Ils en
délivraient 1000 par jour à Abidjan, au moment de notre enquête. Sur la base de
vrais faux extraits de naissance et/ou certificats de nationalité. Les
demandeurs, exclusivement des non Ivoiriens, payaient la somme de 20.000FCFA
et, au bout de 48 heures, devenaient « Ivoiriens » avec leur vraie
fausse CNI, en poche. Pendant les contrôles, les policiers n'y voient que du
feu. De jour en jour, les contrefacteurs non inquiétés, se perfectionnent.
« Monsieur Assalé, depuis que j'ai lu
votre enquête, j'ai peur pour le pays. On était plus ou moins informés de ce
genre de choses, on a parfois pris des faussaires, mais ce que vous révélez là,
après avoir infiltré ce réseau jusqu'à ce niveau en risquant votre vie, est
inacceptable. Nous avons fait des demandes d'autorisation, mais elles ne sont
pas encore venues, pour agir réellement... », m'avait dit un
officier des RG. Ils n'ont jamais eu ces autorisations. Pourquoi ? Je n'en sais
rien.
Aujourd'hui,
avec ces fausses CNI, des individus s'offrent tous les droits. Ils peuvent
aller vider votre compte en banque, intercepter un transfert d'argent,
participer aux élections dans votre commune, vendre votre maison en votre nom,
pour leur compte mais à votre insu (j'ai eu à travailler sur le cas d'un
professeur d'université devenu « fou » après que des gens eurent
vendu sa maison en son nom et pour leur compte), exproprier vos enfants, etc.
On nous
avait promis que désormais, la CNI s'obtiendrait pour les Ivoiriens, au bout de
quelques jours. Mais à ce jour, des demandeurs sont dans l'attente depuis près
de deux ans. Pendant ce temps, par milliers, des non Ivoiriens deviennent
chaque jour, de vrais faux Ivoiriens, dans le silence de tous.
Quand
on enquêtait, j'avais égaré ma CNI, photocopie ci-jointe. Pour les besoins de
l'enquête, je m'étais fait établir cette fausse CNI de couleur Orange, en
payant 20 mille francs.
Dénoncer
ce genre de choses, ce n'est pas magnifier une quelconque xénophobie. C'est
attirer l'attention des décideurs sur ce qui, à terme, pourrait faire s'effondrer
toute la République. Parce que les fraudeurs et autres faussaires ont
démultiplié leurs productions. Je le sais. Et je le dis. A mes risques et
périls. En toute conscience.
Tiémoko Assalé
Source : La Dépêche d'Abidjan 12 Décembre 2017
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