A Dakar, en 2014, manifestation pour la
libération de Karim Wade,
fils de l’ex-président Abdoulaye Wade et son retour en politique.
CRÉDITS : SEYLLOU/AF |
L’auteur
étrille les hommes qui dénoncent les systèmes au pouvoir sur le continent, et
sont prêts pourtant à toutes les compromissions pour prendre leur place.
Les
oppositions africaines ont la particularité de posséder souvent les
mêmes tares que les pouvoirs dont elles dénoncent les actions et auxquels elles
veulent succéder.
Les
péripéties actuelles des opposants sénégalais au régime de Macky Sall prouvent
leur incapacité à constituer une
alternative pour une population qui pourtant est en droit
d’attendre une offre de gouvernement crédible.
La campagne
actuelle pour les législatives du 30 juillet est un bon laboratoire de ce
que nos oppositions peuvent sécréter de négatif
dans leur volonté d’accéder au pouvoir sans autre projet que
celui de vaincre le régime.
D’abord, les
opposants significatifs ont mis sur pied une coalition unique qui a fini
par péricliter à
la suite de querelles d’investitures et de leadership, accouchant ainsi de près
de 50 listes concurrentes. Entre vieux routiers qui veulent toujours exister, jeunes pressés
mais vides de propositions pertinentes et autres clowns politiciens, l’électeur
sénégalais aura droit à un véritable cabinet de curiosités. Le PDS, l’ancien
parti au pouvoir, a poussé l’ignominie jusqu’à investir Abdoulaye
Wade, 91 ans, tête de liste de sa coalition.
Ailleurs,
au Burkina Faso, je n’ai pas
été surpris récemment de voir que le CDP,
ancien parti de Blaise Compaoré, était convié à la marche de l’opposition
officielle dirigée par Zéphirin Diabré. Dans ce pays, les mêmes incohérences et
les mêmes ambitions de pouvoir produisent les mêmes effets : une
décrédibilisation de l’opposition traditionnelle. Zéphirin Diabré et
l’écrasante majorité des gens qui ont battu le pavé aux côtés du CDP pour pourfendre le
gouvernement de Roch Marc Kaboré avaient tous souscrit à la décision
scandaleuse durant la période de transition d’exclure les anciens partisans de
Compaoré de toute compétition électorale. Cette décision était grave, car elle
violait les principes démocratiques, et dangereuse, car elle montait des
Burkinabés, jugés dignes, contre d’autres, frappés d’indignité nationale au
regard de leur simple appartenance politique.
Moins de
trois ans plus tard, par opportunisme, l’opposition accueille en son sein ceux
qu’elle vouait aux gémonies, pour grossir les rangs de
la contestation politicienne.
Dans toute
leur évolution, les oppositions manquent cruellement de propositions
pertinentes autres que des invectives et une litanie d’absurdités. Les citoyens
ne méritent pas, selon eux, le respect qui exige de proposer un projet de
société, un programme ou, a minima, des propositions qui laissent
au moins croire à une
réflexion sérieuse en amont. En un mot, nos hommes politiques nous font
honte !
Entre
regroupements contre nature, renonciations idéologiques et opportunisme
compulsif, les oppositions n’inspirent plus confiance et poussent même des
électeurs désabusés à voter pour des
régimes qui pourtant ne gouvernent ni dans la vertu ni dans le respect de leurs
engagements. Car, au fur et à mesure de leurs reniements et de leurs postures
alambiquées, elles montrent que seul le pouvoir les intéresse et non la volonté
d’apporter des ruptures transformatrices dans l’intérêt, notamment, des plus
pauvres.
Les cas
sénégalais et burkinabé ne sont pas isolés hélas, mais symptomatiques de
l’écrasante majorité des oppositions dans nos pays.
« L’opposition
congolaise est minable », avait dit le journaliste sénégalais Ousmane
Ndiaye relativement aux incohérences de celle-ci dans son bras de fer avec
Joseph Kabila et son traitement du retour de la dépouille d’Etienne Tshisekedi.
Je me suis
largement exprimé à l’époque sur les Béninois qui avaient choisi les arguments
les plus nauséabonds pour fustiger la
candidature de Lionel Zinsou à la dernière présidentielle. En Guinée,
l’opposition a aussi montré qu’elle ne valait pas mieux que le pouvoir qu’elle
combattait. Et la liste est encore longue. Mais le plus important est que ce
constat rend urgente l’émergence d’un nouveau leadership politique de rupture et de progrès
dont nous pourrions nous sentir, enfin, fiers.
Hamidou Anne
(chroniqueur Le Monde Afrique)
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compréhension des causes, des mécanismes et des enjeux de la « crise ivoirienne
».
Source :
LE MONDE 13 juin 2017
Joli billet !
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