B. Dadié et M. Amon-Ago (Archive) |
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Je
souhaite, avant tout propos, dire au nom du CNRD et de la délégation
qui m’accompagne, ma joie et ma fierté de vous retrouver en ces
lieux chargés de symboles et de souvenirs. L’espace qui nous
accueille est l’ancien QG de campagne du candidat Laurent Gbagbo,
le choix de l’ex-Majorité
Présidentielle, investi ici même en
septembre 2010. L’autre grand symbole de notre idéal commun est
bâti sur le socle de la démocratie, de la solidarité, de la
justice, de la liberté et du refus de la domination intérieure et
extérieure. Je veux évoquer le souvenir de nombre de nos camarades
sauvagement assassinés, tels que Boga Doudou, Désiré Tagro, Mahan
Gahé ; je pense aux autres camarades en captivité tels que Laurent
Gbagbo, Simone Ehivet Gbagbo, Blé Goudé ; je pense à d’autres,
encore en exil, comme Dr Assoa Adou, Koné Katinan, Sansan Kouao,
Koudou Késsié, Hubert Oulaye, Don Mello, Bertin Cadet, William
Attéby, etc. ; ainsi qu’à des milliers d’illustres inconnus
vivant dans des camps de réfugiés, avec parfois des enfants et des
nouveau-nés.
Comme
vous le savez, le sort de ces différentes catégories de patriotes
dépend, depuis le 11 Avril 2011, du bon vouloir du régime RHDP et
de ses soutiens.
Je
salue hautement la Direction du FPI avec à sa tête le camarade
président Pascal Affi Nguessan, qui m’a fait l’honneur de
m’associer à la présente cérémonie d’installation de la
vice-présidente Marthe Amon-Ago chargée de la Coordination de la
lutte pour la libération du Président Gbagbo. Je salue cette
initiative d’importance historique. Je la salue avec d’autant
plus d’enthousiasme que l’honorable Amon-Ago Marthe se trouve
être, en sa qualité de Secrétaire Générale du CNRD, ma
collaboratrice, pour ne pas dire la cheville ouvrière dudit Congrès.
Je m’en honore et lui adresse, par la même occasion, les très
chaleureuses félicitations de toute la famille CNRD.
Je
salue, au-delà des personnalités ici présentes, l’ensemble des
Invités : militants ou sympathisants du FPI, militants ou
sympathisants des partis membres du CNRD ; acteurs politiques ou
responsables syndicaux venus si nombreux, vivre en personne un
événement exceptionnel qui survient à un moment non moins crucial
de la vie nationale. De ce point de vue, cette cérémonie sera pour
moi, l’occasion de réitérer mon appel à vous lancé le 11 Avril
2013, lors des manifestations marquant le 2ème anniversaire du
renversement du Président Gbagbo. En effet, fondé en 2006, en
réaction contre la création à Paris du RHDP, cet instrument
politique dirigé contre l’unité et la paix en Côte d’Ivoire,
le CNRD a pour mission la défense de la démocratie. Il est le
ralliement de toutes les forces ivoiriennes indignées par la
naissance du RHDP, et dressées contre l’arbitraire et la volonté
de puissance. Le CNRD est pour la Côte d’Ivoire ce que fut le
Conseil de la Résistance en France lors de l’occupation nazie. A
la différence que les Résistants français étaient armés et que
les membres du CNRD ont résisté, et continuent de résister, les
mains nues. Tout simplement parce qu’ils ont foi en la supériorité
de l’esprit sur la force physique et la brutalité.
Mesdames
et Messieurs, l’évolution chaotique de ce qu’il est convenu
d’appeler "l’affaire Gbagbo" initiée par la CPI, le 29
Novembre 2011, confirme l’hypothèse d’un vaste complot
international ourdi contre la Côte d’Ivoire de Laurent Gbagbo. Ce
complot tient à une double raison. D’une part, Laurent Gbagbo a
fondé un parti politique adossé à un projet de société dont la
pertinence historique fait rougir de jalousie les héritiers de Karl
Marx et de Jean Jaurès ; d’autre part, Laurent Gbagbo est un chef
charismatique peu accommodant dont les maîtres du monde constatent
qu’il est en train d’écarquiller les yeux et d’éveiller les
consciences de centaines de millions d’opprimés et d’humiliés à
travers l’Afrique et le monde. Un tel acteur politique, parce que
peu conformiste, est assimilé à un dirigeant djihadiste qui mérite,
soit d’être éliminé physiquement comme ce fut le cas de Salvador
Allende du Chili, le 11 septembre 1973 ; soit d’être déporté
loin de sa terre natale. Et c’est cette dernière formule qui l’a
emporté. Ainsi s’explique le harcèlement judiciaire dont il est
victime depuis quatre (04) ans. Vous vous souvenez, Laurent Gbagbo
avait exigé qu’« on aille jusqu’au bout ». Aller jusqu’au
bout comme l’exigeait le capitaine Alfred Dreyfus injustement
inculpé de haute trahison parce qu’il est de confession juive.
Personne n’est donc dupe : ce qui se passe à La Haye n’est
qu’une mascarade judiciaire à l’image de "l’affaire
Dreyfus". Face à l’acharnement, aux incohérences et à la
faiblesse d’une Accusation aux abois et faisant feu de tout bois,
le CNRD avait engagé le FPI ainsi que les Patriotes d’ici et
d’ailleurs, à plus de détermination et de sérénité à la fois.
Le 11 Avril 2013, nous demandions en effet au FPI et à ses alliés,
d’engager sans délai, une vaste campagne de mobilisation et de
réarmement moral, pour la bonne raison que le camp Gbagbo dispose,
malgré la barbarie qui s’abat sur lui, d’un capital symbolique
plus consistant, par comparaison avec le capital squelettique de ceux
qui ont exigé et obtenu la recolonisation de la Côte d’Ivoire.
Toujours ce 11 Avril 2013, le CNRD avait fait remarquer que, quelle
que soit la décision des juges, la captivité de Laurent Gbagbo ne
saurait être la fin de Laurent Gbagbo. C’est qu’il y a un lien
très fort entre le FPI et Laurent Gbagbo d’une part, entre
celui-ci et les pro-Gbagbo à travers la Côte d’Ivoire, l’Afrique
et le reste du monde, d’autre part. Normal si l’on sait que les
héros durent et que les leaders charismatiques généreux et
courageux d’Europe, d’Amérique et d’Asie ayant marqué leur
époque, se survivent toujours dans les générations ultérieures.
Que l’ONU, la CPI et l’Occident se détrompent donc : Laurent
Gbagbo-corps physique est certes en otage, là-bas, au cœur de
l’Europe, parce qu’il s’est montré peu docile ; mais Laurent
Gbagbo-esprit et incarnation de la dignité africaine, plane et
planera toujours sur l’Afrique. Plus sa captivité durera, plus les
masses populaires s’approprieront son idéal politique ; et c’est
ce que signifie, aux yeux du CNRD, la nomination d’une
vice-présidente du FPI, chargée de la Coordination de la lutte pour
la libération de Laurent Gbagbo : au lieu d’être un dissolvant
pour les pro-Gbagbo, l’acharnement judiciaire contre Laurent Gbagbo
et les pro-Gbagbo constitue un tonifiant politique de première
importance.
Camarades
militants et militantes, les manœuvres dilatoires en perspective
n’ont qu’un objectif : maintenir Laurent Gbagbo hors du pays le
plus longtemps possible, pour permettre à la forfaiture de
prospérer. C’est ce qui explique le passage en force de
l’Etat-RHDP qui a reconduit Youssouf Bakayoko à la tête d’une
CEI vomie par certains membres du Conseil de Sécurité. C’est à
partir de là que l’on comprend la récente déclaration de Henri
Konan Bédié, président du PDCI-RDA faisant d’Alassane Ouattara
le candidat unique du RHDP pour la Présidentielle de 2015. Par là,
le président Bédié veut-il insinuer qu’« on ne change pas une
équipe qui gagne » ?
Mais
on peut se demander ce que l’Etat-RHDP a gagné pour une Côte
d’Ivoire émergente en dehors du chaos qu’il a instauré : le
départ en exil de plus de 100 000 Ivoiriens, les milliers de morts,
les centaines de comptes gelés, le millier de prisonniers
politiques, la recrudescence de l’insécurité associée au
phénomène des "dozo", des "gnambro" et des
"microbes", aux exactions des FRCI, au surendettement de la
Côte d’Ivoire, au règne de la justice des prétendus vainqueurs,
perceptible à Abidjan comme à La Haye, bref, à la morosité, au
désespoir se traduisant par le phénomène de l’immolation par le
feu. Nous sommes en présence d’un "Etat suicideur " sur
le point de devenir un Etat PDCI-RDR. Au lieu de créer la richesse
et le bien-être pour tous, promis, Alassane Ouattara s’est lancé,
dès son arrivée au pouvoir, dans une politique moyenâgeuse de
"rattrapage" au profit du Nord et des Nordistes, avec la
complicité active du clan Bédié, tournant ainsi le dos à la
République. Nous sommes à un tournant crucial et le CNRD doit se
poser la question suivante : que faire ?
Les
défis qui se dressent devant nous sont certes immenses, mais non
insurmontables. En effet, dans leur volonté hégémonique, Konan
Bédié et Alassane Ouattara sont en train de s’isoler : le
premier, de sa base authentiquement houphouëtiste et le second, de
ses soutiens extérieurs d’ailleurs de plus en plus éclaboussés
par les dérapages et l’arrogance d’un chef peu soucieux des
intérêts du peuple. Cela s’appelle vouloir s’attirer la
désapprobation de l’opinion publique : sran-nouan
des Agni-Baoulé, glonouan des Bété, zimouh
des Gouro, gnounan des Wê. C’est en fait le cancer
politique qui ronge ou détruit radicalement les partisans de
l’arrogance, de l’absurdité et de l’arbitraire. Les patriotes
pro-Gbagbo n’ont pas la naïveté de croire que les forces
coalisées qui ont bombardé la résidence du président Gbagbo, le
11 Avril 2011, vont se retourner subitement contre leur choix.
Souvenez-vous, la grande France de la Liberté, de la Fraternité et
de l’Egalité, la France des Droits de l’Homme, n’a pas hésité
à détruire la résidence du président de la République.
Voyez-vous, alors qu’ils ont le même ennemi que la Syrie de
Bachar-Al-Asad, les vainqueurs d’Hitler n’entendent nullement
faire de la Syrie leur allié dans la guerre qu’ils mènent contre
l’Etat Islamique !
Cependant,
il y a lieu de croire que, petit à petit, la dialectique aidant, la
lutte pour la libération de Laurent Gbagbo va s’amplifier et
porter ses fruits. Elle va porter ses fruits parce que le CNRD, le
FPI, les pro-Gbagbo et bien des militants du PDCI et du RDR, se
rendent compte que la Côte d’Ivoire, leur pays, est devenue une
marchandise que l’on vend aux enchères. Cette triste réalité
doit amener le FPI à assumer son rôle de première formation
politique et de moyen de rédemption nationale : l’adage enseigne
que « lorsque la calvitie ne trouve pas de personnes âgées dans la
citée, elle se pose sur la tête des jeunes ». En d’autres
termes, « aux âmes bien nées, la valeur n’attend point le nombre
des années ».
Chers
camarades militants du FPI, j’avais salué en son temps, votre
maturité politique. Là-dessus, j’insiste encore aujourd’hui
pour vous demander de vous mettre à l’abri des rumeurs assassines,
en toute responsabilité.
L’Etat
PDCI-RDR dont rêvent désormais Konan Bédié et Alassane Ouattara
ayant une vocation ouvertement exclusionniste, il importe que le FPI
et l’opposition digne restent davantage à l’écoute du peuple
ivoirien dans sa diversité politique et socioculturelle. L’heure
de la mobilisation de type républicain a sonné en même temps que
le glas pour les dérives autoritaires. En disant cela, les Patriotes
devront employer un langage quasi "terre à terre" pour
mieux se faire comprendre à travers le pays. Ils devront mettre à
profit de nouvelles tribunes médiatiques telles que Afrique Média
et bien d’autres espaces de liberté.
Mesdames
et Messieurs, je souhaite clore mon propos en réitérant mes très
vifs remerciements à l’endroit des initiateurs de cette cérémonie
historique ; en saluant la mémoire de tous nos morts ; en
renouvelant mes félicitations à Mme Marthe Amon-Ago, et en marquant
la solidarité du CNRD avec Laurent Gbagbo, Simone Gbagbo, Charles
Blé Goudé, Dogbo Blé, Noël Abéhi, ainsi qu’avec nos camarades
exilés ; en remerciant vivement le Conseil du Président Gbagbo,
avec à sa tête Me Altit ; en rendant un vibrant hommage à la
Galaxie patriotique d’Europe et d’Amérique, aux Intellectuels
d’ici et d’ailleurs, épris de justice et de liberté.
Oui,
la Côte d’Ivoire brûle ! Et face à un tel péril, les Ivoiriens
de tous bords doivent se rassembler autour des valeurs d’unité
nationale, de justice et de souveraineté, valeurs au nom desquelles
l’histoire engage, ici et maintenant, le CNRD, le FPI et leurs
alliés, à mener le juste combat pour la libération de Laurent
Gbagbo et la réconciliation nationale.
Je vous remercie.
Bernard
Dadié (20 septembre 2014)
Source : CIVOX. NET 22
Septembre 2014
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