mardi 16 janvier 2018

Côte d’Ivoire : De l’hospitalité à la haine ciblée

NAHIBLY 20 JUILLET 2012
Depuis le 07 août 1960, date de son accession à cette indépendance nominale, la Côte d’Ivoire s’est distinguée par son hospitalité et le dialogue permanent ; une sorte d’acide désoxyribonucléique (A.D.N.).
Cette hospitalité lui a imposé d’accueillir et d’abriter le plus de ressortissants étrangers qu’aucun autre pays de l’ouest africain, voire bien au-delà. Elle a fait de ce petit territoire, et c’est heureux, une terre d’adoption et/ou le passage obligé, voire le pays de tous les espoirs pour la quête d’un mieux-être.
Rien n’a jamais été trop cher pour s’ouvrir grandement à tous les peuples d’où qu’ils viennent. Il faut s’en réjouir parce que cela correspond à la philosophie profonde de l’Africain pour qui l’étranger ou l’allogène reste « un envoyé de Dieu ».
Hélas ce qui se passe depuis ces dernières années dans ce pays nous interroge sérieusement. En effet cette hospitalité semble perfidement et paradoxalement accoucher d’une haine rentrée et volontairement ciblée. Il y a un acharnement ouvertement assumé contre ceux et celles dont les ascendants voire les descendants ont ouvert grandement portes et fenêtres mais aussi les bras et les mains pour accueillir sans compter et sans se soucier de rien. Ces mains qui ont été ainsi tendues hier pour accueillir et intégrer sont impitoyablement en train d’être tranchées sans ménagement. L’horreur de cette situation est renforcée par le fait que cela se déroule avec la complicité hypocrite d’autres Ivoiriens dont le « cœur saigne » bien tardivement maintenant pour certains alors que d’autres pleurent en silence comme l’esclave qui redoute la fureur du maître. D’autres encore craignent que l’on ne se souvienne qu’ils ont été estampillés « ivoiritaires ».
Alors on se ferme les yeux ; on se bouche volontairement les oreilles et le nez et tous feignent de cultiver une indifférence pourtant bruyante. On célèbre la réussite là où l’échec social et celui du système éducatif par exemple le disputent à la misère des individus. Cette misère est d’ailleurs savamment emballée dans les chiffres d’une croissance qui n’a rien d’inclusive et qui n’est qu’un vil pansement recouvrant tristement cette plaie purulente des souffrances individuelles. Il faut flatter le prince qui vous a vaincus pour ne pas essuyer sa colère déchaînée. Vous pourriez être jetés en prison le temps que « sa justice » cherche un habillage pour vous condamner à 10, 15 ou 20 ans de prison, selon les jours et selon son humeur du moment mais toujours sans la moindre preuve factuelle.
Le dialogue qui autrefois avait été érigé en sève nourricière de la cohésion nationale a fait place à l’intolérance des cœurs de pierre.
Tout se passe désormais comme si mettre la nécessité absolue de la recherche de cette cohésion nationale au-dessus des projets éphémères et de cette économie volontairement extravertie était le synonyme détestable de la faiblesse redoutée. Ah, j’oubliais juste que ce qui avait été promis aux Ivoiriens, c’était précisément « un pouvoir fort qui ne doit justement montrer une once de faiblesse… ».
Devenu totalement impuissant, le peuple de Côte d’Ivoire est en train de faire hélas la terrible expérience d’un pouvoir machiavélique dont la seule valeur est le dieu argent. Tout, absolument tout, lui est sacrifié y compris la dignité humaine.
Oui, l’alchimie du mépris et l’extase que procure l’humiliation de l’adversaire vaincu grâce aux armes des autres a transformé l’hospitalité légendaire connue et reconnue à la Côte d’Ivoire en une haine sélective farouchement inextinguible.
La question est aujourd’hui celle-ci : jusqu’à quand les Ivoiriens devraient-ils ainsi s’enfermer dans la peur en acceptant de mourir à feu doux ; mais de mourir quand même ?

Raphaël Dagbo


EN MARAUDE DANS LE WEB
Sous cette rubrique, nous vous proposons des documents de provenance diverses et qui ne seront pas nécessairement à l'unisson avec notre ligne éditoriale, pourvu qu'ils soient en rapport avec l'actualité ou l'histoire de la Côte d'Ivoire et des Ivoiriens, ou que, par leur contenu informatif, ils soient de nature à faciliter la compréhension des causes, des mécanismes et des enjeux de la « crise ivoirienne ».



Source : IvoireBusiness 13 Janvier 2018.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire