Patrouille FRCI à Abidjan, le 5 mai 2011. |
Au cours de la prochaine présidentielle de 2020, les forces du pays
seront amenées à opérer dans un environnement délicat. Voici quelques pistes de
réflexion pouvant pallier les défis de la défense ivoirienne.
À un peu plus d’un
an de la présidentielle, c’est peu dire que les
questions de défense et de sécurité sont au cœur des préoccupations des
Ivoiriens. La décennie de guerre, le traumatisme des mutineries de 2017 et les
menaces sécuritaires de plus en plus pernicieuses dans la sous-région y
contribuent grandement. Il apparaît intéressant, dans ce contexte, de
s’interroger sur les défis de la défense ivoirienne et de proposer quelques
pistes de réflexion.
De fait, les forces du pays vont être amenées à opérer dans un
environnement délicat. D’abord, les tensions liées aux élections peuvent
déboucher sur des situations de maintien de l’ordre (marches non autorisées,
arrestations) lors desquelles les forces de sécurité devront agir de manière
prudente et mesurée, sous peine d’entamer davantage la confiance – déjà mise à
mal – entre l’armée et la nation.
Dans
l’œil du cyclone jihadiste
Ensuite, la prolifération et la
dangerosité des menaces sécuritaires liées à la
poussée des groupes terroristes sahéliens vers
le sud du Burkina et du Mali, avec son corollaire de conflits
intercommunautaires, rappellent que la Côte d’Ivoire est dans l’œil du cyclone
jihadiste. Au sud, le long des côtes, c’est la piraterie maritime qui prend de l’ampleur à mesure que la valeur
stratégique du golfe de Guinée s’accroît. Quand on y ajoute le grand banditisme
et les inquiétudes sur la réussite du désarmement, on prend conscience de la
fragilité de sa position. D’autant que l’outil sécuritaire ivoirien, en dépit
des efforts consentis par les autorités, ne semble pas totalement sorti de la
zone de turbulence.
En effet, le niveau d’instruction
générale des soldats – particulièrement ceux qui sont issus de l’ancienne
rébellion – reste faible. Les promotions exceptionnelles résultant des
accords de 2007 ont miné les efforts accomplis pour parvenir à une pyramide des
grades plus conventionnelle. Malgré l’achat de matériel, les problèmes
d’équipement retardent la projection des troupes au Mali, traduisant ainsi la
persistance de certaines difficultés.
Les commentaires qui ont suivi les dernières nominations –
obligeant le colonel Hervé Touré, dit Vetcho, issu de l’ex-rébellion des « Forces nouvelles »,
à produire un communiqué pour réaffirmer sa loyauté au président –
témoignent, quant à eux, de suspicions et de tensions latentes. Enfin les
Ivoiriens, habitués depuis 2000 à voir l’armée s’immiscer dans les questions
électorales, s’interrogent sur sa capacité à garantir l’expression de la
démocratie et, plus généralement, le respect de l’État de droit lors des
futures échéances.
Intensification des réformes
Ce diagnostic impose la prise de
certaines mesures. L’État doit absolument poursuivre et intensifier
les réformes entamées, notamment dans
l’amélioration du cadre de travail (modernisation des casernes, construction
d’hôpitaux militaires) et dans le renforcement des équipements. Le savoir-faire
des terroristes l’impose.
Mais au-delà, il faut travailler à
l’amélioration de la qualité humaine en insistant sur la formation – tant
initiale que continue – des militaires et gendarmes ivoiriens. Celle-ci doit
être innovante et adaptée à la nature diffuse de la menace, au maintien de
l’ordre dans le respect des droits de l’homme, et, plus généralement, doit être
conforme à la déontologie militaire. Ce dernier aspect contribuera au
renforcement du lien entre l’armée et la nation, un autre chantier clé de la
défense ivoirienne.
À moyen terme, il faut travailler à une nouvelle planification
de la défense ivoirienne sur la période 2020-2025. Les états-majors politiques
doivent profiter de la campagne électorale à venir pour proposer une
alternative à l’actuelle loi de programmation militaire. Le nouveau texte devra
viser une professionnalisation totale à travers le rajeunissement des
effectifs, une meilleure structuration des unités, le respect des standards
internationaux quant à la pyramide des grades et le renouvellement des
équipements. Il doit aussi prévoir la mise en place d’outils stratégiques –
institut plus fonctionnel et école de guerre – et une meilleure gouvernance des
questions de sécurité par le biais d’un plus grand contrôle de la part du
Parlement.
Arthur Banga
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l'unisson avec notre ligne éditoriale, pourvu qu'ils soient en rapport avec
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causes, des mécanismes et des enjeux de la « crise ivoirienne ».
Source : jeune afrique 24 juillet 2019
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