« Dans
un régime démocratique, nous avons tous le devoir de dénoncer une mesure
gouvernementale, si elle n’est pas bonne ».
Quelle
réaction avez-vous après la sortie Kandia Camara, ministre de l’Education
nationale vous accusant de fauteur de troubles au niveau de l’enseignement
primaire ?
Non, je ne réponds pas à la sortie de Madame la
ministre d’hier parce que moi, je mène les débats intellectuels. Une réforme a
été prise, le MIDD émet des réserves avec les arguments. Qu’on analyse les
réserves du MIDD et si les arguments tels que avancés par le MIDD ne sont pas
valables, qu’on en donne la preuve. Si également, on se rend compte que ces
arguments sont tout à fait crédibles, qu’on ait le courage pour dire qu’on
s’est trompé. Tout en tenant compte des réserves que nous avons émises. C’est
tout !
Tout
en vous qualifiant de « méchantes, égoïste et d’inhumain », elle
révèle que vos enfants étudient à l’étranger. Et que vous gagneriez 1.500.000
FCfa par mois en votre qualité de vice-président du Conseil d’Administration de
la Mugefci (Mutuelle générale des fonctionnaires de Côte d’Ivoire : Ndlr). Avec
entre autres, comme bien matériel, deux voitures : une Mercedes de classe S et
Une 4X4 de fabrication américaine. Visiblement vous roulez donc sur de l’or ?
Je ne voudrais pas rentrer dans ces considérations qui
pour moi ne font pas du tout avancer les débats. Les amis qui me connaissent,
ils savent que je vis avec mes enfants. Ils ne quittent pas à Abidjan pour
aller fréquenter ailleurs, je suis désolé.
Kandia
Camara a avancé qu’une procédure disciplinaire a été engagée contre les
enseignants qui ont perturbé les cours le 13 septembre 2016, premier jour de
rentrée, y compris vous ?
Une procédure disciplinaire lancée contre nous ? Bon,
qu’elle l’engage. La grève est un droit… Encore plus, qu’on n’est même pas
encore en grève. Mais nous sommes une organisation syndicale légalement
constituée. Et lorsqu’on est légalement constituée, on mène des actions de
protestations, de contestations de façon très civilisée, telle que nous le
faisons. Il n’y a donc pas de raison qu’on engage une procédure disciplinaire
contre qui que ce soit.
L’on
indique que vous allez à l’encontre d’une décision gouvernementale ?
Que voulez-vous qu’on fasse lorsqu’un gouvernement
prend une décision qui n’est pas bonne ? N’oublions pas que nous sommes dans un
régime démocratique. Et dans un régime démocratique, la souveraineté appartient
au peuple. Parce que j’ai entendu dire que : « Ce sont des employés. C’est
l’employeur qui fixe les règles du jeu… ». Mais dans un régime démocratique, en
tant que fonctionnaires, qui est notre employeur ? C’est l’Etat. Et l’Etat
c’est qui ? C’est nous tous ! Nous avons donc tous, le devoir de dénoncer une
mesure si celle-ci n’est pas bonne. Le gouvernement avait pris la mesure, en
complicité avec la Cie (Compagnie ivoirienne d’électricité : Ndlr) d’augmenter
les factures d’électricité et les populations se sont opposées. Elles ont dit
non, et le gouvernement l’a retirée.
Que
comptez-vous faire maintenant ? Secrétaire général, maintenez-vous toujours votre
position ?
Nous avons dit à nos camarades de ne pas aller à
l’école les mercredis parce que, figurez-vous,-même pour le petit exemple que
nous prenons, lorsque vous prenez l’emploi du temps du mercredi, il fixe le
début des cours à 7 heures 30 alors que l’arrêté signé par Madame le ministre
elle-même, demande que les cours commencent à 8 heures. On ne peut pas dire une
chose et son contraire. Vous ne pouvez pas préciser dans un arrêté que les
cours commencent à 8 heures et définir un emploi du temps dans lequel les cours
commencent à 7 heures 30 et ne pas trouver cela incohérent. Quand le MIDD dit
que c’est incohérent, il faut le reconnaitre et ce qui doit être corrigé, on le
corrige.
Lorsque
votre tutelle menace en disant que si vous lancez une grève, « la
riposte sera sauvage et inoubliable », ne craignez-vous pas votre
radiation de l’effectif de la Fonction publique ?
Oh… Vous savez, si j’étais un couard, je ne me serais
pas engagé dans la lutte syndicale. Lorsqu’on est dans les luttes syndicales, on
sait ce que cela peut avoir comme conséquences. On est sous le feu de ces
critiques, malheureusement. Mais ce sont des pressions de conviction et nous
nous battons pour nos convictions. Les conditions de travail dans lesquelles
les institutions évoluent ne permettent pas de travailler durant 5 jours
d’affilés dans la semaine. Et ça, qu’on ne nous dise pas de ne pas le dire.
Devant la
menace de grève qui se profile à l’horizon, plusieurs options s’offrent à votre
tutelle pour tuer le projet dans l’œuf dont celle, relative, selon la ministre,
à votre affectation, loin, à l’intérieur du pays, où vous tiendrez, une classe
?
Même si je suis affecté à l’intérieur du pays, est-ce
que ça me retire ma qualité de leader syndical ? Est-ce qu’en étant à
l’intérieur du pays, je ne peux pas organiser les assemblées générales ? Est-ce
qu’en étant à l’intérieur du pays, je ne peux pas dénoncer les mesures qui ne
sont pas bonnes ? Si elle pense que c’est cela la solution, bon, qu’elle y
aille. Rien ne nous ébranle en tout cas.
Claude Dassé (afrikipresse.fr)
Titre original : « Non, je ne réponds pas à
la sortie de Madame la ministre, je mène les débats intellectuels ».
Source :
La Dépêche d'Abidjan 21 Septembre 2016
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