Cour d'assises d'Abidjan : le banc des accusés
"La Côte d'Ivoire est passée
à l'étape de l'apartheid judiciaire"
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Le RDR et ses soutiens extérieurs ont voué aux gémonies l'Ivoirité, concept vulgarisé sous Bédié
qui catégoriserait les Ivoiriens entre ceux de souche multiséculaire et ceux de
circonstance, parce que Alassane Dramane Ouattara ne répondait pas et ne répond
toujours pas aux critères d'éligibilité à la présidence.
Au pouvoir, Ouattara
et son équipe ont affiné cette politique vomie d'Ivoirité : le Rattrapage ethnico-régional, cette part belle assumée
et faite aux uniques ressortissants du nord du pays dans les nominations et
promotions dans l'administration civile et militaire.
L'opinion, très
regardante sur la question des droits de l'homme quand il s'agit de défendre la
cause Ouattara, n'y a trouvé aucun inconvénient. Cette politique de
différenciation sociale tolérée et ainsi implicitement autorisée est entrée
dans les mœurs.
La Côte d'Ivoire est
passée à l'étape de l'apartheid judiciaire. Au nom de la justice des
vainqueurs, il y a d'un côté, les démons (Laurent Gbagbo et ses partisans
considérés comme les bourreaux) et de l'autre, les anges (Ouattara et ses
militants qui sont les victimes) que le procureur de la République près le
tribunal de première instance d'Abidjan-Plateau, Simplice Kouadio, avait même
consacré.
L'égalité devant la
loi fait donc désormais partie de creux slogans. La Cour pénale internationale
(CPI) a lancé trois mandats d'arrêt contre les démons, dont deux ont été
exécutés (Gbagbo et Charles Blé Goudé), en attendant le cas Simone Gbagbo. La
justice nationale est, de son côté, dans sa chasse aux pestiférés pro-Gbagbo.
Le 10 mars 2015, sans
aucune preuve dans des accusations vagues et se basant uniquement sur la
présomption de... culpabilité, la Cour d'assises d'Abidjan a distribué, à la
tête du client, des condamnations et des acquittements à 79 maudits pro-Gbagbo
poursuivis pour divers chefs d'accusation (atteinte à la sûreté de l'État,
insubordination, constitution de bandes armées...). Ce mardi 17 mars, quatorze
militaires de la garde rapprochée de Gbagbo se retrouvent devant le tribunal
militaire pour « violation de consigne et atteinte à la sûreté de l'État ».
Et en juin prochain, quinze militaires et gendarmes pro-Gbagbo passeront en
procès pour l'assassinat, dans la nuit du 18 au 19 septembre 2002, du général
Robert Guéi, de son épouse et de sa garde rapprochée. Cette nuit, qui marque le
déclenchement du coup d'État de présumés Zinzin et Bahéfouê transformé en
rébellion armée de Soro Kigbafori Guillaume, a été sanctionnée par plus de 300
morts (civils et militaires).
Mais notre justice,
actionnée pour brimer un camp, celui de Gbagbo, passe par perte et profit les
meurtres notamment de l'artiste Marcellin Yacé, du ministre d'État Émile Boga
Doudou, des lieutenants-colonels Dagrou Loula, commandant militaire de la
région centre, Dali Oblé, commandant de la compagnie territoriale de Korhogo,
et Yodé Gnoléba Jean, directeur du génie et des équipements militaires.
Cette catégorisation
est encore parlante depuis que les vainqueurs militaires sont au pouvoir. Le
général Dogbo Blé et quatre codétenus, dont le commandant Kipré Yagba ont été
condamnés, le 11 octobre 2012, à 15 ans de prison parce que reconnus coupables
de « séquestration, enlèvement et complicité d'assassinat » du
colonel-major Adama Dosso le 12 mars 2011, en pleine crise post-électorale.
Justice ne sera pas rendue au ministre Désiré Asségnini Tagro, tué le 11 avril
2011 à la résidence de Gbagbo, aux colonels-majors Babri Gohourou Hilaire,
porte-parole des FDS, abattu en avril 2011 devant la résidence de Gbagbo, et
Ahouman Brouha Nathanael, chef de la sécurité de Gbagbo abattu en mai 2011.
Le drame de la ville de Duékoué (pogrom du quartier Carrefour le 28 mars 2011
et la destruction du camp de réfugiés de Nahibly en juillet 2012 commis par les
dozo et éléments des forces fidèles à Ouattara) est ignoré.
La justice,
instrumentalisée, joue sa partition d'une justice à double vitesse pour
permettre à Ouattara, par toutes ces condamnations à la carte, de faire d'une
pierre deux coups : d'un, gracier les condamnés et les prisonniers pro-Gbagbo
pour apparaître, avant la présidentielle d'octobre 2015, comme l'homme de paix
et le père de la réconciliation, et de deux, mettre à l'abri des poursuites ses
partisans. Et le tour est joué.
Bally Ferro
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que, par leur contenu informatif, ils soient de nature à faciliter la
compréhension des causes, des mécanismes et des enjeux de la « crise ivoirienne
».
Source : Facebook
13 Mars 2015
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