« Mesdames et Messieurs,
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Tia Koné faisant allégeance à Ouattara |
Je voudrais solennellement m’excuser pour tout le
désagrément que cela a pu causer durant toute cette période à ce jour.
Aujourd’hui, la preuve est faite en effet que le président de la République est
un Ivoirien qui a un profond amour pour sa patrie et qui engage en ce moment
notre pays sur de nombreux chantiers en vue de faire de la Côte d’Ivoire un
Etat de paix et de prospérité. Aussi voudrais-je porter à la connaissance de
mes collègues ce qui précède et leur recommande fermement de rétablir
l’honorabilité du président de la République au plan judiciaire. Je l’ai dit et
je le proclame, je me mets entièrement à la disposition de la nation entière
pour y contribuer. Je répète que l’acte juridictionnel n’avait d’aucune manière
dénié la nationalité ivoirienne à Alassane Ouattara. Pour être complet dans ma
démarche d’association de recherche de solution à la réconciliation, il me faut
sans en épuiser le sujet, parler aussi de ce que je crois être un point de
friction dans les rapports des citoyens ivoiriens entre eux. A l’époque de
l’arrêt précité, nous avons été sans surprise confrontés à une véritable
incongruité textuelle dans l’application de l’article 35 de la Constitution en
y découvrant les éléments d’une malheureuse stratification sociale fondée sur
une illusion aux allures démagogiques. En effet, que lit-on dans ce texte. On y
lit ceci : "le candidat à
l’élection présidentielle doit être Ivoirien d’origine de père et de mère
eux-mêmes Ivoiriens d’origine". Fin
de citation.
On remarque très rapidement que ce texte est tout à la
fois absurde et vide. Il est absurde du point de vue historique. Car l’histoire
nous enseigne que notre pays n’a acquis la souveraineté nationale qu’en 1960
avec les atouts d’acquisition de citoyenneté. Avant cette date, nul doute que
les habitants de ce pays, s’ils avaient une nationalité, n’étaient nullement
Ivoiriens. Si on se réfère donc à l’article en question, cela veut dire qu’en
2000 le candidat qui avait 40 ans était né en 1960. Ce qui devait aussi dire
qu’il avait le même âge que ses parents. Il est indéniable que ses parents ne
pouvaient pas avoir une nationalité qui n’existait pas. Mais, ce qui était vrai
pour les parents, l’était aussi pour les candidats. Ici, ils étaient tous nés
avant 1960, à l’époque coloniale sous la qualité de citoyen français. Ou à tout
le moins de sujets français. Finalement, à l’analyse exhaustive, nous avons
relevé qu’aucun des candidats n’était né Ivoirien, encore moins de père et de
mère Ivoiriens. Nous avons dû, Mesdames et Messieurs, à défaut de pouvoir agir
autrement, procéder à une transposition du présent au passé pour réussir à
faire admettre que tous ceux qui habitaient ce lopin de terre devenu la
République de Côte d’Ivoire, était déjà Ivoiriens. (…) Mais si ce concept est
absurde, il est aussi inique. Parce que comportant les germes d’une répartition
des Ivoiriens en plusieurs catégories. Contrairement au code de la
nationalité qui lui se contente du simple minimum que l’un des deux parents
soient Ivoiriens et cela en ces termes : "Est Ivoirien l’enfant
légitime ou légitimé né en Côte d’Ivoire, sauf si ses deux parents sont
étrangers ou l’enfant né hors mariage en Côte d‘Ivoire, sauf si sa filiation
est légalement établie à l’égard de ses deux parents ou d’un seul parent
étranger ou l’enfant légitime ou légitimé né à l’étranger d’un parent Ivoirien ou
encore l’enfant né hors mariage et dont la filiation est établi à l’égard d’un
parent Ivoirien (articles 6 et 7)".
D’où vient alors que l’on crée de toutes pièces une
catégorie ultra privilégiée d’Ivoiriens qui auraient seule le droit d’être
candidats à l’élection présidentielle ? C'est-à-dire l’enfant né Ivoirien d’origine
de père et de mère eux-mêmes Ivoiriens. Ce concept comporte donc en son sein
les germes d’une pernicieuse opposition des populations susceptibles de rompre
l’harmonie nationale dont la mission n’a été rendue possible, à mon sens, par
le jeu des manipulations politiciennes aux objectifs inavoués. (…) Nous avons
dès lors relevé que ce texte était perfide et mauvais. (…) En l’appliquant par
devoir de juge, nous avons en même temps reconnu que dans sa disposition
essentielle, dans l’espoir que l’avenir permette d’en relever les aspérités.
(…) Aussi m’apparaît-il judicieux de dire au chef de l’Etat, du haut de cette
tribune, que dans sa quête inexorable d’harmonie et d’équilibre sociale, donc
de réconciliation, qu’il prenne en compte cet aspect pernicieux de notre loi
fondamentale qui est l’un des points d’achoppement, de clivage de nos
populations. Un comité de réflexion et de réforme constitutionnelle doit être
mis en place pour l’entame de l’importante tâche (…). »
Source : Le Patriote 11 février 2013
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