jeudi 20 avril 2017

La présidentielle française et nous

...En dépit des « indépendances »
Pour ceux qui sont dans leur bulle et qui refusent de voir le monde tel qu’il est, l’élection présidentielle en France dont le premier tour se déroulera le 23 Avril prochain, ne concerne pas les Africains et précisément les Africains francophones. Leur argument : Que chacun s’occupe de ses oignons. Evidemment, ils ont tort. Non seulement le monde est devenu un village planétaire, mais cette élection française nous touche également et au plus haut point.
Ce qui va se dérouler le 23 Avril puis le 7 Mai 2017 n’est pas uniquement déterminant pour l’avenir des 66 millions d’habitants de l’Hexagone mais il l’est aussi pour des millions d’Africains dont, en première ligne, nous, les Africains issus des pays d’expression française. Des pays qui ont une histoire avec la France et qui conservent un cordon ombilical avec l’ex-pays colonisateur depuis plusieurs dizaines d’années. En dépit des « indépendances ». Cette élection n’est donc pas la scène où s’exécute seulement l’avenir des Français ; elle est aussi le scénario d’un film qui aura un impact sur le devenir de nombreux Africains.
La France n’est-elle pas le véritable patron de nos économies UEMOA et CEMAC ? N’est-ce pas elle qui parraine le fameux FCFA, la monnaie aujourd’hui décriée de l’Afrique de l’Ouest et du Centre ? La France n’a-t-elle pas des troupes stationnées dans nos pays depuis belle lurette ? Ne mène-t-elle pas depuis quelques années une lutte acharnée contre le terrorisme et l’obscurantisme djihadiste pour nous en préserver ? Et puis, comme disent les Anglo-Saxons, « the last but not the least », la France n’est-elle pas la destination favorite des immigrés, clandestins ou légaux, d’Afrique francophone ?
Autant de questions qui prouvent que nous avons tous en partage avec les Français l’unique question qu’ils se posent actuellement relativement au scrutin présidentiel dans leur pays : Qui sera le futur locataire de l’Elysée ? Ils sont onze (11) candidats à briguer la magistrature suprême. Deux (2) femmes font face à neuf (9) hommes dans l’arène. Il s’agit de Nathalie Arthaud, Marine Le Pen, François Asselineau, Benoît Hamon, François Fillon, Jean-Luc Mélenchon, Philippe Poutou, Jean Lassalle, Jacques Cheminade, Nicolas Dupont-Aignan et Emmanuel Macron. Les différents débats télévisés qui les ont opposés, les vidéos de leurs meetings ainsi que les interviews radio ou télé que nous continuons de suivre les concernant, nous ont permis de comprendre que dans la stratégie de leur campagne, l’Afrique constitue une préoccupation résiduelle. La main sur le cœur, ces onze matadors promettent tous d’être « Président pour les Français ».
Dans le fonds, à tous les écouter, on croirait entendre Donald Trump, l’actuel président américain, et son slogan populiste de campagne « America First ». Pourtant une fois à la Maison Blanche, M.Trump n’a pas eu besoin de l’avis des Syriens pour bombarder un aéroport en Syrie, fut-il militaire ! Donald Trump dit avoir agi par humanisme, pour sauver les populations civiles syriennes de « l’ogre Bachar ». Alors que les victimes civiles collatérales de ce bombardement sont aussi effroyables que les corps d’enfants et de femmes sans vie qui ont succombé au gaz toxique qu’aurait répandu l’armée syrienne. La Syrie n’est pas les Etats-Unis et pourtant Trump y a agi unilatéralement. Comme quoi la réalité du pouvoir est aux antipodes des discours de campagne.
Le successeur de François Hollande, que ce soit Madame ou Monsieur, n’ordonnera pas le démantèlement des bases militaires en Afrique. Le nouveau locataire de l’Elysée ne se réjouira pas de la perte d’influence, au plan politique et économique, de la France sur ce continent riche en matières premières et en opportunités diverses. Il ou elle ne soumettra pas son pays à un tel hara-kiri. La Françafrique telle qu’elle est apparue sous De Gaulle, Pompidou et Giscard d’Estaing, puis s’est poursuivie avec Mitterrand, Chirac et Sarkozy sous des dehors bling-bling, disparaîtra-t-elle réellement après 2017 ? Il faudra en douter.
L’élection présidentielle française de 2017 ne changera donc rien. Seuls les Africains, rassemblés dans des sociétés civiles de plus en plus conscientes, dont les clameurs monteront inexorablement vers l’Elysée, pourront faire bouger les lignes. En s’appropriant les processus démocratiques locaux et les aspirations à la liberté, au bien-être social et au respect des droits humains.

Didier Depry


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Source : Notre Voie 13 Avril 2017

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