« Excellente
analyse et cette phrase a beaucoup traversé mon âme « Que les armes se
soient tues n’est pas synonyme de paix, car, des cœurs meurtris, qui pleurent
en silence, font plus de mal que des armes qui crépitent » tellement elle décrit
la situation du pays. Personne n'ose parler et chacun rumine sa colère, sa rancœur,
sa tristesse et sa détresse dans le silence ». Isidore Kouakou Kouadio, internaute abidjanais.
Monsieur le Président de la République,
Il est d’usage à l’orée de chaque nouvelle
année, que le Président de la République s’adresse à la nation. Vous avez parlé
Monsieur le Président, nous vous avons écouté avec intérêt.
Seulement, à la réflexion, comme dans
toute démocratie, le chef de l’État est au service du peuple. Et ce qui est
souhaitable de ce fait, c’est que le peuple lui parle et qu’il l’écoute, afin
d’agir conformément aux aspirations des populations. Qu’il vous plaise donc,
Monsieur le Président que parler nous soit permis.
En effet, plusieurs points de votre
discours nous interpellent. Nous souhaitons revenir sur quelques-uns d’entre
eux. Mais avant, nous tenons à vous remercier pour vos chaleureux vœux, que
nous vous retournons avec la même foi et la même ferveur.
A droite, en costume clair, l'auteur de la lettre ouverte |
Monsieur le Président, nous voulons dès
l’entame de notre propos vous féliciter pour le calme observé lors des
mutineries et des grèves syndicales au cours de l’année dernière. Votre sang
froid a permis de désamorcer ces situations qui auraient pu avoir de fâcheuses
conséquences si elles perduraient. Nos félicitations sont d’autant plus justifiées
qu’en dépit de tous les impacts négatifs de ces mouvements sociaux sur notre
économie, vous avez réussi à régler une autre question toute aussi cruciale :
le règlement des créances intérieures. Merci Monsieur le Président, d’oxygéner
ainsi l’activité des opérateurs économiques, évitant à plusieurs entrepreneurs
de mettre la clé sous le paillasson.
Cela dit, s’il faut féliciter aussi avec
vous les différents corps sociaux pour leur engagement à préserver la paix
sociale, nous apprécions que vous ayez noté le mérite particulier qui revient
aux planteurs. Monsieur le Président, si la baisse des revenus des producteurs
de cacao est intervenue à la suite de la chute brutale de plus de 40% des cours
mondiaux, c’est certainement parce que le système mis en œuvre dans notre pays
pour la gestion de cette filière n’est pas pensé dans l’intérêt des planteurs.
Le mécanisme, sur lequel il s’appuie, fait des intermédiaires et des
multinationales les maîtres et les seuls véritables bénéficiaires des retombées
de la filière et réduit nos braves paysans à de simples ouvriers agricoles.
L’amélioration de la gestion de la filière que vous promettez est donc très
attendue. Nous vous prions d’en faire une priorité de l’action gouvernementale,
afin de faire cesser les souffrances de nos parents.
Parlant de souffrances, Monsieur le
Président, nous avons perçu que vous êtes conscient de celles de votre peuple.
Mais en dépit de vos nombreux efforts, les actes posés jusque-là ont montré
leurs insuffisances. En 2010, vous nous aviez promis 5 NOUVEAUX CHU, et des
milliers de salles de classes. Mais force est de constater que nous avons été
loin du compte. Dans de nombreuses localités, ce sont des huttes faites de
branchages qui servent de classe. Pour nous soulager, vous promettez avant la
fin de votre dernier mandat, de nombreux CHU, CHR et centres de santé
communautaire ; des salles de classe par milliers pour les écoles primaires,
collèges et lycées… Monsieur le Président, permettez-nous de vous prendre au
mot, afin qu’au terme indiqué, nous puissions évaluer ensemble la conformité
des réalisations vis-à-vis des engagements que vous prenez aujourd’hui.
Monsieur le Président, 2017 a été aussi
l’année de tous les désespoirs pour une frange très importante de notre
jeunesse. Ces jeunes qui préfèrent se «
jeter à la mer, plutôt que d’avoir honte devant leurs mères ». La jeunesse
a du mal à se projeter sereinement dans l’avenir. Les programmes de « développement des compétences des jeunes,
pour l’accès à l’emploi et à l’entrepreneuriat ainsi que pour l’appui à
l’auto-emploi » que vous leur proposez semblent ne pas générer d’engouement
chez tous. Et, à vrai dire, Monsieur le Président, prendre pour exemple de
jeunes sportifs qui ont brillé ces dernières années pour galvaniser toute une
jeunesse en manque de repères, c’est prendre une spécificité pour la
généralité. Aucun de ceux que vous avez cités ne vit aujourd’hui en Côte
d’Ivoire. Ils vivent tous à l’étranger. Pourquoi ? Parce que notre pays n’offre
rien comme structure qui puisse leur permettre de maintenir leurs performances
de haut niveau. Monsieur le Président, il urge d’apporter des réponses
structurelles et non conjoncturelles, aux problèmes des jeunes.
Parlant de l’économie numérique, vous les
invitez à s’y intéresser car elle offre «
les moyens de se former, de se prendre en charge et de compétir à armes égales
avec les autres jeunes du monde sur un marché du numérique qui se globalise ».
Monsieur le Président, cet encouragement est noble, mais les coûts d’accès à
internet et au téléphone sont encore très élevés dans notre pays. La qualité de
l’internet est médiocre. A preuve, l’organe de régulation des
télécommunications a eu à sanctionner plusieurs opérateurs du secteur pour la
mauvaise qualité de leurs prestations. La fibre optique se déploie à un rythme
encore trop lent. Tous ces facteurs limitent considérablement notre
compétitivité.
Monsieur le Président, et si c’était que
notre pays ne fait plus rêver sa jeunesse ?
Lors du débat télévisé de l’élection présidentielle de 2010, vous avez reproché
à votre adversaire son laxisme dans sa politique d’électrification. Mais
aujourd’hui, après plusieurs années passées à la tête de notre pays, un rapport
du bureau d’études IED, retenu il y a peu pour l’élaboration du Plan Directeur
de l’Électrification Rurale en Côte d’Ivoire, mentionne que sur les 8513
localités que compte la Côte d’Ivoire, il reste encore 5666 localités non
électrifiées. C’est difficile à comprendre et à admettre, Monsieur le
Président.
Toujours durant ce même débat, vous avez
dit, et je vous cite : « L’eau potable
collective gratuite sera amenée dans tous les villages de plus de 100 habitants
et dans tous les quartiers défavorisés de nos villes ».
Malheureusement, huit (08) ans après, les changements sont quasi
imperceptibles. L’on assiste encore de nos jours, en pleine capitale économique
(à Abobo, Yopougon, Port-Bouët…), à des scènes surréalistes de populations
s’amoncelant en d’interminables files pour recueillir de l’eau potable. Les
récentes manifestations des femmes de Yopougon Siporex en octobre et novembre
derniers nous l’ont douloureusement rappelé. Monsieur le Président, vous nous
avez longuement entretenus sur vos efforts pour le bien-être des Ivoiriens.
Nous saluons tous vos efforts, mais il y a encore beaucoup à faire. Nous vous
encourageons donc à poursuivre ces efforts pour corriger toutes ces
insuffisances.
Vous le devez d’autant plus que la croissance qui nous est présentée, « soutenue à 9% en moyenne depuis 2012 »,
ne se fait toujours pas sentir dans le vécu quotidien des Ivoiriens. Les
centres ruraux de santé sont sous-équipés. L’accès aux soins n’est pas à la
portée de tous. L’Assurance Maladie Universelle, huit (08) ans après votre
accession à la magistrature suprême, n’est toujours pas une réalité palpable.
Monsieur le Président, vous avez en outre
longuement évoqué la Paix dans votre intervention, et c’est à celle-ci que vous
attribuez vos performances. Nous saluons votre engagement pour la Paix. Mais la
Paix à laquelle les Ivoiriens aspirent, ce n’est pas celle du silence des
armes, mais celle des cœurs. Que les armes se soient tues n’est pas synonyme de
paix, car, des cœurs meurtris, qui pleurent en silence, font plus de mal que
des armes qui crépitent.
Monsieur le Président, vous avez dit à ce
propos : « Cultivons la paix, gage de la
cohésion sociale et de notre développement ! Nous devons continuer, sans
relâche, à rassembler tous les fils et toutes les filles de notre pays, à
intensifier toutes nos actions en faveur du pardon et de la concorde nationale.
A cet effet, j’ai décidé, en cette fin d’année et comme il est de coutume,
d’accorder la grâce à 4 132 détenus de droit commun…». Monsieur le
Président, c’est un acte de bonté que de gracier des délinquants. Et nous
l’apprécions. Mais Monsieur le Président, il se trouve dans nos prisons
certains de nos frères et sœurs qui y croupissent sans jugement depuis 2011.
Plusieurs parmi eux y meurent, laissant femmes, enfants et parents dans la
désolation, la misère et l’amertume. Monsieur le Président, s’il vous plait,
accordez leur la liberté. C’est là la clé de la paix véritable dans notre pays.
Libérez vos frères. Ce sont pour plusieurs vos enfants, vos voisins, vos
parents. La Côte d’Ivoire souffre de la profonde division entre ses enfants.
Rassemblez les fils et les filles de ce pays, le faisant, vous appliquerez LA
SOLUTION pour panser toutes les blessures et ramener définitivement la paix des
cœurs dans notre pays.
Parlant toujours de votre quête de la
paix, vous avez dit que les futures «
élections seront une nouvelle occasion de renforcer l’alliance du Rassemblement
des Houphouétistes pour la Démocraties et la Paix ». Monsieur le Président,
vous êtes le président de TOUS les Ivoiriens. Quand le Chef de l’Etat s’adresse
à la nation, le RHDP n’existe plus. Seule la nation compte ! La paix ne passe
pas par les bons scores électoraux du RHDP. Elle passe par la confiance de tous
les Ivoiriens, tous bords confondus, dans le processus électoral. Monsieur le
Président, nous fondons en vous tous nos espoirs pour travailler à la crédibilité
de ce processus. Les listes électorales ne sont pas mises à jour. De nombreux Ivoiriens
en âge de voter n’y figurent toujours pas. Les plaintes sont de plus en plus
nombreuses pour ce qui concerne la composition même de la Commission Électorale
Indépendante.
Pour finir Monsieur le Président, vous
avez dit, je cite : « Le Siège du Sénat
sera établi à Yamoussoukro, après celui de la Chambre des Rois et Chefs
Traditionnels, traduisant ainsi notre volonté de poursuivre les opérations de
transfert de la capitale à Yamoussoukro ». Monsieur le Président, si votre
volonté est vraiment de faire de Yamoussoukro la capitale de notre pays, qu’il
vous plaise d’y installer la Présidence de la République, la Primature et le
Parlement. Suivront ensuite les sièges des ministères et des administrations
centrales. Ainsi que, plus tard, les différentes représentations diplomatiques.
Le désengorgement de la ville d’Abidjan passe par ces mesures.
Monsieur le Président, merci pour votre
aimable attention. Bonne et heureuse année 2018 à vous et à votre famille. Que
Dieu vous inspire à conduire notre pays dans des voies salutaires pour tous.
Bonne et heureuse année 2018 à tous les Ivoiriens.
Que Dieu
bénisse la Côte d’Ivoire.
Koffi Hamed Zarhour
EN MARAUDE DANS LE WEB
Sous cette rubrique, nous
vous proposons des documents de provenance diverses et qui ne seront pas
nécessairement à l'unisson avec notre ligne éditoriale, pourvu qu'ils soient en
rapport avec l'actualité ou l'histoire de la Côte d'Ivoire et des Ivoiriens, ou
que, par leur contenu informatif, ils soient de nature à faciliter la
compréhension des causes, des mécanismes et des enjeux de la « crise ivoirienne
».
Source : Connectionivoirienne.net 6 février 2018
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