Source : https://ruptures-presse.fr 22 janvier 2018 |
Le
pavillon officiel de l’invité d’honneur du Salon du livre 2018 boycotté par
Emmanuel Macron après un échange téléphonique avec Theresa May…
Suite à un entretien téléphonique avec la Première
ministre britannique Theresa May, le Président français a décidé de ne pas
visiter le stand officiel russe au Salon du livre à Paris en signe de
«solidarité» avec son allié britannique après l'empoisonnement de l'ex-espion
russe, Sergueï Skripal, indique l'Élysée.
Attendu,
jeudi soir au Salon du livre à Paris, Emmanuel Macron ne
visitera pas le stand officiel de la Russie qui est
l'invité d'honneur de l'évènement. Cette décision a été prise après un entretien
téléphonique avec Theresa May au sujet de la tentative d'assassinat sur
l'ex-espion russe, Sergueï Skripal et sa fille dont le Royaume-Uni accuse les
services secrets russes.
«Le président ne va pas se rendre sur le pavillon
officiel de la Russie au salon du livre (…) dans le contexte de l'attaque de
Salisbury en cohérence avec nos positions et par solidarité avec notre allié
britannique», a indiqué l'Élysée
Le
communiqué souligne «les liens culturels étroits entre la société russe et la
société française» et l'intention du Président de rencontre «des auteurs russes
lors de sa visite».
L'ambassadeur
de Russie en France, Alexeï Mechkov, a déploré la décision du Président
français.
«Naturellement, nous regrettons que cela soit
arrivé. Mais nos partenaires français doivent enfin comprendre qui mène cette
politique et quelle est sa nature […] Malheureusement, nous nous attendions à
des provocations», a déclaré le diplomate.
Commentant
les mesures possibles qui, selon Macron, pourraient être adoptées dans un proche
avenir contre la Russie, l'ambassadeur a noté que Moscou préfère travailler non
«avec des hypothèses, mais avec des actions concrètes».
«Je suis convaincu que la France, grâce à sa longue
histoire, sait quelle est la casuistique de la politique britannique. J’espère
qu’elle comprendra que tout ce qui se passe aujourd'hui n'a rien à voir avec le
sort tragique de ces deux personnes [Sergueï Skripal et sa fille, ndlr.]
d’autant plus que nous ne savons même pas dans quel état elles se trouvent»,
a-t-il souligné.
LA VOLTE-FACE DE MACRON :
« pas d’autre explication plausible »… Vraiment ?
PAR MAXIME PERROTIN
Dans l’affaire Skripal, Paris s’aligne sur les
accusations à l’encontre de la Russie de Londres et de ses alliés de l’OTAN.
Malgré l’enquête en cours, les chancelleries occidentales brandissent comme
preuve irréfutable la paternité russe de l’agent neurotoxique «Novichok», alors
même que bien d’autres entités ont pu avoir accès à sa formule…
«Tout porte à croire que la responsabilité est attribuable
à la Russie et en cela le travail mené par les services britanniques, partagé
avec les services français, le confirme.»
Changement de ton radical à l'Élysée, ce jeudi 15 mars ! Au
cours d'un déplacement en Indre-et-Loire, Emmanuel Macron a déclaré qu'il
annoncerait des mesures «dans les prochains jours» à l'encontre de la Russie,
estimant que «tout porte à croire» que Moscou est «responsable» de
l'empoisonnement de l'ex-agent double Sergueï Skripal, de sa fille Yulia ainsi
que d'un agent de police. Un empoisonnement dont Londres tient Moscou
responsable. Sans surprise, la Russie réfute ces accusations et demande à juger
sur pièces, en l'espèce des échantillons du neurotoxique incriminé:
Mercredi,
alors que Berlin et Washington avaient
assuré Theresa May de leur soutien avant son annonce
d'une série de mesures à l'encontre de la Russie devant le
parlement britannique, Paris avait prévenu qu'elle attendrait les conclusions
définitives de l'enquête avant de prendre d'éventuelles mesures de rétorsion.
Une prudence qui avait provoqué «l'ire d'une partie de la presse britannique»,
comme le soulignait Reuters.
Dans
un communiqué, l'Élysée déclare maintenant que «la France partage le constat du Royaume-Uni
qu'il n'y a pas d'autre explication plausible et exprime à nouveau sa
solidarité à l'égard de son alliée».
Ainsi, sans attendre les conclusions de l'enquête, l'Élysée
s'aligne sur ses alliés de l'OTAN, qui depuis
plusieurs jours somment les autorités russes de
fournir à Londres les informations qu'elle exige, faisant monter d'un cran la
tension entre les capitales européennes et Moscou, qui a annoncé qu'elle
répondrait par une série de contre-mesures.
Jusqu'à
présent, les annonces du Premier ministre britannique étaient plus de l'ordre
du «symbolique», selon le politologue Philippe Moreau-Desfarge, qui répondait à
nos questions le 14 mars, dans la foulée de l'annonce des actions pour l'heure
prise par le Royaume-Uni à l'encontre de la Russie.
Des
mesures «classiques» — ne devant selon lui avoir «aucune conséquence»
autres que diplomatiques — telles que le boycott de la Coupe du
monde par la famille royale et les membres du gouvernement britannique, ou le
renvoi de 23 diplomates considérés par Londres comme des «agents de
renseignement non déclarés» ou la «suspension des échanges bilatéraux» à haut
niveau. Le Foreign office devait pour sa part se charger d'appeler à la
vigilance pour les sujets britanniques qui voudraient se rendre en Russie.
«Je pense qu'il y a une volonté de dramatiser la
situation, qui est assez caractéristique aujourd'hui au Royaume-Uni. L'enquête
n'est pas finie que l'on sache, il y a toujours des investigations en cours et
on désigne l'accusé principal comme coupable d'emblée», souligne, Pierre
Lorrain, journaliste et spécialiste de la Russie à Sputnik.
Il
estime par ailleurs que ce regain de tensions était «relativement prévisible»
et s'interroge sur le calendrier de cette affaire ultra-médiatisée, à
l'approche des élections présidentielles russes et de la Coupe du monde de
football…
«Il se trouve que chaque fois qu'un élément majeur
se passe en Russie, il y a systématiquement dans le monde occidental des
tentatives — réelles ou non — de mettre en accusation la Russie sur divers
thèmes.»
Toutefois,
Pierre Lorrain n'écarte pas complètement une éventuelle implication des
services russes dans cette tentative d'assassinat, mais juge l'hypothèse peu
crédible : «Peut-être que ce sont
les services russes qui sont responsables de cela… mais dans ce cas il faudrait
considérer que les services et le gouvernement russes sont idiots ou
irresponsables de se lancer dans ce genre d'opérations et de provocation à la
veille d'évènements majeurs qui pouvaient redorer le blason de la Russie auprès
des Occidentaux.»
Des
affaires qui, selon le journaliste, «présentent la même caractéristique: c'est
qu'il n'y a pas de preuve», le conduisant à s'interroger sur la possibilité
d'une provocation : «Beaucoup de
personnes, beaucoup d'intérêts dans le monde, ont des visées sur le fait que la
Coupe du monde ne se déroule pas dans de bonnes conditions et à l'approche des
élections présidentielles en Russie, que le Président Poutine soit désigné
comme quelqu'un de pas fréquentable et surtout d'indésirable pour l'Occident.»
Preuve irréfutable de la culpabilité des russes, brandie à
l'unisson par les autorités britanniques et les médias: l'utilisation du gaz
innervant Novichok («nouveau venu», en russe), qui ne serait maîtrisé que par
la Russie et le Kazakhstan. Seul bémol à cette rengaine, la formule de ce super
agent neurologique top secret serait disponible sur Internet ici ou là depuis 2008 de
façon partielle et 2016 de manière plus complète, pour autant que l'on puisse
juger de la pertinence des informations publiées.
Mais en
réalité, cela fait bien plus longtemps que la formule du Novichok circule, et
pas que dans les milieux autorisés. Le chimiste russe Vil Mirzayanov avait
révélé son existence en 1992 dans un hebdomadaire moscovite. Les autorités
russes ayant estimé que les formules n'étaient pas inconnues de la presse
soviétique et ayant levé leurs accusations de trahison, le chercheur était
parti s'installer aux États-Unis, où il avait publié un ouvrage détaillé sur le
sujet.
Un
point sur lequel revenait Alain Rodier, directeur du Centre Français de
recherche sur le renseignement (CF2R), au micro de l'un de nos
journalistes.
«Il avait même publié un livre aux États-Unis dans
lequel […] les formules étaient disponibles. On peut donc penser que d'autres
personnes étaient tout à fait au courant de ce type de produits.»
Alain
Rodier, qui s'étonne par ailleurs du modus operandi de cette opération «homo»
(pour «homicide»), celle-ci ayant visée un agent échangé, un cas «sans
précédent» souligne-t-il, sans parler de l'implication d'un membre de sa
famille, là encore un élément qui contraste avec le mode opératoire de ce type
d'assassinats ciblés, qui jalonnent l'histoire de l'espionnage. D'ailleurs,
Sergueï Skripal n'avait été condamné qu'à 13 ans de prison en Russie, une peine
légère pour un espion tendant à montrer qu'il n'avait transmis aux Britanniques
que des informations de second ordre. Pourquoi dès lors se venger de lui huit
ans plus tard ?
Mais
ces incertitudes ne concernent pas que la forme ou le calendrier. Un dernier
point attire particulièrement notre attention. En effet, contrairement à ce que
répètent en chœur nos confrères, le Novichok n'a pas été développé et testé
uniquement sur les territoires actuels de la Russie et du Kazakhstan…
«L'institut de recherche chimique de l'ouest de
l'Ouzbékistan était un important site de recherche pour une nouvelle génération
d'armes chimiques secrètes et hautement mortelles, connues sous le nom de
Novichok.»
Ces mots, sont ceux d'un responsable américain, relayés par la
correspondante de la BBC en Asie Centrale, Louise Hidalgo, lors de l'arrivée
d'un groupe d'experts de la défense américaine en Ouzbékistan afin d'y
démanteler et décontaminer l'un des plus gros centres de tests d'armes
biologiques de l'URSS. Un projet pour lequel le Congrès américain alloua 6
millions de dollars suite à un accord d'assistance passé avec l'ex-république
soviétique quelques mois plus tôt.
Bref, la liste des personnes ou entités
ayant potentiellement eu accès à ce produit est bien plus longue que ce que ne
le laissent entendre les Britanniques et leurs relais. Ne serait-il pas prudent
dans ces conditions d'attendre les résultats d'une enquête sérieuse avant de
jeter de l'huile sur le feu ?
Source : https://fr.sputniknews.com
15 mars 2018
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