Aujourd’hui, la parole est à Laurent Dona Fologo
C’est en lisant, dans Le Nouveau Réveil du 12 mai 2012, l’interview de Laurent Fologo, que l’idée de cette note m’est venue. C’est plus fort que moi, chaque fois que j’entends Fologo, j’ai l’impression d’être dans un film de politique fiction. L’enfant de Sinématiali sait-il seulement à quel point il est à l’image de cette Côte d’Ivoire dont le regretté Diégou Bailly a dit un jour qu’elle était le royaume des faux-semblants. Cette Côte d’Ivoire de rêve que le monde entier célébrait naguère, tandis que nous-mêmes, ses fils et ses citoyens naturels, avions toutes les peines à nous y reconnaître.
Dans ce « nous-mêmes » j’englobe évidemment Fologo ainsi que tous ceux qui, comme lui, se réclament de ce qu’ils appellent la philosophie politique d’Houphouët, mais qui seraient bien embarrassés s’ils devaient énumérer les points où ils sont absolument d’accord avec elle. Dans cette interview par exemple, Fologo apparaît tout à fait comme un houphouétiste de façade. L’orthodoxie houphouétiste dont il se targue n’est qu’une posture. Cet opportuniste passé maître dans l’art de faire son miel de toute fleur, n’utilise le nom d’Houphouët que comme un moyen de s’attirer honneurs et considération. Tel une paonne faisant la roue pour attirer son paon…
Fologo est sans doute sincère quand il exprime sa gratitude envers celui qui l’a fait. Mais, dès qu’il veut se faire passer pour un bon élève d’Houphouët, voire le meilleur de ses élèves, on a toutes les raisons de douter de sa sincérité. J’ai éprouvé la même chose quand j’ai lu le livre de Camille Alliali, autre « Disciple d’Houphouët »… Fologo a-t-il approuvé tout ce qu’il a vu son maître faire, ou tout ce que son maître lui a fait faire ? Par exemple, cette mission en Afrique du Sud… Je me rappelle une déclaration sèche sur RFI où, lors d’un passage à Paris vers la fin des années 1970, celui qui aujourd’hui se dit tellement fier et heureux d’avoir été en quelque sorte un héros du combat pour l’abolition de l’apartheid reconnaissait que son expédition n’avait servi à rien, ce qui est la stricte vérité.
Le type de relation qu’Houphouët a maintenu entre la Côte d’Ivoire et son ancienne métropole durant tout son règne était-il compatible avec l’indépendance ? Fologo ne le pense pas aujourd’hui. Et hier non plus, sans aucun doute. Cela saute aux yeux quand on lit le passage où il justifie son ralliement à Gbagbo. Car, de deux choses l’une : ou l’indépendance, c’est-à-dire l’abolition complète du statut de colonie sanctionnée par un acte public, ou la dépendance maintenue et cultivée sous les dehors trompeurs d’une décolonisation de façade. Récemment le journaliste Didier Dépry, de Notre Voie, a révélé la confidence que, au lendemain du massacre de l’hôtel Ivoire qui l’avait révolté, un ancien chargé de mission à la présidence de la République du temps d’Houphouët lui a faite :
Le type de relation qu’Houphouët a maintenu entre la Côte d’Ivoire et son ancienne métropole durant tout son règne était-il compatible avec l’indépendance ? Fologo ne le pense pas aujourd’hui. Et hier non plus, sans aucun doute. Cela saute aux yeux quand on lit le passage où il justifie son ralliement à Gbagbo. Car, de deux choses l’une : ou l’indépendance, c’est-à-dire l’abolition complète du statut de colonie sanctionnée par un acte public, ou la dépendance maintenue et cultivée sous les dehors trompeurs d’une décolonisation de façade. Récemment le journaliste Didier Dépry, de Notre Voie, a révélé la confidence que, au lendemain du massacre de l’hôtel Ivoire qui l’avait révolté, un ancien chargé de mission à la présidence de la République du temps d’Houphouët lui a faite :
« Le véritable Président de la Côte d’Ivoire, de 1960 jusqu’à la mort d’Houphouët, se nommait Jacques Foccart. Houphouët n’était qu’un vice-président. C’est Foccart qui décidait de tout, en réalité, dans notre pays. Il pouvait dénommer un ministre ou refuser qu’un cadre ivoirien x ou y soit nommé ministre. C’était lui, le manitou en Côte d’Ivoire. Ses visites étaient régulières à Abidjan et bien souvent Georges Ouégnin (le directeur de protocole sous Houphouët) lui cédait son bureau pour recevoir les personnalités dont il voulait tirer les oreilles ».
S’il est vrai que Fologo était si proche d’Houphouët, cette réalité n’a pas pu lui échapper. Peut-être qu’à force de se répandre en vantardises sur sa longue familiarité avec son grand homme, il finira un jour par nous livrer quelque grave secret de la même sorte. En attendant, savourons ces quelques perles rhétoriques qu’il a semées ici ou là dans la dernière période, comme autant d’offrandes à ses idoles successives.
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« Il [Houphouët] disait : "Laissez venir les étrangers, c’est Dieu qui nous les envoie". L’Occident devrait lui élever une citadelle (sic) pour avoir vu 50 ans à l’avance ce que serait le monde du 3e millénaire. (Fraternité Matin 4-5/12/1999)
« Quand je vois les effets dévastateurs de la mondialisation sur nos pays, je pense au président Houphouët-Boigny et je me demande comment il aurait pu supporter pareille situation (…). Dieu a bien fait de rappeler le président Houphouët-Boigny à lui avant que n’arrive tout ce qui se passe aujourd’hui ou on vous dicte tout, on vous dirige de l’extérieur. Comment quelqu’un qui a combattu le colonialisme et libéré son pays aurait-il supporté cette autre colonisation qui ne dit pas son nom ? » (Fraternité Matin 4-5/12/1999)
« Ce qui nous arrive aujourd’hui, Houphouët-Boigny l’avait prédit. » (Fraternité Matin 4-5/12/1999)
« Oui, aujourd’hui comme hier, contre vents et marées, je réaffirme et assume le sens de mon modeste combat et de ma détermination : je suis pour le meilleur et pour la République. Mon choix est clair. J’ai soutenu, je soutiens, je soutiendrai toujours tout Président que, par la volonté de Dieu, le peuple ivoirien se donnera, quelles que soient son ethnie, sa région, ses croyances. » (Le Nouveau Réveil 07/09/2007)
« Dieu veut qu’il soit le chef, Dieu a fait que c’est cet homme qui était opposé à Houphouët-Boigny, je n’en reviens même pas. C’est vrai, je me dis aujourd’hui avec le recul du temps que ces deux partis se ressemblaient trop. Sinon, je ne vois pas le seul acte posé aujourd’hui par le président Gbagbo qui soit tellement différent de ce que faisait le Président Houphouët-Boigny. Sauf peut-être cet amour excessif de ce qu’on appelle la Françafrique. N’oubliez pas que lorsque le Rda est né à Bamako en 1946, c’étaient des révolutionnaires qui voulaient se débarrasser du joug colonial, de l’oppresseur colonial, libérer l’homme noir. Houphouët-Boigny le disait lui-même ; pour lui redonner sa dignité bafouée, il le disait. C’est après que tout a changé. Mais, il a commencé dans la révolution. C’est la même chose que Gbagbo fait aujourd’hui. Gbagbo veut la souveraineté comme moi qui vous parle, je veux la souveraineté de la Côte d’Ivoire. Je veux qu’on nous respecte, voilà. » (Le Temps 14 août 2009)
« A chaque époque ses réalités et à chaque réalité son combat. A chaque époque ses hommes et ses femmes pour mener la lutte. Aujourd’hui, Laurent Gbagbo n’est plus le seul enfant du FPI. Il est désormais l’enfant de toute la Côte d’Ivoire. C’est pour cela que ceux qui m’ont déjà vu porter une autre casquette en d’autres temps, je leur demande de ne pas être surpris de me voir aujourd’hui au-devant du combat pour la démocratie, pour la liberté. C’est le Président Houphouët-Boigny qui disait, “Il n’y a que les imbéciles qui ne changent pas”. Et comme moi je pense que je ne suis pas imbécile, j’ai décidé de changer. » (Notre Voie 14/11/2009)
à suivre
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