Choguel Kokalla Maïga,
Premier Ministre (© Autre presse par D)
Monsieur le Président de l’Assemblée générale,
Mesdames, Messieurs les chefs d’Etat et de gouvernement,
Monsieur le Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies,
Mesdames, Messieurs,
Je voudrais, avant tout propos, vous
adresser les salutations fraternelles du peuple africain du Mali et celles du
Président de la Transition, Chef de l’Etat, Son Excellence le Colonel Assimi
GOITA.
Je voudrais également, en leur nom et en
mon nom propre, vous adresser, Monsieur le Président, les chaleureuses
félicitations de la délégation du Mali pour votre brillante élection à la
présidence de cette 76ème session de l’Assemblée générale.
Je félicite également votre
prédécesseur, S.E.M. Volkan BOZKIR, de la République de Turquie, pour la
manière remarquable avec laquelle il a dirigé les travaux de la 75ème session
de l’Assemblée.
Qu’il me soit permis également de
réitérer à notre Secrétaire général, M. António GUTERRES, notre haute
appréciation des efforts louables qu’il continue de déployer pour la
réalisation des nobles objectifs de notre Organisation commune.
Monsieur le Président,
La 76ème session ordinaire de
l’Assemblée générale s’ouvre fort opportunément sur le thème de l’espoir.
L’espoir de renforcer notre résilience pour nous relever de la pandémie de la
Covid-19, dans un esprit de responsabilité, de coopération et de solidarité.
L’espoir d’un monde plus sûr, d’un monde de sécurité humaine. L’espoir que le
Sahel retrouve la stabilité et redevienne un havre de paix et un pôle de
croissance et de développement. L’espoir, enfin, de revitaliser l’Organisation
des Nations Unies.
Le Mali souscrit pleinement à l’esprit
et à la lettre de ce thème, qui résume parfaitement les idéaux de notre
Organisation commune.
C’est une lapalissade d’affirmer que le
Mali et les pays du Sahel sont, de nos jours, confrontés à l’hydre du
terrorisme, à l’extrémisme violent et à l’instabilité. Cela dure depuis plus
d’une décennie, avec le risque d’enlisement, de banalisation ou de lassitude,
propres à détourner ces problématiques de l’agenda international.
A notre quotidien fait d’angoisses et de
tragédies est venue s’ajouter la pandémie de la COVID-19, avec ses impacts
négatifs sur l’économie et sur les conditions de vie de nos populations, déjà
précaires du fait des défis économiques, politiques et humanitaires. Rarement,
un pays ou une région aura été aussi durement éprouvé par l’empilement des crises
plus que le Mali et les Etats du Sahel.
C’est dans ce contexte difficile que le
peuple malien, après plusieurs mois de soulèvements populaires, a choisi une
autre direction à notre pays et a placé tous ses espoirs dans le processus de
Transition politique en cours et dont il est l’artisan principal.
Le gouvernement de Transition que je
dirige depuis le 11 juin 2021 comprend les représentants des forces vives du
Mali. Fait notable, il comprend aussi, dans un souci d’inclusivité, des membres
des Mouvements signataires de l’Accord pour la paix et la réconciliation au
Mali, issu du processus d’Alger, ainsi que des représentants des forces
politiques et sociales de notre pays.
Aussitôt installés, nous avons travaillé
ensemble à l’élaboration du Plan d’Action du gouvernement de Transition, qui
contient un ensemble de mesures dont la mise en œuvre va assurer la prise en
charge des préoccupations majeures des populations éprouvées par la crise
sécuritaire, politique, sanitaire et économique. Ce Plan d’Action gouvernemental,
adopté le 2 août 2021 par le Conseil National de Transition, organe législatif
transitoire, s’articule autour de quatre axes prioritaires. Il est assorti d’un
chronogramme d’exécution et d’un budget prévisionnel.
Le Premier Axe du Plan d’action du gouvernement
érige la sécurité au rang de priorité élevée. Il répond à l’aspiration profonde
de notre peuple à la paix, à la quiétude, au vivre ensemble, à la cohabitation
pacifique, à la cohésion sociale.
En effet, malgré les succès indéniables
enregistrés par les Forces armées maliennes (FAMA) et leurs alliés, auxquels je
rends hommage, les menaces entretenues par le terrorisme et les autres formes
de banditisme et de criminalité transnational continuent, hélas, à endeuiller
notre peuple au quotidien et à menacer les fondements de l’Etat.
De mars 2012 à ce 25 septembre 2021 où
je m’adresse à vous du haut de cette auguste tribune, la situation de mon pays
ne s’est guère améliorée, malgré le soutien international et la présence sur
notre sol d’une Opération de paix de l’ONU, la MINUSMA, et des forces
internationales : l’Opération française Barkhane, la Force européenne TAKUBA et
la Force conjointe du G5 Sahel.
La situation continue progressivement de
se détériorer, au point que des pans entiers du territoire national échappent
au contrôle du gouvernement. Mes concitoyens vivent sous l’emprise des Groupes
armés terroristes dans le déni de leurs droits les plus élémentaires. Leur
accès aux services de base demeure hypothétique en raison de la faible présence
des services de l’Etat, consécutive à l’insécurité grandissante.
La MINUSMA dont je salue ici le courage
et la contribution à la stabilisation du Mali, évolue dans cet environnement
vulnérable avec tout ce que cela comporte comme menaces sur elle.
Face à cette situation préoccupante, le gouvernement
est régulièrement et fortement interpellé par les populations maliennes, de
plus en plus exigeantes vis-à-vis des pouvoirs publics et des partenaires
internationaux. S’il est établi que l’un des droits fondamentaux des
populations est le droit à la sécurité, la garantie de celle-ci est,
assurément, l’élément de légitimation de l’Etat aux yeux des citoyens.
Monsieur le Président,
Je fais ce rappel pour vous restituer
l’exacte situation de calvaire qu’endurent les populations maliennes. Je le
fais aussi pour nous convier, tous ensemble, à l’introspection, afin de changer
de paradigme en matière de sécurité au Sahel.
Le Mali, comme vous le savez tous,
accueille sur son territoire une Opération de paix des Nations Unies et je
voudrais, à nouveau, rendre un hommage appuyé à toutes les femmes et à tous les
hommes qui travaillent, sous la bannière de la MINUSMA, dans des conditions
difficiles, souvent périlleuses, pour préserver la paix et pour protéger nos
populations civiles.
Je rappelle que notre organisation
commune, l’ONU, a été bien avisée en avril 2013, lorsqu’elle a décidé de
déployer, fort opportunément, la Mission Multidimensionnelle Intégrée des
Nations Unies pour la Stabilisation au Mali (MINUSMA).
La résolution 2100 du 25 avril 2013
établissant la MINUSMA avait considéré, je cite, que : « la situation au Mali
constitue une menace pour la paix et la sécurité internationales » et a décidé,
en conséquence, d’agir en vertu du Chapitre VII de la Charte des Nations Unies.
Dans son paragraphe 16, la résolution
2100 a fixé comme mandat initial à la MINUSMA, entre autres, « d’appuyer les
autorités de transition maliennes, pour stabiliser la situation dans les
principales agglomérations, en particulier dans le nord du pays, et, dans ce
contexte, écarter les menaces et prendre activement des dispositions afin
d’empêcher le retour d’éléments armés dans ces zones ».
La résolution 2164 du 25 juin 2014 qui a
renouvelé pour la première fois le mandat de la MINUSMA pour un an, a souligné,
je cite : « …que le terrorisme ne peut être vaincu qu’à la faveur d’une
démarche suivie et globale, fondée sur la participation et la collaboration
actives de l’ensemble des États et organismes régionaux et internationaux,
visant à contrer, affaiblir et isoler la menace terroriste… ». Fin de citation.
En conséquence, le paragraphe 12 de
ladite résolution autorisait « la MINUSMA à utiliser tous les moyens
nécessaires pour accomplir son mandat, dans les limites de ses capacités et
dans ses zones de déploiement ». Elle lui enjoignait, en particulier, au titre
du paragraphe 13 « d’étendre sa présence, notamment grâce à des patrouilles de
longue portée, dans la limite de ses capacités, dans le nord du pays, au-delà
des principales agglomérations, et en particulier dans les zones où les civils
sont en danger ».
Monsieur le Président,
Huit ans après le déploiement de la
MINUSMA, les extraits ci-dessus des résolutions de 2100 (2013) et 2164 (2014)
sont d’une évidente et d’une brûlante actualité. Les populations maliennes sont
exaspérées aujourd’hui devant les tueries de masse, les villages rasés de la
carte et d’innocents civils fauchés, dont des femmes et des nourrissons souvent
brûlés vifs.
Les Maliennes et les Maliens ont le net
sentiment que la mission assignée à la MINUSMA a changé en cours de route, et
notamment depuis 2015, suite à la signature de l’Accord pour la paix et la
réconciliation issu du processus d’Alger, alors même que les défis qui ont
justifié son déploiement sont restés constants.
En effet, contrairement aux attentes du
peuple malien, l’environnement notoirement terroriste dans lequel la MINUSMA a
été déployée en 2013 s’est dégradé continuellement. Au fil du temps, il s’est
même métastasé, car les Groupes armés terroristes qui ont envahi près des deux
tiers de notre territoire national en 2012 ont été dispersés sans jamais être
anéantis. Ils se sont reconstitués et se sont renforcés.
C’est dans ce contexte de menace
préoccupante que l’armée française, à travers l’Opération SERVAL d’abord et,
ensuite, l’Opération Barkhane, a été autorisée à mener, en soutien à la MINUSMA
et à nos Etats, le volet lutte contre le terrorisme au Mali. C’est également
dans ce contexte que l’Opération française Barkhane amorce subitement son retrait
en vue, dit-on, d’une transformation en Coalition internationale dont tous les
contours ne sont pas encore connus, en tout cas pas connus de mon pays.
L’annonce unilatérale du retrait de
Barkhane et sa transformation n’ont pas tenu compte du lien tripartite qui nous
lie, c’est-à-dire l’ONU et le Mali en tant que partenaires engagés avec la
France sur le front de la lutte contre les facteurs de déstabilisation. Le Mali
regrette que le principe de consultation et de concertation qui doit être la
règle entre partenaires privilégiés n’ait pas été observé en amont de la
décision du gouvernement français.
Aussi, la nouvelle situation née de la
fin de l’Opération Barkhane, plaçant le Mali devant le fait accompli et
l’exposant à une espèce d’abandon en plein vol, nous conduit à explorer les
voies et moyens pour mieux assurer la sécurité de manière autonome ou avec
d’autre partenaires, de manière à combler le vide que ne manquera pas de créer
par la fermeture de certaines emprises de Barkhane dans le Nord de notre pays.
Cette situation doit également inciter les Nations Unies à avoir désormais une
posture plus offensive sur le terrain.
Monsieur le Président,
Il n’existe pas de sentiment
anti-MINUSMA au Mali, pas plus qu’il n’existe pas de sentiment anti français
dans notre pays. Non ! Je le dis sans ambages. Notre peuple n’a jamais été et
ne sera jamais un peuple ingrat.
Au sommet de l’Etat et au sein des
populations maliennes, il existe un désir de paix et une soif de sécurité qui
font écho à l’exigence d’efficacité des instruments et des mécanismes
politiques et militaires mis en place et qui font paradoxalement du Mali un
pays surmilitarisé mais très vulnérable face au terrorisme, devenu un facteur
de désintégration de nos sociétés et de déstabilisation des fondements de
l’Etat.
Que devrions-nous faire face à un tel
paradoxe ? Que faut-il faire pour répondre à l’angoisse, à l’exaspération et à
la colère des populations maliennes ? Que faut-il faire pour répondre au
sentiment d’insatisfaction à la fois des Maliens et des partenaires du Mali ?
Je pense, humblement, que face à ces
interrogations, nous devons avoir le courage et la lucidité d’interroger les
instruments et les mécanismes évoqués plus haut. Nous devrions aussi et surtout
remettre sur la table la demande d’un mandat plus robuste et d’un changement de
posture de la MINUSMA, régulièrement faite par notre gouvernement au Conseil de
sécurité de l’ONU.
Ceci permettra d’adapter le mandat de la
MINUSMA, de lui donner les moyens de s’acquitter convenablement de son mandat
et de répondre à l’aspiration du peuple malien, aspiration sans laquelle ni la
Mission de l’ONU ni les autres partenariats militaires internationaux et
régionaux présents sur notre sol n’auront de crédibilité aux yeux de mes
concitoyens.
En termes clairs, les Nations Unies
doivent aider le Mali à lutter plus efficacement contre la criminalité
transnationale organisée afin d’asseoir les conditions véritables de sa
stabilisation, gage de la réussite des actions de soutien politique,
humanitaire, de développement et de protection des droits de l’homme.
S’il est établi que la situation au Mali
constitue une menace pour la paix et la sécurité internationales, il nous
revient de trouver les voies et moyens idoines pour continuer à y faire face de
manière holistique, solidaire et déterminée jusqu’à l’éradication de ladite
menace.
Monsieur le Président,
Dans la guerre sans merci qu’il mène
contre le terrorisme, le gouvernement du Mali ne ménagera aucun effort pour
remplir ses obligations internationales en termes de respect des droits de
l’homme. Il accorde la plus haute importance à la coordination des actions de
nos partenaires sur le terrain, à la coopération régionale pour tenir compte de
la dimension régionale de la crise sécuritaire au Sahel.
C’est tout le sens de notre engagement
dans la Force conjointe du G5 Sahel. C’est aussi tout le sens de notre demande
commune au sein du G5 Sahel en faveur d’un mandat robuste et adapté, sous le
Chapitre VII de la Charte des Nations Unies et d’un financement prévisible et
pérenne de la Force conjointe du G5 Sahel.
Dans un souci de cohérence et
d’efficacité, le gouvernement du Mali s’attèle à la mise en place, sous mon
autorité, d’une structure de suivi et de coordination des activités de la
MINUSMA, ainsi qu’à l’élaboration d’une Stratégie de Gestion Intégrée de la
Crise au Centre du Mali.
Nous ne nous exonérons pas de nos
responsabilités propres dans le processus de stabilisation du Mali. Le gouvernement
de Transition a une claire conscience que cette stabilisation passe aussi par
la mise en œuvre de l’Accord pour la paix et la réconciliation, issu du
processus d’Alger. Au demeurant, le gouvernement et les Mouvements signataires,
ainsi que ceux de l’Inclusivité poursuivent la mise en œuvre de l’Accord dans
un esprit de confiance et de responsabilité au sein d’un cadre nouveau appelé «
Cadre Inter malien pour la mise en œuvre de l’Accord ».
Dans cet esprit, nous poursuivons la
mise en œuvre intelligente et la relecture consensuelle de l’Accord, aux fins
de son parachèvement. L’objectif recherché étant de favoriser son appropriation
nationale et de renforcer son caractère inclusif, tout en veillant aux
conditions politiques et sociales du consensus nécessaire à la relecture de
certaines dispositions, conformément au mécanisme prévu par l’Accord.
Concernant les questions de Défense et
de Sécurité de l’Accord, un programme de DDR accéléré (Désarmement,
Démobilisation et de Réinsertion) portant sur l’intégration de 3000
ex-combattants issus des mouvements signataires et de l’inclusivité a été mis
en place, sur lesquels 1840 ex-combattants ont déjà été intégrés. Le gouvernement
a également exprimé sa volonté d’intégrer les 1160 restants au plus tard le 21
août 2021 n’eut été la lenteur accusée par la Coordination des Mouvements de
l’Azawad dans la fourniture de la liste de ses représentants.
Par ailleurs, le gouvernement du Mali
est disposé à l’intégration prochaine des ex-combattants au sein des Forces
armées et de sécurité, de la Fonction publique de l’Etat et d’autres corps
paras militaires du pays, dès lors que les quotas compatibles avec les
capacités du budget national sont fixés.
Le gouvernement est déterminé à
surmonter les obstacles techniques qui émanent des autres parties à l’Accord,
en particulier les Mouvements signataires dont l’adhésion au DDR doit être sans
réserve.
Le volet réinsertion socioéconomique
entamera les activités d’ici fin septembre 2021 avec l’appui de la MINUSMA et
de la Banque mondiale.
Je n’oublie pas ici la situation des
réfugiés maliens dans les pays voisins et les personnes déplacées internes, qui
reste une préoccupation majeure du gouvernement du Mali. Nous nous attèlerons à
créer, avec l’appui des partenaires bilatéraux et multilatéraux, les conditions
idoines d’un retour dans la sécurité et la dignité de nos populations, et à
assurer leur participation aux prochaines élections.
Monsieur le Président,
La Transition en cours au Mali se veut
une transition de rupture qui porte l’espoir de guérir le Mali des maux qui
l’assaillent, dont l’instabilité politique et institutionnelle, l’affaissement
de l’Etat, conséquences directes de la corruption et de l’impunité. Pour
réussir ce pari, notre pays a décidé de s’engager dans la voie des réformes qui
constituent le deuxième Axe du Plan d’action du gouvernement. Ces réformes vont
au-delà des questions politiques et institutionnelles et visent, in fine, à
refonder l’Etat dont le délitement progressif est à la base de l’extrême
vulnérabilité du Mali face aux défis politiques, économiques et sociaux
auxquels il est confronté.
Mon pays le Mali souhaite être une
solution aux crises qui menacent le Sahel. Le Mali aspire vivre en paix avec
ses voisins, renforcer son unité, sa stabilité et recouvrer la plénitude de sa
souveraineté sur tout son territoire. Le Mali veut garantir la sécurité humaine
à l’intérieur de ses frontières en consolidant ses institutions
constitutionnelles.
A cette fin, le Mali est engagé à faire
sa mue, à travers des réformes, à amorcer sa transformation vers un Etat stable
et prospère, orienté vers le bien-être de ses habitants. Ces réformes ont trop
longtemps été différées pour différentes raisons par les régimes politiques qui
se sont succédé au pouvoir depuis deux décennies. La Transition en cours, sous
la conduite de Son Excellence Colonel Assimi GOITA, a décidé de s’y engager
fermement.
Le Chef de l’Etat nous a commis à
convoquer, dans les tous prochains jours, les Assises Nationales de la Refondation
(ANR) dont les recommandations auront force exécutoire, aussi bien pour la
période de Transition en cours que pour la poursuite des politiques publiques à
venir.
La troisième action prioritaire du gouvernement
est consacrée à l’organisation des élections générales transparentes, crédibles
et inclusives devant marquer le retour à l’ordre constitutionnel au Mali. Ces
élections sont particulièrement importantes, car elles seront le baromètre de
la réussite de la Transition. Nous savons que leur qualité et leur crédibilité
conditionneront l’avenir de notre démocratie, la légitimité et la solidité de
nos institutions.
Tirant les leçons de notre pratique
démocratique récente, le gouvernement va instituer un Organe Unique Indépendant
de Gestion des Elections (OUIGE). Cet Organe unique de Gestion des élections
posera les jalons politiques, juridiques et institutionnels de la restauration
de la confiance des acteurs politiques et des citoyens lors des compétitions
électorales. Il s’agit là d’une innovation majeure de nature à renforcer la
démocratie et la légitimité des institutions.
Nous avons conscience des délais
impartis à la Transition et de nos engagements internationaux. Nous travaillons
sans relâche à les respecter. Dans cette optique, l’Organe unique de gestion
des élections suivra un processus accéléré de mise en œuvre à travers la
relecture de la loi électorale, l’installation d’un directoire national et des
démembrements aux niveaux régional, local et dans les Ambassades et Consulats
du Mali. A cet égard, la table ronde sur l’examen de l’avant-projet des termes
de référence des Assises Nationales de la Refondation s’est ouverte hier à
Bamako.
Au-delà de la question de l’Organe
unique de gestion des élections, le gouvernement va s’atteler à réformer le
système électoral, à travers la relecture des textes fondamentaux régissant les
élections.
Enfin, le quatrième axe de l’action
gouvernementale consistera à instaurer la bonne gouvernance et l’adoption d’un
pacte de stabilité sociale. Sous ce chapitre, le gouvernement s’est engagé à
assurer une gouvernance de rupture et d’exemplarité. Une lutte implacable est
déjà engagée pour combattre la corruption et l’impunité, qui sont à la base de
la déliquescence de l’Etat. Les mesures en cours dans ce sens vont se
poursuivre et s’intensifier.
La gouvernance de rupture se traduit
d’ores et déjà par une réduction drastique du train de vie de l’Etat, afin de
dégager des espaces budgétaires pour améliorer les conditions de vie des
populations et assurer une répartition équitable des richesses nationales. Le
Président de la Transition et le gouvernement ont déjà donné de bons exemples
dans ce sens. Les ressources ainsi dégagées sont réaffectées vers les services
sociaux de base.
Pour plus de justice et d’équité entre les
travailleurs, le gouvernement, après avoir procédé à l’harmonisation des
grilles salariales au sein de la fonction publique, va initier, dans les
meilleurs délais, une Conférence sociale, en concertation avec les partenaires
sociaux et les acteurs du monde du travail.
Monsieur le Président,
Pays sahélien à vocation essentiellement
d’agriculture, d’élevage et de pêche, le Mali demeure fortement préoccupé par
les changements climatiques, qui constituent l’un des défis majeurs pour la
survie et le développement de l’humanité. En effet, mon pays subit de plein
fouet les effets des changements climatiques, caractérisés par l’avancée de la
désertification et son impact sur la faune et la flore, l’assèchement de nos
fleuves et de nos cours d’eau, l’augmentation du niveau de chaleur, les
inondations… C’est pourquoi, je voudrais réaffirmer l’attachement du Mali à la
mise en œuvre de l’Accord de Paris sur le climat.
Monsieur le Président,
Je voudrais conclure en rappelant que
l’action du gouvernement de la Transition au Mali est orientée sur trois
piliers qui correspondent à trois besoins vitaux pour le Mali. Il s’agit du
besoin de sécurité, de besoin de justice pour lutter contre la corruption et
l’impunité et du besoin de réforme.
Il est impérieux de continuer à
travailler à améliorer l’environnement de sécurité au Mali, avec l’aide des
amis du Mali, en appui aux efforts des Forces de défense et de sécurité.
Il est tout aussi impérieux de mener les
réformes nécessaires à la refondation de l’Etat et à l’adaptation des textes
régissant les élections aux besoins de la société malienne et aux évolutions du
temps.
Il n’y a pas d’alternative aux réformes
que nécessitent l’état désastreux du Mali, si nous voulons faire en sorte que
ce grand pays reste debout et redevienne stable. La CEDEAO a bien appréhendé
cela et, dès octobre 2018, elle avait recommandé, à l’issue de sa Mission
d’Information relative à la crise postélectorale de mener les réformes en ces
termes, je cite : « Prenant acte de la prolongation de la législature actuelle
selon l’avis de la Cour Constitutionnelle et au regard des dysfonctionnements
largement reconnus et évoqués par tous les interlocuteurs lors du scrutin
présidentiel passé, il est impératif que le gouvernement et tous les acteurs sociopolitiques
conviennent, de manière consensuelle, d’entreprendre des réformes courageuses
des cadres légaux, y compris la Constitution de février 1992, et du système
électoral avant de s’engager dans les prochaines échéances électorales que
compte mener le pays ».
Je dois dire que cette importante
recommandation de la CEDEAO n’a pas été suivie d’effet à ce jour. Le gouvernement
de transition que j’ai l’honneur de diriger s’attèle à la mise en œuvre
diligente de cette mesure.
Je saisis cette occasion pour renouveler
la gratitude du Président de la Transition, du gouvernement et du peuple
maliens aux Chefs d’Etat et de gouvernement de la CEDEAO, pour leur leadership,
et pour leur présence constante aux côtés du Mali en ces moments difficiles et
complexes. Nous les exhortons à continuer à avoir une lecture lucide de la
situation qui prévaut au Mali, un pays vaste, ouvert sur sept frontières et qui
constitue une digue pour toute la région Ouest-africaine.
Je vous remercie de votre aimable
attention.
Source : « L’ESSOR »
27 septembre 2021