"Le système D … n’assure
malheureusement pas tout."
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La question a fini par se poser
d’elle-même : l’embargo imposé à Cuba était-il seulement américain ou presque
mondial ? Le constat, à vrai dire, semblait évident pas uniquement dans les
statistiques du commerce mondial ou les annales internationales établissant les
rapports entre Etats. Les visiteurs de cette île des Caraïbes le faisaient sur
place.
Pas besoin de grand débat ou de
laborieuse description pour relever que ce pays manquait de tout pour assurer
son développement et subvenir aux besoins de sa population. Le système D
qui a fini par se répandre au sein de la société n’assure malheureusement
pas tout. Il en est ainsi de tout ce qui relève de la technologie dont Cuba
était privée. C’est l’embargo, disait-on alors. Et quelle est son étendue ?
L’on a fini par apprendre que les imbrications d’intérêts au sein de l’économie
mondiale ont de fait dépassé le cadre américain. La décision était bien celle
des Etats-Unis, mais son application était de fait bien plus étendue à partir
du moment où le moindre produit intéressant Cuba comportait une certaine
technologie américaine. L’explication paraîtrait ardue, mais pour les Cubains,
c’était là la triste réalité qui leur était imposée.
Une telle page devrait être tournée
depuis la normalisation des relations entre Cuba et les Etats-Unis. Un tel
processus apparaît pourtant dans une autre étendue à l’occasion de la signature
par Cuba et l’Union européenne (UE), lundi à Bruxelles, d’« un accord de
dialogue politique et de coopération », le premier jamais conclu entre le bloc
européen et l’île castriste qui normalisent ainsi leurs relations deux semaines
après la mort de Fidel Castro.
Cuba était jusqu’alors le seul pays
latino-américain à ne pas avoir d’accord de coopération internationale avec l’UE.
A cette occasion, le ministre cubain des Affaires étrangères a évoqué un
discours de 2003 de Fidel Castro dans lequel ce dernier saluait l’existence de
l’UE et de l’euro comme des « contrepoids » à « l’hégémonie absolue » des
Etats-Unis et du dollar. C’était avant la normalisation de leurs relations.
Cette signature marque l’ouverture officielle d’une nouvelle ère dans la
relation bilatérale, car elle se conjugue avec l’abrogation par les 28 d’un
texte de 1996 qui fixait une série de préalables à la normalisation du lien,
laquelle intervient surtout dans le sillage du rapprochement avec La Havane
décidé par le président Barack Obama, qui avait mis un terme en juillet 2015 à
60 années de gel entre les deux pays. Il avait ensuite effectué une visite
historique à Cuba en mars 2016.
Federica Mogherini, chef de la
diplomatie de l’UE, avait annoncé, fin septembre, qu’elle allait soumettre aux
28 sa proposition d’abroger la « position commune » de 1996, un texte considéré
comme le point culminant des dissensions entre Bruxelles et La Havane.
Le vice-ministre cubain des Affaires
étrangères, Abelardo Moreno, a estimé qu’« il était impératif que cette relique
du passé, en contradiction avec les bases de l’égalité, de la réciprocité et du
respect (...), soit complètement abolie ». Le gouvernement cubain a rappelé
qu’il avait toujours rejeté la « position commune » de l’UE en raison de son « caractère
d’ingérence sélectif et discriminatoire ».
Un pas vient donc d’être franchi avec
l’accord politico-commercial considéré comme « le nouveau cadre juridique des
relations UE-Cuba », selon Bruxelles, afin notamment d’« encourager le
développement durable, la démocratie et les droits de l’homme et de trouver des
solutions communes aux défis mondiaux ».
Des barrières tombent, marquant ainsi la fin d’une époque mais aussi d’une
politique qui avait pénalisé une population. Le processus est lent, mais des
étapes ont déjà été franchies. En attendant la levée totale du blocus. En fin
de compte, c’est bien de cela qu’il s’agit, car le développement de Cuba en
dépend.
Mohammed Larbi
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