Réélu
largement dimanche, Evo Morales, premier président indigène de Bolivie,
bénéficie d'un grand soutien populaire, fruit de ses succès en matière de lutte
contre la pauvreté, dans le pays le plus démuni d'Amérique latine.
Selon
des résultats encore non officiels, la majorité des six millions d'électeurs se
sont montrés reconnaissants envers cet ancien berger de lamas, né dans la
misère de l'Altiplano et forgé dans le syndicalisme, qui a su amener la Bolivie
à une stabilité politique et économique sans précédent. « Aujourd'hui, nous
sommes dignes. Plus jamais nous ne serons mendiants ni humiliés »,
aime-t-il à répéter après neuf ans à la tête de ce pays enclavé, aux finances
dopées par la nationalisation des hydrocarbures. La construction du
téléphérique urbain le plus haut et le plus long du monde, premier vrai
transport public du pays, la mise en orbite d'un satellite, des résultats
tangibles dans la lutte contre la pauvreté et la faim, salués au niveau
international, ont transformé le quotidien des Boliviens.
Washington
pour principal ennemi
À des
années-lumière, l'histoire personnelle d'Evo Morales, dans l'aride et glaciale
cordillère, montre à quel point il a su venir à bout de l'adversité. Dans une
autobiographie récente, il raconte l'influence déterminante d'une famille unie
et laborieuse vivant au rythme ancestral d'une communauté aymara de Oruro
(Centre) coupée du monde, sans eau ni électricité. Sur ses sept frères et sœurs,
quatre mourront de maladie et de malnutrition.
« Jusqu'à
14 ans, j'ignorais l'existence des sous-vêtements. Je dormais avec mes habits »
que « ma mère m'enlevait seulement pour deux raisons : chercher les poux
ou faire une reprise au coude ou au genou », raconte-t-il. Un bref passage
dans un collège, des débuts prometteurs de trompettiste, l'émigration vers la
région tropicale du Chaparé où il devient cultivateur de feuilles de coca, puis
enfin le syndicalisme, feront son éducation. C'est à l'âge adulte, en devenant
leader syndical des producteurs de coca puis député, qu'il découvre le monde,
malgré sa timidité et sa difficulté à parler espagnol.
Evo Morales |
Le 22
janvier 2006, Evo Morales Ayma, élu avec 54 % des voix, devient le premier
président indigène de l'histoire du pays avec pour héros Tupac Katari, leader
aymara d'une révolte indienne contre l'occupation coloniale espagnole, mais
aussi Fidel Castro, le révolutionnaire cubain. Au pouvoir, il ne change pas de
style : épais cheveux noirs et visage tanné, celui qui se décrit comme « l'Indien
noir et laid au nez de perroquet » aime arborer des tenues andines chatoyantes.
L'ancien « cocalero » plaide pour une dépénalisation internationale
de la feuille de coca. Proche de Cuba et de l'ancien président vénézuélien Hugo
Chávez, il fait de Washington son principal ennemi, nouant des alliances avec
l'Iran, la Russie et la Chine.
« Marié
à la Bolivie »
« Nous
avons lutté et lutté contre l'Empire nord-américain. Le peuple est anticolonial,
le peuple est anti-impérialiste, le peuple est anticapitaliste »,
clame-t-il, plaidant pour « la libération de tout le peuple bolivien ».
Il est réélu en 2009 avec 64 % de votes. Âgé de 54 ans, il est le plus ancien
président en exercice d'Amérique latine. Infatigable, il donne des rendez-vous
de travail dès 5 heures du matin et sillonne constamment le pays, pouvant avoir
en un jour jusqu'à cinq meetings en différents endroits. « Nous avons une
énorme responsabilité, celle de continuer à améliorer l'économie, et continuer
à réduire l'extrême pauvreté et la pauvreté », dit-il. Ce n'est pas sans
satisfaction qu'il relevait récemment que « cette année, trois pays
d'Amérique latine nous ont demandé qu'on leur prête de l'argent ». Sans
les nommer, Evo Morales confiait sa « fierté » : « Avant, nous
étions un pays de mendiants ».
Discret
sur sa vie privée, on le sait père célibataire de deux grands enfants de mères
différentes. « Je suis marié à la Bolivie », assure ce passionné de
football, d'ailleurs recruté cette saison comme numéro 10 par le club local des
Sport Boys. Ses adversaires l'accusent de ne pas être parvenu à endiguer
l'insécurité, le trafic de drogue ou la corruption. Lui, qui pense qu'il ne
faut pas rester au pouvoir après 60 ans, mais a bénéficié d'une interprétation
contestée de la Constitution pour briguer un troisième mandat, rêve d'ouvrir un
restaurant un jour.
Source : Lepoint.fr 13-10-2014
(*) - Titre original : « Bolivie,
Evo Morales réélu pour un troisième mandat »
Nous ne pouvons qu'être heureux pour le peuple bolivien qui a su faire confiance à un de ses fils plutôt que de se dire qu'il ne pouvait rien contre l'homme blanc.
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