mardi 16 avril 2019

CLIMBIÉ S’EST ABSENTÉ… (3/5)



NOTRE HOMMAGE À BERNARD BINLIN DADIÉ
1916-2019

Avec l'aimable permission de Grah Pol
Non ! Le maître n’est pas mort. Il s’est seulement déporté sur l’autre rive de l’Histoire, d’où, certes, il ne nous sera plus jamais donné d’apercevoir son être de chair ni de l’entendre de vive voix mais d’où il continue de nous parler, et continuera tant que subsisteront ce pays et ce peuple qu’il a tant œuvré à faire naître à la conscience d’eux-mêmes.

HONNEUR ET PAIX À SON ÂME, ÉTERNELLEMENT !

La Rédaction


La déclaration de Bernard Dadié 
lors du premier procès de l’affaire du 6 février 1949.[1]

Dans ce procès nous disons nettement que nous sommes ici devant vous des détenus politiques, titre qu’on a toujours refusé, mais qui s’est toujours aussi imposé de lui-même. Il s’est imposé de lui-même, dès le premier jour de notre arrestation, lorsque le juge d'instruction, après nous avoir déclaré : « j'ai reçu l'ordre de vous arrêter », ajouta : « cette fois nous tenons la tête ; nous avons assez des lam­pistes ». La tête de quoi ? La tête de notre mouvement, nous, ses dirigeants. Cette phrase éclaire d'un jour cru le complot longtemps ourdi, tramé, complot qui a abouti à notre arrestation. C'était un aveu de taille que devaient venir corroborer les perquisitions dans les bureaux du parti, les fouilles domiciliaires à la recherche d'on ne sait quoi, le grand déploiement de forces pour frapper l'esprit de la masse, dans le but intentionnel de la décourager, la détacher de nous. On a escompté le même résultat, quand après nous avoir mis, enfermés dans le cor­billard municipal, l'on nous promena dans Treichville et Adjamé, quartiers africains d'Abidjan, comme pour dire à nos camarades militants : « Voilà ce qu'on fait de vos dirigeants, si vous ne quittez pas le Ras­semblement Démocratique Africain vous subirez le même sort ». N'est-ce pas là le sens des arrestations massives actuelles ; l'origine du terro­risme qui pèse sur nos populations dont le seul crime a consisté à être ferme dans ses convictions et à penser autrement qu'un gouver­neur ? Puis ce fut notre enterrement dans la prison de Grand-Bassam avec sur notre dos, des nuées d'agents secrets tel du chiendent sur la tombe. A la prison, sur plus de six cents détenus, à plusieurs reprises, l'on vient nous fouiller, nous les « 8 ». Tout cela pour chercher la vérité qu'on ne trouvait pas, la vérité qu'on ne voulait point recon­naître, la vérité que nous sommes des détenus politiques, les victimes d'un complot longtemps ourdi.
Mieux ! M. le Procureur Delamotte, au cours de sa première visite à la prison n'a-t-il pas déclaré publiquement qu'il allait bientôt nous mettre en liberté ? Or voilà qu'à la clôture du dossier, nous qui passons pour être des détenus de droit commun, l'on trouve d'un coup que notre mise en liberté « risque d'être gravement préjudiciable à l'ordre public ». Tandis que dans le même temps, on libère nos adversaires politiques pris, eux, en flagrant délit de port d'armes au cours d'une réunion publique.
Mieux encore, nous qui sommes nés dans ce pays, nous qui avons nos parents, nos amis et nos familles et nos biens dans ce pays, l'on trouve que nous nous soustrairions à l'action de la justice si on noua mettait en liberté provisoire. Pourquoi nous traite-t-on de la sorte ? C'est parce que nous sommes RDA et qu'on nous juge trop souvent sur des ouï-dire et des mensonges répandus par des journalistes besogneux, par des individus aveuglés par leur égoïsme. Le Rassemblement Démo­cratique Africain est une fédération de mouvements. Son programme ?
Plaçant au-dessus de toutes les considérations philosophiques ou religieuses le souci de lutter pour le progrès vers la liberté et la bien-être des populations africaines, les hommes du RDA ne veulent voir que l'effort considérable que la situation exige des Africains :
Effort de compréhension des intérêts véritables de l'Afrique.
a)  Effort de compréhension des intérêts véritables de l'Afrique.
b)  Effort de moralité pour faire taire nos préférences personnelles devant l'idéal humain qui nous anime.
c) Effort d'efficacité pour faire aboutir les légitimes revendications des Africains.
Les idées du RDA ?
La résolution votée à Bamako le 21 octobre 1946 exprime ainsi les idées fondamentales qui sont à la base du Rassemblement Démo­cratique Africain.
a)  Elaboration d'une politique qui reconnaisse et favorise la libre expression de l'originalité africaine en rejetant les entraves d'une fausse assimilation.
b)  Union de tous les Africains sans considération de croyance dans leur lutte contre le colonialisme.
c)  Union des Africains se réclamant de l'esprit du Rassemblement et des démocrates français décidés à les aider dans leur lutte commune contre l'impérialisme.
Originalité africaine ?
Oui, Monsieur le Président, Messieurs de la Cour, les Contes de Perrault nous enchantent, mais les ruses du lièvre et de l'araignée nous enthousiasment. C'est pourquoi nous voulons venir à l'Union Française avec notre fond proposé. Nous entendons, après avoir parlé de Vercingétorix, parler de tous nos Amadou Bamba, qui se sont fait sauter dans leurs citadelles assiégées.
Nous voulons, après avoir parlé de Jeanne d'Arc, parler de toutes nos héroïnes, de toutes nos amazones, de cette reine Aoura Pokou qui, pour la liberté de son peuple, jette dans le Bandama son unique enfant.
Nous voulons, après avoir parlé de Binger, parler de cette reine des Bobo, Makoura Ouattara qui le reçut pacifiquement.
Mais partout, nous ne rencontrons que des obstacles, des entraves. L'on semble vouloir étouffer notre génie afin de mieux nous asservir.
Ce sont des condamnations qui pleuvent sur nos organes de presse qu'on veut tuer.
Ce sont des recommandations sournoises pour qu'on « punisse sévèrement Réveil et ses collaborateurs ».
Ce sont des procès qu'on intente à nos responsables de sous-sections, parce que le peuple librement souscrit pour soutenir sa lutte contre les forces oppressives.
C'est l'interdiction de jouer ici, en Afrique Noire, des disques de Kéita Fodéba. C'est l'interdiction à Paul Robeson, de donner là-bas, on Amérique, des concerts. C'est la censure, l'interdiction à des livres, à des journaux de pénétrer ici en Afrique Noire.
Et, pour couronner tout cela, l'interdiction au Rassemblement Démocratique Africain de tenir des réunions publiques ici, en Afrique Noire, après l'interdiction de toute souscription ou quête dans ce pays. Ainsi nous n'avons même plus le droit de chanter nos propres misères ; plus le droit de pleurer nos libertés perdues ; plus le droit de refuser publiquement leurs mensonges et leurs calomnies ; pas le droit de transmettre quelque chose à l'avenir... Rien ! Et, c'est au moment où la Côte d'Ivoire entière est devenue une prison, c'est au moment où des administrateurs de colonie descendent des pauvres femmes, prennent la tête des razzias révolver au poing comme cela se passe dans Agboville, au moment où l'on tue à coups de bottes et de fusils, c'est ce moment-là que le gouverneur Péchoux choisit pour faire publier par son journal officiel la déclaration universelle des « Droits de l'Homme», laquelle déclaration en son article 19 dit :
« Tout individu a droit à la liberté d'opinion et d'expression, ce qui implique le droit de ne pas être inquiété pour ses opinions et celui de chercher, de recevoir et de répandre sans considération de frontière, les idées et les informations par quelque moyen d'expression que ce soit ».
Et oui ! C'est bien loin, la Charte des Nations Unies ! — Quatre ans à peine après la guerre — bien loin cet article 73 par lequel
« les puissances coloniales reconnaissent la primauté des intérêts des popula­tions qu'elles ont en tutelle et acceptent comme une mission sacrée de les conduire rapidement vers leur émancipation politique, économique et sociale, de les instruire en respectant leur culture, de les traiter avec équité et de les protéger contre les abus ».
C'est bien loin tout cela, puisque lorsque nous parlons d'originalité africaine, l'on nous traite de Russes, et de séparatistes lorsque nous parlons d'émancipation politique, économique et sociale. L'on nous combat donc parce que le Rassemblement Démocratique Africain est le seul mouvement qui ait pour la première fois, ici en Afrique Noire, posé le problème du devenir africain sous son vrai jour.
L'on nous combat parce que nous sommes un mouvement de lutte, un mouvement à programme revendicatif, un mouvement qui combat les abus et ne tresse aucun laurier à des gouverneurs de passage.
L'on nous combat parce que nous sommes pour le respect de la Constitution, pour la liberté contre l'esclavage — pour le bien-être contre les misères — pour la paix contre la guerre.
Etant persuadés que nous sommes incapables de penser par nous-mêmes, les réacteurs vont répétant, de telles conceptions ne peuvent venir que de Russie : et nous voilà traités de Russes, de communistes. Or nous savons que sous le couvert de l'anticommunisme, c'est une guerre incessante qu'on livre à la Paix ; une croisade contre la liberté ; une chasse effrénée à l'homme de progrès. Ainsi :
a)  En 1789, la Société des Amis des Noirs, qui combat l'esclavage, voit ses membres pourchassés et condamnés parce qu'ils propageaient des idées dangereuses, proposaient des mesures qui atteignaient de plein fouet les intérêts des esclavagistes. Autour de ce mouvement que l'on traite d'étranger, que l'on dit à la solde de l'étranger, se déclenche une propagande intense, endiablée, à l'instigation des colons dans le but de perdre ce mouvement dans l'esprit du peuple français.
b) En 1824. Trois jeunes Martiniquais, pour avoir introduit dans l'île des ouvrages français critiquant la colonisation, sont traités de communistes et condamnés à être marqués au fer rouge.
c) En 1832. Un jeune instituteur français, pour avoir ouvert une école où il donnait des cours gratuits aux ouvriers, est traité de communiste, révoqué et condamné.
c) En 1840. L'abbé de Lamenais, pour avoir épousé la cause du peuple, pour avoir écrit : « O, peuple paria, réclames-tu quelque soulagement à ton sort on te sabre, on te fusille et tu tombes sous le gourdin des assommeurs payés et patentés », cet abbé, est traité de communiste et condamné.
Ainsi, M. D... est dans le ton, dans la tradition. Il est bien dans le ton lorsqu'il se permet d'expédier à nos sous-sections, son télégramme du 2 février, télégramme ainsi conçu : « Bataille destruction RDA soviétique déclenchée - Stop - Bloquez toute activité suppôts Kominform - Stop », télégramme qui, à ce qu'il paraît, avait échappé — et pour cause — à la vigilante attention des services de l'Administration. Il n'y a de pire aveugle que celui qui ne veut pas voir ! En effet, il ne faut pas voir.
D... le 14 novembre n'avait pas été réélu conseiller de la République. Tous ses rêves donc s'écroulaient. Faut-il partir du RDA ? Faut-il rester au RDA ? Il balance, calcule, hésite... Il rompt sans rompre, toutefois... Il veut rester au RDA mais demander à ce que M. Houphouët lui donne 600 000 francs pour se payer un camion car « il ne voudrait plus, lui qui a été conseiller de la République, retourner petit fonctionnaire dans l'Administration. Il en aurait honte ». M. Houphouët promet de lui remettre cette somme lorsqu'il aura vendu ses produits. Mais M. D... est pressé... Il lui faut une voiture ! Entre-temps, son ami Péchoux arrive. Il est gouverneur. Ce gouverneur dont l'arrivée ici fut saluée avec des transports de joie par ses alliés actuels qui allaient chantant « Notre Gouverneur est venu. Nous sommes au pouvoir », alliés dont la première victime fut notre camarade Indat Frédéric d'Agboville, Indat qui passa trois mois en prison. Indat était accusé de propagation de fausses nouvelles par un chef de canton ami de M. Houphouët à ce qu'il disait lui-même. Il promit d'aller voir « son gouverneur » pour faire arrêter Indat. Il descendit à Abidjan et effectivement, quelques jours après, c'est-à-dire le 9 décembre 1948, Indat, secrétaire général de la sous-section d'Agboville, notre camarade que ce chef de canton ne voulait pas voir, est écroué. Le 2 mars 1949, il bénéficie d'un acquittement confirmé par la cour d'appel de Dakar.

Dimanche 6 février 1949. La provocation

M. D... est pressé ! Son ami M. Péchoux est là, qui veille... Les 600 000 francs promis par M. Houphouët tardent à venir. La voiture hante le sommeil de M. D... qui est souvent au Palais. Entre-temps, le 2e Congrès interterritorial s'ouvre. M. D... brille par son absence. M. D... a une camionnette Chevrolet et le 24 janvier il donne sa démission. Nous apprenons qu'il ferait une conférence le 30. A cette confé­rence qui se tient au COMACICO, au lieu de nous donner les raisons de son départ du RDA, il s'en prend violemment au député Houphouët. Non content de cela, il donne l'ordre à ses hommes de se battre, déclarant que lui, en prenait la responsabilité... La conférence est dissoute.
Le bruit depuis décembre 1948 courait que tous les dirigeants du RDA allaient être arrêtés, que tous les militants RDA allaient être maltraités.
Le 2 février 1949, M. D... fort de ses alliances et sûr de son impunité expédie des télégrammes à nos sous-sections, donnant ainsi le signal du combat. Dès le mercredi 2 février, j'apprends qu'une nouvelle conférence doit se tenir, mais cette fois au marché municipal, et ce, le dimanche 6 février 1949.
Nous apprenons aussi que le conférencier, en l'occurrence M. D…, ses partisans et ses alliés, viendraient armés. Du mercredi à samedi 5 février, les nouvelles affluent, à savoir que les partisans de D… et ses alliés ont été autorisés à s'armer... Devant tous ces bruits, le Comité directeur juge utile de saisir les autorités par lettre adressée au Procureur et aux Autorités administratives. C'est la lettre en date du 5 février 1949, lettre qui doit se trouver au dossier.
Dimanche 6 février. La conférence, au lieu du marché municipal, se tient à Treichville, au COMACICO, dans un grand déploiement de forces, alors que toutes les conférences tenues avant le 30 janvier et le 6 février n'ont jamais été honorées par tant de forces armées.
Je suis chargé de la Presse. C'est ma fonction dans notre mouvement. En cette qualité, c'est pour moi un devoir d'être partout où se tient une réunion, une conférence publique. C'est en regard de cette fonction que l'on doit juger mon activité lors des événements du 6 février. En effet, muni de mon appareil photographique, je me rend devant la salle. J'y entre... Je regarde la disposition des bancs, de la tribune qu'on installait, je remarque qu'on a fait des barrages et je vois, armés de fouets, les hommes du service d'ordre portant des brassards marqués BDE. Je sors. Ces remarques me suffisent. Il ne me restait qu'à attendre M. D... pour le photographier. Ainsi me documenter moi-même a été pour moi le souci le plus constant. C'est cela qui m’a conduit à la rue n° 3, angle 7, puis à accompagner vers les 11 h 30 les camarades Williams et Mockey auprès du commissaire Lefuel à la rue n°2, angle 7. Je tenais à entendre moi-même la réponse du commissaire afin de pouvoir, éventuellement, les rapporter exactement.
C'est encore ce souci de documentation qui m'a conduit du côté de M. Diou..., à la rue n° 13, à Treichville pour voir ce qui se passait…
D'autre part, je reconnais avoir crié « mercredi, achetez tous Réveil ». J'estime que c'est pour moi, en tant que journaliste, [un devoir] de placer le plus d'exemplaires possible de notre organe de lutte, surtout que ce numéro-là devait apporter des éclaircissements sur l'attitude du sieur D... Tout autre à ma place aurait certainement agi de la même façon... Eclairer la masse est pour moi, un devoir... Lui dire aussi ce qui se passe est encore un devoir...
Et c'est parce que j'ai voulu accomplir mon devoir de journaliste que j'ai été arrêté. Aussi est-ce en tant que journaliste que je comparais aujourd'hui devant vous, Messieurs, et c'est en tant que journaliste militant du mouvement du Rassemblement Démocratique Africain que je parle.
Nous voici donc arrêtés le 9 février 1949, mis dans un corbillard qui le matin même avait conduit quelqu'un à sa dernière demeure. Après le télégramme de M. D..., le fait d'enfermer dans un corbillard des dirigeants d'un mouvement auquel on a déclaré la guerre, est significatif, symbolique. Nous voici à la prison de Bassam.
En mars 1949, M. Di... Ama..., huissier au greffe de la prison, publiquement, en parlant de nous, les détenus du 6 février, déclare : « Ils sont dans cette prison-là pour un an. Ils peuvent attendre ». Ces paroles sont significatives, quand on connaît les relations de M. Di... et qu’on sait qu'il a présidé la conférence du 6 février.
Effectivement nous y sommes depuis plus d'un an, dans cette prison. Nous y sommes parce que nous avons pensé qu'après les horreurs de la dernière guerre les tortures inhumaines, qu'en regard de tous les sacrifices consentis, les hommes devaient mener une autre vie qu'une existence de bêtes constamment traquées, traquées par faim, traquées par la police. Nous y sommes depuis plus d'un an dans cette prison parce que nous nous sommes opposés au retour de pratiques que nous estimons devoir disparaître avec Hitler...
Le régime hitlérien avec ses SS, avec ses chiens policiers, avec son mépris absolu de la dignité humaine, fait-il partie de la civilisation occidentale qu'on dit chrétienne ? Les fours crématoires font-ils partie de la doctrine chrétienne ? Les fosses communes dans lesquelles on jetait des gens encore vivants, font-elles partie de la doctrine chrétienne ?
Nous savons que sous le couvert de l'anticommunisme, sous le couvert de défendre la foi, sous le couvert de sauver la civilisation occidentale chrétienne, ce sont des buts inavouables que l'on poursuit. Nous avons compris cela puisqu'un haut prélat américain, le cardinal Spellmann a dit : « Ce n'est pas pour défendre ma foi que je combats le communisme, mais c'est en tant qu'Américain qui défend son pays. Car l'existence du communisme est une provocation constante à l'adresse de tous ceux qui croient en l'Amérique... et en Dieu ».
Et c'est pour que cette terre cesse d'être une vallée de larmes pour le peuple que, nous du Rassemblement Démocratique Africain, luttons et lutterons toujours.
En effet, j'ai, sur les quais de Dakar, vu des dockers coltiner des caisses de primeurs, des caisses de sucre, des sacs de blé, de semoule, de riz, etc., et ces dockers-là, à la fin de leur journée, je les ai vus ne manger que des cacahuettes, alors que dans les entrepôts le riz moisit, le sucre fond, la pomme de terre pourrit. J'ai vu ces hommes, le soir venu, coucher au long des trottoirs, à la belle étoile... Nous Disons, nous du RDA... que cela est inadmissible.
J'ai, à la polyclinique Roume, toujours à Dakar, entendu un médecin capitaine demander et répondre à une femme africaine qui se plaignait de n'avoir plus de lait pour nourrir son enfant :
— Quel âge a-t-il ?
— Six mois.
— Donne-lui de la bouillie de mil, il mangera s'il a faim.
Dans le même temps, en rade, des bateaux américains jettent à la mer des caisses de lait. Nous disons, nous du RDA, que ce langage est odieux et le geste des Américains criminel.

Libérer l'homme de toutes les entraves qui limitent ses possibilités.

J'ai ailleurs vu des hommes fouiller dans des poubelles à la recherche d'un quignon de pain qu'ils disputaient à des chiens hargneux.
Nous disons, nous du RDA, avec notre franc-parler habituel, que le régime qui génère de tels faits est inhumain.
Voilà pourquoi nous luttons et lutterons encore et lutterons toujours, nous du RDA.
Nous combattrons tous ceux qui veulent, pour des profits égoïstes, abêtir l'homme, dégrader l'homme en le condamnant à mener une vie de bêtes de somme.
Nous, du RDA, nous entendons libérer l'homme de toutes les entraves qui limitent ses possibilités.
Nous voulons qu'il accède à tous les domaines de la connaissance, et ce, malgré tout syllabus et tout décret du Saint-Office.
C'est pour en arriver là que nous prêchons l'union de tous les Africains, que nous appelons tous les Africains à la croisade contre les misères cultivées. Mais cette union est très mal vue, très mal vue, très mal accueillie par tous ceux qui ont intérêt à ce que ces misères cultivées continuent à prospérer parmi nous.
Cette union est combattue selon les vieux principes du « diviser pour régner ».
Le maréchal Pétain, après une tournée en Afrique Noire, écrivait : « Il faut coûte que coûte empêcher que les Noirs s'unissent, soit par un lien politique soit par un lien religieux, car c'est par leurs divisions, leurs dissensions que nous les tenons ». (Je cite de mémoire). Et au ministre socialiste SFIO Moutet de surenchérir : « Il faut éviter dans les colonies les grands rassemblements de peuples ».
Ainsi, c'est parce que le Rassemblement Démocratique Africain est un mouvement d'union et un grand rassemblement de peuples qu'on le combat ; c'est à ce double titre qu'il est devenu la bête noire, la cible du gouvernement qui dans sa frénésie, sa rage de destruction, a perdu tout contrôle.
Dès le lendemain de notre arrestation, M. Ply, dans son organe, publie nos noms en les faisant suivre de la sous-section dont nous faisons partie. Qu'est-ce à dire ?
Le gouverneur de son côté, immédiatement se lance dans une grande tournée à travers le territoire. Qu'est-ce à dire ?
La Sûreté relève les noms des camarades de nos bureaux des sous-sections, dans le but de pouvoir un jour les arrêter en masse comme cela vient d'arriver pour Zuénoula, ou individuellement. Méthode plus courante.
Dans le but de détacher de nous la masse, l'on use de la cor­ruption : distributions d'argent, de fusils, de décorations, octrois de hautes protections. Si quelques individus se laissent tenter, la masse elle, nous demeure fidèle.
L'on recourt alors à l'intimidation. L'on extorque des démissions. L'on achète des démissions auxquelles l'on donne la plus large publicité pour dire : Voilà ! Le Rassemblement Démocratique Africain sous nos coups se désagrège ! Mais le bloc RDA demeure.
C'est alors que M. Rucart vient à la rescousse en écrivant : « Ce n'est pas le RDA qui commande et juge », comme si jamais nous, du RDA avions dit commander et juger ! Cette phrase semble être un mot d'ordre. On arrête nos militants, on les bat, on les torture, les humilie, les jette en prison pour ensuite leur corner aux oreilles : « Va dire à Houphouët de venir te sortir de là, de la prison », ou alors cette rengaine : « Quitte le RDA et tu seras libre ». Mais le bloc RDA demeure. Dans le même but de perdre Houphouët dans l'esprit de la masse, l'on nous a gardé pendant treize mois, pour constamment dire à la masse : « Tu vois, Houphouët est incapable de faire libérer les détenus du 6 février... Si tu le suis, tu subiras le même sort » ; ainsi notre détention sert de thèse de propagande, d'arme de combat au Gouvernement.
Tout cela ne donnant pas les résultats escomptés, l'on recourt à la manière forte. On lance dans le pays des agents provocateurs... puis l'on fait venir la troupe et ce sont des rafles, des razzias, des tueries ; la terreur, ce régime d'état de siège que la Côte d'Ivoire ne connut même pas au temps de Vichy. Ce sont de pauvres femmes qu'on arrête, maltraite et jette en prison, alors qu'il est bien dit et accepté par toutes les nations que nul ne sera soumis à la torture, ni à des peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.
La collusion du Gouvernement avec les individus que les hommes de ce pays ont jugés et condamnés, est encore révélée par la large publicité que donne le gouvernement local à un télégramme du ministre des TDM, télégramme n°50004 du 11 février, retransmis sous n°35 AC à tous les cercles et subdivisions, télégramme adressé seulement à ceux qui en avaient expédiés pour demander à ce ministre la suppression du Rassemblement Démocratique Africain.
Ainsi, ce n'est certainement pas parce que j'ai arraché un journal à un gosse, ce n'est certainement pas, parce que j'ai demandé à un homme de ne pas tirer que je comparais aujourd'hui devant vous, Monsieur le Président, Messieurs de la Cour.
Bon gré, mal gré, mes camarades et moi comparaissons devant vous en tant que dirigeants d'un mouvement que le Gouvernement combat, en tant que détenus politiques.
Monsieur le Président,
Messieurs de la Cour,
Nous faisons tous de l'histoire. L'épopée du Rassemblement Démo­cratique Africain a commencé dès l'instant où le juge nous a dit : « J'ai reçu l'ordre de vous arrêter ». Des ordres à un juge ! Hum ! Et cette épopée continue.

Tous, nous entrons aujourd'hui dans l'Histoire

Le peuple qui a assisté à tous les faits, le peuple qui les a vécus, vous regarde, Messieurs.
Tous, nous entrons aujourd'hui dans l'Histoire, et il est certain que demain, l'historien impartial, sans passion aucune, avec sérénité, se penchera sur le dossier de ce premier grand procès politique en Afrique Noire... Il se penchera sur ce dossier avec sérénité parce qu'il sera hors de toutes les contraintes politiques et des remous de notre époque...
On nous reproche aussi notre union avec le peuple de France. Eh bien, que l’on sache une fois pour toutes que nous n'avons fait que prendre la main du peuple de France, une main qui nous était tendue depuis le 22 janvier 1844. En effet, le 22 janvier 1844, le peuple de France, pour l'abolition de l'esclavage, aux députés, adressait la pétition suivante :
« Messieurs les Députés,
Les soussignés, ouvriers de la capitale, ont l'honneur, en vertu de l'article 45 de la Charte Constitutionnelle de venir vous demander de bien vouloir abolir, dans cette session, l'esclavage.
Cette lèpre sociale qui n'est plus de notre époque, existe cepen­dant encore dans quelques possessions françaises. C'est pour obéir aux grands principes de la fraternité humaine que nous venons faire entendre notre voix en faveur de nos malheureux frères, les esclaves.
Nous éprouvons aussi le besoin de protester hautement au nom de la classe ouvrière, contre les souteneurs de l'esclavage qui osent prétendre, eux qui agissent en toute connaissance de cause, que le sort des ouvriers français est plus déplorable que celui des esclaves.
Fiers de la sainte et généreuse initiative que nous prenons, nous sommes sûrs que notre pétition trouvera un écho dans notre noble patrie et nous avons confiance dans la justice des députés de France ».
Qu'il nous soit permis de dire que cette union avec le peuple de France a toujours été mal vue par ceux qui toujours ont confondu leur fortune avec la fortune de la France. Ceux qui hier comme aujour­d'hui ne cessent de clamer : « La France est ruinée si nous sommes ruinés ».
Non ! La France de 1789, la France des principes immortels de liberté, d'égalité et de fraternité, la France qui est partie par l'Europe, renverser les trônes du despotisme, la France du peuple de France que nous sommes très heureux de saluer et de remercier ici, à la barre, dans un tribunal français, cette France-là que nous aimons nous du RDA, n'est pas ruinée si M. Tartempion, flibustier, est ruiné. Cependant, l'on agit comme si l'on ne voulait nous montrer de la France qu'un visage défiguré... Celui qu'on veut nous faire voir au-delà des bataillons, des chenillettes et des tanks. Mais nous ne nous lais­serons pas abuser, parce que nous savons qu'au-delà de tout cela, est et demeure la France, la France qui a proclamé qu'elle n'emploiera jamais les armes contre la liberté d'un peuple.
Cette union donc, est très mal vue. C'est ainsi que l'on pourchasse toujours dans les territoires d'outre-mer, les démocrates français, les Français honnêtes qui frayent avec les autochtones.
Hier, c'est Mgr Monnet qu'on chasse de la Réunion pour avoir soutenu la cause des esclaves ; c'est l'abbé Lemarche qu'on expulse de la Guadeloupe parce qu'il a fait chanter le Veni Creator à un mariage d'esclaves.
Aujourd'hui, ce sont les Souyris, les Suret-Canale, Fayette, Rigo, etc. et d'autres démocrates encore qu'on inquiète pour le seul fait qu'ils vont avec des indigènes, comme si aller avec les indigènes est un crime de lèse-prestige.
Hier, des milliers d'hommes mouraient dans les ergastules des colons, lorsqu'on enchaînait des enfants de cinq ans pour les empêcher de fuir, lorsqu'on fouettait jusqu'au sang des femmes enceintes ou par caprice, les éventrait pour voir ce qu'elles ont dans le ventre, lorsqu'on empalait des hommes pour des vétilles, eh bien, il se trouvait des monstres, des Granier de Cassagnac et des Charles Dupin, pour trouver ce régime humain. Lorsqu'on élevait des hommes comme du bétail, il se trouvait encore des monstres pour soutenir, bible en main, « que l'esclavage est une voie ouverte par la Providence au succès de la religion ».
Mais face aux thuriféraires de ce régime odieux, étaient dressés les démocrates et républicains français, les démocrates et les républi­cains du monde entier.
En face d'eux, était Schoelcher qui criait l'égalité absolue de tous les hommes ; Schoelcher qui exigeait que « le Noir fût tout aussi libre de vendre le coton de sa propriété, que le Blanc de vendre le sucre de sa plantation ». Pour avoir soutenu de telles idées, il devint l'ennemi n°1 des colons, comme Houphouët l'est aujourd'hui ; il fut traité de communiste, d'agent de l'étranger comme Houphouët l'est aujourd'hui parce qu'il a parlé d'émancipation, parce qu'il a parlé d'originalité africaine. Mais comme Houphouët continuant sa route, en dépit des mesquines provocations, Schoelcher tenant tête à ses adversaires déchaînés, leur crachait à la face : « J'aime mieux la justice à tout le café du monde ».
Aujourd'hui il repose au Panthéon. Triomphe de la vérité et de l'amour !
C'est encore lui qui dit : « Il faut prodiguer les moyens de vivre et de s'instruire à tous ceux qui en manquent ». Or que lit-on en 1949 dans des circulaires du Gouvernement général ? Ceci : « Il est demandé aux territoires d'attirer l'attention de chacun sur les charges que représentent pour les budgets, l'entretien des instal­lations de caractère social. Il est certain que si l'on construit un lycée ou un grand hôpital, il faut envisager que plus tard les budgets auront à supporter l'entretien des professeurs et des médecins. Par conséquent de la part de l'Administration, il y a là une étude très prudente à faire de façon à connaître parfaitement les incidences de ces organisations sur les budgets. C'est un point très important ».
Eh bien pour nous, du Rassemblement Démocratique Africain, le point très important est d'avoir beaucoup d'écoles et beaucoup d'hôpi­taux. Et c'est parce que nous sommes contre les idées qui produisent de telles circulaires que nous sommes en prison.

Des étudiants nous écrivent : « Moralement, c'est nous tous qui sommes en prison »

On a cru en nous arrêtant, arrêter la marche du Rassemblement Démocratique Africain. C'est mal connaître le RDA.
Le Rassemblement Démocratique Africain, ce sont :
·         ces milliers d'enfants sans écoles,
·         ces milliers de femmes sans maternité,
·         ces milliers de malades sans hôpitaux,
·       ces milliers de petits commerçants accablés d'impôts et qu'une oppression économique rend les jouets des trusts internationaux qui leur paient des prix dérisoires.
·         Ces petits artisans pressurés par le fisc...
·         Ces fonctionnaires qu'on fait valser, qu'on n'avance pas pour des questions d'opinion. Ce sont tous ces travailleurs qui se demandent comment joindre les deux bouts.
·         Ces gendarmes, ces gardes de cercle, ces policiers, qui logés à la même enseigne que nous, se demandent eux aussi comment joindre les deux bouts. Tous ces anciens combattants qui attendent leur pension, ces anciens combattants qui ont combattu l'arbitraire et qui aujourd'hui sont soumis à un arbitraire.
Le RDA, c'est tout un peuple dressé contre les injustices qu'une Constitution a rendues caduques, tous ces étudiants qui nous écrivent : « Moralement, c'est nous tous qui sommes en prison ».
Le Rassemblement Démocratique Africain, c'est tout cela. C'est pourquoi nous chanterons dans les prisons, nous chanterons dans les fers, parce que nous savons que quelqu'un toujours luttera pour le triomphe de la vérité et de la justice.
Voilà le Rassemblement Démocratique Africain pour ceux qui ne le connaissent pas.
Mais, forts de notre principe d'association librement consentie, des milliers d'hommes librement sont venus à nous. Sous la tempête actuelle dont nous nous rions, quelques huit ou dix personnes sont parties...
Nous leur disons qu'elles partent. Qu'elles partent, mais qu'elles se souviennent que si elles sont quelque chose aujourd'hui, c'est grâce au peuple qu'elles méprisent. C'est parce que ce peuple a payé des contributions diverses ; c'est parce que ce peuple a souffert.
Nous leur disons qu'elles partent, mais qu'elles se souviennent que si elles jouissent de quelque liberté aujourd'hui, c'est parce que le peuple de France a lutté pour conquérir ces libertés et lutte encore pour les maintenir.
Qu'elles partent, mais qu'elles se souviennent qu'au lendemain de notre arrestation, un gouverneur, par le truchement d'un juge de ce palais, a essayé de détacher de nous, une de nos camarades femmes[2], secrétaire générale, en lui promettant une voiture toute neuve, trente mille francs de rentes mensuelles et des avantages divers. Elle lui répondit simplement : « Ce n'est pas au moment où les femmes de France et du monde entier luttent pour la liberté et la paix que nous femmes africaines allons croiser les bras... Depuis vingt ans je marche à pied, je n'ai que faire de votre voiture. Je vis bien sans votre rente. Nous continuerons la bataille à côté de nos frères, de nos pères et de nos maris qu'on arrête, et tue ». Qu'elles partent, ces huit ou dix personnes, mais qu'elles se rappellent cette réponse.
Monsieur le Président,
Messieurs de la Cour,
Nous croyons qu'avec Goering, un temps est mort, définitivement, un temps où l'on pouvait se permettre de dire : « Je n'ai pas à exercer la justice, j'ai à exterminer, c'est tout », pour conclure avec Renan : « Qu'on nous donne seulement un quart d'heure de vérité par jour, et le monde sera sauvé ».

Nous savons que les alouettes ne tombent pas toute rôties du ciel

Oui, qu'on nous donne seulement un quart d'heure de vérité, et l'on verra que le Rassemblement Démocratique Africain est un mouve­ment qui milite pour la formation d'une Union française véritable, et non un mouvement séparatiste, mais que les véritables séparatistes, ce sont des individus qui, pour des intérêts personnels n'osent se montrer sous leur vrai jour.
Nous tenons à dire que nous ne lâcherons jamais la main du peuple de France. Car, supposons un seul instant que vous ayez deux frères et que brusquement vous tombiez malade. Aussitôt l'un d'eux, parce que vous êtes malade, réunit des amis et festoie tandis que l'autre vous soigne, vous veille jusqu'à votre guérison. Rétabli, auquel des deux frères ira votre gratitude, votre affection ?
Hier, lorsqu'en signe de protestation contre notre détention injus­tifiée et les brimades, nous faisions la grève de la faim, ici, des Noirs, valets de l'Administration riaient, dansaient, festoyaient à la seule pensée que nous en crèverions tous, mais là-bas en France, parce que des hommes risquaient de mourir de faim, le peuple protestait, formait des comités de défense, entreprenait des démarches, expédiait des mes­sages... nous assurant de sa chaude solidarité. Et ce peuple de France dont le cœur bat si près du nôtre aujourd'hui encore continue son action à notre égard. Par votre verdict, vous nous direz si nous avons mal fait de lier notre destin au destin du peuple de France.
Nous tenons aussi à dire publiquement pour qu'il n'y ait plus d'équivoque : pour nous, du RDA, aucune idée qui peut servir au bonheur de l'homme, à l'avènement de la fraternité et au maintien de la paix, n'a de couleur ni d'étiquette.
C'est pourquoi nous donnerons toujours la main à tous ceux qui, par le monde entier, luttent pour les mêmes buts que nous, à savoir pour la liberté — pour le bien-être de tous — pour la paix.
Avec eux, nous bâtirons la cité nouvelle dans laquelle il n'y aura ni maîtres, ni esclaves, ni un seul indigent, ni un seul mendiant parce qu'il sera donné « à chacun selon ses besoins » ; la cité nouvelle dans laquelle le Pater Noster aura tout son sens parce que les hommes s'aimeront et seront redevenus les frères qu'ils n'auraient pas dû cesser d'être.
Dans cette cité, il n'y aura plus de loups ni d'agneaux, mais des hommes.
1789 a permis la formation de la Nation Française. La grande révolution qui souffle actuellement sur le monde, permettra, elle, la formation de la grande famille. Cela est inéluctable.
Nous, au Rassemblement Démocratique Africain, nous luttons parce que nous savons que « les alouettes ne tombent pas toute rôties du ciel ». Nous luttons, certes, mais que tous ceux qui ont contribué à nous faire arrêter, tous ceux qui ont troqué notre liberté contre de petites faveurs personnelles, tous ceux qui, par leur action nocive, ont permis les tueries actuelles, que tous les agents provocateurs qui circulent armés dans Agboville et ailleurs, que tous ceux qui, dans nos villages, traquent et tuent allègrement parce qu'ils ont leur « gouverneur », parce qu'ils sont sûrs de leur impunité, que tous ceux-là sachent et se disent que tous, nous faisons de l'Histoire et que les heures comme celles d'aujourd'hui, celles où nous sommes à cette barre, devant vous, ces heures-là, ont toujours un lendemain.



[1]. Carnet de prison (annexes) pp. 205-218.
[2]. Anne-Marie Raggi.

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