il entendait mettre en place un parti unique et fort.
Le système institué par le chef de l'Etat faisait de lui la seule source de
droit. Il était le seul qui condamnait, emprisonnait et libérait de façon
régalienne. Cette conception des choses prévalut dans toutes les affaires
politiques.
UN SCENARIO EFFRAYANT
Dès le mois de
décembre 1962, le Président avait lait courir des rumeurs relatives à un grave
complot visant à l'assassiner. Concernant mes amis et moi-même, le délateur
était Christian Groguhet. Il rendit visite à trois d'entre nous, membres de la
JRDACI : Issa Bamba, Amadou Koné et moi-même – j'étais alors membre du comité
exécutif de ce mouvement. Il nous tint à peu près le discours suivant : « Je dirige un mouvement politique
d'opposition au PDCI, qui est implanté partout. Mes partisans n'attendent qu'un
signal pour semer le trouble ». Il nous invitait à se joindre à lui. Nous
considérions ce Groguhet comme un simple provocateur en mission et n'accordâmes
aucun crédit à ses allégations. En réalité, il était un homme choisi par
Houphouët-Boigny car il nourrissait une rancœur à notre égard depuis que nous
l'avions battu au congrès de la JRDACI. Stimulé par l'envie de prendre une
revanche, il était ainsi l'instrument idéal aux yeux du Président pour monter
de toutes pièces un complot.
Les dés étaient
lancés. L'inexorable machine qui devait annihiler notre jeune mouvement était
en marche. Le 11 janvier 1963, une loi portant création d'une Cour de sûreté de
l'Etat fut adoptée par l'Assemblée Nationale. Le soir même, je fus convié avec
mon épouse au dîner offert par le Président en l'honneur de l'ambassadeur
d'Israël. Cette invitation démentait apparemment les rumeurs selon lesquelles
la loi votée nous concernait. Comment imaginer qu'Houphouët-Boigny pouvait
inviter à sa table un homme qu'il projetait d'arrêter quelques heures plus tard
?
En fait, ce dîner n'était qu'une mise en scène destinée à nous
tromper pour mieux avoir raison de nous. Au moment où nous prenions congé,
Houphouët lança à ma femme sur un ton léger : « Quand ton mari sera Président de la République, je serai son
chauffeur ». Phrase troublante à laquelle elle décida pourtant de ne pas
attacher d'importance, préférant croire qu'il s’agissait d'une plaisanterie au goût un
peu douteux. Le fond de l’histoire était que le Président ne voulait pas nous
faire confiance et, sentant son pouvoir menacé, il avait monté de toutes pièces
l’accusation d'un complot dont il tirait toutes les ficelles.
Le
lendemain de ce fameux dîner, je fus convoque avec Issa Bamba et Amadou Koné au
palais présidentiel : nous étions vaguement inquiets
mais ne pouvions croire que l'affaire irait aussi loin. Pourtant,
l'ambiance était chargée de tension et la mise en scène effrayante : je fus
surpris de découvrir des commandos armés dans la salle d'audience. Nous fûmes reçus par le Président Houphouët-Boigny, entouré de quelques dignitaires
dont Philippe Yacé, Président de l'Assemblée Nationale : ce dernier lut l'acte
d'accusation, en présence du sinistre Groguhet. Nos pires
appréhensions furent confirmées... La nouvelle de notre garde à vue se répandit
comme une traînée de poudre en ville et, pour
calmer les esprits, Yacé fit une allocution pour expliquer que nous n'étions
pas arrêtés, mais simplement logés « dans des chambres des hôtes de marque
du palais présidentiel avant la réunion de Yamoussoukro où [ils] s'expliqueront
». En fait de résidences, nous fûmes bel et bien enfermés dans les sous-sols du palais. Je refusai de perdre espoir, faisant encore confiance à Houphouët-Boigny et aussi à Yacé, mon ancien instituteur. Je
ne pouvais croire à une véritable arrestation. Ma femme fut prévenue par mon
chauffeur. Comme moi, elle devait croire à un mauvais rêve, or je ne devais pas
la revoir, ni mes enfants, avant quarante-trois interminables mois...
Quatorze janvier 1963, Yamoussoukro, dans l’enceinte de l'immense
domaine privé d'Houphouët-Boigny, entouré d’un haut mur : ce jour-là, toute
l'intelligentsia du pays se trouva réunie. Dans ce lieu,
qui faisait penser à une souricière, toute la classe politique était comme
prise en otage et soumise à un conditionnement psychologique d'intimidation.
Devant une assistance médusée, le délateur Christian Groguhet, ravi de jouer
un des premiers rôles, répéta qu'avec la connivence de la plupart d'entre nous,
il avait mis en place une organisation visant à assassiner le Président. Il
cita une liste de noms réellement surprenante, comportant quatre ministres –
j'étais du lot –, neuf députés, des conseillers et de nombreux hauts
fonctionnaires. Pratiquement tous les cadres de la Nation, qui avaient été
formés à grands frais,
faisaient partie de la charrette. Nous étions des dizaines de prévenus, tout
cela semblait incroyable. Je pris la parole pour déclarer n'avoir participé à
aucune réunion avec Groguhet et n'être que la victime d'une machination
politique. Cependant, nous perdîmes tout espoir en entendant la déclaration
d'Houphouët-Boigny clôturant le débat : «
Je les arrête tous et tout de suite ». Nous étions consternés. C'était
comme un cauchemar, toute ma foi en l'Homme se trouva ébranlée et même
totalement brisée.
Plus
tard, en prison, nous reconstituâmes toute l'affaire : il était évident que le
Président lui-même était derrière tout cela. S'il ne nous avait pas arrêté, il
n'aurait pu asseoir solidement sa position de chef incontesté et demeurer seul maître à bord. En coupant toute résistance de
façon aussi radicale, il annihilait les éventuelles velléités de la JRDACI de
contrer sa politique, concentrant ainsi tout le pouvoir
entre ses mains. Nous avions une conception occidentale de la démocratie tandis
qu'Houphouët-Boigny raisonnait comme un monarque absolu : le contrôle du pouvoir était l'affaire d'un maître unique et toutes les décisions lui
appartenaient, sans conteste possible. En outre, il attachait de l'importance aux racines ethniques, considérant comme une fatalité que l'ethnie
des Baoulés à laquelle il appartenait ne pouvait s'entendre avec les autres dont nous étions les représentants.
Je pense qu'il avait néanmoins certains
remords à mon endroit, sachant que
j'étais farouchement contre la violence Mais lorsque j'avais dit devant toute l'assemblée que je mi
considérais comme « victime d'une
horrible machination », j'avais augmenté son courroux, lequel devait
devenir indécent tant
il était injuste et cruel.
Les faits n'étaient
évidemment pas relatés ainsi dans la presse, qui nous présenta plutôt comme de
dangereuses menaces pour le gouvernement en place. Nous étions montrés du doigt
comme de vulgaires criminels et même plus, comme un danger pour l'équilibre de
la nation. Quelle hérésie... Houphouët-Boigny élargit
même le champ de la conspiration à toute l'Afrique, indiquant que ce qui se
préparait en Côte d'Ivoire participait d'un «
complot communiste international visant à l'élimination physique des dirigeants
africains légitimes ».
Des interrogatoires
musclés commencèrent dès le 15 janvier. Dieu seul sait comment je trouvai la
force de résister au supplice des tortures, dont Houphouët-Boigny en personne
était témoin, faisant montre d'un sadisme sans bornes. Il est difficile de
relater ces séances d'une violence inouïe, qui visaient à nous extorquer des
aveux, inventés de toutes pièces : flagellations au nerf de bœuf ou à la
matraque plombée et, surtout, des supplices avec de la pâte du plus fort piment
du pays. Au-delà des sévices physiques, nous étions dégradés, humiliés, par des
tortures terribles sur le plan mental, comme des mises à nu sous des flots
d'injures et de sarcasmes. Les tortionnaires, éléments de la garde
présidentielle, n'avaient cure de nos hurlements : on leur avait expliqué que
le complot visait, au-delà du Président, toute la tribu Akoué dont il était
originaire et qui dirigeait la Côte d'Ivoire. Il en allait donc de la
sauvegarde du pays. Les premiers interrogatoires durèrent une semaine. J'étais
désespéré. Que devait penser Thérèse ? Comment vivait-elle désormais ?
Le 31
janvier, nous fûmes à nouveau amenés dans la propriété d'Houphouët-Boigny à Yamoussoukro. Le discours qu'il
prononça fut particulièrement cynique et témoigna de la violence du personnage.
Il nous accusa d'avoir créé la SACCI (Société africaine de culture de Côte
d'Ivoire), un groupement communiste – ce dont la presse se fit docilement
l'écho. Il nous qualifia de « fils
d'éleveurs de poulets » et nous annonça que nous, qu'il considérait comme
moins que des prisonniers de droit commun, serions jugés ici à Yamoussoukro, à
huis clos. A un moment de son discours, il nous éclaira sur le sens des propos
qu'il avait tenus à mon épouse après le dîner avec l'ambassadeur d'Israël
quelques semaines plus tôt (« Je serai le
chauffeur de ton mari quand celui-ci sera Président de la République. ») :
c'était pour nous montrer qu'il était au courant de notre prétendu complot. A
l'évidence, ce discours visait à qualifier l'injustifiable qu'il entendait
perpétrer. Nous, les prisonniers, ne nous faisions plus aucune illusion. La
situation était tellement injuste, voire absurde, que nous ne pouvions plus
croire en rien. Qu'allait-il advenir de nous ?
Le
procès eut lieu du 4 au 9 avril 1963 dans la résidence d'Houphouët-Boigny à
Yamoussoukro, transformée en camp retranché. Début février, il avait été mis
fin aux fonctions d'Ernest Boka, président de la Cour suprême – le malheureux
allait connaître un funeste sort.
Philippe
Yacé était commissaire du gouvernement, bien que restant président de
l'Assemblée nationale. La défense était assurée par des avocats commis d'office
; autant dire qu'il n'y avait pas de défense. Le seul et unique dénonciateur
était Christian Groguhet. Dire que le sort de dizaines d'hommes reposait sur
son seul témoignage ! Quelle aberration... Les chefs d'accusation, outre la
tentative d'assassinat sur la personne du Président, mentionnaient la
constitution d'un mouvement subversif d'inspiration communiste et l'alliance
avec des puissances étrangères.
Tout se passait à
huis clos et pour cause. Les mesures décidées lors du procès furent énoncées
comme suit : « Des perquisitions ont
lieu en ce moment même dans vos domiciles : le moindre papier trouvé chez vous
suffira à établir votre culpabilité. Tous les fonctionnaires de Côte d'Ivoire
vont signer un engagement sur l'honneur de ne pas adhérer au communisme. Vous
serez jugés ici par ceux qui ont souffert pour le parti. Mais nous ne ferons
pas de vous des martyrs ; parce que seuls les coupables seront
châtiés et sévèrement châtiés ». Le verdict était sans appel.
Lors de ma déposition, je réaffirmai ma
conviction d'être victime d'une machination politique. Mais j'étais conscient que notre défense était vaine.
Aucune évocation d'actes établis, aucune preuve ; c'était à se demander si la
Cour cherchait à connaître la vérité. Tous les membres de ce tribunal ad hoc semblaient ne s'intéresser qu'au
passé de militants gauchistes des étudiants que nous avions été. Les sanctions
tombèrent comme un couperet : treize condamnations à mort, sept aux travaux
forcés à perpétuité et quarante-trois aux travaux forcés – Dieu merci, les
peines capitales furent par la suite commuées. Les condamnations étaient
assorties de la confiscation de la totalité des biens et d'un emprisonnement
immédiat. Pour ma part, j'écopai d'une peine de vingt ans. Vingt ans... une
très longue tranche de vie.
TEL PÈRE, MAIS
PAS TEL
FILS ?
Petite anthologie des déclarations musclées d’Alain-Richard Donwahi, leur ministre délégué à la Défense, à propos des récents incidents de
Bouaké. Ministre de la Défense, c’est pas pour défendre les gens ? Mais celui-ci
nous parle comme s’il était le ministre de la Police politique d’une de ces
dictatures sud-américaines du bon vieux temps… Mais écoutez-le plutôt :
« Nous avons affaire à des vandales. C’est ce que nous
avons pu constater. »
« Il faut arrêter de nous faire croire que c’est pour (les factures)
que des personnes sont venues manifester. Ce n’est pas pour cela. Il y en a qui
sont venus ici simplement pour piller, voler le bien d’autrui. »
« Ces actes de vandalisme ne resteront pas impunis. »
« Nous pouvons vous assurer que nous allons faire en sorte
de pouvoir protéger les biens et les personnes. C’est notre rôle. Nous allons
mettre l’effectif qu’il faut à Bouaké pour faire cela. »
« Nous avons procédé à des interpellations, nous allons
continuer à le faire, mettre aux arrêts ceux qui se sont rendus coupables de
méfaits. Nous allons être fermes pour que cela cesse. »
Et
maintenant, écoutez la noble voix du père de ce ministre :
• « Respectons-nous les uns les autres, pour que nous soyons
dignes de notre nation. Ayons confiance les uns dans les autres […]. Nous le
devons car nos populations souffrent encore des effets dévastateurs de la
crise. » (Ouverture de la 2e session ordinaire - 4 octobre 95).
• « II faut
arrêter de voir partout des ennemis autour de soi. » (Divo, le 13 novembre 1994).
• « Réconcilier,
c'est d'abord désarmer. Et, en l'occurrence, le désarmement de notre mémoire
historique passe évidemment par la juste reconstitution des faits, la
reconnaissance des erreurs communes et la réhabilitation des victimes du
mensonge et de la manipulation. » (Discours du 27 avril 1997).
(D’après Eugénie Douayérê – Fraternité Matin 27
août 1997)
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