Deux jours seulement après la clôture du 3e Forum du Réseau de la Gauche Africaine (ALNEF), tenu à Bamako du 25 au 27 novembre, nous apprenions que le président Laurent Gbagbo, renversé le 11 avril 2011 par les forces d’occupation françaises en Côte d’Ivoire, est déporté à la Haye pour dit-on, « y répondre des accusations de crimes contre l’humanité» portées par le procureur de la CPI, le très controversé Luis Moreno-Ocampo. Nous avons souvenance que dès l’éclatement de la crise électorale en décembre 2010 en Côte d’Ivoire, le procureur de la CPI avait déjà condamné Gbagbo en déclarant notamment que ce dernier sera «tenu pour responsable de toutes les violations des droits de l’Homme au cours de la crise». En condamnant Mr Gbagbo alors que les supposés crimes dont il est accusé n’avaient pas encore eu lieu, Mr Ocampo laissait clairement apparaître un parti-pris dans la crise en Côte d’Ivoire, en violation flagrante de l’esprit de neutralité qui devrait caractériser une institution comme la CPI.
La CPI n’a commencé ses enquêtes sur d’éventuelles violations des droits humains pendant la crise postélectorale en Côte d’Ivoire qu’au cours du mois d’octobre 2011 et ces enquêtes se poursuivent encore en ce moment. La célérité et la précipitation dans lesquelles le transfèrement de Laurent Gbagbo s’est fait, sont extrêmement préoccupantes et font craindre une instrumentalisation de la justice internationale à des fins politiques.
Les rapports des organisations de défense des droits humains accusent aussi bien les forces fidèles à Monsieur Gbagbo que celles de Messieurs Soro et Ouattara, d’avoir « commis des massacres contre les populations civiles » au cours de la crise postélectorale en Côte d’Ivoire. Mr Gbagbo a été transféré à la Haye pour répondre d’éventuels crimes qu’auraient commis des forces à lui restées fidèles. Quid de Messieurs Alassane Ouattara et Guillaume Soro, dont les forces sont également accusées chaque jour de commettre des atrocités les plus inimaginables sur les populations civiles et les opposants? Pourquoi cette impunité dont jouissent le duo Soro-Ouattara et leurs forces ?
Il est également opportun de rappeler qu’en novembre 2004, sur ordre de l’ancien Président Français Jacques Chirac, 64 citoyens ivoiriens avaient été massacrés par l’armée française devant l’Hôtel Ivoire à Abidjan. En Avril 2011, le Chef de l’Etat Français, Nicolas Sarkozy a ordonné les bombardements de l’armée française sur le palais présidentiel ivoirien et les camps militaires à Abidjan, faisant de nombreux morts dont le chiffre exact n’est pas encore connu. La mission des Nations Unies en Côte d’Ivoire et les organisations de défense des droits humains ont accusé les forces républicaines de Messieurs Soro et Ouattara d’avoir massacré froidement plus de 800 personnes, après leur entrée à Duékoué le 30 mars 2010. Le journal français Le Canard Enchaîné du 06 avril 2011 accuse d’ailleurs les autorités françaises d’avoir appuyé logistiquement les forces de Mr Ouattara qui ont commis des massacres à Duékoué, en leur « fournissant des munitions et des fusils d’assauts de type FAMA ».
Pourquoi le procureur de la CPI ferme-t-il les yeux sur ces crimes de Chirac, Sarkozy et des forces françaises en Côte d’Ivoire ? La CPI n’est-elle compétente que pour les Africains ?
L’ALNEF s’étonne donc de ce que seul Monsieur Gbagbo ait été déféré à la CPI alors qu’aucun officiel français ni aucun membre du régime Ouattara n’aient jusqu’à présent été inquiétés.
En tout état de cause, le transfèrement quasi-clandestin de Gbagbo à La Haye ne va pas contribuer à apaiser une situation nationale toujours très tendue en Côte d’Ivoire et caractérisée par :
- la tenue d’élections législatives dans des conditions frauduleuses avec une Commission Electorale totalement aux ordres du gouvernement et l’exclusion de l’opposition politique;
- la misère endémique dans laquelle est plongé le peuple de Côte d’Ivoire alors que l’impérialisme français, à travers ses multinationales, pille ouvertement les richesses du pays sous le prétexte de la «reconstruction»;
- la détention arbitraire de centaines de prisonniers politiques, militants du FPI ou d’anciens collaborateurs et des membres de la famille de Monsieur Gbagbo;
- les exécutions sommaires perpétrées par les FRCI de Monsieur Ouattara contre les militants de l’opposition et les partisans présumés de Monsieur Gbagbo;
- les violations flagrantes des libertés de manifestations avec l’interdiction de fait des meetings de l’opposition et des agressions ouvertes contre les militants de l’opposition;
- les entraves à la liberté de la presse avec des menaces de mort et des emprisonnements de journalistes de la presse de l’opposition;
- les entraves à la liberté de la presse avec des menaces de mort et des emprisonnements de journalistes de la presse de l’opposition;
Considérant ce qui précède:
L’ALNEF condamne fermement le transfèrement de Mr Gbagbo á la Haye et craint qu’une justice sélective et orientée de la part de la CPI, ne discrédite à jamais cette institution, dont la création avait pourtant été saluée par les Organisations de défense des droits Humains;
L’ALNEF redoute que le transfèrement de Gbagbo et la chasse à l’Homme dont sont victimes ses partisans en Côte d’Ivoire, ne ravive les tensions et entraine la reprise de la guerre civile dans le pays;
L’ALNEF appelle au report des élections législatives jusqu’à ce qu’un climat apaisé soit crée et une Commission électorale véritablement indépendante soit mise sur pied pour garantir un scrutin juste et équitable;
L’ALNEF appelle l’Union Africaine et les gouvernements africains à se retirer du traité de Rome, dont la preuve est aujourd’hui faite, qu’il s’agit d’un machin créé uniquement pour servir les intérêts politiques des puissances impérialistes et non la protection des droits humains;
L’ALNEF appelle le régime Soro-Ouattara, à cesser toutes les exactions contre les opposants et les journalistes et à garantir l’exercice de toutes les libertés démocratiques, acquises de haute lutte par le peuple de Côte d’Ivoire;
Enfin, L’ALNEF apporte son soutien aux masses laborieuses et aux forces progressistes de Côte d’Ivoire dans leurs luttes pour la défense des libertés, de la démocratie et de l’Etat de droit.
La lutte continue !Enfin, L’ALNEF apporte son soutien aux masses laborieuses et aux forces progressistes de Côte d’Ivoire dans leurs luttes pour la défense des libertés, de la démocratie et de l’Etat de droit.
Fait à Johannesburg le 06 décembre 2011
Chris Matlhako, Coordonnateur du Réseau de la Gauche Africaine (ALNEF), South African Communist Party (SACP)
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