samedi 28 novembre 2015

La France doit se regarder en face et exorciser ses propres démons

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Après l’hommage national aux victimes des attentats du 13 novembre 2015, après la douleur et les pleurs des parents et amis, après les indignations et condamnations, que doit faire la France ? Pour Hollande, il faut non seulement reprendre et intensifier les frappes contre Daesh mais travailler à ce que Bachar Al-Assad ne soit plus au pouvoir à Damas. Depuis plusieurs mois, en effet, le président français soutient qu’une solution politique en Syrie passe par la mise à l’écart du président syrien. Et le fait qu’il l’ait répété lors de sa dernière visite aux États-Unis prouve que l’ancien Premier secrétaire du Parti socialiste est vraiment obsédé par la chute du numéro 1 syrien. Les Ivoiriens se rappellent certainement que Sarkozy était, lui aussi, obsédé par le renversement de Laurent Gbagbo jugé par la France (droite et gauche confondues) pas assez docile pour laisser ses multinationales piller les richesses des Ivoiriens. En matière d’obsession, Hollande n’innove donc pas. En d’autres termes, dans la guerre contre les présidents qui refusent de se soumettre aux diktats des Occidentaux, il n’y a rien de nouveau sous le soleil français. Ce qui est nouveau, c’est que la Russie de Poutine a clairement affirmé qu’elle ne se laisserait plus tromper par la France et ses alliés de l’OTAN qui avaient mis en avant l’instauration de la démocratie et la protection des populations civiles pour intervenir en 2011 en Libye. Ayant découvert avec le temps que ces pays avaient menti comme George W. Bush avait trompé le monde entier sur les armes de destruction massive que détiendrait Saddam Hussein et que le vrai mobile de leur ingérence dans les affaires libyennes était l’élimination physique de Kadhafi et l’accaparement du pétrole libyen, le président russe a décidé de soutenir le président syrien. Cela signifie qu’Assad n’est pas orphelin comme Gbagbo l’était de 2000 à 2011 et que les dirigeants français devront y réfléchir à deux fois avant de croiser le fer avec la Russie qui, en plus d’être membre permanent du conseil de sécurité de l’ONU, est une vraie puissance militaire qui n’entend pas laisser les pays occidentaux continuer à jouer les gendarmes du monde. Au fait, qui a fait de Hollande, de Fabius, de Sarkozy, de Juppé et d’autres petits prétentieux français les maîtres du monde ? Qui les a institués juges et arbitres de la terre ? De qui tiennent-ils le mandat et le pouvoir de décider de qui mérite de diriger ou de vivre ? Et au nom de quoi eux seuls, malgré le fait qu’ils ont du sang sur les mains et traînent une flopée de casseroles, auraient le droit de vivre ? Qu’est-ce qui les autorise à décréter qu’untel peut vivre pendant que tel autre devrait mourir ? Face à une telle arrogance, on est évidemment tenté de donner raison à Me Jacques Vergès qui estimait en 2011 que « l’État français est conduit par des voyous et des assassins ». Ce que je veux mettre en relief ici, c’est que bomber le torse ou menacer de faire partir Assad ne sert à rien dans la mesure où les autorités russes se sont solidement mises derrière le président syrien et ne sont pas près de le lâcher. Pour le dire autrement, le refus de faire son mea culpa et le départ d’Assad réclamé à tout bout de champ par Hollande ne sont que de fausses solutions. Le locataire de l’Élysée ferait mieux d’entendre et de considérer sérieusement les vraies solutions proposées par certains de ses compatriotes. Il gagnerait, d’abord et avant tout, à prendre connaissance de ce que certains internautes français pensent de sa manière de gérer le pays. L’un d’entre eux dit ceci : « On peut encore pardonner après un premier attentat mais là, un second aussi meurtrier juste 10 mois après, c'est inadmissible ! C’est une faute lourde de l'État ! Le gouvernement savait, il n'a rien fait ». Un autre met en garde : « Non à la récupération politique. Hollande devrait avoir honte de son inaction coupable ; au lieu de quoi, il se balade à nos frais et en polluant un max pour jouer le maître du monde ». Un troisième, pour qui « c’est ni plus ni moins de la sale campagne électorale tachée de sang » conseille de « ne pas tomber dans cette mascarade et complot du style la marche de Charly [qui est] de la grosse hypocrisie de la part de personnes qui ne font rien pour la France ». Un quatrième internaute se demande si la gauche a déjà fait quelque chose sur quelque sujet que ce soit et pointe le laxisme de Valls « qui a refusé de l’État syrien la liste de djihadistes français en Syrie ». Quant à Emmanuelle Prévost, la sœur d’une victime tuée au Bataclan, elle s’étonne que « des personnes fichées S circulent librement, empruntent n'importe quel moyen de locomotion ». D’autres citoyens français sont allés au-delà de l’exaspération pour faire des propositions à même d’aider le pays à combattre efficacement et durablement le terrorisme. C’est le cas de Jean-Luc Mélenchon pour qui il est urgent de « sortir des ambiguïtés avec le Qatar et l’Arabie Saoudite » et de considérer que « la Russie est un partenaire et non un adversaire abominable ». Et le co-président du Parti de Gauche d’appeler tous ses compatriotes à ne pas se contenter « d’analyser les erreurs sans fin des dirigeants politiques qui nous ont amenés à cette situation mais à faire aussi le point sur nous-mêmes. Je veux dire sur tous ceux qui ont laissé se prendre des décisions contraires à l’intérêt de notre pays pendant aussi longtemps sans dire un mot et sans sanctionner aucun responsable les jours de vote ».
Je trouve l’interpellation de Mélenchon d’autant plus intéressante que le peuple français nous a jusqu’ici donné l’impression de ne pas être au courant des crimes, pillages et coups tordus de ses dirigeants en Afrique francophone, de n’avoir jamais vu des Ivoiriens battre le pavé à Paris pour la libération de Laurent Gbagbo injustement détenu à la Haye, de n’avoir jamais entendu parler de biens mal acquis et cachés en France par plusieurs chefs d’État africains. Pour sa part, Éric Montana fait l’aveu suivant : « En Afghanistan, en Irak, en Libye, au Tchad, en Syrie nous avons semé la mort et la terreur. Nous avons voulu imposer la démocratie à coups de bombes à des peuples qui n'en veulent pas. Nous avons voulu exporter des valeurs auxquelles nous-mêmes ne croyons plus. Nous avons infligé tellement de souffrances qu’aujourd'hui nous récoltons ce que nous avons semé. Nos politiciens font les guerres au lieu de s'occuper des problèmes graves de notre pays. Le chômage explose, la misère s’étend, nos retraités font les poubelles pour pouvoir survivre, notre jeunesse n'a plus d'espoir et nos gouvernements dépensent des milliards à bombarder des pays et des peuples étrangers ». Le chanteur français poursuit : « Arrêtons de nous mêler des affaires du monde. Nous ne sommes ni des exemples à suivre ni des justiciers. Il est temps d'ouvrir les yeux : à force de semer la haine, le racisme et la mort, nous, nous récoltons le terrorisme et la peur. Et ces politiciens irresponsables qui nous conduisent vers l’abîme, ces pompiers pyromanes, profitent du terrorisme pour nous infliger l'état d'urgence, réduire nos libertés et nous dresser les uns contre les autres au risque de provoquer une guerre civile dans notre propre pays ».
La suggestion du philosophe Michel Onfray ne me paraît pas moins pertinente. À la question de savoir quelle devrait être la bonne attitude pour la France, il répond sans hésiter : « Moi, je serais pour qu'on se désengage absolument de tous les conflits planétaires dans lesquels on s'en va bombarder des populations musulmanes... Pourquoi on aurait le droit d'intervenir au Mali mais pas le droit d'intervenir à Cuba, le devoir d'intervenir en Libye mais pas en Corée du Nord ? Qu'est-ce qui fait qu'on a des indignations sélectives ? On ne peut pas aller faire le gendarme sur la planète entière ! Donc on a des indignations sélectives parce qu'il faut penser en termes de géologie, de stratégie, de sous-sol. Faites une carte géologique et vous verrez que ce sont les endroits géostratégiques où ont lieu les guerres. Parce que là où il y a du pétrole, il y a toujours des militaires ».
Ces propos de M. Onfray, si c’est un Africain qui les avait tenus, il aurait été accusé de la théorie du complot dont raffolent ceux qui non seulement manquent d’arguments face à des faits qui les accablent mais sont dans le déni permanent et se refusent à faire repentance. La France doit cesser de penser qu’elle est blanche comme neige, que la colonisation fut une bonne chose, qu’elle fait œuvre salvatrice et civilisatrice en envoyant des soldats et/ou en s’ingérant dans les affaires intérieures des pays africains. Ces interventions, qui se sont toutes soldées par la désolation, le chaos, la misère et la mort précoce de milliers de personnes, il est temps qu’elles prennent fin. Autrement dit, les dirigeants français doivent enfin se regarder en face ou dans le miroir. Ils comprendront alors qu’ils ont fait trop de mal ici ou là et qu’ils doivent s’atteler dorénavant à régler d’abord les nombreux problèmes auxquels leur pays est confronté. Quand ils auront fait cela, quand ils auront fini de rendre leurs compatriotes heureux et, si nous le désirons, alors nous pourrions faire appel à eux. Pour l’instant, ils seraient mieux inspirés d’exorciser leurs propres démons et de relever leurs propres défis au lieu de se lancer dans une perpétuelle fuite en avant. Concrètement, cela veut dire fermer toutes les coûteuses bases militaires françaises en Afrique qui ne servent qu’à protéger des dictateurs corrompus et sanguinaires, laisser les Africains d’expression française se débrouiller tout seuls comme le font si bien Ghanéens, Zambiens, Nigérians, Kenyans, Botswanais ou Ougandais, ne plus empoisonner ou assassiner les Africains épris de liberté et de souveraineté. Car, tant qu’Africains et Arabes seront exploités, méprisés et humiliés, tant que ne sera pas engagée la vraie guerre, celle contre la duplicité et contre le soutien à des terroristes et rebelles çà et là pour déstabiliser des présidents qui refusent d’être des pantins, tant que perdurera la volonté de dire aux autres comment ils doivent vivre et qui doit les diriger, il sera difficile, voire impossible d’éradiquer le terrorisme.

Jean-Claude DJÉRÉKÉ

vendredi 27 novembre 2015

Mousbila Sankara : « Ce sont les mêmes personnes qui ont renversé le commandant Jean-Baptiste Ouédraogo, qui ont tué le capitaine Thomas Sankara, et qui ont exfiltré Blaise Compaoré en 2014. »

Mousbila Sankara
Ancien ambassadeur du Burkina Faso en Libye (1983-1987), proche de Thomas Sankara, Mousbila Sankara a été emprisonné et torturé pendant quatre ans par le régime de Blaise Compaoré. Pour l’Humanité, il revient sur son parcours, le chaos libyen, et analyse les évènements récents de son pays : la chute de Compaoré, le coup d’État de Gilbert Diendéré, et l’échéance présidentielle du 29 novembre où il bat la campagne pour soutenir le candidat de l’UNIR/PS, maître Bénéwendé Sankara.
Quel a été votre parcours avant la révolution sankariste ?
Mousbila Sankara. Avant de prendre contact avec les acteurs politiques, j’ai principalement évolué dans le milieu syndical burkinabé, de 1969 à 1980. En 1980, il y a eu le deuxième coup d’Etat de l’histoire de notre pays commis par le colonel Saye Zerbo qui a reçu le soutien d’un nombre significatif de travailleurs. Malheureusement, la bonne volonté de ce colonel a été émoussée par la réalité du terrain et les luttes de tendance ont conduit à une rupture entre ces mêmes travailleurs et le régime. Le droit de grève a été supprimé. Nous avons malgré tout poursuivi la grève et de nombreux responsables syndicaux, dont moi, ont été suspendus et poursuivis. J’ai pu quitter le pays et c’est de l’extérieur que j’ai appris le renversement du régime par l’aile progressiste de l’armée, qui a pris le pouvoir sous le nom du CSP, le Comité du Salut du Peuple. Le commandant Jean-Baptiste Ouédraogo en était le président et le capitaine Thomas Sankara a été nommé peu de temps après Premier ministre. Compte tenu de leurs divergences, le 17 mai 1983, le capitaine Sankara a été arrêté et le capitaine Blaise Compaoré, qui faisait partie de la même tendance, est rentré en dissidence. Nous avons décidé de les soutenir. Les circonstances ont guidé ce rapprochement : nous nous battions pour notre liberté à exprimer nos droits syndicaux et le 4 août 1983, ils ont renversé ceux qui nous harcelaient et nous torturaient. J’ai accepté ensuite le poste d’ambassadeur du Burkina Faso en Libye.
Comment avez-vous rencontré Thomas Sankara ? Quels étaient vos liens avec lui ?
Mousbila Sankara. Nous sommes de la même famille, même si nous sommes parents éloignés, mais je le connaissais avant la révolution. Le nom de famille Sankara, on le trouve au Centre, au Nord et un peu à l’Ouest et aujourd’hui, grâce aux migrations, partout dans le pays. C’était quelqu’un de très curieux, et il était très intéressé par ma petite bibliothèque. Lui-même de confession chrétienne, il me posait des questions sur l’islam et la culture musulmane. Plus tard, il a suivi de près nos luttes syndicales. Il venait s’enquérir de l’état de nos négociations, prendre connaissance de nos tracts, etc.… J’ai pu constater qu’il développait une véritable vision politique, et cela nous a encore rapprochés. Par contre, je n’avais quasiment aucun contact avec Blaise Compaoré. Je savais simplement que lui et Thomas étaient très liés. 
Le poste d’ambassadeur en Libye est à l’époque extrêmement sensible puisque la France et les Etats-Unis sont alors en conflit avec le régime du colonel Kadhafi, accusé entre autres d’avoir des visées sur le Burkina Faso, ancienne colonie française. Comment avez-vous vécu cette période ?
Mousbila Sankara. Je suis arrivé en poste à Tripoli à la fin de l’année 1983. Avant cela, des contacts existaient entre des agents de liaison libyens au Burkina Faso et nous. Donc j’étais une figure connue des milieux diplomatiques au sein de la capitale libyenne. Là-bas, j’ai pu constater à quel point la France et la Libye étaient en confrontation sur le dossier tchadien. Les Français soutenaient le président Hissène Habré et les Libyens appuyaient Goukouni Oueddei [alors à la tête du Front de libération nationale du Tchad, le FROLINAT, ndlr]. Le Tchad était profondément divisé. Or, Thomas Sankara entretenait de très bonnes relations avec le colonel Kadhafi mais également avec Hissène Habré. Compte tenu de cette situation, j’ai travaillé avec l’ambassade de France à Tripoli pour essayer de trouver une solution politique à ce conflit, d’être des modérateurs entre Thomas Sankara et François Mitterrand.
Mais la France devait être extrêmement contrariée des bonnes relations entre Sankara et Kadhafi ?
Mousbila Sankara. Oui, ils ont même protesté lorsque nous avons établi notre représentation diplomatique. Thomas leur a répondu : « Vous aussi vous avez une ambassade, pourquoi nous n’aurions pas ce même droit ? Si pour l’intérêt de votre peuple, vous la maintenez ainsi qu’un centre culturel, des écoles françaises, nous le pouvons également ». Il a été très clair, catégorique. Malgré le travail que nous avons effectué avec l’ambassadeur de France, la réalité du terrain tchadien était extrêmement difficile. La France est ensuite intervenue militairement pour chasser les Libyens de la bande de territoire qu’ils occupaient au Tchad.
Etait-il facile pour un diplomate de travailler avec le régime de Kadhafi ?
Mousbila Sankara. En tant qu’individu, c’était dur. Et en tant que diplomate, encore plus difficile. Car les Libyens n’avaient pas une diplomatie classique. Quand vous êtes nommé à un poste comme celui-ci, votre premier réflexe est de vous documenter, et le cas libyen n’était documenté nulle part. C’était un régime très opaque, le bureau des Affaires étrangères n’était pas dirigé par un ministre mais par un comité, un ensemble de personnes, et l’information circulait très mal entre eux, ou ils faisaient semblant de découvrir à chaque fois une situation dont vous aviez discuté la veille avec un autre interlocuteur. Rien n’était jamais acquis.
La France a fait la guerre à Mouammar Kadhafi en 2011, le pays est aujourd’hui détruit, livré aux milices, et les métastases de ce conflit n’en finissent pas de s’étendre à l’Afrique subsaharienne. Que cela vous inspire-t-il ?
Mousbila Sankara. Quand j’étais en Libye, compte tenu de ma religion musulmane, de ma culture, j’étais avec le peuple, le Libyen lambda. Nous avions là-bas des milliers d’émigrés burkinabés, maliens, tchadiens, tunisiens, algériens etc.… Pourtant, personne ou presque ne songeait à franchir la Méditerranée car chacun trouvait sur place ce dont il avait besoin. La Libye était la vache à lait de l’Afrique. Le drame a commencé avec les sanctions de la communauté internationale, suivi des bombardements de 1986. Les gens ne pouvaient plus rien envoyer à leurs familles restées au pays. Quand l’intervention de Sarkozy est venue détruire l’Etat libyen en tant que tel, il fallait bien que tous ces immigrés aillent quelque part. Malheureusement, vous n’êtes pas capables, vous Européens, de voir le problème dans sa complexité. Partout où les gens n’arrivent plus à vivre, ils chercheront à aller ailleurs, et pour l’instant, leur « ailleurs », c’est chez vous. Même si vous bétonnez, ils perceront le béton. La solution c’est d’accepter qu’on a mal fait et aider les populations à rester chez elles. Il vous a fallu trois siècles pour vous construire et élever votre niveau de vie. C’est devenu un mirage pour nous. Or, les perspectives d’avenir doivent se construire sur place, au niveau local. Rares sont ceux qui se sentent à l’aise loin des leurs, de leurs familles.
Dans les semaines qui précèdent le renversement et l’assassinat de Thomas Sankara, vous êtes donc toujours en poste à Tripoli…
Mousbila Sankara. Oui, mais pas ce jour-là (le 15 octobre 1987, ndlr). J’étais parti quelque temps plus tôt à l’Assemblée générale de l’ONU à New York, et c’est de là-bas que j’ai appris sa mort. Blaise s’était rendu à Tripoli le 31 août 1987 pour représenter le Burkina Faso à l’occasion de la fête du 1er septembre célébrant la prise de pouvoir du colonel Kadhafi. Nous avons échangé à propos du climat délétère qui régnait alors au Burkina. Des tracts anonymes circulaient et qui illustraient de profondes divisions au sein des responsables de la révolution burkinabé. Il m’a juré que ces tracts n’étaient pas de son fait mais du Parti communiste révolutionnaire voltaïque (PCRV)[1], qui tentait de les opposer, mais qu’ils ne parviendraient pas à leurs fin. Le PCRV n’a pas changé depuis. Ils sont toujours dans la clandestinité, ils prônent en permanence des idées séduisantes mais qui ne sont jamais applicables dans le monde réel. La caricature des trotskystes, en quelque sorte. Pour en revenir à Blaise Compaoré, il m’a dit ensuite qu’il allait réunir la presse afin de mettre un terme aux rumeurs et rétablir la vérité sur ses excellentes relations avec Thomas Sankara.
Quand j’ai appris le coup d’Etat, j’ai appelé Blaise. Il m’a dit qu’il avait été débordé et qu’il cherchait à rétablir la situation. Il a ajouté : « Ne rentre pas, car si nous sommes tous arrêtés ou tués, ce sera sans issue ». Mais il s’est bien gardé de m’informer la mort de Thomas. C’est seulement quand j’ai appelé Tripoli que j’ai enfin été mis au courant. Blaise Compaoré m’a ensuite demandé de l’aider à lui fournir de l’aide et des équipements, ce que j’ai fait. Blaise n’était évidemment pas débordé du tout. C’est lui qui gérait tout, et il a fini par l’assumer publiquement une semaine plus tard. Tout cela n’était qu’une tromperie.
Comment les Libyens ont-ils accueilli le coup d’Etat et l’assassinat de Thomas Sankara ?
Mousbila Sankara. Ils étaient divisés. D’abord, la perte de la personne les a marqués car certains étaient fiers de Thomas Sankara. Mais ils avaient leur politique. La Libye voulait quelqu’un qui puisse leur permettre un accès à certaines zones qu’ils convoitaient, comme la Côte d’Ivoire, le Togo et le Niger, et Thomas était réticent. Ils ont donc cherché à voir comment ils pouvaient tirer leur épingle du jeu face à cette situation nouvelle. Quand je suis rentré à Ouagadougou, je me suis rendu compte que je ne pourrais pas travailler avec Blaise Compaoré qui assumait alors être à la tête des officiers qui avaient renversé la révolution. Je suis rentré en Libye, j’ai envoyé une lettre de démission. Ils ont retiré ma voiture, coupé mes téléphones et mon télex et rendu ma situation ingérable. J’ai finalement réussi à faire partir mon épouse et je suis rentré au Burkina. Ils m’ont accueilli à l’aéroport au mois de décembre, et ils m’ont arrêté le 14 et jeté  en prison.
Votre détention a été extrêmement dure, pourquoi avez-vous été torturé ?  
Mousbila Sankara. J’ai subi des tortures pendant quatre ans. Et je n’ai jamais compris pourquoi. De temps en temps, mes tortionnaires me posaient des questions auxquelles je n’avais pas de réponse. Puis au bout de deux ans, on m’a transféré au Conseil de l’entente[2] et là cela a été une toute autre musique. On m’a accusé d’être un adversaire du nouveau régime et de travailler en intelligence avec Boukary Kaboré[3]. Ils m’ont torturé pour que je signe un papier lui demandant de se rendre, ce que j’ai refusé.
Vous avez été torturé par des éléments du RSP. Le général Diendéré, qui a tenté au mois d’octobre un coup d’Etat et qui dort aujourd’hui en prison, était-il présent ?
Mousbila Sankara. Oui. Gilbert Diendéré faisait partie de cette équipe de tortionnaires. Je les connaissais tous, vous savez. On a travaillé ensemble pendant quatre ans.
Si vous n’avez compris ni les raisons de votre arrestation et celles des tortures que l’on vous a infligées, avez-vous compris celles de votre libération ?
Mousbila Sankara. Non plus. Des organisations de défense des droits de l’homme ont tenté d’intervenir pour obtenir au moins la tenue d’un procès pour moi et mes codétenus. Nous étions une dizaine dans ma cellule. Des avocats commis d’office se sont occupés de notre dossier, et j’ai appris en 1991 que j’avais été gracié. Nous étions des lambeaux de personne : malades, handicapés… La plupart sont morts aujourd’hui. Quand je suis sorti, j’avais perdu la vue. J’ai déposé plainte contre Blaise et ses hommes pour séquestration et torture. On m’a répondu que les lois garantissaient l’impunité à Blaise Compaoré, et qu’un dépôt de plainte allait compliquer ma situation.
Comment avez-vous vécu la chute de ce même Blaise Compaoré en octobre 2014 ?
Mousbila Sankara. Pour moi, le départ de Blaise a constitué une surprise car les manifestations visaient avant tout à l’empêcher d’être à nouveau candidat aux élections. Mais la tournure des évènements l’a contraint au dernier moment à partir. Cependant, on n’a pas tenu compte du rôle joué par ceux qui ont provoqué la chute de Blaise Compaoré[4]. La transition s’est organisée, mais le RSP était toujours en place, comme l’a montré la tentative de coup d’Etat menée par Gilbert Diendéré.
Cette tentative de coup d’Etat a été qualifiée de « stupide » par la plupart des observateurs, partagez-vous ce point de vue ?
Mousbila Sankara. Disons qu’elle apparaît stupide pour ceux qui ne connaissent pas notre histoire. Gilbert Diendéré tirait les ficelles dans l’ombre depuis le départ de Blaise, et il obtenait toujours ce qu’il voulait. Face à la détermination de ceux qui ont exigé la dissolution du RSP, il s’est rendu compte qu’il n’aurait aucun moyen de le reconstituer puisqu’il n’était plus dans le système. Alors il l’explique à ses complices du RSP, mais ceux-là n’ont pas la finesse du milieu politique. Lui savait qu’un pouvoir militaire n’était plus possible, mais il voulait créer une situation qui amène à la négociation afin d’éviter la dissolution du RSP. Et ce moyen, c’était de faire traîner la tenue des élections et d’appuyer un parti politique partageant cette vision et susceptible de maintenir le RSP. Il a été débordé par ses hommes qui ont cru possible de prendre le pouvoir. Pour une fois, Gilbert Diendéré a été mis devant le fait accompli. S’il n’assumait pas le putsch de ses hommes, cela voulait dire qu’il les abandonnait à leur sort, ce qui est difficilement concevable pour un militaire. Blaise n’était plus là pour corrompre et s’assurer la fidélité d’une armée qui n’a pas suivi le RSP.
Pour vous, le RSP a toujours joué le rôle de faiseur de rois au Burkina Faso…
Mousbila Sankara. Le RSP a officiellement été créé en 1996, mais la structure existait déjà sous le nom de Centre national d’entraînement commando (CNEC). Et ce sont les mêmes personnes qui ont renversé le commandant Jean-Baptiste Ouédraogo, qui ont tué le capitaine Thomas Sankara, et qui ont exfiltré Blaise Compaoré en 2014.
Quel a été, selon vous, le rôle joué par la Côte d’Ivoire dans ce coup d’Etat ?
Mousbila Sankara. Je ne veux pas raconter n’importe quoi, c’est une partie de l’histoire que je ne connais pas. Je sais que les rebelles ivoiriens sont passés par le Burkina Faso lors de la partition du pays en 2003. Je suis un pro-Gbagbo par principe, et je n’ai pas apprécié le sort que l’on a fait à ce pays. Cela m’a en quelque sorte enlevé toute ma dignité. J’évite même d’en parler, et de transiter par ce pays lorsque je voyage. Ceci dit, les problèmes fondamentaux du Burkina Faso ne trouvent pas leur source en Côte d’Ivoire. Si un gouvernement pose un problème, la question est réglée en France et aux Etats-Unis.
Les élections du 29 novembre sont présentées comme les plus libres et démocratiques de l’histoire du Burkina Faso. Partagez-vous ce point de vue ?
Mousbila Sankara. Ceux qui ont manifesté et obtenu la chute de Compaoré voulaient la fin d’un système de prédation économique, d’une impunité généralisée, et un processus qui permette de tirer les leçons de ce qui s’est passé. Mais l’occident, qui contribue massivement au budget de l’Etat, a réclamé l’organisation d’élections à l’horizon d’un an. En quelque sorte, les acteurs de l’ancien système ont évité le jugement qui les aurait chassés de la scène politique burkinabé et qui aurait permis l’émergence d’une nouvelle génération politique. Si un Roch Marc Christian Kaboré ou un Zéphirin Diabré (les deux favoris du scrutin, ndlr) est élu président de la République, ce ne sont pas eux qui vont ouvrir les dossiers des crimes économiques auxquels ils ont participé. La démocratie, on ne la mesure pas simplement à travers la capacité à s’imposer grâce à la supériorité des budgets de campagne. A l’UNIR/PS, nous y allons et nous profitons de cet espace pour expliquer à la population ce que nous pensons être juste pour ce pays. Nous savons qu’avec nos maigres moyens, une victoire relèverait du miracle. Mais nous partons résolument en campagne pour que la trace de nos convictions profondes ne s’égare pas.
Qu’est-ce que cette élection peut changer pour le quotidien difficile des Burkinabés ?
Mousbila Sankara. Avec Roch ou Zéphirin, ça ne changera rien. On aura quelques nouveaux riches, c’est tout. Si pendant 27 ans ils ont été incapables d’amener Blaise à œuvrer dans le sens de l’intérêt général, qu’attendre d’eux aujourd’hui ? Qu’attendre d’un Zéphirin Diabré, ancien ministre des privatisations à un franc symbolique ? Thomas Sankara avait mis en place un système de démocratie directe avec des votes à main levée. C’est cela qui contribue à empêcher la corruption. Ce qui a été mis en place ici, c’est une démocratie marchande à l’occidentale.

Propos recueillis par Marc de Miramon, envoyé spécial à Ouagadougou (Burkina Faso).
Titre original : « Ce qui a été mis en place ici, c’est une démocratie marchande à l’occidentale »

Source : Humanite.fr 25 Novembre 2015 




[1] - Le PCRV est une structure politique clandestine soupçonnée d’avoir joué un rôle dans la déstabilisation de la révolution sankariste.
[2] - Cœur du pouvoir à Ouagadougou, où Thomas Sankara a été assassiné.
[3] - Surnommé « le Lion », proche de Thomas Sankara et héros de la guerre entre le Mali et le Burkina Faso, Boukary Kaboré a refusé de reconnaître la légitimité de Blaise Compaoré. Après son exil au Ghana, nombre de ses hommes ont été assassinés par le nouveau régime.
[4] - Les sankaristes de l’UNIR/PS et les acteurs de la société civile, dont le Balai citoyen.

jeudi 26 novembre 2015

Noam Chomsky : « Une catastrophe écologique est imminente, et nous n’avons que très peu de temps pour la limiter. »


Noam Chomsky est né le 7 Décembre 1928 à Philadelphie (Etats-Unis). Il a commencé à travailler à l’Institut de Technologie du Massachusetts (MIT) en 1955. Eminent linguiste, philosophe et militant politique, son travail dans les années 50 a révolutionné le domaine de la linguistique. Il s’est fait connaître par son activisme contre la guerre du Vietnam. Opposé aux élites dirigeantes de son pays et de l’Occident en général, c’est un critique acerbe de la politique étrangère américaine et occidentale. A 86 ans passés, il continue de dénoncer toutes les injustices, avec l’Occident en général dans sa ligne de mire.

Isabelle Kumar, euronews : Noam Chomsky merci d‘être avec nous. Le monde en 2015 semble très instable, mais d’une façon générale, êtes-vous plutôt optimiste ou pessimiste ?
Noam Chomsky : Au niveau mondial, nous courons vers un précipice : nous ne pouvons que chuter dans l’abîme, ce qui réduit fortement nos chances d’une survie décente.
Isabelle Kumar, euronews : De quel précipice s’agit-il ?
Noam Chomsky : Il y en a deux en fait : le premier est environnemental. Une catastrophe écologique est imminente, et nous n’avons que très peu de temps pour la limiter. Nous n’allons pas dans le bon sens. L’autre date de 70 ans, c’est la menace d’une guerre nucléaire, qui est en fait toujours croissante. Si vous regardez bien ce dossier, c’est un miracle que nous ayons survécu.
Isabelle Kumar, euronews : Regardons les questions environnementales d’abord. Nous avons demandé aux internautes, sur les réseaux sociaux, de nous envoyer des questions, et nous en avons reçu des milliers. Nous avons reçu cette question de Enoa Agoli, qui demande : « quand vous analysez la question de l’environnement avec le regard d’un philosophe, que pensez-vous du changement climatique ? »
Noam Chomsky : L’espèce humaine est vieille d’environ 100 000 ans, et elle est maintenant face à un tournant de son histoire. Cette espèce est dans une position où elle va bientôt décider, d’ici quelques générations, si l’expérimentation de la vie dite intelligente peut continuer, ou si nous sommes déterminés à la détruire. Les scientifiques reconnaissent que les combustibles fossiles doivent être laissés dans le sous- sol si nos petits-enfants veulent avoir des perspectives décentes. Mais les structures institutionnelles de notre société font pression pour essayer d’extraire la moindre goutte. Les effets, les conséquences humaines prévisibles du changement climatique dans un avenir proche, sont catastrophiques et nous courons vers ce précipice.
Isabelle Kumar, euronews : En termes de guerre nucléaire, nous savons tous maintenant que l’Iran a conclu un accord préliminaire. Est-ce que cela ne vous donne pas une lueur d’espoir que le monde pourrait être un endroit plus sûr ?
Noam Chomsky : Je suis pour les négociations avec l’Iran, mais ces discussions sont profondément viciées. Il y a deux états au Moyen-Orient qui multiplient les agressions, la violence, les actes terroristes, les actes illégaux, en permanence. Ils sont tous les deux des États très puissants, dotés d’armes nucléaires et de tout un armement. Et leurs armes nucléaires ne sont pas prises en compte.
Isabelle Kumar, euronews : A qui faites-vous allusion ?
Noam Chomsky : Les Etats-Unis et Israël. Les deux états nucléaires majeurs dans le monde. Après tout, il y a une raison qui explique pourquoi, dans les sondages internationaux, gérés par des instituts de sondages américains, les États-Unis sont considérés comme la plus grande menace à la paix mondiale par une majorité écrasante. Il est assez intéressant de constater que les médias américains aient refusé de publier cela.
Isabelle Kumar, euronews : Vous n’accordez pas une très grande estime au président américain Barack Obama. Mais avec cet accord avec l’Iran, ne le voyez-vous pas sous un meilleur jour ? Le fait qu’il s’efforce de réduire la menace d’une guerre nucléaire ?
Noam Chomsky : En fait il ne fait rien. Il a juste lancé un programme de plusieurs milliards de dollars pour la modernisation des armes nucléaires américaines, ce qui signifie l’expansion du système nucléaire. C’est une des raisons pour lesquelles la célèbre horloge de l’apocalypse établie par le Bulletin of Atomic Scientists, a, il y a quelques semaines, avancé de 2 minutes, donc plus près de minuit. Minuit est la fin. Il est maintenant 3 minutes avant minuit. C’est du jamais vu depuis 30 ans, depuis les années Reagan, quand il y avait un risque imminent de grande guerre nucléaire.
Isabelle Kumar, euronews : Vous avez mentionné les États-Unis et Israël avec l’Iran. Maintenant, le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu rejette l’accord préliminaire sur le nucléaire iranien, et il dit…
Noam Chomsky : Nous savons pourquoi. L’Iran a de très faibles dépenses militaires, même selon les normes de la région. La doctrine stratégique de l’Iran est défensive. Elle est conçue pour tenir à distance une attaque, assez longtemps, pour que la diplomatie prenne le relais. Les États-Unis et Israël, deux Etats voyous, ne veulent plus tolérer la menace. Aucun analyste stratégique ne pense que l’Iran puisse un jour utiliser une arme nucléaire. Même s’il le faisait, le pays serait simplement vaporisé, et il n’y a aucune indication que les mollahs au pouvoir, quoi que vous en pensiez, veulent voir leur pays détruit.
Isabelle Kumar, euronews : Encore une question sur ce problème, par l’intermédiaire des réseaux sociaux, de Morten A. Andersen qui demande : « Croyez-vous que les Etats-Unis puissent un jour parvenir à un accord qui serait dangereux pour Israël ? »
Noam Chomsky : Les États-Unis mènent en permanence des actions qui sont dangereuses pour Israël, très sérieusement. Tout en faisant croire qu’ils soutiennent la politique israélienne. Dans les 40 dernières années, la plus grande menace pour Israël a été sa propre politique. Si vous regardez en arrière, en 1970, Israël a été l’un des pays les plus respectés et les plus admirés dans le monde. Il y avait beaucoup d’attitudes favorables. Il est maintenant l’un des pays les plus détestés et craints dans le monde. Au début des années 70, Israël a pris une décision. Ils avaient le choix, et ils ont préféré l’expansion à la sécurité, avec des conséquences très dangereuses. C‘était déjà évident à l‘époque – je l’ai écrit et d’autres personnes l’ont fait : si vous préférez l’expansion à la sécurité, cela conduit à une dégénérescence interne, la colère, l’opposition, l’isolement et la destruction ultime éventuellement. Et en soutenant ces politiques, les Etats-Unis contribuent à la menace à laquelle Israël est confronté.
Isabelle Kumar, euronews : Cela m’amène à la question du terrorisme, un fléau mondial et certaines personnes, je pense, y compris vous-même, diront qu’il y a un retour de bâton de la politique américaine internationale. A quel niveau les États-Unis et ses alliés sont-ils responsables des attaques terroristes dans le monde entier ?
Noam Chomsky : Rappelez-vous que la pire campagne terroriste dans le monde est de loin, celle qui est orchestrée à Washington même. C’est une campagne mondiale d’assassinat. Il n’y a jamais eu de campagne terroriste de cette échelle.
Isabelle Kumar, euronews : Quand vous parlez de campagne globale d’assassinat…
Noam Chomsky : La campagne de drones – c’est exactement cela. Sur de grandes parties du monde, les Etats-Unis, publiquement, ouvertement – il n’y a rien de secret dans ce que je dis, nous le savons tous – réalisent une campagne d’assassinat de personnes suspectées de nuire un jour au gouvernement américain. Et en effet c’est, comme vous l’avez dit, une campagne de terreur, et quand vous bombardez un village au Yémen, par exemple, que vous tuez quelqu’un – peut-être la personne que vous visiez, peut-être pas – et que d’autres personnes qui se trouvaient dans le quartier meurent elles-aussi – comment pensez-vous que les gens vont réagir ? Ils vont se venger.
Isabelle Kumar, euronews : Vous décrivez les États-Unis comme le principal Etat terroriste. Comment se place l’Europe alors selon vous ?
Noam Chomsky : Eh bien, c’est une question intéressante. Une étude récente, je crois qu’elle a été faite par la Fondation Open Society [indique que] la pire forme de torture, c’est le transfert de prisonniers. Vous prenez quelqu’un que vous pensez être responsable de quelque chose, et vous les envoyez à votre dictateur favori, peut-être Assad ou Kadhafi ou Moubarak, pour qu’il soit torturé, en espérant que peut-être quelque chose va en sortir. C’est extraordinaire ce transfert. L‘étude s’est penchée sur les pays qui ont participé, bien évidemment les dictatures du Moyen-Orient, car c’est là que les prisonniers ont été envoyés pour être torturés, et l’Europe. La plupart des pays européens ont participé : l’Angleterre, la Suède, d’autres pays. En fait, il y a une seule région du monde où personne n’a participé : c’est l’Amérique latine. Ce qui est assez dramatique. L’Amérique latine est maintenant à peu près hors de contrôle des États-Unis. Quand elle était contrôlée par les Etats-Unis, il n’y a pas si longtemps, c‘était le centre du monde de la torture. Maintenant, l’Amérique latine ne participe pas à la pire forme de torture qui soit. L’Europe a participé. Quand les maîtres rugissent, les serviteurs se couchent.
Isabelle Kumar, euronews : L’Europe est la servante des Etats-Unis ?
Noam Chomsky : Certainement. Ils sont trop lâches pour adopter une position indépendante.
Isabelle Kumar, euronews : Quel portrait faites-vous de Vladimir Poutine ? Il est décrit comme l’une des plus grandes menaces pour la sécurité, non ?
Noam Chomsky : Comme la plupart des dirigeants, il est une menace pour sa propre population. Il a décidé des actions illégales, évidemment. Mais le décrire comme un monstre fou qui souffre d’une maladie du cerveau et qui est atteint d’Alzheimer, une créature maléfique, c’est un standard de fanatisme orwellien. Je veux dire, quoi que vous pensiez de ses politiques, elles restent logiques. L’idée que l’Ukraine puisse rejoindre une alliance militaire occidentale serait inacceptable pour tout dirigeant russe. Cela remonte à 1990, lorsque l’Union soviétique s’est effondrée. Il y avait déjà la question de ce qui se passerait avec l’OTAN. Gorbatchev a accepté l’idée que l’Allemagne soit unifiée et rejoigne l’OTAN. C‘était une concession assez remarquable avec un quiproquo : que l’OTAN ne s‘étende pas d’un pouce vers l’est. C’est l’expression qui a été utilisée.
Isabelle Kumar, euronews : Donc, la Russie est tombée dans une provocation ?
Noam Chomsky : Qu’est-ce qui est arrivé ? L’OTAN s’est déplacé jusqu’en Allemagne de l’Est, puis Clinton a étendu la prépondérance de l’OTAN jusqu’aux frontières de la Russie. Maintenant, le nouveau gouvernement ukrainien, après le renversement du précédent, a voté à 300 voix contre 8 ou presque, la résolution pour rejoindre l’OTAN.
Isabelle Kumar, euronews : Mais vous pouvez comprendre pourquoi ils veulent adhérer à l’OTAN, vous pouvez comprendre que pour le gouvernement de Petro Porochenko, ce serait assurer la protection de leur pays ?
Noam Chomsky : Non, non, non, ce n’est pas une protection. La Crimée a été prise après le renversement du gouvernement, n’est-ce pas ? Personne ne protège l’Ukraine. Tout cela menace l’Ukraine d’une guerre majeure. Vouloir rejoindre l’OTAN n’est pas une protection. Le fait est que cela représente une menace stratégique sérieuse pour la Russie, quel que soit son dirigeant, c’est bien connu.
Isabelle Kumar, euronews : Si nous regardons la situation en Europe maintenant, il y a aussi un autre phénomène intéressant qui se déroule. Nous voyons la Grèce se rapprocher de l’Est, c’est en tout cas le souhait du gouvernement Syriza. Nous voyons aussi Podemos, qui est en train de gagner du pouvoir en Espagne, ainsi qu’en Hongrie. Pensez-vous qu’il y a une possibilité que l’Europe se rapproche des intérêts russes ?
Noam Chomsky : Jetez un œil à ce qu’il se passe. En Hongrie la situation est totalement différente. Syriza est arrivé au pouvoir sur la base d’une vague populaire qui montre que la Grèce ne veut plus se soumettre aux politiques de Bruxelles et aux banques allemandes qui détruisent le pays. Ces politiques ont été faites pour augmenter la dette de la Grèce, par rapport à sa production de richesse ; environ la moitié des jeunes sont au chômage, presque 40 % de la population vit sous le seuil de pauvreté, on détruit la Grèce.
Isabelle Kumar, euronews : Faut-il annuler la dette grecque ?
Noam Chomsky : Oui, comme en Allemagne. En 1953, quand l’Europe a annulé la plupart de la dette de l’Allemagne. Juste comme ça, pour que l’Allemagne soit en mesure de rembourser les dommages de guerre.
Isabelle Kumar, euronews : Donc, on devrait aussi annuler la dette du Portugal ? Et de l’Espagne aussi ?
Noam Chomsky : Qui a engagé cette dette ? Et à qui doit-on la rembourser ? La dette a en partie été contractée par des dictateurs. En Grèce, c‘était la dictature fasciste, soutenue par les États-Unis. La dette, je pense, était plus brutale que la dictature. C’est ce que l’on appelle en droit international, une « dette odieuse », qui ne doit pas être payée, et c’est un principe introduit dans le droit international par les Etats-Unis, quand il était dans leur intérêt de le faire. Une grande partie du reste de la dette, ce qu’on appelle les paiements à la Grèce sont des paiements aux banques, allemandes et françaises, qui ont décidé de faire des prêts très risqués avec de faibles taux d’intérêt, et qui sont maintenant confrontées au fait qu’ils ne peuvent être remboursés.
Isabelle Kumar, euronews : Je vais maintenant vous poser la question de Gil Gribaudo qui demande : « Comment l’Europe va-t-elle se transformer dans le futur, avec les défis existentiels qui arrivent ? » Parce qu’il y a la crise économique, et il y a aussi une montée du nationalisme, et vous avez également décrit certaines lignes de failles culturelles qui ont été créées à travers l’Europe. Comment voyez-vous l’Europe se transformer ? ‏
Noam Chomsky : L’Europe a de graves problèmes. Certains sont le résultat de politiques économiques conçues par les bureaucrates de Bruxelles, la Commission européenne et ainsi de suite, sous la pression de l’OTAN et les grandes banques, surtout celles de l’Allemagne. Ces politiques ont un certain sens du point de vue des concepteurs. Ils veulent être remboursés pour leurs prêts et leurs investissements risqués et dangereux. Ces politiques érodent l’Etat-Providence, qu’ils n’ont jamais aimé. L’Etat-Providence est l’une de ces contributions majeures de l’Europe à la société moderne, mais les riches et puissants ne l’ont jamais aimé. Il y a un autre problème en Europe : cette dernière est extrêmement raciste. J’ai toujours pensé que l’Europe est plus raciste que les États-Unis. Jusqu’ici ce n‘était pas aussi visible en Europe parce que les populations européennes dans le passé ont eu tendance à être assez homogènes. Donc, si tout le monde est blond aux yeux bleus, alors vous ne semblez pas raciste, mais dès que la population commence à changer, le racisme vient de nulle part. Très vite. Et c’est un problème culturel très grave en Europe.
Isabelle Kumar, euronews : J’aimerais terminer avec une question de Robert Lumière sur une note plus positive. Il demande : « Qu’est-ce qui vous donne de l’espoir ? »
Noam Chomsky : Ce qui me donne de l’espoir : un certain nombre de choses dont nous avons parlé. L’indépendance de l’Amérique latine par exemple. C’est d’une importance historique. Nous le voyons avec la réunion du Sommet des Amériques à Panama. Dans les dernières réunions continentales, les États-Unis ont été complètement isolés. C’est un changement radical par rapport à il y a 10 ou 20 ans, lorsque les États- Unis trempaient dans les affaires latino-américaines. En fait, la raison pour laquelle Obama a fait ses gestes envers Cuba était d’essayer de surmonter l’isolement des États-Unis. Ce sont les États-Unis qui sont isolés, pas Cuba. Et sans doute ce sera un échec. On verra. Les signes d’optimisme en Europe sont Syriza et Podemos. Espérons qu’il y ait enfin un soulèvement populaire contre les écrasements, les politiques économiques et sociales destructrices qui viennent de la bureaucratie et des banques, et c’est très encourageant. Ou ça devrait l‘être.
Isabelle Kumar, euronews : Noam Chomsky, merci beaucoup d’avoir été avec nous.

Source : The Global Conversation, fr.euronews.com 17 avril 2015

mercredi 25 novembre 2015

Vous avez dit « rue Ministre » ?

Le Premier Ministre Daniel Kablan Duncan a récemment déclaré que plus de 90% des routes ivoiriennes ont dépassé leur durée de vie théorique. C’est donc pour cette raison que de nombreux axes routiers sont actuellement en pleine réhabilitation. Si l’on se félicite de la décision des autorités ivoiriennes de redonner une nouvelle allure à nos routes, force est de constater que très souvent les entreprises chargées des travaux routiers ne respectent pas scrupuleusement le cahier de charges auquel elles ont librement souscrit. C’est ainsi qu’il n’est pas rare de voir des routes à peines rénovées (comme celle d’Agboville) avec des trous béants par endroits, si ce ne sont pas des bitumes avec de minces couches de goudron comme à la Palmeraie, notamment vers la rue prétendument « Ministre » qui n’a pratiquement de goudron que de nom. Tout se passe comme si nous sommes dans un no man’s land où chacun fait ce qu’il veut, comment il veut et sans aucun contrôle. On a même le net sentiment qu’on fait tout pour ne pas terminer le chantier afin d’être toujours dans la course pour les prochains appels d’offre et 
continuer ainsi à grossir sur le dos de l’Etat. Pourtant l’Ageroute est là. Le Bnetd également. Ainsi que l’Autorité nationale de Régulation des marchés publics. Faut-il alors soupçonner les commissions et retrocommissions d’être à l’origine de la dégradation du réseau routier ivoirien ? On pourrait aisément le penser quand il est difficile de comprendre que les goudrons mis au temps d’Houphouët-Boigny sont plus résistants que ceux de nos ères qui charrient le temps de l’argent en vitesse et des richesses subites, très souvent tirées de marchés alambiqués. Le plus important est de se faire son beurre. Pour le reste, on s’en fout…

Maxwell A. Médah (La Tribune de l’Economie)

EN MARAUDE DANS LE WEB
Sous cette rubrique, nous vous proposons des documents de provenance diverses et qui ne seront pas nécessairement à l'unisson avec notre ligne éditoriale, pourvu qu'ils soient en rapport avec l'actualité ou l'histoire de la Côte d'Ivoire et des Ivoiriens, ou que, par leur contenu informatif, ils soient de nature à faciliter la compréhension des causes, des mécanismes et des enjeux de la « crise ivoirienne ».

Source : La Dépêche d'Abidjan 21 Novembre 2015

lundi 16 novembre 2015

Selon Vladimir Poutine, Daesh est financé par 40 pays, y compris par des pays membres du G20


Au sommet du G20, qui s’est tenu du 14 au 16 novembre en Turquie, le président russe a souligné que la Russie avait présenté des exemples de financement des terroristes par des personnes physiques venant de 40 pays, y compris des pays-membres du G20.
Lors du sommet « j’ai donné des exemples basés sur nos données du financement de Daesh par des individus privés. Cet argent vient de 40 pays, parmi lesquels participent des pays-membres du G20 », a précisé Vladimir Poutine.
Vladimir Poutine a aussi évoqué la nécessité urgente d’empêcher la vente illégale de pétrole.
« J’ai montré à nos partenaires de nombreuses photos prises depuis l’espace et depuis les aéronefs sur lesquelles on voit clairement le volume que représente la vente illégale pétrolière effectuée par Daesh ».
Le président russe a aussi précisé que ce n’était pas le moment de rechercher quel pays était le plus efficace dans la lutte contre Daesh. « Il vaut mieux unir les efforts internationaux pour combattre ce groupe terroriste », a déclaré Vladimir Poutine.
« Nous avons besoin du soutien des Etats-Unis, des pays européens, de l’Arabie saoudite, de la Turquie et de l’Iran », a-t-il poursuivi.
A propos des relations avec les Etats-Unis, le président Poutine a mis en évidence que la position de Washington avait changé après les attentats de Paris.
« Nous avons besoin d’organiser un travail qui se concertera sur la prévention des attaques des terroristes à l’échelle globale. Nous avons proposé d’unir nos efforts avec les Etats-Unis dans la lutte contre Daesh. Malheureusement, nos partenaires américains ont refusé. Ils nous ont envoyé une note écrite qui dit : “Nous rejetons votre proposition”. Mais la vie change toujours assez vite, en nous donnant des leçons. Et je crois que maintenant tout le monde commence à comprendre qu’on ne peut combattre effectivement Daesh qu’ensemble », a précisé le président russe.
Compte tenu des différences d’approche dans la lutte contre l’EI, Vladimir Poutine a précisé qu’avant tout, il était important de définir quelles étaient les organisations qui peuvent être considérées comme terroristes et celles qui font légitimement partie de l’armée d’opposition syrienne. « Nos efforts doivent être concentrés sur la lutte contre des organisations terroristes », a insisté le président russe.
Après que le gouvernement russe a entamé une campagne de bombardements militaires en Syrie depuis le 30 septembre, la Russie a été largement critiquée par les pays occidentaux mais Vladimir Poutine a répondu aujourd’hui.
« Il est vraiment difficile de nous critiquer. Ils ont peur de nous donner des informations sur les territoires que nous ne devons pas frapper, craignant que cela devienne l’endroit exact de nos frappes futures et que nous allons les trahir. Il est évident que ce point de vue est basé sur leur propre conception de la décence humaine », a déclaré le président russe.
Source : Russia Today

samedi 14 novembre 2015

Les attentats de Paris me font mal, mais...

Une contribution de Jean-Claude Djéréké

On nous demande de prier pour Paris où 6 attaques terroristes ont fait, le 13 novembre 2015, 128 morts et plus d’une centaine de blessés dont certains seraient entre la vie et la mort. Et j’ai commencé à le faire. Sincèrement et intensément. Pourquoi ? D’une part, parce que de nombreux amis (Africains et Gaulois) vivent et travaillent là-bas. D’autre part, et c’est la raison la plus importante, parce que la foi chrétienne, Antoine de Saint-Exupéry, Émile Zola, Victor Hugo et d’autres grands auteurs français m’ont appris qu’être homme, c’est ressentir la honte et la colère devant la misère, la souffrance et la détresse d’un autre homme, quelles que soient sa couleur de peau, ses convictions religieuses, idéologiques ou politiques. Cette empathie, ajoutent-ils, devrait pousser quiconque revendique ce titre d’homme à agir en faveur de tout homme en difficulté.

Paris novembre 2015

Comme j’eusse aimé que gouvernants et gouvernés français fussent choqués et révoltés par les massacres et viols devenus, depuis 1997, le pain quotidien des populations de l’Est de la République démocratique du Congo ! Comme j’aurais tant aimé qu’ils se solidarisent avec le Cameroun, le Nigeria aux prises avec Boko Haram depuis quelques mois, avec la Centrafrique qui n’en finit pas d’être endeuillée alors qu’un contingent militaire français y a été envoyé pour mettre fin aux violences de la Seleka et des Anti-Balaka ! Comme j’eusse voulu qu’ils volent au secours de la Côte d’Ivoire attaquée et coupée en deux, de septembre 2002 à avril 2011, par des terroristes venus du Burkina où ils avaient été entraînés au nez et à la barbe des diplomates et militaires français. La France ne se contenta pas alors de demeurer passive. Au cours d’un semblant de Table ronde à Marcoussis, elle força le président élu à travailler avec ces rebelles analphabètes et buveurs de sang dans un gouvernement d’union nationale. Elle fit pire encore en 2011 en installant, dans la tricherie et après le bombardement de la ville d’Abidjan par ses avions, celui pour qui Soro et ses compères avaient pris les armes. Certes, le temps est davantage au recueillement qu’au questionnement mais je ne résiste guère à l’envie de poser la question suivante : La France des Hollande, Sarkozy, Fillon, Juppé, dirait-elle « oui » si les États-Unis lui proposaient de discuter avec les auteurs des attentats d’hier et de les nommer ministres pour que Paris soit en paix ? J’en doute fort puisque, dans son adresse au peuple français, M. Hollande a plutôt promis que son pays sera impitoyable à l’endroit de ceux qui se sont « lâchement et honteusement » attaqués à la France. Comme j’eusse aimé que les gouvernants français affichent la même fermeté vis-à-vis du terroriste Soro Kigbafori qui aurait mis le Burkina à feu et à sang après le coup d’État manqué de Gilbert Diendéré (16 septembre 2015) contre les autorités de la transition si ses diaboliques conversations téléphoniques avec le médiocre Djibril Bassolé n’avaient pas été enregistrées et remises aux dirigeants burkinabè ! Mais, à la fermeté, la « France, pays des droits de l’homme », préféra complaisance et soutien car c’est bien Paris qui déroulait le tapis rouge à Soro et à ses compagnons sanguinaires chaque fois qu’ils s’y rendaient ; c’est bien dans la capitale française que les micros des radios et télévisions leur étaient tendus ; c’est bien en France qu’ils ouvrirent des comptes bancaires et achetèrent villas et châteaux. Oui, je prierai pour Paris mais je prierai aussi pour que cessent l’indignation et les condamnations sélectives auxquelles nous avons assisté en France ces 20 dernières années, pour que les dirigeants français arrêtent de semer le chaos dans les pays dont ils veulent accaparer les richesses (Lybie, Côte d’Ivoire, Centrafrique, Cameroun), pour qu’ils renouent vite avec les valeurs prônées par leurs grands penseurs, pour que leur pays ne soit plus cette « civilisation qui, à force de "ruser avec ses principes", s’achemine inéluctablement vers sa "décadence" » (Aimé Césaire).


Abidjan avril 2011
Suites des bombardements franco-onusiens de la résidence du président Gbagbo

Jacques Vergès disait que « les poseurs de bombes sont des poseurs de questions ». Condamner sans réserve les attentats qui viennent de frapper Paris ne devrait donc pas empêcher les Français de s’interroger et éventuellement de faire leur examen de conscience. Je voudrais leur proposer ici trois petites questions :
1) Pour renflouer ses caisses et maintenir le train de vie de ses habitants, un pays a-t-il le droit d’aider des terroristes à déstabiliser un autre pays et à y tuer des milliers de personnes ?
2) Peut-on exporter la violence dans d’autres pays et espérer ne jamais en être victime soi-même ?
3) Peut-on se dire attaché aux droits de l’homme et à la démocratie et cautionner en Afrique des parodies d’élections qui tôt ou tard déboucheront sur des tensions et des violences ?

Les attentats de Paris me font mal mais j’aurais encore plus mal si la France, au lieu de tirer les leçons de cette tragédie, continuait à s’acoquiner avec les terroristes dans certains pays étrangers et à semer la désolation et la mort là où il aurait simplement fallu négocier un partenariat gagnant-gagnant.

J.-C. DJEREKE
Titre original : « Contre les indignations sélectives de Paris »

Source : Connectionivoirienne.net 14 novembre 2015