En Côte
d’Ivoire, pour devenir millionnaire ou milliardaire, il n’est plus nécessaire
d’étudier ou de travailler dur ; il suffit de tuer, de violer et de piller le
bien d’autrui, tel est le message envoyé par Alassane Dramane Ouattara non
seulement aux Ivoiriens mais au monde entier après la dernière mutinerie que le
pays vient de connaître. En attendant que l’on évalue tous les dégâts de cette
mutinerie, on peut admettre d’ores et déjà que la protestation des militaires
non seulement écorne l’image d’un pays que certains analystes superficiels
disaient aussi sécurisé que la Suisse mais ternit un peu plus le blason de Ouattara
que ses partisans ont toujours présenté comme un homme fort et ferme. La
semaine dernière, Ouattara n’a été ni fort ni ferme. Ses proches déclarent même
qu’il était si atteint, si ébranlé, qu’il aurait envisagé de démissionner. À
ceux qui en doutaient encore, le dénouement du dernier bras de fer entre le
pouvoir fantoche et moribond d’Abidjan et ses mutins aura surtout révélé que
Dramane Ouattara occupe le fauteuil présidentiel, non parce qu’il a été
démocratiquement élu, mais parce que des tueries et massacres ont été perpétrés
par des voyous et analphabètes qu’il avait recrutés au Burkina, au Mali, en
Guinée, au Togo et dans d’autres pays de l’Afrique occidentale. Dans une vidéo
postée sur Facebook, en effet, deux mutins n’affirment-ils pas qu’eux et leurs
camarades ont voté pour que Ouattara soit à la tête de la Côte d’Ivoire mais
que ce sont leurs armes qui l’y ont installé ?
Une
affirmation que je trouve un peu exagérée car, même si ces Pieds Nickelés y ont
mis du leur, ont perdu amis et compagnons dans cette folle aventure, même si
Ibrahim Coulibaly et ses hommes du « Commando invisible » ont fait de
nombreuses victimes parmi les policiers et gendarmes à Abobo, on doit
reconnaître que, en définitive, ce sont les soldats français appuyés par la
force onusienne censée pourtant être neutre, et non les FRCI, qui ont eu raison
de nos forces de sécurité et de défense. Tous ceux qui étaient présents à la
résidence du chef de l’État entre le 1er et le 11 avril 2011 peuvent attester
que la France utilisa tous les moyens militaires dont elle disposait (avions de
guerre, hélicoptères, missiles, rafales, etc.) contre Laurent Gbagbo qui non
seulement n’avait pas déclaré la guerre à l’ancienne puissance colonisatrice
mais demandait le recomptage des voix pour un règlement pacifique du
contentieux électoral. Le président ivoirien aurait pu périr dans ce déluge de
feu, car tel était le but recherché par ses adversaires (Sarkozy, Jean-Marc
Simon, Ouattara, Bédié et Soro) mais il eut la vie sauve probablement parce que
la mission que Dieu lui a confiée n’était pas encore achevée. Non, les rebelles
de Ouattara n’étaient pas assez forts pour battre nos soldats. La Licorne les
aida plutôt à pénétrer dans la résidence présidentielle où ils firent montre
d’une barbarie inouïe envers les Henri-Philippe Dacoury-Tabley, Christine
Adjobi, Yanon Yapo, Jean-Jacques Béchio et d’autres.
En
d’autres termes, sans les Français, les FRCI auraient mordu la poussière devant
nos valeureux militaires. Cela est d’autant plus vrai que les attaques de la
rébellion contre la République, ses institutions et ceux qui les incarnaient
n’ont pas débuté le 11 avril 2011. C’est en 2002, précisément le 19 septembre,
que tout commença. Ce jour-là, Kigbafori Soro et sa bande de criminels furent
chassés d’Abidjan et poursuivis jusqu’à Bouaké par des soldats loyalistes peu
équipés. La thèse selon laquelle les rebelles auraient pris la capitale
économique si la Licorne ne s’était pas interposée ne tient donc pas la route.
Début novembre 2004, la rébellion était presqu’anéantie quand Jacques Chirac la
remit en selle en détruisant nos avions militaires. Sarkozy vola ensuite à son
secours en 2011 pour combattre et remplacer Laurent Gbagbo par Ouattara. En
principe, tout devait alors aller comme sur des roulettes mais chacun s’aperçut
très vite qu’il y avait des problèmes entre Ouattara et son armée. D’où
venaient-ils ? Du fait que les promesses faites (cinq millions de F. CFA plus
une villa à chaque soldat) n’avaient pas été tenues. Pourtant, on nous avait
dit et répété en 2016 que l’Ivoirien nouveau est celui qui respecte la parole
donnée, ne dérange pas la quiétude des populations, tourne le dos aux coups
d’État, etc.
La République aurait-elle été épargnée par ces mutineries à
répétition avec leur lot de désagréments, de traumatismes, de jours chômés, de
morts et de blessés par balles ? Oui, si nous avions eu un président sorti des
urnes et non imposé par les armes. Et c’est ici qu’émerge la première leçon de
cette mutinerie : les solutions apportées par la violence sont toujours des
solutions provisoires. Mahatma Gandhi l’a bien résumé dans cette formule : « Je m’oppose à la violence parce que,
lorsqu’elle semble engendrer le bien, le bien qui en résulte n’est que
transition, tandis que le mal produit est permanent ». Le moins que
l’on puisse dire est que Ouattara et ses adeptes sont rattrapés par leur propre
violence, celle qu’ils ont introduite dans le jeu politique ivoirien. De cette
violence, ils ont usé et abusé contre Bédié, Guéi et Gbagbo pour arriver au
pouvoir. C’était leur marque de fabrique. D’où vient-il alors que les
Soumahoro, Bictogo, Hamed Bakayoko condamnent aujourd’hui tout recours à la
violence ? Pourquoi celle-ci serait-elle bonne pour eux et pas pour les autres
? Eux qui ont été prompts à arrêter puis à incarcérer une pauvre dame qui
vendait au marché de Yopougon, pourquoi ne font-ils rien contre Soul II Soul,
collaborateur de Soro, chez qui on aurait découvert quantité d’armes ? Un tel
« deux poids, deux mesures » est-il acceptable quand on prétend
militer pour la démocratie et la justice ? Ou bien Ouattara a-t-il peur de Soro
dont le discours sur le pardon et la réconciliation ne peut séduire que des
individus prêts à toutes les compromissions pour manger ou obtenir un
strapontin ?
La seconde leçon que l’on peut tirer de ces cinq jours de
mutinerie, c’est celle-ci : en acceptant de verser 42 milliards de F. CFA aux
mutins après les avoir menacés de sanctions, Ouattara prouve qu’il ne comprend
que le langage de la force. Les fonctionnaires, eux, sont méprisés et ignorés.
Parce qu’ils n’ont pas la force avec eux, parce qu’ils ne traumatisent pas les
Ivoiriens, parce qu’ils n’ont pas d’autre moyen de pression que le dialogue. Or
n’est-il pas étrange que les houphouétistes auto-proclamés qui prêchent le
dialogue à tout bout de champ se montrent sourds à leurs légitimes
revendications ? N’est-il pas absurde que le pouvoir laisse d’honnêtes
travailleurs crever de faim au moment où il ne recule devant rien pour
contenter des mercenaires ? Et combien de temps durera cette injustice ?
Ouattara, qui ne respecte que ceux qui tirent en l’air, est-il assuré que ceux
qu’il qualifiait hier de « libérateurs » ne reviendront pas à la
charge quand ils auront fini de dépenser l’argent perçu ?
En tout état de cause, les mutins,
devenus un véritable boulet après avoir été publiquement encensés et félicités,
auront montré qu’ils peuvent faire plier Ouattara et donc qu’ils sont à même de
le déboulonner à tout moment. Qu’ils aient affirmé avoir contribué à sa prise
du pouvoir par les armes confirme le fait que le président du RDR est un
putschiste. Certains, croyant peut-être se venger de Laurent Gbagbo, qui
n’aurait pas écouté leur appel à exiger le désarmement de la rébellion avant
l’élection d’octobre 2010, s’étaient empressés de dire que Dramane Ouattara
avait gagné la présidentielle d’octobre 2010. Ils sont mêmes allés à son
investiture. Aujourd’hui, sans gêne, ils soutiennent que, sans les mutins,
Ouattara n’aurait jamais été au pouvoir. Pourquoi ont-ils changé d’avis ? L’imminente
libération de Laurent Gbagbo annoncée par certaines personnes qui se fondent
sur le fait que la plupart des témoins à charge ont jusqu’ici blanchi le
pensionnaire de Scheveningen ? Une libération que ne souhaiterait pas
Roch-Christian Kaboré parce que, d’après lui, ses compatriotes vivant en Côte
d’Ivoire étaient massacrés sous Laurent Gbagbo. Qu’est-ce que je pense de la
sortie du président burkinabè ? D’une part, l’opinion de ce mendiant et laquais
de la France importe peu ; d’autre part, quand nous aurons fini de dégager son
frère Dramane, lui, Salif Diallo et les autres Burkinabè qui ont pris part à la
déstabilisation de notre pays, nous leur demanderons des comptes car ce serait
trop facile que leurs crimes restent impunis. Voilà des gens qui considèrent
leur pays comme celui des hommes intègres alors que les seuls domaines où ils
excellent sont les vols et les tueries. Et puis, pourquoi les Burkinabè ne
rentrent-ils pas chez eux s’ils se sentent persécutés en Côte d’Ivoire ? Qui
les en empêche ?
Jean-Claude DJEREKE
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Source :
connectionivoirienne
20 mai 2017
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