Le
président du Muséum national d'histoire naturelle, Bruno David, a évoqué
devant les députés de l'Assemblée [nationale] française la complexité du
processus de restitution des crânes des résistants algériens réclamés par
l'Algérie.
« En tant que dépositaires des collections, nous
devons évidemment en prendre soin, mais nous n'avons pas le droit de les
céder. Cela peut d'ailleurs poser des problèmes éthiques : nous conservons
des crânes de résistants algériens du XIXe siècle que l'Algérie
réclame, mais, dans la mesure où ils ne nous appartiennent pas, je ne peux
pas les restituer sans suivre un processus assez compliqué », a-t-il expliqué lors de son audition par la
Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire, le
7 décembre, dont le compte-rendu a été publié mardi.
Il a précisé que le processus obéit à
des règles, du point de vue éthique, « afin
de protéger la propriété intellectuelle et le patrimoine de chaque pays,
mais elles compliquent sensiblement la vie du Muséum », indiquant
qu'il faut « garantir la
traçabilité des matériels et être prêt à les restituer en fonction des
situations ». Il a affirmé que « c'est
loin d'être simple » pour les crânes humains.
Dans une interview accordée à l'APS, le
31 octobre dernier, le ministre des Moudjahidine, Tayeb Zitouni avait
indiqué que les démarches « vont bon
train » pour récupérer ces ossements et les enterrer en Algérie,
soulignant que « la dignité
humaine est sacrée et doit être respectée même pour les morts et que rien
ne justifie, ni moralement ni idéologiquement, que ces ossements
soient laissés dans la situation déplorable actuelle ».
Pour sa part, le directeur des
collections au Muséum national d'histoire naturelle (MNHN) de Paris,
Michel Guiraud, avait dit que son institution était « prête » à examiner « favorablement »
la demande de restitution des 36 crânes de chouhada, résistants algériens
morts au champ d'honneur au début de la colonisation française, conservés
depuis plus d'un siècle.
« Nous sommes prêts à examiner favorablement la
demande de restitution des crânes des Algériens, conservés dans notre musée », avait-il affirmé dans un entretien à
l'APS, indiquant qu'il y a cependant « un
chemin à prendre » sur le plan procédural pour que la demande
soit prise en considération.
« Pour leur restitution, il y a un chemin à
prendre. Nous reconnaissons le droit de la famille et celui des
descendants relayés par leur Etat », a-t-il dit, soulignant que les demandes « doivent passer par le canal diplomatique et non pas par
une association qui n'a pas un droit particulier par rapport aux restes
humains ».
Une pétition a été lancée en ligne,
rappelle-t-on, par un universitaire algérien, Brahim Senouci, pour
rapatrier en Algérie ces restes afin d'« y
recevoir une digne sépulture ».
Les 36 crânes, des dons provenant de
médecins militaires à l'époque de la colonisation, sont effectivement
conservés dans des boîtes de carton entreposés dans une armoire métallique
au musée. C'était dans une déclaration à l'APS, en 2011, que le chercheur en
histoire, l'Algérien Ali Farid Belkadi, avait révélé, rappelle-t-on, que
les restes mortuaires d'Algériens, ayant résisté à la colonisation
française au XIXe siècle, avaient été retrouvés au MNHN de
Paris.
Les restes, des crânes secs pour la plupart, appartiennent à Mohamed
Lamjad Ben Abdelmalek, dit Cherif Boubaghla, au Cheikh Bouziane, le chef
de la révolte des Zaâtchas (région de Biskra en 1849), à Moussa
El-Derkaoui et à Si Mokhtar Ben Kouider Al-Titraoui. La tête momifiée
d'Aïssa El-Hamadi, qui fut le lieutenant du Cherif Boubaghla, fait partie
de cette découverte, de même que le moulage intégral de la tête de Mohamed
Ben-Allel Ben Embarek, lieutenant de l'Emir Abdelkader.
Algérie Presse Service (APS)
Source :
El Watan 14 décembre 2016
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