François Hollande en décembre 2013 avec (de gauche à droite)
les présidents Ikililou Dhoinine, Jakaya Kikwete, Paul Biya,
Faure Gnassingbe, Ali Bongo et Alassane Ouattara
(C) Charles Platiau/pool/afp
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La tenue à Paris ces jeudi et
vendredi du forum Africa France en présence de plusieurs ministres français et
africains est l'occasion de revenir sur l'action africaine du chef de l'État.
Est-elle positive ?
La conversion aura été
rapide. Alors qu’il n'avait presque jamais mis les pieds en Afrique avant
son élection, François Hollande aura fait de la relation franco-africaine l'une
des priorités de sa politique étrangère. L'organisation ces jeudi et
vendredi du forum Africa France par le Quai d'Orsay en présence de plusieurs
ministres français et africains est l'occasion de revenir sur l'action
africaine du chef de l'État. Quelle est-elle ?
Organisation d'un sommet France-Afrique en février 2015 à
Paris, déplacements au Mali, en Angola en Centrafrique ou au Cameroun pour
promouvoir les intérêts économiques et défendre la stabilité régionale, le chef
de l'État aura joué sur plusieurs tableaux. « François Hollande sait que c'est une zone où la France peut
continuer d'exister sur la scène internationale comme on l'a vu avec les
interventions militaires au Mali ou en Centrafrique, analyse Bruno Delaye,
diplomate, responsable de la "cellule africaine" de l'Élysée de 1992
à 1995. Il perçoit aussi l'intérêt économique d’un continent dont les pays
ont une croissance qui dépasse souvent les 5%. Et les bonnes relations qu'il
entretient avec plusieurs présidents facilitent tout cela ».
Depuis de longues années, François Hollande est en effet
très proche de certains chefs d'État rencontrés dans le cadre de
l'Internationale socialiste lorsqu'il était Premier secrétaire du PS. Au
premier rang, on peut citer le président guinéen, Alpha Condé, avec qui
il échange régulièrement par SMS ou un autre « camarade »
socialiste, le président du Niger, Mahamadou Issoufou. Le chef de
l'État est aussi très proche du président malien Ibrahim Boubacar Keïta,
diplômé de la Sorbonne, et allié majeur de la France dans la lutte contre
le terrorisme. Il a aussi de bons rapports avec l'homme fort de l'Afrique
subsaharienne, le président tchadien Idriss Déby. C'est d'ailleurs à N'Djamena
que la France a installé le QG de l'opération Barkhane menée par l'armée
française au Sahel. Les présidents sénégalais, Macky Sall et ivoirien, Alassane
Ouattara, font également partie de ceux avec lesquels François Hollande nourrit
de bonnes relations.
Mais lors de son accession au
pouvoir, le chef de l'Etat a voulu élargir la perspective, en se
rapprochant de plusieurs dirigeants d'Afrique anglophone et
lusophone, notamment sur les préconisations de sa conseillère « Afrique »,
Hélène Le Gal, ex Directrice « Afrique centrale et orientale » au
Quai d’Orsay (nommée depuis ambassadrice de France en Israël). Ainsi
a-t-il reçu le nouveau président du Nigéria Muhammadu Buhari en septembre 2015
à l’Elysée. Il a aussi noué des relations cordiales avec la Tanzanie de
Jakaya Kikwete et le Kenya d’Uhuru Kenyatta. Une évolution essentiellement
motivée par des préoccupations économiques, ces pays étant parmi les plus
prospères du continent. « Nicolas
Sarkozy avait commencé à parler à ces pays mais il n'était pas allé au
bout, plombé notamment par son discours de Dakar de 2007, trop paternaliste, et
par un manque de conviction du potentiel africain, pointe un ancien ambassadeur
de la France sur le continent. François Hollande, lui, joue à fond la carte de
la realpolitik ».
Autres évolutions notables sous le quinquennat Hollande :
le très décrié ministère de la Coopération, rebaptisé ministère du Développement,
a perdu son rôle politique. Tandis que Bercy n'a plus d'influence
économique, puisque depuis 2014 le Quai d'Orsay a récupéré le Commerce
extérieur. Quant aux relations avec les dirigeants encombrants (Ali Bongo,
Joseph Kabila, Denis Sassou Nguesso), que François Hollande fréquente le moins
possible, elles sont l’apanage du ministre de la Défense, Jean-Yves Le Drian.
Celui qui a, dès octobre 2012, clamé
que « le temps de la Françafrique
(était) révolu » ne cesse d'ailleurs de répéter lors de ses
déplacements sur le continent que la relation franco-africaine doit être
marquée du sceau du « respect, de la
clarté et de la solidarité ». François Hollande l'a d'ailleurs prouvé
s'agissant de la crise gabonaise. Puisque après avoir laissé le Quai
d'Orsay réagir de manière assez vigoureuse, notamment vis à vis du camp d'Ali
Bongo, l'Élysée a fait preuve d'un certain mutisme, envoyant le signal
que « les affaires
africaines ne doivent plus se régler à Paris » comme le confie un
diplomate français. « Nicolas
Sarkozy avait supprimé "la cellule africaine" de l'Élysée, François
Hollande poursuit cette normalisation en mettant l'accent sur le business »,
ajoute Pierre Vimont, directeur de cabinet du ministre des Affaires étrangères
de 2002 et 2007.
L'action africaine du président de la
République n'a donc pas été insignifiante. Pour Antoine Glaser, fin
connaisseur du continent (il a fondé et dirigé durant 26 ans La lettre du Continent, consacrée à l'Afrique) et
auteur du livre Arrogant comme un Français
en Afrique, elle est même plutôt positive. Antoine Glaser y écrit
notamment que « François Hollande
est devenu sur le continent un vrai "marsouin" d'honneur »
et que c'est « peut-être sur le
terrain de l'Afrique que le président de la République exerce la plénitude de
son pouvoir ». Et de conclure sur l'action de l'actuel chef de l'État :
« Pour les Africains, le
"général Hollande", à travers les opérations Serval puis Barkhane,
tente de corriger en partie les erreurs d'appréciation de son prédécesseur,
grand initiateur de l'opération en Libye ». Au final, François
Hollande prouve qu'il a accordé autant d'importance au Zambèze qu'à la
Corrèze.
Antoine Izambard, Journaliste
(http://www.challenges.fr/
22.09.2016)
Titre original : « La galaxie africaine de
François Hollande ».
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leur contenu informatif, ils soient de nature à faciliter la compréhension des
causes, des mécanismes et des enjeux de la « crise ivoirienne ».
Source :
La Dépêche d'Abidjan 22 Septembre
2016
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