Il y a 16 ans, les corps calcinés du journaliste burkinabè Norbert Zongo, de son frère et de deux autres collaborateurs étaient retrouvés dans la carcasse de leur voiture sur la route de Sapouy, à une centaine de kilomètres au sud de Ouagadougou.
Les Burkinabè se souviennent. Nous partageons leur espoir que les auteurs et les commanditaires de ce crime odieux soient enfin recherchés, identifiés et châtiés comme ils le méritent. En hommage à Norbert Zongo et ses compagnons, à toutes les victimes du régime fantoche déchu, nous invitons nos amis lecteurs à lire ou à relire l'article d'Alpha Barry, de RFI, paru le 12 décembre 2008, à l'occasion du 10e anniversaire de l'assassinat du journaliste.
La Rédaction
La Rédaction
Assassinat de Norbert Zongo :
dix ans après, ni vérité, ni justice
Le collectif contre l’impunité appelle à manifester ce 13 décembre 2008 à Ouagadougou pour obtenir la réouverture du dossier Norbert Zongo. Journaliste, directeur de publication de l’hebdomadaire L’Indépendant, très critique à l’égard du pouvoir, Zongo a été assassiné il y a dix ans. En 2006, la justice burkinabè a classé le dossier en attendant des « éléments de preuve… »
Dimanche 13 décembre 1998. Comme c’est habituel après le bouclage de son journal, Norbert Zongo se rend dans son ranch de chasse dans le sud du pays près de la frontière ghanéenne. Il est en compagnie de son chauffeur, de son frère et d’un autre de ses collaborateurs. En fin de journée, les quatre personnes sont retrouvées mortes, calcinées à bord de leur véhicule dans les environs de Sapouy à une centaine de kilomètres de Ouagadougou. Le lendemain, la nouvelle se répand partout dans le pays. C’est le choc. Notamment chez les étudiants burkinabè où Norbert Zongo animait régulièrement des conférences publiques. Ces derniers descendent dans la rue. Pour eux comme pour la majorité de l’opinion burkinabè, la mort du journaliste n’est pas accidentelle. Elle ne peut être qu’un assassinat commandité par le pouvoir. D’autant plus que Norbert Zongo enquêtait sur la mort après tortures du chauffeur du frère du président Blaise Compaoré. Ces tortures avaient été infligées par des éléments de la garde présidentielle au sein du Conseil de l’entente, la garnison militaire qui abrite le régiment de sécurité présidentielle.
N. Zongo |
Le Burkina, réputé calme jusque-là, vit ses premières émeutes depuis plus de 7 ans. Très vite, un collectif contre l’impunité est créé pour réclamer vérité et justice dans cette affaire. Ce collectif dirigé par l’activiste des droits de l’homme, Halidou Ouédraogo, est formé d’associations, de partis politiques et de syndicats. A l’appel de toutes ces organisations, des milliers de gens descendent régulièrement dans la rue. C’est la crise dans tout le pays. Sous la pression, le pouvoir accepte de mettre en place une commission d’enquête indépendante (CEI) au sein de laquelle siège Reporters sans frontières (RSF).
7 mai 1999. La CEI dépose son rapport qui épingle « six suspects sérieux ». Ils sont tous membres de la garde présidentielle avec à leur tête l’adjudant Marcel Kafando, chef de la sécurité rapprochée du président Blaise Compaoré.
Alors que la rue gronde toujours, le pouvoir met en place un collège de sages chargé de faire des propositions pour juguler la crise. Celui-ci préconise des réformes politiques pour une grande démocratisation du pays. Il propose un schéma de réconciliation. Pendant ce temps, un juge d’instruction est nommé pour s’occuper exclusivement de l’assassinat de Norbert Zongo et de ses trois compagnons d’infortune.
2 février 2001. Le juge Wenceslas Ilboudo inculpe l’adjudant Marcel Kafando. Ce dernier purge déjà une peine de vingt ans dans le cadre de la mort du chauffeur du frère du président. Un dossier qui a abouti à un jugement en août 2000 grâce à la même pression du Collectif contre l’impunité. L’adjudant Kafando est inculpé après que le juge ait relevé des contradictions dans ses déclarations sur son programme de la journée du 13 décembre 1998. « Ce qui fait peser des soupçons sur lui », indique alors Abdoullay Barry, le procureur général près de la cour d’appel de Ouagadougou. Pour la première fois, la justice burkinabè donne de l’espoir dans ce dossier. « A partir de maintenant, expliquait le procureur général, le juge d’instruction doit pouvoir procéder à des interrogatoires plus approfondis et même à des confrontations entre Kafando et d’autres personnes ». Mais cet espoir est vite déçu. Le dossier s’enlise. La justice évoque « la maladie » de Kafando qui « ne peut se soumettre à la procédure ».
L'adjudant Marcel Kafando |
Alpha Barry
Source : RFI 13/12/2008
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