lundi 29 septembre 2014

Réponse du Dr Assoa Adou au journal ouattariste « Le Patriote » à propos d'un article intitulé : « Les exilés pro-Gbagbo au Ghana préparent un coup contre le régime Ouattara ».

La Coordination du FPI en exil au Ghana
signant le livre d'Or de condoléances
à l'occasion de la mort du Président John Atta Mills.
(Assis : Le Dr Assoa Adou)
Grande fut ma surprise lorsque votre publication du 23 septembre 2014 barrait à sa Une : « Depuis le Ghana et malgré les appels au retour, les exilés pro-Gbagbo préparent un coup ».
Le contenu de l’article faisait état d’un échange lors d’une rencontre entre le secrétaire général du NDC et certains exilés dont moi-même au Ghana lors des funérailles de la mère du Secrétaire Général du NDC dans son village natal.
D’abord, je tiens à souligner que la délégation que je conduisais à ces funérailles avait fait un voyage aller et retour le même jour. Nous sommes arrivés sur le lieu de la cérémonie le samedi 6 septembre 2014 à 10H. La mobilisation massive du peuple ghanéen lors des obsèques ne pouvait permettre d’avoir un aparté avec le secrétaire général du NDC.
C’est donc uniquement sur les lieux de la cérémonie que nous avons rencontré et salué le secrétaire général et sa famille. De surcroît nous avons quitté à 12 h avant la fin de la cérémonie pour retourner à Accra. Dans ces circonstances il est surprenant de me prêter ainsi qu’aux camarades qui étaient avec moi un quelconque entretien avec le secrétaire général du NDC. Votre journaliste et ses informateurs souffrent certainement d'hallucinations visuelles et auditives.
Le FPI reste fidèle à la forme de lutte politique prônée par le Président Laurent Gbagbo : La lutte pacifique pour faire de la Côte d’Ivoire un état démocratique et souverain.
Les militants du FPI n'ont toujours eu qu'un seul mot d’ordre : asseyons-nous et discutons.
Au demeurant, la publication de cet article à ce moment précis ne peut être neutre par rapport à la crise interne que le FPI a traversée et qu’il a su résoudre brillamment par les ressorts du débat démocratique interne.
Lorsqu’on se rappelle de toutes les tentatives d’exacerbation de cette crise par votre journal pour voir le FPI se briser en petits morceaux, nous pouvons aisément comprendre que votre journal cherche les voies et moyens pour prolonger médiatiquement la crise en semant le trouble et le doute sur la fidélité de certains camarades du FPI à leur attachement à la ligne de lutte pacifique.
Votre désir de fabriquer artificiellement une fissure entre les militants du FPI en prévision du congrès programmé pour le mois de décembre de cette année, connaîtra le même sort que la tentative désespérée de vouloir briser le FPI lors de la crise précédente.
Habitué au débat démocratique, vous constaterez vous-même la vigueur avec laquelle le FPI sortira vainqueur de toutes les tentatives de déstabilisation.
Je souhaite longue vie à votre journal pour le bonheur de la démocratie dont les pionniers constituent aujourd’hui les cibles de la violence du pouvoir d’Etat dont vous êtes le porte-voix.

Dr Assoa Adou, Président de la Coordination du FPI en exil.

Source : IVOIREBUSINESS 29 Septembre 2014.

jeudi 25 septembre 2014

"La décision du président Bédié, baptisée ‘’l’Appel de Daoukro’’, n’engage que lui seul."

Ainsi donc, ni les conseils des uns, ni les avertissements des autres, et même les menaces des ‘’irréductibles’’ (le mot est du Président Bédié) n’ont suffi à faire fléchir les présidents Henri Konan Bédié et Alassane Ouattara dans leur projet de ‘’candidature unique’’ à la Présidentielle de 2015. Et sous les couleurs du RHDP (Rassemblement des Houphouettistes pour la Démocratie et pour la Paix), avec comme le ‘’bon cheval’’, Alassane Ouattara, le président de la République sortant.

Certes, les deux grosses têtes du mouvement houphouettiste sont libres de prendre une telle décision, mais, comme dit un ami philosophe, ‘’leur liberté nous donne la liberté de contester leur liberté’’ ! Au nom de la démocratie que nous avons appelée de tous nos vœux et que, l’ayant obtenue, nous devons œuvrer à consolider. Opter pour une ‘’candidature unique’’ au RHDP dans le contexte actuel, c’est tuer ‘’et l’enjeu et le jeu’’ du scrutin. Et donc, in fine, tuer dans l’œuf la ‘’démocratie naissante’’ dans notre pays.

Mais tout d’abord une précision : contrairement à ce qu’on croit ou à ce qu’on affirme, la déclaration de ‘’l’ancien Président’’ ne constitue pas un ‘’soutien du PDCI-RDA’’ à la candidature unique, car signée en son nom propre : ’’Henri Konan BEDIE, Ancien Président de la République, Fils de la Région de l’IFFOU’’. Plus ambigu encore est le point (de la déclaration) qui recommande à tous les militants qui veulent se présenter de le faire en toute liberté : ’’Tu seras ainsi le candidat unique des partis politiques pour l’élection présidentielle de 2015 sans préjudice pour les irréductibles qui voudront se présenter en leur nom propre’’, a-t-il clairement précisé. Preuve qu’il n’a pas engagé le PDCI-RDA.

Engagement personnel
Ainsi donc, en un mot comme en cent, la décision du président Bédié, baptisée ‘’l’Appel de Daoukro’’, n’engage que lui seul. Et il en est bien conscient, qui insiste : ’’(…) Toutes ces réalisations sont faites pour le développement durable du pays et donc pour la stabilité et la paix. C’est bien ce qui me motive à te soutenir personnellement (…), toi qui les conduis’’. L’Appel de Daoukro n’est donc pas une ‘’décision solitaire’’ imposée aux autres : les militants du PDCI-RDA, encore moins les autres membres du RHDP. Même s’il a promis de ‘’donner des instructions fermes aux instances du parti de soutenir le projet’’. Ce qui est sûr, c’est que la réaction d’un Anaky protestant contre l’Appel de Daoukro sous prétexte que cela aurait dû se faire ‘’collectivement’’, manque de pertinence, surtout venant de lui qui avait dit sur la question :’’Nous attendons tous un mot de Bédié’’ (c’était à l’issue du ‘’26ème Congrès du MFA’’, en Juillet dernier).

Si donc le soutien de ’’l’Ancien Président de la République, Fils de la Région de l’IFFOU’’ à ’’l’Actuel Président de la République, natif de Dimbokro’’, ‘’n’engage que lui seul’’, peut-on (ou doit-on) lui en vouloir ? N’a-t-il pas ‘’le droit de soutenir son jeune frère’’ à cette Présidentielle où il n’est pas lui-même candidat ? ‘’Il a le droit, mais non en bradant le PDCI-RDA, un ‘’parti historique’’, qui est ’’le bien le plus précieux légué par le père fondateur’’, dit un irréductible qui ajoute : ‘’S’il est fatigué (et il est fatigué !), qu’il passe tout simplement la main à la jeune génération d’houphouettistes qui sont prêts à se battre corps et âme pour défendre l’houphouettisme dont le PDCI-RDA est l’un des éléments essentiels’’.

Enfin, fulminant contre le projet de création d’un ‘’parti unifié’’ (baptisé déjà ‘’PDCI-RDR’’ par le Sphinx et approuvé par le Bravetchè !), cet irréductible déclare, révolté : ‘’Le RDR est sorti du PDCI, maintenant s’ils veulent la fusion, ben, comme l’enfant prodigue, qu’ils regagnent la maison tout simplement ! Nous les accueillerons avec joie’’. En somme, pour beaucoup, ‘’si le chef a parlé, on ne pourra plus rien faire’’. D’ailleurs le PDCI-RDA, par le truchement de son Secrétariat exécutif, a déjà apporté son soutien à l’Appel de Daoukro (Cf. ‘’Session extraordinaire’’ du 18 Septembre). Même si, selon son porte-parole (le ministre Kobenan Kouassi Adjoumani), le Secrétariat continuait de ‘’travailler pour examiner comment mettre à l’exécution cet Appel de Daoukro’’. Preuve que, encore une fois, la ‘’proposition’’ de ‘’l’ancien président de la République’’ n’engage pas (encore !) le PDCI-RDA qui aura tout le loisir de la refuser ou de l’accepter !

Un langage alambique
Toujours est-il que les irréductibles restent méfiants. Ainsi, la possibilité à eux laissée de se présenter en 2015 sonne dans leurs oreilles comme le ‘’piège de Moïse’’ aux enfants d’Israël : après avoir demandé à ceux-ci de choisir entre l’Eternel et le ‘’veau d’or’’, il massacra ceux qui avaient choisi le veau d’or. La Bible parle de ‘’trois mille tués’’ ! (Exode 32 : 27-29). La leçon : il n’est pas incertain que celui qui choisit de ‘’se présenter en son nom propre à la Présidentielle de 2015 ne creuse lui-même sa ‘’tombe politique’’ ! On comprend donc la colère de ceux qui ont compris le langage alambiqué du ‘’fils de l’Iffou’’.

Ainsi donc, la ‘’guerre’’ est déclarée, et par le Président Bédié lui-même qui, en appelant à ‘’un mouvement pour faire aboutir ce projet’’ (de candidature unique), a sonné le tocsin pour les hostilités. Un de ses arguments :’’Il n’y a personne pour battre Ouattara en 2015 !’’. Riposte des irréductibles : eux aussi se préparent à ‘’se mettre en mouvement pour faire échec à ce projet pas du tout démocratique’’. Pour eux, si le PDCI-RDA ne présente pas de candidat en 2015, cela consacrera, non seulement la ‘’seconde mort du sage de Yamoussoukro’’, mais la mort de la démocratie en Côte d’Ivoire. Et donc le retour au parti unique !

Le combat des irréductibles se pose donc en terme de ‘’combat pour la préservation de la démocratie’’ qui passe (cette préservation de la démocratie) nécessairement par la présence au premier tour de la Présidentielle de 2015 des trois (3) grands partis politiques actuels en Côte d’Ivoire : PDCI-RDA, RDR et FPI. Toute décision ou tout acte qui tend à dévoyer ce processus démocratique est à combattre. La ‘’candidature unique au premier tour’’ de la Présidentielle de 2015 est bien l’une de ces décisions à combattre !

Retour au parti unique !
Concernant le ‘’grand parti unifié’’ projeté, les irréductibles n’en voient ni l’intérêt ni l’urgence, sinon que c’est pour ‘’nous ramener au parti unique !’’ Pour eux, ce qu’il convient de faire aujourd’hui, c’est, d’une part, au niveau du PDCI, de ‘’respecter les résolutions du 12ème Congrès’’ (tenu les 3, 4, 5 et 6 Octobre 2013) qui prévoit la candidature du parti à la Présidentielle de 2015, et, d’autre part, au niveau du RHDP, de s’en tenir, pour l’heure, aux textes fondateurs de l’Alliance (signés le 8 Mai 2005 à Paris) qui font obligation à tous les partis membres de ‘’soutenir le ‘’candidat houphouettiste’’ bien placé au ‘’second tour’’. Alors, ‘’où est le problème urgent qui oblige à présenter hic et nunc un ‘’candidat unique’’ à la Présidentielle de 2015 ?’’, s’interrogent-ils perplexes.

Il y a bien des ‘’cadres actifs’’ du parti qui sont prêts à en découdre avec le président sortant, et gagner afin de sauvegarder et ‘’l’héritage’’ du Nanan national, et la démocratie appelée à prospérer en Côte d’Ivoire. Et puis, est-ce un drame si, par malheur, le ‘’candidat irréductible’’ est ‘’démocratiquement battu’’ ? Bédié battu en 2010, n’est-il pas auréolé aujourd’hui ? Dans tous les cas, cela participe de la dynamique de la démocratie dont les ‘’enfants d’Houphouët-Boigny’’ devraient être fiers !

Au total, par sa déclaration, N’Zuéba (Petite Rivière) a envoyé aux fleuves et à la mer des eaux boueuses qui risquent de lui revenir horriblement salées. Sérieusement, disons que si la guerre est effectivement déclarée entre partisans et adversaires de la candidature unique, cela ne doit effrayer outre mesure. A condition, bien sûr, qu’elle soit non pas ‘’fratricide’’, mais plutôt ‘’fraternelle’’, avec comme armes de combat, non des ‘’Kalachnikov’’, mais ‘’des idées et des mots’’, le tout couronné par le ‘’bon ton’’, pour le bonheur de la Côte d’Ivoire démocratique. Amen.

K. K. Man Jusu, journaliste consultant
Titre original : "Appel de Daoukro : Un malentendu ?"

en maraude dans le Web
Sous cette rubrique, nous vous proposons des documents de provenance diverses et qui ne seront pas nécessairement à l’unisson avec notre ligne éditoriale, pourvu qu’ils soient en rapport avec l’actualité ou l’histoire de la Côte d’Ivoire et des Ivoiriens, et aussi que par leur contenu informatif ils soient de nature à faciliter la compréhension des causes, des mécanismes et des enjeux de la « crise ivoirienne ».

Source : L'Intelligent d'Abidjan 24 Septembre 2014

lundi 22 septembre 2014

Allocution de Bernard Dadié, président du CNRD, à l’occasion de la cérémonie d’installation de la vice-présidente Amon-Ago Marthe

B. Dadié et M. Amon-Ago (Archive)
(...)
Je souhaite, avant tout propos, dire au nom du CNRD et de la délégation qui m’accompagne, ma joie et ma fierté de vous retrouver en ces lieux chargés de symboles et de souvenirs. L’espace qui nous accueille est l’ancien QG de campagne du candidat Laurent Gbagbo, le choix de l’ex-Majorité 
Présidentielle, investi ici même en septembre 2010. L’autre grand symbole de notre idéal commun est bâti sur le socle de la démocratie, de la solidarité, de la justice, de la liberté et du refus de la domination intérieure et extérieure. Je veux évoquer le souvenir de nombre de nos camarades sauvagement assassinés, tels que Boga Doudou, Désiré Tagro, Mahan Gahé ; je pense aux autres camarades en captivité tels que Laurent Gbagbo, Simone Ehivet Gbagbo, Blé Goudé ; je pense à d’autres, encore en exil, comme Dr Assoa Adou, Koné Katinan, Sansan Kouao, Koudou Késsié, Hubert Oulaye, Don Mello, Bertin Cadet, William Attéby, etc. ; ainsi qu’à des milliers d’illustres inconnus vivant dans des camps de réfugiés, avec parfois des enfants et des nouveau-nés.
Comme vous le savez, le sort de ces différentes catégories de patriotes dépend, depuis le 11 Avril 2011, du bon vouloir du régime RHDP et de ses soutiens.
Je salue hautement la Direction du FPI avec à sa tête le camarade président Pascal Affi Nguessan, qui m’a fait l’honneur de m’associer à la présente cérémonie d’installation de la vice-présidente Marthe Amon-Ago chargée de la Coordination de la lutte pour la libération du Président Gbagbo. Je salue cette initiative d’importance historique. Je la salue avec d’autant plus d’enthousiasme que l’honorable Amon-Ago Marthe se trouve être, en sa qualité de Secrétaire Générale du CNRD, ma collaboratrice, pour ne pas dire la cheville ouvrière dudit Congrès. Je m’en honore et lui adresse, par la même occasion, les très chaleureuses félicitations de toute la famille CNRD.
Je salue, au-delà des personnalités ici présentes, l’ensemble des Invités : militants ou sympathisants du FPI, militants ou sympathisants des partis membres du CNRD ; acteurs politiques ou responsables syndicaux venus si nombreux, vivre en personne un événement exceptionnel qui survient à un moment non moins crucial de la vie nationale. De ce point de vue, cette cérémonie sera pour moi, l’occasion de réitérer mon appel à vous lancé le 11 Avril 2013, lors des manifestations marquant le 2ème anniversaire du renversement du Président Gbagbo. En effet, fondé en 2006, en réaction contre la création à Paris du RHDP, cet instrument politique dirigé contre l’unité et la paix en Côte d’Ivoire, le CNRD a pour mission la défense de la démocratie. Il est le ralliement de toutes les forces ivoiriennes indignées par la naissance du RHDP, et dressées contre l’arbitraire et la volonté de puissance. Le CNRD est pour la Côte d’Ivoire ce que fut le Conseil de la Résistance en France lors de l’occupation nazie. A la différence que les Résistants français étaient armés et que les membres du CNRD ont résisté, et continuent de résister, les mains nues. Tout simplement parce qu’ils ont foi en la supériorité de l’esprit sur la force physique et la brutalité.
Mesdames et Messieurs, l’évolution chaotique de ce qu’il est convenu d’appeler "l’affaire Gbagbo" initiée par la CPI, le 29 Novembre 2011, confirme l’hypothèse d’un vaste complot international ourdi contre la Côte d’Ivoire de Laurent Gbagbo. Ce complot tient à une double raison. D’une part, Laurent Gbagbo a fondé un parti politique adossé à un projet de société dont la pertinence historique fait rougir de jalousie les héritiers de Karl Marx et de Jean Jaurès ; d’autre part, Laurent Gbagbo est un chef charismatique peu accommodant dont les maîtres du monde constatent qu’il est en train d’écarquiller les yeux et d’éveiller les consciences de centaines de millions d’opprimés et d’humiliés à travers l’Afrique et le monde. Un tel acteur politique, parce que peu conformiste, est assimilé à un dirigeant djihadiste qui mérite, soit d’être éliminé physiquement comme ce fut le cas de Salvador Allende du Chili, le 11 septembre 1973 ; soit d’être déporté loin de sa terre natale. Et c’est cette dernière formule qui l’a emporté. Ainsi s’explique le harcèlement judiciaire dont il est victime depuis quatre (04) ans. Vous vous souvenez, Laurent Gbagbo avait exigé qu’« on aille jusqu’au bout ». Aller jusqu’au bout comme l’exigeait le capitaine Alfred Dreyfus injustement inculpé de haute trahison parce qu’il est de confession juive. Personne n’est donc dupe : ce qui se passe à La Haye n’est qu’une mascarade judiciaire à l’image de "l’affaire Dreyfus". Face à l’acharnement, aux incohérences et à la faiblesse d’une Accusation aux abois et faisant feu de tout bois, le CNRD avait engagé le FPI ainsi que les Patriotes d’ici et d’ailleurs, à plus de détermination et de sérénité à la fois. Le 11 Avril 2013, nous demandions en effet au FPI et à ses alliés, d’engager sans délai, une vaste campagne de mobilisation et de réarmement moral, pour la bonne raison que le camp Gbagbo dispose, malgré la barbarie qui s’abat sur lui, d’un capital symbolique plus consistant, par comparaison avec le capital squelettique de ceux qui ont exigé et obtenu la recolonisation de la Côte d’Ivoire. Toujours ce 11 Avril 2013, le CNRD avait fait remarquer que, quelle que soit la décision des juges, la captivité de Laurent Gbagbo ne saurait être la fin de Laurent Gbagbo. C’est qu’il y a un lien très fort entre le FPI et Laurent Gbagbo d’une part, entre celui-ci et les pro-Gbagbo à travers la Côte d’Ivoire, l’Afrique et le reste du monde, d’autre part. Normal si l’on sait que les héros durent et que les leaders charismatiques généreux et courageux d’Europe, d’Amérique et d’Asie ayant marqué leur époque, se survivent toujours dans les générations ultérieures. Que l’ONU, la CPI et l’Occident se détrompent donc : Laurent Gbagbo-corps physique est certes en otage, là-bas, au cœur de l’Europe, parce qu’il s’est montré peu docile ; mais Laurent Gbagbo-esprit et incarnation de la dignité africaine, plane et planera toujours sur l’Afrique. Plus sa captivité durera, plus les masses populaires s’approprieront son idéal politique ; et c’est ce que signifie, aux yeux du CNRD, la nomination d’une vice-présidente du FPI, chargée de la Coordination de la lutte pour la libération de Laurent Gbagbo : au lieu d’être un dissolvant pour les pro-Gbagbo, l’acharnement judiciaire contre Laurent Gbagbo et les pro-Gbagbo constitue un tonifiant politique de première importance.
Camarades militants et militantes, les manœuvres dilatoires en perspective n’ont qu’un objectif : maintenir Laurent Gbagbo hors du pays le plus longtemps possible, pour permettre à la forfaiture de prospérer. C’est ce qui explique le passage en force de l’Etat-RHDP qui a reconduit Youssouf Bakayoko à la tête d’une CEI vomie par certains membres du Conseil de Sécurité. C’est à partir de là que l’on comprend la récente déclaration de Henri Konan Bédié, président du PDCI-RDA faisant d’Alassane Ouattara le candidat unique du RHDP pour la Présidentielle de 2015. Par là, le président Bédié veut-il insinuer qu’« on ne change pas une équipe qui gagne » ?
Mais on peut se demander ce que l’Etat-RHDP a gagné pour une Côte d’Ivoire émergente en dehors du chaos qu’il a instauré : le départ en exil de plus de 100 000 Ivoiriens, les milliers de morts, les centaines de comptes gelés, le millier de prisonniers politiques, la recrudescence de l’insécurité associée au phénomène des "dozo", des "gnambro" et des "microbes", aux exactions des FRCI, au surendettement de la Côte d’Ivoire, au règne de la justice des prétendus vainqueurs, perceptible à Abidjan comme à La Haye, bref, à la morosité, au désespoir se traduisant par le phénomène de l’immolation par le feu. Nous sommes en présence d’un "Etat suicideur " sur le point de devenir un Etat PDCI-RDR. Au lieu de créer la richesse et le bien-être pour tous, promis, Alassane Ouattara s’est lancé, dès son arrivée au pouvoir, dans une politique moyenâgeuse de "rattrapage" au profit du Nord et des Nordistes, avec la complicité active du clan Bédié, tournant ainsi le dos à la République. Nous sommes à un tournant crucial et le CNRD doit se poser la question suivante : que faire ?
Les défis qui se dressent devant nous sont certes immenses, mais non insurmontables. En effet, dans leur volonté hégémonique, Konan Bédié et Alassane Ouattara sont en train de s’isoler : le premier, de sa base authentiquement houphouëtiste et le second, de ses soutiens extérieurs d’ailleurs de plus en plus éclaboussés par les dérapages et l’arrogance d’un chef peu soucieux des intérêts du peuple. Cela s’appelle vouloir s’attirer la désapprobation de l’opinion publique : sran-nouan des Agni-Baoulé, glonouan des Bété, zimouh des Gouro, gnounan des Wê. C’est en fait le cancer politique qui ronge ou détruit radicalement les partisans de l’arrogance, de l’absurdité et de l’arbitraire. Les patriotes pro-Gbagbo n’ont pas la naïveté de croire que les forces coalisées qui ont bombardé la résidence du président Gbagbo, le 11 Avril 2011, vont se retourner subitement contre leur choix. Souvenez-vous, la grande France de la Liberté, de la Fraternité et de l’Egalité, la France des Droits de l’Homme, n’a pas hésité à détruire la résidence du président de la République. Voyez-vous, alors qu’ils ont le même ennemi que la Syrie de Bachar-Al-Asad, les vainqueurs d’Hitler n’entendent nullement faire de la Syrie leur allié dans la guerre qu’ils mènent contre l’Etat Islamique !
Cependant, il y a lieu de croire que, petit à petit, la dialectique aidant, la lutte pour la libération de Laurent Gbagbo va s’amplifier et porter ses fruits. Elle va porter ses fruits parce que le CNRD, le FPI, les pro-Gbagbo et bien des militants du PDCI et du RDR, se rendent compte que la Côte d’Ivoire, leur pays, est devenue une marchandise que l’on vend aux enchères. Cette triste réalité doit amener le FPI à assumer son rôle de première formation politique et de moyen de rédemption nationale : l’adage enseigne que « lorsque la calvitie ne trouve pas de personnes âgées dans la citée, elle se pose sur la tête des jeunes ». En d’autres termes, « aux âmes bien nées, la valeur n’attend point le nombre des années ».
Chers camarades militants du FPI, j’avais salué en son temps, votre maturité politique. Là-dessus, j’insiste encore aujourd’hui pour vous demander de vous mettre à l’abri des rumeurs assassines, en toute responsabilité.
L’Etat PDCI-RDR dont rêvent désormais Konan Bédié et Alassane Ouattara ayant une vocation ouvertement exclusionniste, il importe que le FPI et l’opposition digne restent davantage à l’écoute du peuple ivoirien dans sa diversité politique et socioculturelle. L’heure de la mobilisation de type républicain a sonné en même temps que le glas pour les dérives autoritaires. En disant cela, les Patriotes devront employer un langage quasi "terre à terre" pour mieux se faire comprendre à travers le pays. Ils devront mettre à profit de nouvelles tribunes médiatiques telles que Afrique Média et bien d’autres espaces de liberté.
Mesdames et Messieurs, je souhaite clore mon propos en réitérant mes très vifs remerciements à l’endroit des initiateurs de cette cérémonie historique ; en saluant la mémoire de tous nos morts ; en renouvelant mes félicitations à Mme Marthe Amon-Ago, et en marquant la solidarité du CNRD avec Laurent Gbagbo, Simone Gbagbo, Charles Blé Goudé, Dogbo Blé, Noël Abéhi, ainsi qu’avec nos camarades exilés ; en remerciant vivement le Conseil du Président Gbagbo, avec à sa tête Me Altit ; en rendant un vibrant hommage à la Galaxie patriotique d’Europe et d’Amérique, aux Intellectuels d’ici et d’ailleurs, épris de justice et de liberté.
Oui, la Côte d’Ivoire brûle ! Et face à un tel péril, les Ivoiriens de tous bords doivent se rassembler autour des valeurs d’unité nationale, de justice et de souveraineté, valeurs au nom desquelles l’histoire engage, ici et maintenant, le CNRD, le FPI et leurs alliés, à mener le juste combat pour la libération de Laurent Gbagbo et la réconciliation nationale.
Je vous remercie.
 
Bernard Dadié (20 septembre 2014)

Source : CIVOX. NET 22 Septembre 2014

samedi 20 septembre 2014

BÉDIÉ N'EST PAS TOUT LE PDCI NI TOUTE LA CÔTE D'IVOIRE...


Leader de la Coalition des militants du PDCI pour la sauvegarde des résolutions du 12ème congrès n’est pas du tout content de la déclaration unilatérale de soutien à la candidature d’Alassane Ouattara prononcée par Bédié le mercredi dernier à Daoukro. Il le fait savoir dans cet entretien accordé au Nouveau Courrier.
Hier près que le président Bédié a lancé un appel à soutenir la candidature unique de monsieur Alassane Ouattara aux prochaines présidentielles. Vous avez lancé un appel à la mobilisation de tous les militants du PDCI, cadres, jeunes militants de base à faire barrage à cette forfaiture. Qu’est-ce que cela signifie concrètement et qu’est-ce vous allez faire ?
Monsieur Henri Konan Bédié a fait une sortie de route. Monsieur Henri Konan Bédié, lui seul ne représente pas le PDCI, ne représente pas les milliers militants du PDCI. Un parti politique fonctionne avec des règles. Le PDCI-RDA s’est doté de statuts et un règlement intérieur. Monsieur Henri Konan Bédié s’est adressé aux militants du PDCI et non à une tribune du PDCI-RDA. Mais à la visite d’un chef d’Etat dans une région. Les militants sont frustrés, les militants sont vexés, les militants sont mécontents donc pour ce fait il faudrait qu’il sache que beaucoup d’entre nous ne partagent pas cet avis et que le PDCI de feu le président Félix Houphouët-Boigny était ce PDCI là qui continuait d’exister.
Mais et si le président Bédié persiste ?
Pour nous c’est une forfaiture, et quelque chose qui n’est pas normal c’est une forfaiture. S’il persiste dans la même voie nous l’appelons à revenir sur la décision qu’il a prise à Daoukro. Il faudrait qu’il revienne sur sa décision parce que les militants sont désemparés, les militants sont éparpillés. Ils ne savent plus à quel saint se vouer.
Vous pensez que cette sortie va créer une crise au PDCI ?
Le PDCI ne disparaitra pas. L’implosion qui se prépare sera colmatée par nous. Nous n’allons pas laisser le PDCI imploser après les déclarations faites par Monsieur Henri Konan Bédié depuis Daoukro. Si nous ne faisons rien c’est là que le PDCI va s’imploser. Et mon mécontentement est tel que c’est comme toute la Côte d’Ivoire était en deuil, c’est comme si le président Houphouët-Boigny mourait pour une deuxième fois. Voici l’acte posé par Henri Konan Bédié qui tue une deuxième fois le président Félix Houphouët Boigny. Un, il se permet de dissoudre le PDCI-RDA sans aucun congrès, aucun parti politique ne peut être dissous. Faut-il le rappeler à Monsieur Konan Bédié ? Seul le congrès peut prononcer la dissolution du PDCI-RDA pour refondre le PDCI-RDA en PDCI-RDR. Il ne peut pas prendre sur lui la responsabilité de le faire.
C’est votre avis d’aller au parti unifié ?
Nous ne voulons pas aller à un parti unifié de cette façon. Il ne revient pas à Williams Koffi d’aller à un parti unifié. Un parti unifié est du ressort d’un congrès ; même Henri Konan Bédié ne peut pas, moi je ne peux pas, c’est le congrès qui est souverain. Le congrès seul peut se prononcer sur un parti unifié mais pour moi à mon avis le parti unifié pour le moment n’a pas de sens, il n’a pas sa raison d’être. Le PDCI en temps que parti politique à la veille d’une échéance aussi importante que celle des élections présidentielles de 2015 où ce pays a connu la quiétude, la paix nous sommes un recours. Les Ivoiriens attendent beaucoup du PDCI donc il faut que le PDCI revienne au pouvoir. Henri Konan a signé sa déclaration de Daoukro en tant que Monsieur Henri Konan Bédié, ancien président de la République et fils de la région de l’Iffou, il n’a pas signé sa déclaration en tant que président du PDCI-RDA donc sa déclaration l’engage à titre personnel. Sa déclaration est un acte isolé d’un fils de la région de l’Iffou. Les gens ont vite fait de confondre l’individu qui est le président Henri Konan Bédié du PDCI-RDA et qui est un fils de la région de l’Iffou. Je vous montre les documents que nous avons remis à la presse, il n’a pas signé en tant que président du PDCI-RDA.
Déjà sa déclaration fait l’effet d’une bombe. Certains partisans de la diaspora ont déjà demandé sa destitution. Ils demandent un congrès extraordinaire. Quelle est donc votre analyse ?
C’est un fait. Il y a eu une analyse logique, il a prononcé un discours politique à une visite d’un chef d’Etat dans une région. Ce n’était pas un endroit indiqué pour que lui, en sa qualité de président du PDCI-RDA, le fasse, donc si les gens pensent qu’il a dérapé et qu’ils veulent sa tête, c’est un fait. Le congrès analysera s’il doit avoir un congrès extraordinaire ou pas. Le congrès analysera aussi les dispositions pratiques. Williams Koffi ne peut pas se prononcer, la diaspora même l'a dit, c'est-à-dire que c’est le congrès seul qui peut se prononcer là-dessus.
Depuis un moment on voit que c’est KKB, c’est vous qui êtes sur le terrain pour contester la position de Bédié et tout ce qui ne rentre pas dans les résolutions du 12ème congrès. Est-ce que vous êtes soutenus par ceux qu’on appelle au PDCI des barons ?
Je vous ramène la question. C’est vous les journalistes qui nous avez suivi dans les différents entretiens. Et que disent les barons ? Ils se réfèrent tous au congrès, ils nous laissent même parler. Ils font des déclarations pour dire que le PDCI-RDA se réfère au congrès, que le PDCI-RDA est obligé d’avoir son candidat. Depuis la déclaration de Konan Bédié, bon nombre de ceux que vous appelez «barons», même les militants nous appellent parce qu’un baron, sa voix est égale à un militant simple, donc actuellement il faut compter avec la mobilisation qui est grande. Ce n’est pas seulement les militants du PDCI mais c’est aussi la Cote d’Ivoire qui est meurtrie. Félix Houphouët-Boigny vient de mourir pour la deuxième fois. Il y a eu un deuil national le mercredi 17 septembre 2014.

Par Anderson Diédri
Titre original : « Soutien à la candidature unique de Ouattara - Williams Koffi : "Bédié tue une deuxième fois Houphouët-Boigny". »

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Sous cette rubrique, nous vous proposons des documents de provenance diverses et qui ne seront pas nécessairement à l’unisson avec notre ligne éditoriale, pourvu qu’ils soient en rapport avec l’actualité ou l’histoire de la Côte d’Ivoire et des Ivoiriens, et aussi que par leur contenu informatif ils soient de nature à faciliter la compréhension des causes, des mécanismes et des enjeux de la « crise ivoirienne ».

Source : Le Nouveau Courrier 19 Septembre 2014

jeudi 18 septembre 2014

PIÉGÉS PAR LA FRANCE...


Koulibaly n’a pas vu le piège dans lequel il tombait
«Après le 11 avril 2011, les Blancs sont allés voir Koulibaly au Ghana. Ils lui ont présenté un faux bulletin de santé de Ouattara, en lui disant de rentrer très vite en Côte d’Ivoire parce qu’il était une alternative crédible en Côte d’Ivoire. Ils lui ont dit que Ouattara n’allait pas vivre pendant 6 mois. Koulibaly n’a pas vu le piège dans lequel il tombait. Il s’est précipité pour revenir avec tout ce qu’on sait… Ouattara est toujours là. Tout le monde sait ce que Koulibaly est devenu. Il est l’ombre de lui-même. La France a atteint son objectif. Parce qu’elle voulait griller Koulibaly», explique un jeune cadre du FPI dépité par cette autodestruction dans laquelle le président du FPI s’enferme au fil des jours.
A la tête du FPI, Affi N'Guessan n'est plus quel’ombre de lui-même, en rupture totale avec la base de son parti. Emporté par la présidentielle de 2015, où il se voyait déjà au palais avec le soutien de ses nouveaux amis français, l’homme a pensé qu’il pouvait courir plus vite que son ombre qui n’est d’ailleurs même pas de lui, mais qui s’appelait Gbagbo Laurent. En fait, après sa sortie de prison en 2013, le président du FPI n’a pas su négocier le virage qui s’offrait à lui. Et il est tombé dans le même piège qui a été tendu à Koulibaly après le 11 avril 2011. La France sait, en effet, qu’en Côte d’Ivoire, malgré tout ce qui se dit dans ses médias aux ordres, le FPI reste le parti majoritaire.
Mais bien plus que ça, les Ivoiriens restent fondamentalement attachés au Président Gbagbo, malgré sa déportation à la CPI. L’Elysée, l’ONU, la CPI, l’UE et même les USA disposent de sondages bien chiffrés qui le prouvent clairement. Et cette même France sait que malgré la traque des dirigeants de ce parti par des mains interposées en Côte d’Ivoire, le FPI et le Président Gbagbo sont toujours solidement dans l’esprit du peuple ivoirien. Dans ce cas, que faire ? Voici la question que s’est alors posé l’Hexagone après le 11 avril 2011.
Gbagbo déporté à la CPI, il faut alors liquider politiquement tous ceux qui en Côte d’Ivoire, pourraient sérieusement gêner Ouattara à la tête de ce pays. En 2011, Affi étant à son tour en prison à Bouna, celui qui sur le terrain, peut donner des insomnies au poulain à cette époque s’appelle Koulibaly. Il fallait donc le liquider politiquement. Et la meilleure manière était de le faire sortir de la machine que constitue le FPI, tout en le conduisant contre son gré, à renier Gbagbo, le nom qui fait pourtant roi en Côte d’Ivoire et en Afrique. «Vous êtes une alternative crédible en Côte d’Ivoire. Gbagbo, c’est du passé», c’est en résumé, le discours que certains diplomates français qui ont Gbagbo en horreur, servent abondamment à des opposants ivoiriens. Bien évidemment, beaucoup y ont laissé des plumes, comme d’ailleurs Koulibaly qui bien avant son hara-kiri en 2011, était l’une des personnalités les plus adulées en Côte d’Ivoire.
Après lui, il restait encore Affi N’Guessan. A sa sortie de prison en 2013, il parcourt le pays. A tous ses meetings, il soulève des foules. Ce qui n’est pas fait pour plaire à Ouattara et à ses parrains parisiens que la popularité de Gbagbo gêne énormément dans leur envie de mettre la main sur la Côte d’Ivoire. Surtout qu’après le coup de 2011, Choi avait très vite fait d’enterrer le FPI en Côte d’Ivoire. «C’est fini pour Gbagbo et le FPI en Côte d’Ivoire», avait alors lancé, le contre maître de Paris dans la crise ivoirienne. Dans le même temps, sur le terrain, la popularité d’Affi N’Guessan inquiète Ouattara et ses parrains français. En ce moment, le président du FPI est en phase avec les Ivoiriens. Sur le terrain politique, il est le plus présidentiable.
Même le Pdci, qui n’a jamais aimé Ouattara en réalité, ne jure que par Affi en privé. Le discours du président du FPI rassure les Ivoiriens et gêne le pouvoir. Amadou soumahoro, qui aime [mieux] voir ses opposants au cimetière, se laisse emporter par ses émotions. Il menace ouvertement Affi qui était encore en ce moment l’espoir de toute la Côte d’Ivoire. «Affi doit savoir qu’il est en liberté provisoire», lâche le secrétaire par intérim du RDR. Totalement sonné, en désespoir de cause, Joël N’Guessan vole au secours de Ouattara qui ne sait que faire devant l’équation Affi. Mais comme au RDR, il n’y a que la force qui paye, il menace à son tour, en répétant les mêmes litanies. «Affi doit savoir qu’il est en liberté provisoire», ressasse le porte-parole d’Amadou Soumahoro.
Affi devient alors l’homme à abattre. Le Patriote, le haut-parleur du régime expose tout le désarroi et la grande peur qui gagnent la cour de Ouattara après la libération de Affi N’Guessan et Sangaré Aboudramane. «Le monstre est de retour», titre de ce fait, le journal en parlant du grand retour du FPI. Dans le même temps, le régime qui manque de finesse dans toutes ses actions, opte pour la manière forte. A plusieurs reprises, le pouvoir menace de mettre le président du FPI aux arrêts. Mais il est chaque fois dissuadé par l’ambassadeur de France qui, en réalité, a pour mission de veiller sur ce pouvoir. Les grandes oreilles parisiennes qui pullulent à Abidjan depuis le 11 avril 2011, proposent autre chose. «Il vaut mieux liquider Affi avec son propre couteau», résume-t-on dans les chancelleries françaises en Côte d’Ivoire. Le président du FPI devient subitement fréquentable. Il est choyé par les ambassadeurs de l’UE qui le reçoivent régulièrement ou qu’il reçoit à son tour en audience. Mais Affi ne voit pas le piège venir. «Il n’a pas su que c’est parce qu’il porte un habit à l’effigie de Gbagbo qu’on le reçoit partout », lâche un cadre du FPI.
Evidemment, c’est le même scenario qui est déroulé. «Gbagbo, c’est fini. Vous aussi, vous êtes une alternative crédible». Comme Koulibaly, le président du FPI succombe à ce discours, sans savoir qu’il met le pied dans un gros piège. Il voit alors désormais Paris comme une agence de casting qui choisit les dirigeants africains, mais surtout en Côte d’Ivoire. Du coup, le combat pour la libération du Président Gbagbo est rangé au placard. Il agit désormais [selon le] bon vouloir de ses nouveaux amis français qui veulent pourtant le liquider devant Ouattara. Le plus grand souci du président du FPI est finalement de ne plus mettre les diplomates à mal. Il refuse alors de dire ce qu’ils n’ont pas envie d’entendre. Comme si le FPI existait juste pour faire plaisir aux diplomates. Son entourage immédiat ne se gêne plus de faire campagne pour la reddition et la soumission aux bourreaux des Ivoiriens. «Les Blancs sont trop puissants. On ne peut rien contre eux», ce lugubre cantique, par le passé, entonné dans l’entourage de Martin Luther King lorsqu’il engageait le combat contre la ségrégation raciale aux USA, revient à la mode parmi les proches de Affi.
Et lors de la visite de François Hollande en Côte d’Ivoire, Affi N’Guessan va à la résidence de France à Cocody, pour le rencontrer seul, sans Sangaré Aboudramane que toute la Côte d’Ivoire reconnait pourtant comme le gardien du temple. Qu’est-ce que ces deux hommes ont pus se dire ce jour-là ? Le Président français le dit d’ailleurs pour sa part. «Le FPI doit aller aux élections de 2015 au risque de disparaitre», menace-t-il. Et pourtant, ce n’est pas ce compte-rendu qui a été fait au FPI. «Nous avons demandé au Président Affi de quoi il a parlé avec le président français. Il nous a dit qu’il a parlé de la libération du Président Gbagbo. Mais nous lui avons demandé en quoi la question de la libération du Président Gbagbo est un secret pour qu’il aille voir seul Hollande, sans le Président Sangaré et un autre membre de la direction du parti», explique un baron du FPI. Et c’est en partie à partir de là que le terme «rentrer dans le jeu politique» a commencé à être émis. Pour Affi et son entourage, être dans le jeu politique, c’est faire jeu avec le pouvoir. Mais, manque de pot, pour le président du FPI. à Yopougon, bastion de son parti, ses militants ne sont pas dupes.
«Il y a longtemps que le FPI est dans le jeu politique. Et c’est parce que nous sommes dans le jeu politique que le Président Affi et plusieurs autres prisonniers politiques ont été libérés. Nous ne sous reconnaissons pas dans cette CEI», ont dénoncé, le dimanche 7 septembre 2014, les 11 sections que compte la zone de Niangon, toujours à Yopougon.


Guehi Brence (In Le Temps 15/09/2014)
Titre original : "Pour maintenir Ouattara au pouvoir : Comment la France a «liquidé» Affi. Les méthodes et les hommes utilisés."

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source : La Dépêche d'Abidjan 16 Septembre 2014

mercredi 17 septembre 2014

Affi N'Guessan rattrapé par la forte exigence de démocratie interne du Fpi.*


Plus dure sera la chute...
Sorti de sa prison de Bouna, Pascal Affi N'Guessan, président du Front Populaire Ivoirien, a bien su reprendre le gouvernail du parti. Il a, par ce fait, pu redonner espoir à ses militants. Espoir né de quelques éclaircies qu'il semblait apporter à un horizon obscurci par les ténèbres du 11 avril 2011. De nombreux militants avaient donc repris confiance en eux. Tous heureux de revoir un FPI remobilisé à travers les différents meetings organisés par son président. Marqué par l'enthousiasme des militants et sympathisants lors de ses différentes sorties post-prison, Affi N'Guessan avait fini par confondre l'adhésion populaire à la cause défendue avec un attachement personnel qui lui serait dévoué par les militants. Alors que ces derniers attendaient un leader capable de donner courageusement de nouvelles directives pour continuer la lutte, le président du FPI s'est progressivement illustré dans une posture collaborationniste avec le régime Ouattara, sous couvert d'un « dialogue républicain » ou d'une contribution à une hypothétique réconciliation. Une posture qui était loin de renouer fondamentalement avec la lutte pour la souveraineté, la démocratie, les libertés et la prospérité des Ivoiriens. Une posture ambiguë et jugée contre-nature par les radicaux du parti. Faisant fi de l'opinion de la base, Affi N'Guessan s'est engagé dans une démarche autocratique. Il a fait des choix personnels qu'il a tenté d'imposer au parti, au mépris de la démocratie interne régissant son fonctionnement procédural régulier. Pour tenter de donner du poids à ces choix personnels, Affi décide des les exprimer sous le couvert de l'Alliance des Forces démocratiques (Un groupement de partis politiques d'opposition), loin des débats internes de son parti. L'entrée du FPI dans la Commission électorale indépendante a fortement marqué ce déni de démocratie interne. Affi N'Guessan a désigné un représentant du FPI, en la personne de Alain Dogou, au sein de cette Commission, sans prendre le soin de consulter le Comité central.
Mais refusant que le FPI soit un parti de béni-oui-oui, le Comité central en a décidé autrement. Depuis le week-end dernier, le Comité central a par un vote démocratique désavoué la démarche cavalière d'Affi N'Guessan. 135 voix, contre 119, ont été pour le retrait du FPI de la Commission Électorale Indépendante. Affi a donc été ainsi rattrapé par la forte exigence de démocratie interne du parti. Cet acte historique du Comité central, suscite quelques interrogations : désavoué dans sa démarche cavalière, Affi pourra-t-il démissionner pour sauver son honneur ? Se soumettra-t-il effectivement à cette décision du Comité Central ? Quel autre plan mettra-t-il à exécution pour poursuivre sur sa dérive collaborationniste ? Et qu'adviendra-t-il en cas d'échec de ce plan ? Autant d'interrogations qui nous projettent dans l'incertitude des lendemains du retrait du FPI de la CEI.
Pour l'heure, la dernière bataille pour définitivement mettre Affi et son clan hors d'état de nuire sera le Congrès prévu du 11 au 14 décembre prochain. Si Affi connait un second désaveu à ce Congrès, s’alignera-t-il sur les positions de la nouvelle direction du parti qui sera mise en place ou suivra-t-il la voie de Mamadou Koulibaly, président de Liberté et Démocratie pour la République (LIDER), celle qui consiste à créer son propre parti politique quand on fait le choix de la trahison ou quand on s'obstine à soutenir une position minoritaire ?

Zéka Togui.
(*) - Titre original : "FPI-Pascal Affi N'Guessan : Sa démarche cavalière, son désaveu démocratique, le dernier coup fatal qui l'attend, et l'incertitude des lendemains." 
 
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Source : CIVOX. NET 15 Septembre 2014

lundi 15 septembre 2014

LE DILEMME DE L'AFRIQUE FRANCOPHONE

NOUS AVONS LE GRAND PLAISIR D'ANNONCER À NOS AMIS LECTEURS LA PARUTION DU DERNIER OUVRAGE DE L'ESSAYISTE IVOIRIEN JEAN-CLAUDE DJÉRÉKÉ INTITULÉ "ABATTRE LA FRANCAFRIQUE, OU PÉRIR. LE DILEMME DE L'AFRIQUE FRANCOPHONE", AVEC UNE PRÉFACE DE NOTRE COLLABORATEUR MARCEL AMONDJI.
POUR MARQUER L'ÉVÉNEMENT, NOUS VOUS OFFRONS CETTE PRÉFACE, EN ESPÉRANT QU'ELLE VOUS DONNE ENVIE D'ALLER DÉCOUVRIR PAR VOUS-MÊMES CE BEAU LIVRE DE COMBAT.

LA RÉDACTION

***
Préface de "Abattre la Françafrique ou périr. Le dilemme de l'Afrique francophone", de J.-C. Djéréké (L'Harmattan, Paris)


Il y a des coïncidences bien étranges… Au moment où me parvenait le message où un jeune ami encore (presque) inconnu me demandait une préface pour son livre que voici, j’étais justement en pleine réflexion sur ce qui en constitue le thème principal, à savoir la méconnaissance, réelle ou feinte, par les « élites » de nos pays, des causes réelles, ainsi que des vrais enjeux de nos tragédies politiques.
Méconnaissance ou, plutôt, refus de reconnaître ? Et s’agirait-il d’un refus de bonne foi, ou bien d’un déni volontaire dicté par la lâcheté, ou bien de tout cela à la fois ? Mais qu’importe ? Qu’il y ait intention délibérée, ou non, le résultat est le même : comprendre ce qui est arrivé à notre pays, comment cela est arrivé, qui en est coupable, comment s’y prendre pour se donner les meilleures chances d’en sortir à peu près avec bonheur, est proprement impossible. Mais comment aurait-il pu en être autrement quand chacun a sa propre définition de chaque mot, sa propre interprétation de chaque événement, sa propre compréhension de l’Histoire et, par voie de conséquence, face à l’avenir, aucun dessein propre, aucune vision originale, mais seulement une sorte de disponibilité bestiale de chacun à ployer le cou sous le premier joug qu’on lui impose ?
La meilleure illustration de cet état de choses, c’est le nom que nous avons pris l’habitude de donner au drame que nous vivons en Côte d’Ivoire depuis 1999. Nous l’appelons « crise ivoirienne » alors qu’il serait certainement plus conforme à la vérité de l’appeler « crise des relations franco-ivoiriennes ». Car, en vérité, notre patrie n’est jamais sortie de son statut de colonie depuis que son territoire fut conquis par la France. C’est le paradoxe ivoirien : le pays, qui a produit le mouvement anticolonialiste le plus puissant et le plus authentiquement populaire de toute l’Afrique intertropicale, est aussi celui où le colonialisme n’a jamais été réellement aboli ! Mais, au moins, jusqu’au 11 avril 2011, la mémoire de la puissance de ce mouvement et la crainte que son réveil ne fût pas impossible imposaient aux dominateurs un certain respect vis-à-vis des dominés, même si ce n’était que de façade… Depuis le 11 avril, ce rempart moral est tombé et nous voici revenus aux temps où des Kouassi Ngo, des Bani Bro et autres « naçarafôtigui » aidaient les Angoulvant à nous imposer le joug…
Avant de prétendre s’attaquer à la solution d’un problème, encore faut-il bien en connaître toutes les données. Il faut enfin oser appeler un chat un chat, et la politique actuelle de la France vis-à-vis de notre pays, une entreprise de recolonisation larvée ! C’est ce que fait Jean-Claude Djéréké tout au long de son essai. Et il le fait en homme qui sait qu’il n’est point d’action efficace qui ne suppose une réelle connaissance des hommes et des choses et que, par conséquent, tout appel à l’action doit aussi être un enseignement. Enseigner, c’est aider les autres à s’ouvrir aux choses et aux êtres tels qu’ils sont. Dans ces textes, vous ne trouverez pas d’injonctions, seulement des mises en garde. C’est le regard d’un veilleur qui scrute l’horizon et qui signale les passes dangereuses, les écueils, les impasses…
Il y a déjà beaucoup de livres consacrés à cette crise. Les uns signés de soi-disant journalistes d’investigation ne font cependant qu’ajouter à la confusion régnante, et il n’est pas toujours évident que ce n’est pas là, justement, le vrai dessein de leurs auteurs. D’autres, qui procèdent d’intentions plus saines, ne sont à l’arrivée que des auto-contemplations de leurs propres auteurs. L’essai de J.-C. Djéréké est, à ce jour, le seul dans lequel l’auteur démontre un réel souci d’éclairer le lecteur sur la vraie nature de cette crise, sur ses vraies causes et sur ses véritables enjeux. Il a choisi de le faire sous cette forme – une compilation de textes préexistants – plutôt que sous la forme d’une dissertation d’un seul bloc de 156 pages. Peut-être ce choix est-il réellement, ainsi qu’il le dit, le mieux adapté au sujet, à l’époque et au public visé. Car c’est un genre aujourd’hui fort prisé en Côte d’Ivoire, probablement parce que le lecteur ne s’y sent pas sans cesse sous la férule de l’auteur, et qu’il peut s’y promener à son rythme et à sa guise, comme les abeilles qui vont de fleur en fleur puiser de quoi faire leur miel.
*
« Abattre la Françafrique ou périr ! » Oui, c’est bien là le dilemme devant lequel nous nous trouvons, nous et notre peuple. Mais, qu’on ne se méprenne pas sur le sens de cette dichotomie : « nous et notre peuple. » Ce « nous » ne renvoie pas à l’idée d’une élite ou d’une aristocratie ; ce sont tout simplement ceux qui, par les choses qu’ils savent, non pas de science infuse, mais pour les avoir apprises, et apprises très précisément dans l’intention d’en faire profiter ceux des nôtres qui sans cela, sans cette pédagogie, ne les sauraient jamais, notamment parce que d’autres s’évertuent, eux, à les leur cacher.
« Abattre la Françafrique ou périr » ! De mon temps, on ne l’aurait sans doute pas dit de façon aussi abrupte. Mais c’était une autre époque. En ce temps-là, les choses nous paraissaient si faciles ! Nous croyions que la libération de notre pays était inéluctable, quelque ardue et quelque coûteuse même qu’elle promît d’être ; nous croyions qu’elle serait totale car nous ne soupçonnions point les « ruses du colonialisme français » ; nous croyions qu’elle serait nécessairement un formidable tremplin pour un développement national tous azimuts, et dont nous-mêmes serions les artisans et les tout premiers bénéficiaires. Telle était l’indépendance dont nous rêvions entre 20 et 30 ans, avant que Jacques Foccart et Félix Houphouët ne nous imposent leurs « indépendances Potemkine ». C’est ce qui opposait la majorité de la jeunesse ivoirienne à celui qui n’était alors qu’un simple député et un ministre de pacotille à Paris, mais déjà indécrottablement inféodé au colonialisme français. Lui-même, nous n’imaginions pas qu’il durerait tant, ni surtout qu’il pousserait la trahison jusqu’à livrer si complètement notre commune patrie à ses pires ennemis.
Cher Jean-Claude, en vous lisant, j’ai l’impression de me trouver en présence d’un de mes bons camarades de ces temps-là ! Or c’était juste le moment où vous, vous alliez naître au monde ! 1962 ! Parbleu ! C’est autour de cette année-là, entre 1958 et 1963, que nous naquîmes nous aussi, une deuxième fois, en sortant enfin de la gangue de nos illusions sous les coups redoublés de la dure réalité. Ainsi, d’une certaine manière, vous et moi, nous sommes des contemporains. Voilà donc le pourquoi de tant de convergences ! Mais nous ne sommes pas contemporains seulement de cette manière allégorique ; nous le sommes encore à travers l’ami commun qu’ici je me contente de nommer Auguste D… afin de ne pas risquer de blesser sa modestie.
Le plus ancien souvenir personnel que je garde d’Auguste remonte à l’année 1948, alors que nous étions en France depuis deux ans. Pour le centenaire de l’« abolition de l’esclavage » de 1848, les autorités du lycée avaient organisé un vin d’honneur, et nous devions en être les invités très spéciaux. Notre ami refusa tout net d’y figurer, disant haut et fort qu’il n’y avait aucun rapport entre lui et cet événement. Ce n’était pas le simple coup de sang d’un adolescent en crise, mais un authentique acte citoyen. Refuser de participer à ce vin d’honneur, c’était dénoncer la manie que les Français avaient déjà de rejeter sur nous toute la culpabilité de nos misères alors qu’eux seuls en sont la cause. Vous savez bien quel homme il est aujourd’hui, plus de soixante ans après. Cet homme-là était déjà en lui… Pour ma part, je crois que ce fut à cette occasion, et grâce à Auguste, que je commençai à regarder notre histoire avec des yeux différents.
Dix ans plus tard, c’est à Auguste encore que je dus mon tout premier et véritable engagement politique. C’était le 31 juillet 1959. Ce jour-là, dans une maison d’Anoumabo, un groupe d’étudiants se jurèrent de travailler ensemble à la création d’une organisation politique clandestine ayant pour objectif l’indépendance de la Côte d’Ivoire. L’événement avait été suggéré par lui et je me souviens encore de la grande fierté que j’éprouvai d’y être associé.
*
Le poète espagnol Antonio Machado doublement mort en exil, de sa patrie trahie et de sa République assassinée, avertissait : Il n’existe pas de chemin tout tracé d’avance ; le chemin, c’est celui que fait notre passage ; mais nul autre – pas même nous – n’y cheminera une deuxième fois. Je n’ai pas rappelé ces souvenirs par nostalgie. Il s’agit seulement d’affirmer ceci : qu’importe si nous autres avons marché toutes ces années sans atteindre, ni même approcher, notre objectif, et sans avoir laissé beaucoup de traces ? L’essentiel, c’est d’avoir quand même marché ; c’est d’avoir entretenu en nous cette petite flamme secrète, jusqu’à ce moment où, à la veille de disparaître, nous avons le bonheur de la reconnaître chez quelqu’un de nos cadets, et qui brûle tellement de la transmettre à son tour.
En parcourant ce livre, j’ai ressenti la même fierté qu’il y a 55 ans, dans cette maison d’Anoumabo dont j’ai parlé. Fierté que J.-C. Djéréké ait voulu m’associer comme préfacier à son inlassable travail d’élucidation des enjeux d’une tragédie dont notre génération n’a pas su préserver la Patrie, faute d’avoir eu le courage ou l’intelligence – en politique ce sont des synonymes – d’affronter une certaine réalité.
Abattre la Françafrique ou périr ” ? Oui… Mais, aujourd’hui, c’est aussi en nous-mêmes que cela est nécessaire.

Marcel Amondji

jeudi 11 septembre 2014

Nos ennemis sont très forts... Faut-il pour autant arrêter de leur résister sous prétexte que ce serait contreproductif ? L'un croit que OUI, l'autre affirme que NON. Et vous, qu'en dites-vous ?


CONFRONTATION


Sans vouloir nous mêler des affaires internes du FPI, nous avons jugé à propos d'offrir à nos lecteurs que cela intéresse -- nous savons qu'ils sont nombreux -- un biais original pour se faire une idée approchée des véritables enjeux de cette nouvelle crise dans l'interminable crise du politique que connaît notre malheureuse patrie depuis bientôt un quart de siècle.
Ce biais consistera dans la confrontation des deux textes ci-dessous, qui peuvent être considérés comme les condensés des vues des deux principaux courants qui s'affrontent actuellement dans le FPI, l'un qui soutient la ligne prônée par Pascal Affi N'Guessan (voir sa réplique décomplexée au récent communiqué de Justin Katinan Koné en sa qualité de porte-parole du Président Gbagbo), l'autre qui conteste cette ligne considérée à tort ou à raison comme capitularde.
Lisez ! Et que chacun se fasse son opinion.

La Rédaction
***
Ligne politique : Le FPI ignore les enseignements de Gbagbo

Ce samedi 30 août 2014, les militants du FPI, membres du Comité central, se sont encore séparés sur leur profond désaccord sur la ligne politique du parti. Depuis la chute brutale du régime, le 11 avril 2011, et le transfèrement, le 30 novembre de la même année, de Laurent Gbagbo à la prison de Scheveningen, à La Haye, le FPI est en crise sévère : certains, rigides et partisans du boycott de toute activité étatique, sont pour la pression permanente sur le pouvoir afin de le faire plier quand d’autres, adeptes du pragmatisme, militent pour une flexibilité dans la stratégie doctrinale afin de se frayer des issues de secours.
Loin des passions aveuglantes et des émotions paralysantes, le FPI devrait évaluer le chemin parcouru depuis trois ans. Loin du tohu-bohu et des improductives et contre-productives querelles de clocher. Pour élaborer, en toute discrétion, des stratégies et réfléchir à ses problèmes en se servant de sortes de laboratoire d’idées appelées think tank.
Au moment de ses adieux à la Côte d’Ivoire après sa certification problématique du second tour de la présidentielle du 28 novembre 2010, Young-jin Choi, représentant spécial du secrétaire général de l’ONU en Côte d’Ivoire, décrétait la mort du FPI. «Je ne crois pas que le FPI ait toujours sa place sur la scène politique ivoirienne. Le FPI sans M. Gbagbo, le FPI qui a appuyé l’utilisation de la force militaire contre les populations civiles, je ne cois pas que ce FPI-là ait encore un avenir», déclarait-il, le 30 août 2011, sur RFI.

L’exemple sud-africain
Le nouveau pouvoir a manœuvré souterrainement dans ce sens. Une campagne activement menée a été conduite par Kouassi Alomo Paulin, ancien député PDCI-RDA de Bouaflé, et Félicien Sékongo alias Zagadou Paulin, ancien porte-parole adjoint des ex-Forces nouvelles (rébellion armée) et conseiller de Soro Kigbafori Guillaume, pour obtenir «l’éradication» de ce «parti terroriste»; des groupements politiques ont été suscités, comme la Ligue des mouvements pour le progrès (LMP pour créer la confusion avec l’ex-LMP qui a soutenu la candidature de Gbagbo à la présidentielle) et récemment un parti politique a vu le jour, le Front populaire-Unis ou FP-U (différent du Front populaire ivoirien ou FPI), pour le mettre sous l’éteignoir. Mais le FPI, comme le phœnix, s’est relevé de ses cendres pour redevenir un acteur majeur de l’échiquier politique ivoirien.
Ayant réussi, grâce à la mobilisation de ses militants, à redresser la tête à la grande déception de ses adversaires, l’ex-parti au pouvoir a choisi la palabre sur la place publique, se contentant de demi-vérités, sans se poser des questions simples à même de lui permettre de réajuster le tir et rebondir. Ainsi, il arrive à des militants, y compris des cadres du parti, de revendiquer l’exemple de la libération de Nelson Mandela en Afrique du sud pour accréditer la thèse de l’épreuve de force avec le pouvoir d’Alassane Dramane Ouattara.
Premièrement, ils oublient l’environnement international qui prévalait: il y avait la guerre froide avec le soutien du bloc soviétique et des mouvements de décolonisation qui permettaient, au Congrès national africain (ou ANC en anglais), de s’appuyer sur les pays africains nouvellement indépendants. Cet environnement, depuis la chute du mur de Berlin, a considérablement changé au point que, pour prendre un exemple bien ivoirien, les cinq membres du Conseil de sécurité de l’ONU ont voté, le 30 mars 2011 à l’unanimité, la résolution 1975. Celle-ci, parce qu’elle exigeait le départ immédiat de Laurent Gbagbo au profit d’Alassane Dramane Ouattara, a permis à l’Opération des Nations unies en Côte d’Ivoire (ONUCI) et à la force militaire française Licorne de le bombarder dans la résidence officielle des chefs d’Etat africains.
Et c’est au regard de cette évolution politique que Nelson Mandela, obligé, au nom de la realpolitik, d’abandonner la lutte armée et de négocier sa sortie, a été libéré, après 27 ans de cachot en Afrique du Sud, en février 1990. Il n’est pas sûr et, à mon sens, il est même vain de croire que le seul slogan «No Gbagbo, no peace, no Gbagbo, no élection» et la surenchère de la politique de la chaise vide à tous les prix, suffiront à ouvrir la porte de la prison à l’ex-président ivoirien.

Le FPI doit payer une rançon
Tout le monde sait, et c’est une lapalissade, que Gbagbo est un otage de la communauté dite internationale qui le détient. Celle-ci, se servant de la CPI pour lui refuser, par exemple à six reprises, la liberté provisoire, a déjà donné ses raisons: l’existence d’un «réseau bien organisé» soutenu par le FPI à même de mener des actions de déstabilisation du régime Ouattara qu’elle adoube, avec en filigrane la renonciation, par Gbagbo, à toute activité politique. Le parti, par sa surdité et sa cécité, oublie que, comme dans le cas des groupes islamistes, il doit payer une rançon pour obtenir la libération de son leader: la révision de sa stratégie politique et de ses méthodes.
Deuxièmement,  personne ne veut s’interroger sur le changement de statut de Nelson Mandela. De terroriste parce que, hier, patron du bras armé de l’ANC, Madiba est devenu une icône mondiale qui a déplacé 53 chefs d’Etat ou de gouvernement, dont tous les grands de ce monde, à ses obsèques, le 15 décembre 2013. Et personne ne cherche à comprendre pourquoi alors l’autre combattant de la liberté en Afrique australe, Robert Mugabe, est voué aux gémonies et dans le collimateur de la communauté dite internationale.
A la différence du «héros» zimbabwéen, Mandela a accordé plusieurs importantes concessions aux Occidentaux qui défendent les Afrikaners, ces Sud-africains blancs d’origine néerlandaise, française, allemande ou scandinave. Il a choisi de fermer les yeux sur les retombées de l’apartheid; il renvoyé à la saint-glinglin la question ultra-sensible de la redistribution des terres dont la majorité noire a été dépossédée, il y a près de 100 ans. Et jusqu’à ce jour, la réforme agraire demeure un sujet tabou qui a valu l’exclusion de l’ANC de Julius Malema, président de la Ligue de jeunesse du parti, le 29 février 2012.
Et, last but not least, de 1866 jusqu’à 2014, y compris donc depuis la prise de pouvoir par les Noirs en 1994, c’est un Blanc qui était le grand argentier de l’Etat sud-africain. C’est seulement le 26 mai 2014, moins de quatre semaines après la réélection de Jacob Zuma pour un second mandat, qu’un Noir, Nhlanhla Nene, est devenu, pour la première fois de l’histoire du pays, ministre des Finances de l’Afrique du sud.

Gbagbo prêche dans le désert.
La politique, on ne le répètera jamais assez à tous les protagonistes de la crise stérile au FPI, est la saine appréciation des réalités du moment. Elle n’est ni linéaire, ni statique au point que Laurent Gbagbo, pour répondre aux accusations de coalition avec le RDR dans le cadre du Front républicain, en 1995, affirmait qu’il n’y a pas «d’union politique contre-nature, il y a des unions» et que, l’ex-président ivoirien Henri Konan Bédié, pour répondre aux détracteurs de son rapprochement avec Ouattara, adversaire politique juré d’hier, n’a eu que cette formule lumineuse: «La politique, c’est l’art de l’impossible».
«Je souhaite qu’on arrête les armes et qu’on rentre dans la partie civile de la crise, et qu’on conclue rapidement pour que le pays reprenne», disait donc, à l’attention de ses partisans et du nouveau pouvoir, Gbagbo à son arrestation, le 11 avril 2011, pour paraphraser sa célèbre formule : «Asseyons-nous et discutons». Il a prêché dans le désert. Rejetant, lui, toute idée de confrontation militaire, il prenait ainsi bien en compte les rapports de force en présence: un ex-parti au pouvoir en lambeaux et condamné, après la déroute militaire, à une sorte de clandestinité d’un côté, une coalition internationale (ONU et France) qui soutenait massivement les nouveaux tenants du pouvoir de l’autre. Et privilégiait le dialogue politique, l’arme des forts, selon Félix Houphouët-Boigny.
C’est pourquoi dans ses plaidoiries, Me Altit, conscient de la dimension politique du dossier Gbagbo, ne cesse de défendre l’image du parti fondé par le plus célèbre prisonnier de La Haye, pour espérer inverser la tendance et les préjugés défavorables. Formation politique fondée par ce candidat à sa propre succession que l’opinion internationale a toujours appelé le mauvais perdant du scrutin présidentiel du 28 novembre 2010 ayant abouti à une grave crise post-électorale, le FPI est présenté comme un parti violent qui rêve de reprendre le pouvoir à Alassane Dramane Ouattara par tous les moyens, en s’appuyant sur des «réseaux bien organisés» à l’intérieur comme à l’extérieur.
Troisièmement, Laurent Gbagbo a été arrêté, pas comme président du FPI (il ne l’était plus après son élection et sa prestation de serment le 26 octobre 2000), mais en tant que président de la république de Côte d’Ivoire. Et pour affronter les électeurs ivoiriens en 2010, il avait créé La majorité présidentielle (ex-LMP composée de plusieurs partis politiques, de syndicats et d’Ong), parce qu’il se déclarait le «candidat 100% pour la Côte d’Ivoire», recueillant, selon la CEI de Youssouf Bakayoko, 45,90% au second tour de la présidentielle. Et donc l’ex-parti au pouvoir, au lieu de prendre en otage la question, aurait dû faire de la libération de l’ex-président déchu un sujet d’intérêt national et même international, en associant tous ces Ivoiriens et autres Africains qui se reconnaissent en Gbagbo sans être membre de son parti.

Les portes fermées de la diplomatie
Le président Pascal Affi N’Guessan, sous la pression des jusqu’au-boutistes, s’est donc fourvoyé en confiant, dans la précipitation, la question de sa libération à un homme du sérail. Et puis, que peut faire Mme Amon Ago Marthe, 12ème vice-présidente du FPI chargée de la Coordination des actions pour la libération de Laurent Gbagbo, en dehors des interviewes dans les journaux bleus, c’est-à-dire proches du pouvoir déchu, de colloques auxquels n’assisteraient que des leaders «gbagbotiquement» marqués et des conférences de presse? Presque rien.
Tout le monde oublie que le FPI reste exclu de l’Internationale socialiste et donc infréquentable, selon les bons mots de François Hollande. Orphelin, ce parti se trouve isolé sur la scène internationale et ne dispose, pour ainsi dire, d’aucun relais ni d’appui extérieur ni de tribune pour faire entendre sa voie.
En outre, autant aucun président africain en exercice, en dehors de José Eduardo dos Santos d’Angola et, à un niveau moindre, de Teodoro Obiang Nguema Mbasogo de Guinée-Equatoriale, n’a ouvertement soutenu Gbagbo durant la crise post-électorale de 2011, autant, tant que les choses restent en l’état avec un FPI braqué contre le pouvoir Ouattara, discréditant indirectement Gbagbo que l’on présente comme un homme de dialogue et de compromis, les portes de la diplomatie internationale risquent de rester closes au nez de Mme Ago Marthe. Car, aucune autorité ne voudrait s’attirer les foudres des décideurs du monde et la condamnation de la nébuleuse internationale. Or, et on l’oublie au FPI, la porte de la prison s’ouvre de l’extérieur.
C’est pourquoi, pour mettre fin au désordre politique qui ronge le FPI et selon un communiqué du Comité central en date du 14 août 2014, Abou Drahamane Sangaré, 1er vice-président chargé de la stratégie et de la politique, a soutenu que la «crise a malheureusement donné une image peu honorable du FPI dans la conscience collective. (…) Il a demandé de rendre à Gbagbo et aux démocrates ivoiriens l’outil de lutte qu’est le FPI et appelé au rassemblement». Comprenne qui pourra.

Ferro Bally (Source : Notre Voie 4/9/2014)
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Comment Ferro Bally peut-il être aussi sûr de détenir la vérité ?

La crise qui secoue le Front Populaire Ivoirien (FPI), depuis que le président de ce parti a procédé à un chamboulement inopiné de la direction, fait son chemin. Elle apporte quasi quotidiennement de nouvelles péripéties, et le parti en prend des coups qu’il faudra certainement réparer pour rebâtir la cohésion. Du coup, on a l’impression que cette crise ouvre la porte à toutes sortes de dérives, dont celle des déclarations à mettre de l’huile sur le feu, comme les écrits de l’éminent journaliste Ferro Bally. Ce journaliste de notoriété semble croire maîtriser toute l’histoire du FPI, au point d’accuser cette formation politique d’aller « du culte des textes au culte de la personnalité ». Le fait est qu’il est utile que les uns et les autres, qui s’intéressent à un problème, débattent de celui-ci en totale franchise et en toute objectivité malgré le parti pris qui est forcément de mise. Mais lorsque l’on cherche à jeter l’opprobre sur tout un ensemble, là où il serait suffisant de parler des faits en proposant des analyses, avec des arguments précis, il y a problème. En tout cas, c’est ainsi que m’apparaissent deux interventions du journaliste Ferro Bally, dans le quotidien « Le nouveau Courrier ». Des interventions où, dans l’une il accusait, il ya quelques jours, le FPI d’ignorer les enseignements de Gbagbo, ce qui peut signifier que les militants de ce parti méprisent ou n’ont rien compris du président Gbagbo. Dans le texte en question, Ferro Bally accusait (en plus) le FPI de ne pas comprendre que les temps ont changé… Dans une autre intervention, parue ce mardi 9 septembre 2014, Ferro Bally accuse les militants du parti de Laurent Gbagbo d’êtres tantôt enclins au culte des textes, tantôt à celui de la personnalité (ou cumulativement). On ne peut nier qu’il est important qu’un journaliste de la trempe de Ferro Bally, éminent historien du présent, apporte des éclairages dans un débat qui intéresse toute la nation. Mais, il est toujours utile, pour quiconque prend la parole, de mesurer l’impact de son discours sur l’ensemble dont il parle : la question, ici, est alors de savoir ce qu’on gagne à jeter l’opprobre sur tout un groupe, en l’occurrence l’ensemble du FPI ? Car, prétendre que les militants de ce parti n’ont rien retenu des enseignements de leur leader et qu’ils ne comprennent rien au temps qui passe est bien plus destructif que constructif ! Cela est, à la limite, insultant !... Aujourd‘hui, il est visible à tous que dans la crise créée par le président AFFI, deux groupes se sont formés : le groupe de ceux qui pensent comme le président, dont manifestement fait partie le frère Ferro Bally, à savoir que les adversaires du FPI sont trop puissants, et les temps sont en leur faveur, si bien qu’il faut se plier à tout ce qu’ils veulent, ce qui serait « entrer dans le jeu politique », et celui opposé de ceux qui estiment que c’est uniquement dans la lutte que le FPI et la Côte d’Ivoire desserreront l’étau de servitude dans lequel le pays se trouve présentement. Au-delà des personnes qui composent l’un ou l’autre des deux groupes, il faut voir, à mon avis, comment résoudre la crise, et garder des chances au FPI et à la Côte d’Ivoire de sortir de l’ornière de toutes les privations actuelles. Ce n’est sûrement pas en s’érigeant en juge infaillible, pour prononcer des condamnations péremptoires, sur la base d’informations partisanes avec des a priori discutables qu’on participe à la construction de la nécessaire cohésion. Ferro Bally, pour le grand professionnel que je pense toujours qu’il est, gagnerait à s’inscrire dans une posture plus objective, de cette objectivité qui se garde de faire des affirmations sans fondement : parce que clamer que le président du FPI bénéficie d’une « immunité présidentielle » est purement sans aucun fondement ! A la limite, il s’agit là d’une allégation tendancieuse, pour le moins fantaisiste ! Que le journaliste veuille faire l’historique de l’opposition en Côte d’Ivoire, en choisissant de partir des groupes communistes de l’époque, voilà une initiative louable, pour faire connaître l’histoire de notre pays, en ce qui concerne les arcanes politiques. Mais d’où le journaliste tire-t-il cet épisode d’« Akan-crates et de Gbagbo-crates » au FPI ? Là aussi, il y a problème ! De mon point de vue, il s’agit ni plus ni moins d’une orientation « tribalique » du débat, une pratique malicieuse qu’ont certaines personnes, lorsque les arguments viennent à leur manquer, de faire appel à l’appartenance tribale des individus, afin de disqualifier une position en lui collant des tares artificielles. Quant à dire que le président Affi est « dans l’œil du cyclone pour des raisons émotives », il faut vraiment que Ferro Bally ait un mépris souverain pour tous ceux qui ne pensent pas comme le président du FPI, pour décréter que leur position repose sur « des raisons émotives » ! Passe encore que par arrogance, parce qu’on se croit au-dessus d’un certain lot, on s’autorise à faire des insinuations insultantes pour un groupe dont il n’est pas évident qu’on connaisse toutes les composantes, mais aller jusqu’à proclamer qu’une position défendue par des militants d’un parti est simplement émotive, si ce n’est pas du mépris… Et notre frère journaliste d’affirmer que « la bataille de la libération de Gbagbo, qui a versé dans l’idolâtrie, a cessé d’être un devoir militant en faveur de la bataille pour la réhabilitation de l’histoire et de l’image du FPI… » J’avoue que je ne suis pas sûr de bien suivre le frère. Mais, comme je suis de ceux qui ne voient pas les choses comme il semble les voir, je voudrais, par-delà son arrogance, qu’il nous concède à nous autres, de considérer que « rehausser et réhabiliter l’histoire et l’image du FPI » passe inéluctablement par rehausser et réhabiliter l’image et l’histoire de Laurent Gbagbo. Ferro Bally dit que le FPI se retrouve désormais dans un « désert idéologique » et semble arguer que c’est parce que le parti lie son sort à celui de Laurent Gbagbo, ce qui serait « une instrumentalisation outrancière du culte de la personnalité ». Si, pour l’éminent journaliste, « la réhabilitation de l’image et de l’histoire du FPI » passe par faire table rase sur les problèmes actuels qui sont ceux du parti et de la Côte d’Ivoire, pour s’inscrire dans les options que nous dictent nos persécuteurs, c’est son droit et nous le lui concédons. C’est pourquoi, au lieu de nous insulter, il devrait nous concéder de penser différemment de lui, et de choisir une voie autre, selon laquelle il faut refuser de cautionner, par une participation à un jeu politique aux dés pipés d’avance, la situation de non droit et de déni de démocratie dans laquelle patauge ce pays, situation dont les emprisonnements politiques et extra judiciaires, le siège du pays par les dozos et autres armées étrangères, la gestion ethnocentrique de l’Etat, puis le maintien en otage du président Laurent Gbagbo, sont des points focaux. De sa position, après avoir dit que « nos adversaires sont trop forts pour nous, que le monde est dominé par eux et que nous n’avons aucune possibilité de nous libérer », s’il n’a plus rien à dire d’autre, que le frère se taise, au lieu de nous insulter. Parce que, ne lui en déplaise, nous continuerons de penser que le persécuté qui compte sur son bourreau pour son salut a renoncé à être ; et nous refusons de ne plus exister... Ce ne sont pas des paroles en l’air : il faut juste comprendre que nous avons choisi d’être, même en tant que persécutés, plutôt que de poursuivre une existence de parias (de l’humanité) que voudraient nous accorder nos bourreaux. Et nous resterons dans cette voie ! Parce que la roue tourne et c’est sur les faits d’aujourd’hui que se bâtit demain.
Que Dieu nous assiste !

Bédi Holy (Source : CIVOX. NET 11 Septembre 2014)

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