mardi 30 juillet 2013

Le bêtisier ouattariste (suite)

Aujourd’hui, la parole à Paul Koffi Koffi, alias Rodomont :

"L’Etat va continuer à exercer sa mission, sa souveraineté sur l’ensemble du territoire. L’Etat a la Responsabilité d’apporter la sécurité aux personnes et aux biens. Qu’ils le comprennent, qu’ils l’entendent. Nous n’allons pas permettre qu’ils installent cette nouvelle forme d’insécurité qu’on
Paul Koffi Koffi-Rodomont et le général S. Bakayoko
(de G à Dte)
appelle les coupeurs de route. C’est le signal fort qu’on veut donner. C’est pourquoi, nous sommes venus avec des moyens dissuasifs pour leur dire que nous devons et nous pouvons nous attaquer à eux pour éradiquer ce mal pernicieux qu’il faut rapidement mettre ces ennemis hors d’état de nuire. […]. Après moi, les états-majors viendront. Le chef d’état-major, le commandant supérieur de la gendarmerie, le directeur général de la police, le directeur général des Eaux et forêts, le directeur général de la Douane, sont mandatés par le président de la république pour traduire dans les faits ce que nous avons indiqué. Ils viendront, par la suite, pour mettre le dispositif en place. Nous avons tenu à être là parce que nous n’avons pas qu’une mission seulement technique, sécuritaire, mais également politique, pour parler aux populations. Eux, ils feront le suivi des opérations sur le terrain. Vous avez vu que nous avons pris systématiquement là où ce n’était pas autorisé, nos hommes qui étaient là et qui, je regrette, continuaient à se livrer à ces pratiques. Ils ont été pris et envoyés dans des camps de gendarmerie pour audition (Pv). Nous attendons le retour de ces auditions pour prendre les sanctions qui s’imposent. La phase de sensibilisation est terminée. Le président de la république a demandé la normalité au plan de la sécurité et c’est ce que nous faisons. […]. Nous avions une mission précise. C’était de faire le constat du niveau de sécurité à travers le pays et nous sommes en particulier dans le district des Savanes qui a fait l’objet d’attaque. Je tiens à le dire, parce que c’est un évènement majeur, l’attaque du directeur général de l’Addr. Nous sommes venus nous enquérir de la situation et rassurer les populations, les autorités, apprécier le niveau sécuritaire et aussi donner des consignes à nos hommes sur la gestion de la question des coupeurs de routes, la gestion des barrages routiers, des rackets qu’il faut éliminer, sur la question des orpailleurs clandestins, du Ddr et tout autre question de sécurité. Ce qu’on retient, c’est que d’abord en ce qui concerne nos hommes, ils sont unis, ils travaillent ensemble. Nous avons observé la fraternité d’armes entre gendarmes, militaires, policiers etc. Ensuite, nous avons noté la présence permanente des autorités préfectorales qui apportent leur soutien permanent à nos hommes sur le terrain. Et les moyens que ces autorités apportent permettent à nos hommes d’être efficaces sur le terrain. Nous avons noté aussi la  détermination de nos hommes pour traquer le phénomène des coupeurs de routes. Déjà des dispositions ont été prises ici, je ne vais pas les dévoiler, mais nous avons senti une volonté de traiter véritablement cette question. Et les résultats se font sentir. Déjà, nous avons eu de nombreuses arrestations, une vingtaine si je fais le point de notre tournée, en si peu de temps. Nous les encourageons à continuer […]. Bien sûr, vous avez vu avec moi une armada de moyens qui vont être remis. Cela sera fait. Il faut aussi noter le fait que nous soyons sous embargo. Nous avons constaté que les bandits sont armés. Il faut que nous donnions des dotations à nos hommes sur le terrain. Ces choses seront réparées. Il faut être patient. Cela se fera normalement en fonction des zones prioritaires, nous y mettrons les moyens […]. Nos hommes sauront faire le tri." 
 
Propos rapportés par Serge Amany (« Coupeurs de route : Paul Koffi Koffi promet l'éradication du mal », in Le Nouveau Réveil 27-28 juillet 2013)

lundi 29 juillet 2013

NOTRE DERNIER HOMMAGE A UN JUSTE


Son nom restera à jamais synonyme de justice, de courage et de vérité
 
 
Ce lundi 29 juillet 2013, au cimetière du Père-Lachaise à Paris, plusieurs centaines de personnes, auxquelles nous nous associons, ont rendu un dernier hommage à Henri Alleg, qui fut l'un des premiers à dénoncer la torture pendant la guerre d’Algérie.
Dans un court message lu en son nom, Abdelaziz Bouteflika, président de la République algérienne démocratique et populaire, a rappelé cette dénonciation de la torture par le militant communiste, estimant que son ouvrage « La Question » avait été « un texte majeur » dans la lutte anticoloniale.
Le secrétaire national du PCF, Pierre Laurent, a salué un militant dont le nom « restera irrémédiablement synonyme de justice, de courage et de vérité ».
En réponse aux articles de presse qui ont évoqué les origines juives d’Henri Alleg, un de ses enfants a souligné que son père était un « militant internationaliste ayant en horreur le communautarisme ».
(d’après l'AFP)
 
SEQUENCES AVEC HENRI ALLEG

Par Arezki Metref 


(photo jean Texier)
Henri Alleg. C'est le courageux, l'inflexible auteur de La Question. C'est le prestigieux ancien directeur d’Alger Républicain. C'est l'anticolonialiste intransigeant et pugnace. C'est le communiste à l’ancienne, clair dans ses positions, pas de concessions ni d’embrouille. Pour les gens de ma génération, Henri Alleg est un mythe, et un modèle. En dehors de l'Histoire anticolonialiste dans laquelle il occupait la place que l'on sait, j'en entendais parler dans le cercle familial. Il venait à Aït Yenni rendre visite à mon grand-père et à mes oncles. La première fois que je l'ai rencontré en vrai, j'ai eu cette sensation étrange d'être en présence d'une légende. Je devais réaliser un dossier sur la guerre d'indépendance pour un hebdomadaire. Il m'avait raconté son arrestation, la disparition de Maurice Audin, l'internement et la rédaction de La Question sur des bouts de papier glissés dans des paquets de cigarettes afin de les faire sortir de la prison à destination de son avocat. Pudique, il garda le silence sur les sévices qu'il avait subis, ces stigmates de la haine colonialiste sur le corps d'un homme libre. Ce qui frappait chez lui, c'était une très grande intelligence, un humanisme à toute épreuve et une simplicité de grand homme. Disponible, à l'écoute, il n'avait pas d'a priori, mais il avait des principes et un idéal, celui de la défense des intérêts de la classe ouvrière et des peuples. C'était pour lui, la ligne rouge à ne pas franchir.  

Première séquence 

Je l'avais invité à l'Association de culture berbère lors de la réédition commentée de La Question, en Belgique. Ce devait être en 2002. Bien évidemment, il possédait cet art du tribun pour captiver son auditoire. Ce dernier voyageait avec Henri dans les méandres des turpitudes colonialistes qu’il savait décrire et analyser en dialecticien. A la fin de la soirée, nous nous sommes retrouvés au métro, et c'est ce vieux bonhomme de 80 ans, à l'époque, qui se souciait de savoir comment j'allais rentrer. Le contraire eût été de mise. Il m’expliqua ce que déjà je savais, les lignes à prendre, les correspondances. Il manifesta un souci protecteur qui m’avait touché. 

Deuxième séquence 

C'était en novembre 2005 pour un colloque sur « L'autre Camus ». Nous voulions parler d’Albert Camus, si possible, autrement que dans les termes de plus en plus unanimistes qui se forgeaient. Il fallait les intervenants idoines. Je m'étais souvenu qu'Henri avait été directeur d'Alger Républicain, journal auquel avait collaboré Camus quelques années auparavant. Il me parut légitime qu'il ait eu une lecture du journalisme et de la littérature de Camus. Il faut dire que sa participation à ce colloque avait soulevé un certain émoi. Au point qu'un intellectuel franco-algérien me dit que donner la parole sur Camus à « un stalinien » avait quelque chose de pernicieux. Je crois avoir répondu que, contrairement à beaucoup de non staliniens, ou d'antistaliniens de salon, Alleg portait dans sa chair le droit de s'exprimer, et dans son parcours et dans ses combats la légitimité pour le faire. Lorsqu'il prit la parole à ce colloque, je compris alors pourquoi une telle crainte. C'était une époque où l'on dressait à Camus une statue de quasi anticolonialiste, ajoutée aux autres statues qu'il avait déjà de grand écrivain, d'immense journaliste, etc. Patiemment, Henri Alleg démonta la mécanique du discours de Camus sur l’Algérie. Même ses fameux reportages sur la misère en

(photo El Watan)
Kabylie brandis souvent comme la preuve irréfutable de son engagement en faveur des colonisés, Henri Alleg les analysait autrement. Le sens ultime de ces textes était comme une doléance adressée au système colonial pour qu’il manifeste un peu moins de dureté à l’égard des colonisés, une demande compassionnelle d'un peu plus d'humanisme. A aucun moment, le système colonial n'est remis en cause en tant que tel. Inutile de préciser les gorges chaudes que son intervention avait suscitées au milieu d'un chantier où l'idolâtrie de Camus, sans doute méritée sur d’autres terrains que l’anticolonialisme, battait son plein. Henri Alleg reconnut à Camus sa stature de grand écrivain, mais il ne voulait pas laisser dans l’équivoque dont on les drape aujourd’hui les positions de Camus sur la colonisation et surtout sur l’indépendance de l’Algérie. 
 

Troisième séquence 

Je le rencontre à un salon du livre à Montpellier. Il m'offre Mémoire algérienne, l’ouvrage qu'il venait de faire publier, et je lui offre pour ma part Kabylie Story. Cet échange aura deux conséquences. Je lui ferai une interview pour Le Soir d’Algérie sur son vécu algérois, lui demandant de me le décrire à travers des lieux emblématiques. Dans un premier temps, il interpréta ma demande comme une limitation du propos politique. Il admit cependant lors de la parution que l'angle était plus intéressant qu’un énième retour descriptif du dernier quart d’heure de la colonisation, juste à la veille de la guerre de Libération. Autre conséquence de cet échange, il m'adressa une lettre dans laquelle il exprimait tout net ses remerciements pour Kabylie Story, ce voyage à travers les villages kabyles qui, disait-il, relatait toute la beauté de la Kabylie, ainsi que ses combats pour la survie et la dignité. Il concluait en me disant que ce livre faisait pour cela bien davantage que de volumineux essais. Je me suis souvenu que c'était le directeur de presse qui portait son appréciation sur ce qui n'était qu'un reportage. C'est pourquoi lorsqu'il a été question de publier Roman de Kabylie, je lui ai demandé si je pouvais reprendre sa lettre en postface tant elle m'avait touché. Il souhaita la réécrire.
Arezki Metref
 
 
J'ai tenu à raconter des échanges personnels avec Henri Alleg car je sais qu'aujourd'hui, sa biographie est dans tous les journaux. Au moment où il s’en va, on sent comme l’ombre d’un grand homme qui s’efface. Il laisse un vide. Indéniablement. Il manquera aux combattants pour la vérité et la justice. A son contact, il nous semblait nous élever à la hauteur de la grande histoire. L’une des leçons qu’il nous lègue, c’est qu’avec de la conviction, de la détermination, des principes, un homme peut soulever des montagnes. Il l’a fait avec La Question. 


Source : Le Soir d’Algérie 21 juillet 2013

Mont Péko: L’Effet Ouattara

Amadé Ouérémi, le chef de l’armée indisciplinée d’Alassane Ouattara qui écumait l’Ouest de
Femmes et enfants burkinabè dans une colonie du Mont Péko
la Côte d’Ivoire, y semant mort et désolation au sein des populations autochtones Wê, a été « maitrisé » par son employeur d’antan pour faire taire les critiques persistantes des ONG de droits de l’homme comme Human Rights Watch. Cependant, les Ivoiriens découvrent peu à peu qu’Ouérémi n’est que le symptôme d’une gangrène sociale, humanitaire et politique créée par Dramane Ouattara et qui conduit assurément à l’ultime pourrissement du tissu social ivoirien. Aujourd’hui, le Mont Péko n’est plus un territoire ivoirien. C’est un territoire burkinabé occupé par les contingents successifs de Burkinabè, qui, depuis la guerre d’Alassane Ouattara commencée en 2002 contre la Côte d’Ivoire, ont servi de supplétifs à l’armée d’Alassane Ouattara dans l’Ouest ivoirien, y ont massacré les autochtones, et, pour se récompenser du service rendu à Alassane Ouattara, se sont d’abord installés sur les propriétés de leurs victimes, et plus tard, parce qu’en nombre impétueux, ont décidé tout bonnement de s’établir et d’exploiter avec leurs familles, qui ne cessent d’affluer du Burkina, les forêts classées de l’Ouest.
 

Hommes et enfants burkinabè dans une colonie du Mont Péko
Aujourd’hui, l’expression « Mont Péko » résume tout le drame ivoirien, le drame d’un pays souverain dépecé, démembré, réduit en lambeaux depuis 2002, et que se partagent, comme dans le tableau de l’Espolio, des acharnements étrangers. Pendant que les autochtones de l’Ouest ivoirien se terrent de peur, ou sont sous terre ou en exil, et que les messagers d’Alassane Ouattara clament que la question de la nationalité des milliers de Burkinabè n’est point liée à celle du foncier, voici en quelques images les parents d’Ouérémi, les nouveaux colons du Mont Péko, ceux qui remplaceront les autochtones We et seront désormais les propriétaires terriens de l’Ouest ivoirien si la naturalisation précipitée et forcée d’Alassane Ouattara prend effet et que le plan machiavélique d’Alassane Ouattara et de Blaise Compaoré de faire de la Côte d’Ivoire une colonie de peuplement du Burkina Faso n’est pas mis en échec.  

M. Frindéthié
(http://frindethie.wordpress.com/2013/07/27/mont-peko-leffet-ouremi/) 

en maraude dans le web
Sous cette rubrique, nous vous proposons des documents de provenance diverses et qui ne seront pas nécessairement à l’unisson avec notre ligne éditoriale, pourvu qu’ils soient en rapport avec l’actualité ou l’histoire de la Côte d’Ivoire et des Ivoiriens, et aussi que par leur contenu informatif ils soient de nature à faciliter la compréhension des causes, des mécanismes et des enjeux de la « crise ivoirienne ».

Source : CIVOX. NET 29 Juillet 2013

dimanche 28 juillet 2013

MALI. RESULTAT DE L’ELECTION PRESIDENTIELLE

« Et le nouveau président est... François Hollande, élu avec 97% des suffrages exprimés. » 

Il a une dynamique digne d’un footeux comme Cristiano Ronaldo, à la seule
Le Triomphe
différence que, lui, François Hollande, ne marque pas de but. La girouette des lobbies, même comme il s’en défend – n’est-ce pas, Delphine Batho ? –, est le nec plus ultra de la Françafrique. Ceux qui croyaient à tort que cet épisode tragique de l’Afrique était terminé doivent actuellement manger leur chapeau. Qualifié pour la présidentielle malienne, l’homme qui sans doute a déjà trouvé du pétrole sous l’Élysée, tellement il est bas dans les sondages, jubile. Avant l’échéance fatidique, il a déjà gagné haut la main son challenge : avoir la mainmise sur la base de Tessalit en faveur d’AREVA, le cœur du Mali en somme.
Le Mali [a élu] son nouveau président [ce 28 juillet, dès le] premier tour. Alors que le pays n’est pas encore stabilisé, le geyser du désert a voulu par tous les moyens cette élection. Dans des salmigondis sans objet, il avait annoncé SA victoire sur le terrorisme le 14 juillet dernier, avant que le couperet ne lui tombe sur sa tête à la tignasse décolorée, attestant l’assassinat macabre de Philippe Verdon. C’est Sarkozy qui a dit que le président teint ses cheveux… Il se pourrait donc que le président de la République ait recours aux colorants de l’Oréal et autres Schwarzkopf, pour cacher ses cheveux gris, pour paraître comme ce brun ténébreux qu’il n’est pas. Passons. A propos du Mali donc, pas de suspense. D’ailleurs, ce n’est que là-bas que l’homme qui rêve de rester 10 ans à l’Élysée peut encore avoir des suffrages. Hélas, le soi-disant sauveur de l’UMP ne lui laissera aucune chance, même si je préfère Fillon…
Dogmatique et sentencieux, velléitaire à souhait, l’actuel chef de l’État français ne pouvait pas rêver mieux. L’homme qui dit « fixer le cap » sans une résolution courageuse n’a que la force de ses artères de l’autre côté de l’océan. Papa François « Mali » Hollande a le destin tout tracé pour le Mali. L’homme, du haut de ses convictions et de sa normalité, jusqu’au bout des ongles of course, s’est présenté au 89, rue du Cherche-Midi dans le 6e arrondissement de Paris. C’est l’adresse de l’Ambassade du Mali en France. La montagne des flamboyances africaines était venue en personne chercher son prix. Fichtre.
C’est bien la première fois dans l’histoire de France qu’un président de la République se déplace dans une ambassade africaine. C’était lundi dernier. Et pourquoi ? Pour la gloriole. Caresser un joujou de tissu « jaune-vert-rouge » accroché au cou et penser tutoyer les étoiles ou se sentir aimer ou câliner, surtout qu’à la maison, semble-t-il, c’est pas la fête tous les jours avec la « rottweiler », comme la nomme un élu de droite. Elle tiendrait, – conditionnel –, l’homme, en joue. Ma mère quant à elle, à chaque fois qu’elle le voit à la
L'Investiture
télévision, s’esclaffe, avec l’envie de gerber. « Satan ! » crie-t-elle, très à cheval sur ses principes religieux et contre le « mariage pour tous ». Peut-être qu’elle agit ainsi parce qu’elle a voté pour lui. Nous sommes tous de gauche dans la famille. Tous, sauf mon beau-père, qui pleure encore le petit homme aux talonnettes…
Le président par intérim du Mali, Dioncounda Traoré, en remettant sa décoration à François Hollande a déclaré : « Au nom de la République du Mali, nous vous élevons à la dignité de grand-croix de l’Ordre national du Mali ». Ajoutant : c’est « une très grande joie et une très grande fierté au nom du service exceptionnel rendu à mon pays » et « de la mobilisation exceptionnelle » de la France « en notre faveur ». Terminant son propos, il poursuivit : « Notre histoire s’était cabrée mais nous sommes aujourd’hui en mesure de la dompter grâce à l’appui de la France ». Ah, bon ?
Quelle bonne nouvelle pour les Maliens ! Le général Charles de Gaule revient. Autant pour moi, la Françafrique et François Hollande… 


Source: Le blog d'Allain Jules 21 juillet 2013

LEUR MORALE (suite)

Les sophismes d’Epiphane Zoro-Bi Ballo à propos du débat sur la nationalité. 

Si le débat actuellement en cours sur la citoyenneté – car c’est de citoyenneté, plus que de nationalité, qu’il s’agit –,  peut avoir une utilité, c’est d’abord parce qu’il fait sortir maints loups du bois où, déguisés en honnêtes défenseurs des droits de l’homme ou, s’agissant d’Epiphane Zoro-Bi Ballo, « des droits humains », ils se tenaient prudemment embusqués jusqu’à ces dernières semaines. Nos lecteurs pourraient être désagréablement surpris de ce que nous donnons la parole à de drôles de paroissiens, tels Joël NGuessan ou Epiphane Zoro-Bi Ballo, manifestement sous influence. Mais le but de ce blog, c’est de contribuer de notre mieux à la plus complète et la plus précise information possible de nos compatriotes sur la nature, les causes et les enjeux de cette crise. A cet égard, ce que nous lisons ces derniers jours sous la plume de certains suppôts de ce pouvoir fantoche, ce que nous entendons de leur bouche, est très instructif. Surtout quand, comme c’est le cas ici, le locuteur est ce même juge-certificateur qui, dès 1999, s’illustrait à Dimbokro, le « village natal » de qui vous savez… A l’époque, ce Ballo-là était seulement « un magistrat impartial et courageux, qui faisait honnêtement son travail ». Aujourd’hui, grâce à ce débat un peu surréaliste, le tout récent adhérent du RDR se dévoile lui-même comme l’un des Ivoiriens dénaturés dont l’activité sournoise a contribué de longue date à préparer l’usurpation des Ouattara.
Au passage, n’oubliez surtout pas de savourer la petite vacherie sur « Houphouët-Boigny qui s’est fait maître d’un développement déséquilibré en faveur de son village (…) ». Qu’aurions-nous lu sous sa plume si ce Zoro-là n’était pas aussi un membre éminent du fameux Rassemblement des houphouétistes… (Etc.) ?
La Rédaction 

b

 Tiémélékro, 1999. Je fais partie de l’équipe chargée de l’établissement des cartes nationales d’identité dans le cadre des audiences foraines initiées par le gouvernement sous la pression de l’opposition, en particulier du Fpi. En tant que magistrat, j’avais pour rôle de vérifier l’origine ivoirienne des pétitionnaires afin de leur délivrer dans l’affirmative, un certificat de nationalité. Installé donc derrière un bureau de fortune, je commence à recevoir les requérants :
-« Quels sont vos noms, prénoms, date et lieux de naissance ? »
-« Je m’appelle Yao Kouassi Clément, né en 1973 à Tiémélékro. » Me répond le premier à qui je m’adresse.
-« Quels sont les dates et lieux de naissance de vos père et mère ? »
-« Mon père est né en 1930 et ma mère en 1940, tous deux à Tiémélékro. »
Après cet entretien, je lui délivre sans hésiter le certificat sollicité, sa nationalité ivoirienne m’ayant paru sans conteste établie. Je m’adresse donc au pétitionnaire suivant. Sur mon interpellation il me décline son identité :
-« Je me nomme Abou Sidibé, né en 1973 à Tiémélékro. Mes père et mère sont respectivement nés en 1930 et 1940 tous deux à Tiémélékro. »
Pour ce pétitionnaire, je suis gagné par le doute et il me faut aller plus loin.
-« D’où sont venus vos grands-parents avant de s’installer à Tiémélékro ? »
-« Je n’en ai aucune idée, me répond-il, quelque peu embarrassé. Je sais que mes grands-parents, commerçants, sont nés dans les années 1910 et 1915 dans la région de Bongouanou. Et je me suis toujours considéré comme originaire de cette région. »
Je lui notifie, à son grand désarroi, mon refus de lui délivrer le certificat de nationalité, parce que, selon mon entendement, des Sidibé ne sauraient être considérés comme originaires de Bongouanou ou de Tiémélékro. « Tiémélékro, c’est chez les Kouadio, N’NGuessan, Koffi, Aboh…. Va chercher ton village ! » Pourrait-on lui demander. Il ne s’agit guère ici de village natal, mais bien de village…ancestral.
Ce récit traduit une réalité quotidienne pour de nombreux Ivoiriennes et Ivoiriens, et je suis persuadé que beaucoup y retrouveront leurs histoires individuelles, marquées de traitements discriminatoires et d’indescriptibles frustrations. Quels critères le législateur a-t-il mis en avant pour déterminer l’attribution de la nationalité ivoirienne à titre de nationalité d’origine ?, m’avait demandé une amie mienne, Emérik, qui ne s’expliquait pas les tracasseries et humiliations qu’elle avait dû subir pour se faire délivrer par la direction nationale de la Police, un passeport.
-« Mais les choses sont très simples, lui ai-je répondu avec cet air du juriste convaincu de son fait. La réponse à ta question se trouve aux articles 6 et 7 du code de la nationalité. Est ivoirien (d’origine) dit l’article 6 :
1-L’enfant légitime ou légitimé, né en Côte d’Ivoire, sauf si ces deux parents sont étrangers ;
2-L’enfant né hors mariage, en Côte d’Ivoire, sauf si sa filiation est légalement établie à l’égard de ses deux parents étrangers ou d’un seul parent également étranger.
L’article 7 pour sa part dispose qu’est ivoirien (d’origine) :
1-L’enfant légitime ou légitimé, né à l’étranger d’un parent ivoirien ;
2-L’enfant né hors mariage, à l’étranger, dont la filiation est légalement établie à l’égard d’un parent ivoirien. »
Je n’ai jamais compris les raisons de l’énoncé inutilement rébarbatif de ces dispositions. Toute cette phraséologie pour simplement dire qu’est ivoirien l’enfant né en Côte d’Ivoire ou à l’étranger d’au moins un parent ivoirien. Il n’y a donc qu’à prouver que l’un des parents est Ivoirien pour établir la nationalité ivoirienne de l’enfant à titre de nationalité d’origine. Pour me convaincre de m’être bien fait comprendre par cette « apprentie juriste » qui semblait attacher un très grand intérêt à la question, je pris le risque d’illustrer mes propos.
-«Je suis ivoirien, né en 1968, de parents ivoiriens. Mon fils Israël, né en 1997 est donc ivoirien d’origine. » Sceptique, elle enchaîne par une autre question :
-«De quelle entité juridique dépend la nationalité ? »
-« De l’Etat, naturellement » lui répondis-je sans trop savoir où elle voulait en venir.
Cette fois, elle prend l’air d’avoir le dessus et poursuit :
-« La naissance de l’Etat de Côte de d’Ivoire a été officiellement scellée le 7 août 1960, date de son indépendance de la France. Il s’ensuit donc que la nationalité subséquente ne saurait évidemment préexister à cette date. Est-ce bien exact ? »
-« Je le crois. »
-« S’il en est ainsi, achève-t-elle, quelle est la disposition du code de nationalité qui règle alors la question de la nationalité ivoirienne de tes parents qui sont nés avant 1960, donc bien avant l’existence d’une nationalité dont ils se réclament aujourd’hui ? »
Le raisonnement on ne peut plus rigoureux de mon « apprentie juriste » me conduisit à réaliser que le code de la nationalité garde le silence sur cette question fondamentale : « comment a été réglée au plan du droit la question de la nationalité des personnes habitant ce territoire colonial appelé Côte d’Ivoire au moment de son accession à l’indépendance ? » Le code de la nationalité de 1961, toujours en vigueur, parle d’Ivoiriens et d’étrangers sans dire le critère juridique permettant d’identifier les uns et les autres… au départ. Face au silence de la loi, chacun y va de sa méthode. Tandis que certains se proposent d’établir la nationalité ivoirienne de leurs parents nés avant 1960 par des déclarations sur l’honneur, d’autres produisent des arbres généalogiques pour rapporter la preuve de leur souche ivoirienne. Le général Guéi n’avait peut-être pas si tort(1).
Le professeur Niangoran Boua avait eu l’ingénieuse idée de tenter de combler ce vide juridique par des arguments anthropologiques. Il soutenait que la Côte d’Ivoire n’étant pas un no man’s land avant la colonisation, la détermination de l’Ivoirien d’origine devait se faire par un recours à l’appartenance à l’une ou l’autre des tribus originairement installées sur ce territoire qui sera plus tard baptisé Côte d’Ivoire. Il s’agit là d’un argument spécieux qui méconnaît gravement les exigences de l’Etat moderne tel qu’hérité de la colonisation. D’une part les tribus en question ne constituaient pas une entité homogène et aucun sentiment national ne les unissait entre elles. Chacune vivait repliée sur elle-même dans une attitude de méfiance et de rejet de l’autre. En outre, les populations de ces tribus occupaient des aires géographiques qui transcendent pour la plupart les frontières nationales actuelles. On le voit, la théorie des tribus « fondatrices » ne saurait servir de base à la détermination de la nationalité ivoirienne. La référence à la tribu recèle également un risque majeur, celui de renforcer la tribalisation de la vie politique et d’accentuer le repli communautaire au détriment des valeurs de la République, proclamée comme une et indivisible par la loi fondamentale. Si je dois ma nationalité d’origine avant tout à mon appartenance à la sous-tribu Gouro, je ferai naturellement passer les intérêts de ma tribu avant ceux de la nation. Koblata, le village de mes ancêtres d’abord, la Côte d’Ivoire ensuite. L’on ne devrait donc pas en vouloir ni à Houphouët-Boigny qui s’est fait maître d’un développement déséquilibré au profit de son village, Yamoussoukro, ni à Konan Bédié pour qui Daoukro(2) et ses environs a été une priorité. Que devient la Côte d’Ivoire dans tout cela ? Rien qu’un rassemblement hétéroclite de plusieurs tribus, évoluant chacune de son côté ! En 2000, Madeleine Tchikaya(3) alors présidente de la « sous-commission Carte d’identité » de la Commission consultative constitutionnelle et électorale (Ccce), mise sur pied par la junte au pouvoir après le coup d’Etat du 24 décembre 1999, s’était illustrée par son engagement en faveur de la pureté identitaire. A travers un document destiné « à une meilleure sauvegarde de l’identité ivoirienne », elle avait notamment proposé de « mentionner sur les cartes nationales d’identité les repères identitaires » indiquant la souche villageoise du bénéficiaire de ladite carte. Elle estimait par ailleurs que chaque Ivoirien doit « se faire établir sa carte nationale d’identité dans sa région d’origine, même si on n’y est pas né, où le pétitionnaire et ses parents sont censés être connus »(4). L’on avait cru à une grosse farce. Que non ! On peut se nommer Sidibé, être né à Tiémélékro et être originaire de cette localité parce que ses ascendants y sont installés depuis plusieurs générations. La proposition de Tchikaya impose plutôt à celui qui revendique la nationalité ivoirienne d’aller se faire recenser dans son village ancestral. Il est très clairement ici question de la recherche d’une race d’Ivoiriens de souche, d’Ivoiriens purs. Je connais à Grand-Bassam(5) une famille dont les ascendants sont venus du Nigéria dans la période de l’installation des comptoirs portugais et espagnols sur les côtes bassamoises dans les années 1700-1800. Dans la perspective de l’application de cette mesure, l’on priera cette famille d’aller à la recherche de ses origines ancestrales ailleurs, car Grand-Bassam appartiendrait historiquement aux peuples Ahizi ou Abouré. Et là encore, il faut se demander de quel Grand-Bassam il s’agit : la ville qui s’offre à nous aujourd’hui et dont le développement s’est amorcé progressivement à partir de la pénétration sur ses côtes des explorateurs portugais, espagnols et ensuite français, ou de ces petits hameaux de pêcheurs disséminés ici et là, ce qui n’était même pas encore en fait Grand-Bassam. Grand-Bassam existe tel quel à ce jour parce que des « gens venus d’ailleurs », installés là depuis plusieurs générations ont contribué à sa création. L’histoire est dynamique et évolutive. Pourquoi Grand-Bassam ne serait-elle pas tout autant la ville de ces Haoussa venus du Nigéria ?
Les prochaines guerres seront des guerres identitaires, liées aux crises de nationalité, prophétisait un auteur au siècle dernier. L’actualité africaine nous fait constater aujourd’hui, hélas, combien cette prédiction se trouve justifiée. De l’Afrique centrale à l’Afrique de l’ouest, le continent est partout déchiré par des conflits politiques sur fond de revendication identitaire. Du Rwanda à la Côte d’Ivoire, en passant par la République démocratique du Congo (Rdc), une même réalité s’impose : le lien entre la guerre et une citoyenneté ou nationalité mal définie. La Rdc est contrainte d’y faire face et de régler de façon courageuse la question des Banyamoulingué pour ramener dans le pays la stabilité politique et la préserver. La Côte d’Ivoire est quant à elle appelée à gérer avec la plus grande efficacité le problème des étrangers et des Ivoiriens qui leur sont abusivement assimilés, au risque de perdre définitivement le contrôle sur une partie du pays et de sa population, et de plonger l’ensemble de la sous-région dans une instabilité chronique. Le flou dans la détermination de la nationalité, ajouté au discours politique sur l’envahissement de la Côte d’Ivoire par les étrangers, met en effet de façon certaine l’avenir du pays en péril. 
 
E. Zoro-Bi Ballo

NOTES
(1) Journal Officiel de la République de Côte d’Ivoire, 12 octobre 2000
(2) Henri Konan Bédié a été le successeur d’Houphouët. Il est l’auteur de la théorie de l’«ivoirité» qu’il a lui-même qualifié de « nouveau contrat social ». Cette théorie visait à renforcer le sentiment nationaliste.
(3) Ex-Ministre de la promotion de la femme sous Houphouët-Boigny, Tchikaya s’est fait appeler par une partie de la presse ivoirienne « la Le Pen des tropiques » pour les idées nationalistes qu’elle soutenait au sein de la commission chargée de la rédaction de nouvelles mesures d’identification en 2000.
(4) Le Patriote, quotidien Ivoirien du n°778 du jeudi 28 mars 2002
(5) Grand Bassam est une ville côtière du Sud de la Côte d’Ivoire. Petit village de pêcheurs avant la colonisation, son développement s’est amorcé à partir de l’installation des comptoirs commerciaux par les explorateurs portugais et les colons français. Elle fut la première capitale de la Côte d’Ivoire.
 

en maraude dans le web
Sous cette rubrique, nous vous proposons des documents de provenance diverses et qui ne seront pas nécessairement à l’unisson avec notre ligne éditoriale, pourvu qu’ils soient en rapport avec l’actualité ou l’histoire de la Côte d’Ivoire et des Ivoiriens, et aussi que par leur contenu informatif ils soient de nature à faciliter la compréhension des causes, des mécanismes et des enjeux de la « crise ivoirienne ».

Source : Nord-Sud Quotidien 25/07/2013

Odette Lorougnon* : « Le peuple ivoirien ne se reconnaît pas dans ce pouvoir. »

Lactualité est dominée principalement par les questions liées à la nationalité et au foncier rural. Vous qui avez été député pendant une décennie, quel est votre commentaire ?

O. Lorougnon
Je m’en vais vous poser une question. Qui a des problèmes de nationalité en te d’Ivoire ? Qui s’est une fois plaint dans ce pays où nous sommes qu’on lui a retiré la nationalité ivoirienne ? Est-ce que les Ivoiriens du Nord se sont une fois plaints ? Et ces étrangers dont on parle, qui les a fait venir en te d’Ivoire ? Personne à ce que je sache. Ils sont venus deux-mêmes, ça veut dire qu’ils savent les règles qu’il faut observer quand on est dans le pays de l’autre. Ils sont venus travailler, faire fortune ou se chercher comme on le dit dans le langage populaire. Et non pour charger la question de la nationalité sur leurs têtes. Ceux qui veulent les exploiter, ont peut-être autre chose en tête. Quand Alassane Ouattara venait en te d’Ivoire, les étrangers étaient jà là, ce n’est pas lui qui les a fait venir dans ce pays.
Le RDR nest pas allé prendre les Burkinabé, ni les Béninois, Maliens, Guinéens et autres pour les envoyer en te d’Ivoire. Doù vient-il que subitement le RDR éprouve un intérêt particulier pour ces étrangers qui sont ici depuis des lustres ? Quel est donc le problème ? Il y a des intellectuels parmi ces étrangers et ils savent bien la procédure pour acquérir la nationalité ivoirienne. Alors nous nous posons la question de savoir que veut Alassane Ouattara de la te d’Ivoire ? Parce que les étrangers n’ont rien deman.
Depuis une vingtaine dannées, depuis que le RDR est devenu un parti politique, on ne parle que de la question des étrangers. Devons-nous déduire que le RDR est un parti détrangers ? Devons-nous déduire que le RDR est constitué détrangers ? Parce qu’on ne peut pas comprendre cette marche singulière et étrange de ce parti, au profit des étrangers. Parce que dans tous les pays du monde, quand un parti politique arrive au pouvoir, c’est la question des nationaux, leur bien-être qui le préoccupe dabord. Ça fait dix ans, vingt ans que nous menons le même débat. Nous avons fait dix ans au Parlement, au cours de la 9e législature (cembre 2000–11 avril 2011), il a été question de la nationalité, de la question des étrangers ; à telle enseigne qu’on s’est demandé si les autres pays environnants appliquaient la réciprocité en la matière. La preuve, nous avons aujourd’hui des Ivoiriens exilés qui sont en train de souffrir dans ces pays voisins, après avoir fui la terreur du régime en place en te d’Ivoire. Pourquoi la te d’Ivoire doit-elle faire une exception ? On nous rétorquera que ces étrangers-là ont travaillé ici. Mais la te d’Ivoire les a payés, a participé au développement de leurs pays, a aidé financièrement leurs pays. Mais quel est donc le problème ? Que cherchent le Rdr et Alassane Ouattara ? En tout cas, je refuse de croire que le Rdr ait pris le pouvoir pour le bien-être des étrangers. Depuis presque 3 ans de pouvoir, on ne parle que de la question des étrangers. Alors, il faut que les Ivoiriens du Nord se marquent de ces amalgames dangereux, parce qu’ils risquent dêtre vus comme complices dans cette te d’Ivoire qui est en train dêtre figurée.
Jai comme l’impression que ceux qui sagitent en ce moment sur la question, prennent leurs propres cas pour la généralité. Les dirigeants de ce pays qui parlent de la nationalité ivoirienne, il nous semble qu’ils transposent leurs propres situations sur celles des paisibles étrangers qui nont rien demandé. Quon les laisse donc tranquilles. Peut-être que ce sont les dirigeants qui ont des problèmes de nationalité et qui tentent de se cacher derrière les étrangers. De grâce quon épargne donc ces étrangers de nos questions politiciennes.

Aujourdhui le gouvernement ivoirien estime à plusieurs centaines de milliers dapatrides qui devraient acquérir la nationalité selon une procédure durgence

Moi je voulais savoir, quels sont ceux qu’on nomme des apatrides.

Les apatrides, ce sont des individus qui ne jouissent  daucune nationalité.

Entre nous, est-ce qu’il existe réellement des apatrides dans le monde ? Je voulais vous retourner la question M. le journaliste. Parce que forcément un individu vient de quelque part. Tous ces étrangers qui sont en  te  d’Ivoire,  c’est  en  leurs  âmes  et consciences qu’ils ont cidé de venir dans ce pays, pour la plupart faire fortune. Ils ne sont pas venus pour faire de la politique ni qu’on les utilise dans un tel projet. Moi, je voulais les interpeller pour ne pas qu’ils se laissent utiliser ni manipuler par une frange délites ivoiriennes qui pensent que c’est avec les étrangers qu’ils peuvent prosrer. Ils ne sont donc pas venus pour faire de la politique. Il faut que les gens comprennent qu’un individu qui est venu en te d’Ivoire et qui s’est installé dans un village ou une contrée, on ne peut pas dire du jour au lendemain qu’il est sans patrie donc un apatride. Les étrangers sont venus d’eux-mêmes et ce n’est pas le Rdr qui est allé les chercher, donc il ne faudrait pas qu’il les utilise pour dautres fins. Cest un faux débat créé par ceux qui veulent se tailler un électorat sur mesure.

Selon vous, il y a donc un agenda secret qui soustend cela ?

Cest un agenda secret du Rdr.

Et qui vise quoi ?

Qui vise tout simplement un électorat comme je l’ai dit. Le Rdr cherche des voies et moyens pour se maintenir coûte que coûte au pouvoir. Et la naturalisation de masse des étrangers est une voie royale que tente demprunter ce parti. Parce que le peuple ivoirien ne se reconnait pas dans ce pouvoir ; le peuple ivoirien est médusé aujourdhui, en regardant ce pouvoir qui ne parle que pour les étrangers. Les Ivoiriens s’interrogent de savoir ce que devient la te dIvoire. Les gens tentent dutiliser les étrangers à des fins politiques. Il y a quelquun qui est certainement en mal de popularité, et qui cherche un électorat sur mesure. Ce débat-là a été jà l’objet dâpres discussions au Parlement durant la législature précédente. Le débat refait surface, parce qu’il y a quelquun qui avait voulu naturaliser 3 millions détrangers, parce que tout simplement il veut un électorat à lui.
Il faut que le président Ouattara convainque le peuple ivoirien. Il a pris le pouvoir pour les Ivoiriens et non pas pour les étrangers. Parce que trop c’est trop. Il n’a pas pris le pouvoir pour les étrangers ni pour la Cedeao. Il a pris le pouvoir pour le bien-être des fils et filles de te dIvoire. Et ceux-là sont en exil, il faut qu’il en parle, ceux-là sont aussi en prison, il faut qu’il en parle, ceux-là nont rien à manger. Nous nous offusquons donc contre ces agissements. Et si les Ivoiriens nen parlent pas, et qu’ils sont confis chez eux, il ne faudrait pas que le pouvoir pense que cest par peur. Mais, les Ivoiriens réfléchissent, méditent et s’interrogent : que devient notre pays ?
Cette élite qui a pris le  pouvoir,  travaille pour le bien-être de qui ? Sinon, ce n’est pas peur des kalaches, dans lesquelles nous vivons depuis plus de dix ans. Les Ivoiriens ont souffert et continuent de souffrir.
Il y a deux ou trois mois, on nous parlait de 650 mille apatrides qui devraient néficier de la nationalité ivoirienne, en complicité avec le Haut-commissariat des réfugiés (HCR). Mais les réfugiés, il y en a partout. Il y a des milliers d’Ivoiriens refugiés dans la sous-région qui souffrent. Qu’est-ce qu’ils ont fait pour ces réfugiés ivoiriens ? Pourquoi donc les Ivoiriens doivent souffrir en exil. Nous prenons le nord de la te d’Ivoire à témoin pour tout ce qui est en train de se passer. Demain, l’Histoire  les accusera davoir été complices de cette forfaiture. Parce que c’est de là-bas que sont venus ceux qui ont rangé la te d’Ivoire. La rébellion vient du nord, la question de la nationalité est venue du nord. Cest encore dans le nord que des cadres du pays, de grands serviteurs de l’Etat sont emprisonnés. Le nord est devenu aujourd’hui le Camp Boiro et le Guantanamo de la te d’Ivoire. Le nord répondra un jour devant l’Histoire. Cest pourquoi, j’interpelle les cadres et populations du nord sur ce qui se passe en te d’Ivoire. LHistoire les regarde. Le mot apatridie me laisse donc perplexe. Il n’y a pas à mon sens des gens qui sont des apatrides, parce qu’ils sont forment venus de quelque part. À moins qu’ils ne veuillent volontairement changer de Patrie, donc de nationalité.

Il se trouve que ces personnes concernées par lapatridie, dans le cas despèce en Côte dIvoire, sont pour la plupart des descendants de personnes venues dailleurs mais qui navaient plus de liens avec leurs pays dorigines et aucun papier pour les identifier comme étant des ressortissants de tel ou tel autre pays.

Cest faux ! Je dis que c’est inadmissible et inacceptable. Il n’y a pas  un individu qui puisse se retrouver du jour au lendemain sans patrie, sans origines à la limite. Lors du Forum de réconciliation en 2001, M. Ouattara a brandi devant le monde entier le passeport flambant neuf de son grand re. Si en 1900 son grand-re avait jà un passeport moderne, ça veut dire qu’on était dans la modernité (rires) et que les gens devraient avoir leurs papiers. Donc comprenez qu’on veut changer la mographie de la te d’Ivoire, et au-delà se tir un électorat sur mesure. Nous interpelons les Ivoiriens afin qu’ils évitent dêtre complices de la politique de repeuplement, du changement de la mographie de la te d’Ivoire.

Il y a aussi la question du foncier rural qui est source de tension aussi bien à louest quau nord, au centre  et à lest du pays. Quel est votre sentiment sur cette question, étant donné que les deux questions nationalité et foncier sont liées ?

En effet, qui dit nationalité parle également de la question du foncier. Ces deux questions importantes là sont liées, cest pourquoi nous nous posons toutes ces questions. Si on nous fait un tel programme de déposséder les Ivoiriens, car en fait cest une dépossession, en le repeuplant et en donnant les terres à ces peuples quon fait venir par camions, cars…, que deviennent les Ivoiriens ? Que deviennent surtout les futures générations ? Et cest pourquoi ces questions sont existentielles. Ce nest pas normal ce qui se passe dans notre pays. Cest du jamais vu, quun pouvoir prenne fait et cause pour ceux qui viennent dailleurs, pour des étrangers au triment des nationaux.
Mais en réalité, le problème des Ivoiriens ce nest pas qui veut être Ivoirien, puisque pour l’être il y a une procédure de naturalisation à suivre pour les étrangers. Comme je le disais le problème des Ivoiriens aujourdhui, cest qu’ils ont faim, ils souffrent, ils sont malheureux dans leur propre pays. Tout est cher. Et je crois que cest à cette situation là que le gouvernement doit faire face ; cest ça qui est l’urgence pour le peuple de te dIvoire. Cest donc sur ces questions-là que les Ivoiriens attendent Ouattara et son gouvernement.

Avec les réserves quémet le Pdci sur les questions du foncier et de la nationalité, lesquelles réserves ont également été émises par votre parti, avez-vous limpression que le Pdci est en train de vous rejoindre sur certains points ?

Est-ce que je dois dire que le Pdci est en train Le Pdci devrait être de notre côté sur ces questions essentielles. Cest une question qui engage l’ensemble des Ivoiriens. Si jamais le Pdci se fait complice de la dépossession des terres aux Ivoiriens, l’Histoire lui demandera des comptes. Le Pdci doit savoir de quel côté il se trouve. Cest le Pdci qui est le parti historique en te d’Ivoire, c’est encore le Pdci qui a implanté le développement en te d’Ivoire. Le Pdci doit pouvoir fendre ce que Houphouët-Boigny a laissé comme héritage. Le Pdci ne peut assister à la destruction de l’ritage dHouphouët. Et l’ritage dHouphouët c’est la nationalité, c’est la question du foncier rural. Les Ivoiriens regardent les députés Pdci qui sont au Parlement. Ils se doivent de fendre la Nation ivoirienne.

84 prisonniers politiques seront jugés par une Cour dAssises, selon la décision de la justice. Alors que le régime continue de parler de réconciliation.

Est-ce que ceux qui veulent juger ces 84 prisonniers politiques ont une vision ? Là-dessus, je continue de m’interroger. Parce que c’est à la suite des élections que ces personnalités ont été arrêtées. On ne les a pas pris dans la rue. Donc, la question est politique, elle est même très politique. Ces prisonniers politiques ne peuvent pas se retrouver du jour au lendemain devant une cour dAssises. Cest pourquoi je me demande si ceux qui nous dirigent ont une vision de la justice. Ou veulent-ils simplement continuer de servir aux Ivoiriens une justice des vainqueurs ? Comment des gens qu’on a pris à la suite d’une élection, d’une crise postélectorale, laquelle élection est éminemment politique, et qu’on a accusé datteinte à la sûreté de l’Etat, on peut les accuser de crimes de sang, et se retrouver du jour au lendemain devant une cour dassises. Parce qu’il faut bien que le pouvoir protège les siens. Le pouvoir actuel veut protéger ses chefs de guerre. Cest pourquoi, on accuse sans fondement Affi Nguessan, Simone Gbagbo,  Abdoudramane Sangaré et les autres. Et pourtant tout le monde entier sait ceux qui ont fait la guerre, ceux qui ont tué, ceux qui ont nos biens. Il est temps qu’Alassane Ouattara regarde dans son camp s’il veut bien gouverner.
En principe pour aller à une réconciliation nationale, et je crois que dans la finition de la Cdvr, il ny a pas une partie justice dedans, les choses doivent être faite selon les règles de l’art. Mais, je crois qu’ils ont plutôt trompé les Ivoiriens, à travers cette Commission dialogue, rité et réconciliation (Cdvr). A travers cette commission, ils font des règlements de compte, ils font en sorte que les autres ne reviennent plus dans le jeu politique. Et cest cela l’agenda caché des dirigeants que denrayer toutes ces personnalités de la scène politique. Mais ce nest pas possible et ça ne sera jamais possible. On connait ceux qui ont tué et aussi ceux qui exploitent illicitement les richesses de la te d’Ivoire, avec les armes. Il est donc temps que Ouattara regarde dans son camp. Des gens qui ont été de grands serviteurs de l’Etat, des ministres, gouverneur, premiers ministres, des directeurs généraux, des officiers supérieurs cest eux qui sont de grands bandits et les grands bandits se promènent, ils sont nommés à des hauts postes de responsabilités dans la hiérarchie militaire. On veut abrutir l’administration ivoirienne. Ils sont venus pour abrutir l’administration ivoirienne et nous ne saurions cautionner cela. Nous voulons demander au président Ouattara de lirer les prisonniers politiques. Il ny a aucune preuve.

Justement, les avocats ont dénoncé le fait quil n’y avait rien dans les dossiers de ces prisonniers politiques

Il n’y a effectivement rien dans les dossiers. Alors pour quelles raisons on devrait les juger aux assises. Alors que le président Ouattara collabore avec des chefs de guerre, qui ont les mains souillées de sang d’innocentes victimes. Pourquoi des cadres de l’Etat devraient être des bandits, pendant que les bandits de grand chemin se promènent et sont à la tête de nos institutions. On ne gouverne pas comme cela un pays. Et je l’ai toujours dit que quand on n’aime pas un pays on ne cherche pas à le payer. J’interpelle encore les populations et les cadres du nord de la te d’Ivoire. Il est temps qu’ils donnent de la voix pour rétablir la te d’Ivoire dans ses droits et son intégrité. Parce que l’Histoire les interrogera un jour.

La semaine dernière, la procureure de la Cpi a séjourné à Abidjan, dans le cadre de ses enquêtes. Quelle analyse faites-vous de sa récente visite ?

Nous autres, nous sommes profanes dans les questions de justice. Mais on a comme l’impression que Fatou Bensouda a ci, dans son for intérieur, tout simplement de condamner Gbagbo. Il lui faut donc par tous les moyens condamner Gbagbo. Je ne sais pas ce qu’on lui a promis pour qu’elle se débatte maladroitement de la sorte. Elle représente aujourdhui une honte pour l’élite féminine africaine. Sinon quand il n’y a pas de preuves, celui qu’on tient a le néfice du doute et est relaxé. Cest ce qui se passe dans les plus petits commissariats et brigades de gendarmerie. Les dossiers de Laurent Gbagbo et des prisonniers politiques détenus ici sont vides, alors qu’ils  aient  le  courage  de  les  lirer. Si Bensouda veut vraiment rendre justice aux victimes, quelle vienne prendre Soro, Ouattara et leurs différents chefs de guerre. Parce que Gbagbo ne sest pas battu seul. On a imposé une guerre à Gbagbo et il na fait que fendre la Nation et les institutions républicaines. Gbagbo nest pas allé au nord pour faire une guerre. Bien au contraire les gens sont venus du nord pour faire la guerre à la te dIvoire, au nom de la nationalité ont-ils dit. Bensouda sait-elle que des ministres, officiers supérieurs, des cadres de l’administration ont été ts impunément. Alors, pourquoi cherche-t-elle à tout prix à condamner la victime. Parce que Laurent Gbagbo est bien la victime des bourreaux quelle protège aujourdhui et avec lesquels elle travaille aujourdhui. Laurent Gbagbo est la victime de la guerre imposée à la te dIvoire, Bensouda doit le savoir. Il faut quelle sache quen tant qu’intellectuelle africaine, elle devrait faire la fierté des femmes africaines et non senrôler dans une affaire honteuse de condamnation dun leader parce qu’il gêne un système, alors il  faut le maintenir  loin en tention. Pour que Ouattara puisse bien gouverner. Les femmes de te dIvoire interpellent Fatou Bensouda.

Laurent Akoun avait été arrêté puis jugé, Alphonse Douati est à la Maca, Koua Justin également, la liste est longue. On a limpression que le Fpi ne se contente que de produire des déclarations de dénonciation ou de protestation et cest tout. Pourquoi nenvisage-t-il pas dautres moyens pour vous faire entendre ?

Oui vous avez peut-être raison. Mais ce n’est pas vrai non plus. Le Fpi a été sorganisé par la guerre qu’on a imposée à la te d’Ivoire. Mais le Fpi s’est relevé de ces cendres-là,  quand  bien  même  les  autres sont en prison. Ceux qui ont été épargnés momentanément, je  dis  bien  momentanément parce que chacun des responsables du parti a son nom sur une liste noire du régime, ont pu relever le Fpi. Nous avons programmé des meetings à Port-Bouët, Koumassi,  Bonoua, Yopougon. Vous avez été témoins lors du giga meeting du 21 janvier 2012 à Yopougon, de la réponse brutale et violente du pouvoir, alors que ce dernier avait donné son accord pour la tenue de ce meeting. Vous savez, quand tu viens par la force, tu as peur de tout. Quand on est venu par la brutalité, la violence, on pense que ceux qui sont en face sont aussi comme ça. Or le Fpi n’est pas comme ça. Je souhaite que le pouvoir n’ait pas peur et qu’il ouvre l’espace politique pour que vous  puissiez voir le Fpi. Nous voulons un Etat de droit, le droit à la manifestation, le droit à la vie. Parce qu’il y a eu mort d’hommes et de nombreux dégâts au meeting du 21 janvier 2012. Cest pourquoi, l’on dirait que le Fpi ne connait pas les manifestations. Mais c’est bien ce parti qui a envoyé la contestation mocratique en te d’Ivoire. Cest Laurent Gbagbo qui est à l’origine du retour au multipartisme dans ce pays. Cest pourquoi ceux qui pensent que Laurent Gbagbo est brutal ou a tué quelqu’un savent que ce n’est pas vrai. Il y en a même parmi eux qui montaient dans sa chambre, pendant que nous les militants, cadres du parti, on attend dans le salon. Si Gbagbo devrait les tuer, il l’aurait fait depuis longtemps. Gbagbo a ouvert l’espace politique et ils sont où ils sont aujourdhui. Nous demandons donc qu’ils ouvrent l’espace politique, et ils verront bien la capacité de mobilisation du Fpi. Et c’est de cela qu’ils ont peur. Mais dites-vous que cette capacité de mobilisation et de redressement du FPI est intacte. 

Propos recueillis par Frank Toti – Le Nouveau Courrier 27-28 juillet 2013.
(*) – Secrétaire générale adjointe du FPI, secrétaire nationale de l’organisation des femmes du FPI (OFFPI). 

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